croissance et décroissance sont dans un bateau..
Apologie de la décroissance
Peu de scientifiques en Espagne, comme le physicien Antonio Turiel, nous informent et nous mettent en garde depuis de nombreuses années sur la crise énergétique actuelle. Bien qu'actuelle ou circonstancielle, elle n'est pas grand-chose. Il s'agit plutôt d'un "effondrement énergétique annoncé". C'est pourquoi les nouvelles qui nous parviennent ces derniers temps ne sont guère surprenantes. Son livre "Petrocalipsis" résume bien la situation et montre comment les fausses promesses d'alternatives aux combustibles fossiles sont utopiques. Une gifle à la réalité qui explique l'impossible substituabilité des dérivés du pétrole comme le diesel pour faire bouger les machines lourdes ou obtenir suffisamment de chaleur pour fabriquer de nombreux matériaux comme le ciment ou l'acier, piliers de notre monde. Toute la révolution verte que l'on veut mener à bien, la transition écologique, repose sur une construction massive, désespérée et précipitée de macro-parcs renouvelables, et en donnant une licence " verte " au gaz et au nucléaire, tout in extremis, alors que l'électricité n'est qu'une partie minoritaire de ce qui fait bouger ce monde de drogués du pétrole. Certes, son deuxième livre en collaboration avec le journaliste Juan Bordera, "El otoño de la civilización" ("L'automne (la chute) de la civilisation"), approfondit cette utopie parce qu'elle est enfermée dans un système dépendant de "l'or noir" et qui se heurte inévitablement aux limites de la croissance.
Celui qui nie le réchauffement climatique, déjà à ce stade, ou qui a un subconscient très puissant pour ne pas affronter la réalité et ainsi éviter ce sentiment de mauvaises ondes, épluche l'avenir de ses enfants et petits-enfants, ou accepte que cela aille à l'encontre de ses intérêts quels qu'ils soient. Les raisons ne sont pas seulement faciles à comprendre, mais, par bon sens, en regardant une colonne de gaz sortir, on a l'intuition que ce ne sera pas bon pour l'air.
Alors, pourquoi brûle-t-on des choses ? Tout simplement pour que l'explosion et la "fumée" qui s'ensuit fassent fonctionner un moteur et ainsi faire bouger des choses, comme un véhicule, ou une turbine et ainsi produire de l'électricité. Ce dernier principe est un vieux principe physique, mais il a révolutionné le 19e siècle et permis les avancées technologiques dont nous bénéficions actuellement. Le problème est que la thermodynamique condamne notre univers à toute transformation d'énergie qui génère des pertes sous forme de chaleur, de déchets, de désordre... on retrouve ici l'entropie. Nous prospérons parce que nous chauffons l'environnement extérieur à travers les gaz résiduels qui s'échappent dans l'atmosphère, et par coïncidence ceux qui génèrent l'effet de serre.
Bien sûr, la technologie s'est améliorée pour réduire ces pertes d'énergie et rendre les processus plus efficaces, mais je répète une fois de plus que, quelle que soit la réduction des émissions, l'effet global ne sera pas apprécié et s'aggravera même, car chaque fois, il y aura plus de bouches dans le monde. Oui, la surpopulation est un problème croissant qui doit également être reconnu, car aucune espèce ne peut croître indéfiniment. Les points d'inflexion tels que l'agriculture au néolithique, la révolution industrielle ou le processus Haber-Bosch, ont bien permis des sauts de croissance exponentielle, car ils sont entrés en territoire vierge dans l'histoire de l'humanité. Avant chaque point de basculement, il y avait plus d'espace physique, et l'air et l'eau étaient moins pollués que l'étape suivante. Si nous voyagions dans le temps et disions à nos arrière-grands-parents qu'il était possible de nourrir 47 millions d'habitants (et même plus !) en Espagne, ils ne feraient pas les calculs pour si peu de terres. Nous devons reconnaître le rôle important de la technologie, mais aussi du commerce et de la libéralisation des marchés. Le problème est que nous avons maintenant beaucoup moins de marge pour la prochaine révolution technologique - si elle vient vraiment - dans laquelle les ressources énergétiques et matérielles sont les principaux facteurs limitants.
Sans prétendre entrer dans des partis pris idéologiques, le système mondial dans lequel nous sommes ne va pas changer. Tout simplement parce qu'il a fonctionné pour nourrir plus de bouches et nous permettre une vie plus confortable. A quelques exceptions près, personne ne va changer son mode de vie à long terme. Prenons quelques exemples : cesserez-vous confortablement d'acheter sur Amazon en sachant que Bezos impose des conditions de travail qui obligent ses employés à uriner dans des bouteilles ? Ou allez-vous vous supprimer de Twitter, le nouveau jouet de Musk, sachant qu'il défend avec véhémence la semaine de 80 heures ? Oui, le citoyen européen ordinaire peut manger moins de viande, prendre moins de douches ou acheter un véhicule électrique, mais cela ne changera rien si on le replace dans la perspective globale de l'industrie et du conflit d'intérêts avec les puissances économiques émergentes. Cependant, l'épuisement progressif des ressources nécessaires à notre survie rendra la décroissance inévitable. Nous allons décroître, par la force des choses ou par la ruse, et je parie que ce sera par la ruse. Plus tôt nous prendrons conscience d'un monde en crise climatique, énergétique et sociale, avec tout ce que cela implique, mieux ce sera. Et ça ne ferait pas de mal d'adopter une position plus stoïque à ce sujet.
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Le monde est-il devenu fou ?
Comprendre la crise en Ukraine du point de vue du pic des ressources
Non, cette guerre ne vise pas (seulement) à obtenir les ressources de l'Ukraine. Au-delà des autres ambitions politiques, il s'agit plutôt pour le reste de l'Europe de perdre ses fournisseurs d'énergie, ainsi que son pouvoir politique - et sa stabilité.
Il n'est pas étonnant que nous utilisions le même mot - pouvoir - pour décrire à la fois l'utilisation de la force politique et le taux de transfert d'énergie. C'est presque un axiome, plus une nation dispose d'énergie (et d'autres ressources minérales), plus elle possède de pouvoir politique sur ses voisins. Il est également important de noter que le pouvoir est relatif : il n'est pas nécessaire d'avoir toute l'énergie de la galaxie à portée de main - il suffit d'en avoir un peu plus que le pays voisin.
Dans un monde en abondance et en croissance (c'est-à-dire entre 1950 et 1970), cela ne posait guère de problèmes. Chaque pays en avait suffisamment - c'est-à-dire assez pour produire autant d'énergie et fournir autant de minéraux et de nourriture que nécessaire, avec une marge de progression - pour que personne ne soit vraiment gêné de voler ses voisins. Bien entendu, cela a rarement été le cas et les années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale peuvent donc être considérées comme la plus grande anomalie de l'histoire de l'humanité. Cependant, dans les périodes de discontinuité, comme celle que nous vivons actuellement, le rôle de l'énergie est difficile à surestimer.
Pourtant, nos dirigeants politiques et nos experts en économie aimeraient encore croire que nous sommes dans les années 80 et 90, les décennies rugissantes de la mondialisation avec un nombre toujours croissant de cargos sillonnant les océans de la planète... Où chaque problème international et chaque pénurie locale pouvaient être résolus par des accords commerciaux ou des embargos. Mais ce à quoi nous assistons actuellement, c'est à la dissolution de cette idée - ainsi que du mythe de la remplaçabilité infinie et de l'efficacité des sanctions.
Laisser l'idée de croissance infinie rejoindre le groupe prestigieux des idées sur le tas de compost de l'histoire serait la prochaine étape logique, mais ne nous emballons pas tout de suite.
Le problème avec les discontinuités est qu'elles ont tendance à survenir au pire moment possible. L'économie mondiale était sur le point de "rebondir" après un marasme causé par l'une des pires pandémies de l'histoire récente... et puis il y a eu d'abord une pénurie de bois, puis une série de perturbations dans la chaîne d'approvisionnement, puis une crise de l'énergie combinée à une pénurie (et une augmentation des prix qui en a résulté) de presque toutes les matières premières.
Du point de vue du pic des ressources, tout cela est tout à fait logique. Nos politiciens aimeraient cependant penser qu'il ne s'agit que d'un accident de parcours et que tout rentrera dans l'ordre en 2024. Ok, peut-être 2025. Il y a cependant un changement subtil dans le langage. Je me souviens qu'au bon vieux temps (années 90 et 2000), chaque tableau décrivant l'utilisation des ressources était présenté comme un graphique à tendance ascendante, voire stellaire. Aujourd'hui, ils ont tendance à tout représenter (des tendances actuelles d'extraction aux niveaux de stocks) par rapport à la moyenne des cinq dernières années. Honnêtement, cela me rend fou. Ces graphiques transmettent le message que nous avons atteint une sorte de niveau de production "mature", où chaque année fluctue autour d'une moyenne - avec quelques années meilleures et pires. Ils donnent l'image d'un monde en parfait équilibre décrit par des flux stables d'énergie et de matières premières. En fait, comme nous allons le voir, le monde est tout sauf cela...
Ce que ces graphiques ne montrent pas au monde, c'est que nous avons lentement atteint un plateau de production cahoteux, à partir duquel le début de la descente n'est qu'une question de temps. Ils parlent un langage de taux de flux (x tonnes/an, y pieds cubes/an, etc.), sans aucune référence au stock (réserves) ou au taux d'épuisement. ), sans aucune référence au stock (réserves) ou au taux d'épuisement (c'est-à-dire à la quantité qu'il nous reste et à la façon dont le processus parfaitement naturel d'épuisement entraînera une lente diminution de la disponibilité de la ressource donnée au fil du temps).
L'économie mondiale se dirige vers une falaise, en ignorant délibérément les panneaux d'avertissement au bord de la route.
Dans ce contexte, il n'est absolument pas étonnant que 8 ans se soient écoulés entre l'annexion de la Crimée et une guerre totale en Ukraine. Il est désormais clair que l'Europe est définitivement sur la longue pente du déclin (sur le plan énergétique) et que ses prouesses politiques ne sont plus ce qu'elles étaient. L'Occident ne peut plus prétendre de manière crédible qu'il peut facilement résister à la fermeture des robinets de gaz. La production de gaz naturel est en baisse depuis des décennies, les importations de GNL sont limitées par les capacités des terminaux et le besoin d'équilibrer la charge des "énergies renouvelables" ne cesse de croître, sans parler de la demande accrue d'électricité de base provenant des centrales à gaz qui remplacent (temporairement) le nucléaire et le charbon. En d'autres termes, comme je l'ai indiqué à Nafeez Ahmed au début de l'année dernière : L'Europe est en difficulté. Son secteur énergétique, et donc son économie réelle, est devenu terriblement dépendant de la Russie.
Et il ne s'agit pas seulement de l'énergie, mais aussi de la production de métaux et d'engrais. Dans cette "crise des molécules" où pratiquement tous les produits de base sont sous-approvisionnés, perdre 6 % de la production mondiale d'aluminium ou 15 % de la production d'engrais n'est pas une option. (Pour mémoire, il s'agit des matériaux qui consomment le plus d'énergie et qui sont donc dans le collimateur de toutes les mesures d'économie d'énergie). De ce point de vue, la guerre a été déclenchée exactement au bon moment pour la Russie : lorsque le stockage de gaz en Europe est au plus bas et que les prix des métaux/engrais sont au plus haut - dans certains cas, jamais atteints. Les chances d'éviter des sanctions à long terme sont donc les meilleures. Même si les sanctions devaient frapper, la Russie a accumulé d'importantes réserves de devises et d'or - représentant 42 % de son PIB annuel - pour maintenir son économie en vie malgré la chute du rouble.
Qu'en est-il des ressources de l'Ukraine ? Eh bien, ils possèdent un quart des réserves de charbon d'Europe... dont 90% d'anthracite de haute qualité situé dans le bassin du Donets (ou Donbas), occupé par les groupes sésaratistes de Luhansk et Donetsk. Il est vrai que la Russie possède également beaucoup de charbon, mais la plupart de celui-ci se trouve en Sibérie méridionale, à quelque 4 000 km à l'intérieur des terres, à l'est. Le charbon étant un matériau lourd et encombrant, il est coûteux à transporter par voie terrestre (surtout en termes d'énergie), mais il peut être facilement transporté par barge sur les rivières d'Europe de l'Est. Le Donets se trouve également à proximité des côtes de la mer Noire, et donc des marchés européens accessibles par vraquier. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi les séparatistes ont voulu s'emparer du port de Mariupol en 2014/15 ?
Du charbon ? Bah ! Nous avons des éoliennes ! Bien sûr, mais comme le cas de la hausse des prix du gaz l'a montré au monde entier, les "énergies renouvelables" ne pourront pas sauver la situation. Au grand dam de notre climat, le charbon reste une option "populaire", bien que très polluante, pour fournir au réseau de l'électricité de base - ce que ne peuvent faire les centrales nucléaires démantelées, les éoliennes les semaines sans vent ou les panneaux solaires la nuit. En outre, le charbon est indispensable à la fabrication de l'acier, nécessaire pour ériger ces tours blanches surmontées de pales tournantes - une matière première dont le prix s'envole également. Malgré les objectifs "net zéro", le pic pétrolier (1) étant très probablement derrière nous et le pic d'extraction du gaz étant imminent, l'Europe sera contrainte d'utiliser davantage de charbon.
Si la Russie "réussit" à ériger un gouvernement fantoche en Ukraine, ses compagnies minières auront un accès libre au bassin houiller, ce qui enrichira les oligarques au-delà de toute mesure... Au prix de nombreuses vies perdues et d'une nation privée de sa liberté.
Jusqu'à la prochaine fois,
B
Notes :
(1) L'Iran pourrait revenir sur le marché pétrolier suite à un accord nucléaire potentiellement réussi avec l'Occident. Cependant, dans le même temps, le Mexique se retirera du marché l'année prochaine, et l'épuisement continuera à faire son travail sans relâche dans le reste du monde... Ce qui nous laisse avec un pic secondaire potentiel, bien que de courte durée, au début de l'année prochaine.
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Philosophie pour la fin de la croissance
"Seigneur Croissance, par ta grâce, accorde-moi, je t'en prie, le pouvoir de concevoir dans mon esprit et d'exécuter ce que je désire faire, le but que je voudrais atteindre par ton aide, ô Puissant Croissance, le seul vrai Dieu qui vit et règne pour les siècles des siècles. Accorde-moi le pouvoir d'atteindre plus de richesse, que je peux utiliser pour régner sur les autres en ton nom. Manifeste-toi devant moi pour que je puisse atteindre le but que je désire. C'est ce que je demande respectueusement et humblement en ton nom, Seigneur Croissance, que tu me juges digne, Père".
La fin de la croissance et le long déclin qui s'ensuit, déjà bien entamé dans les sociétés surdéveloppées, vont creuser un énorme trou dans la conscience collective de l'Occident. Son absence n'est pas encore évidente pour les nantis qui, sous une forme ou une autre, croient encore au retour de la croissance et ne peuvent imaginer d'autre mode de fonctionnement qu'une poursuite incessante de la croissance sur un plateau virtuel.
L'ensemble de notre système financier et bancaire repose donc sur la croissance : sans elle, le seul moyen de rembourser les prêts serait d'imprimer de l'argent. En d'autres termes, tout gonfler jusqu'à l'oubli - ce qui est rarement considéré parmi les options les plus populaires. L'autre solution, encore moins acceptable pour les masses, consiste à essayer de créer une mini-récession en augmentant les taux d'intérêt et en forçant ainsi certaines dettes à faire défaut... tout en priant (fort) pour que cela ne devienne pas immédiatement incontrôlable. Si vous avez l'impression de vous retrouver en 2007/8, vous ne vous trompez pas... L'élite dirigeante s'est retrouvée dans une impasse, qui ne peut être résolue que par le retour de la croissance.
Dans ce contexte, comme le dit l'adage, "il est désormais plus facile d'imaginer la fin du monde, que la fin du capitalisme". Ainsi, nous sommes submergés d'histoires de fin du monde, la plupart d'entre elles décrivant le monde comme une terre désolée, avec des survivants errant dans les ruines fumantes - à la recherche de nourriture ou occupés à fuir leurs ennemis. Les gens vivraient des vies "méchantes, brutales et courtes", se cachant à nouveau dans des grottes, mais cette fois-ci en béton et en acier.
Mon essai 2052 évoque cette image pour une raison bien précise : montrer comment la poursuite effrénée de la croissance, associée au déni du dépassement et de nos contraintes matérielles sur une planète finie, cause bien plus de dommages qu'elle ne le devrait... Mais il ne doit pas nécessairement en être ainsi. Oui, la transition vers un monde à faible technologie ne sera pas une partie de plaisir et entraînera beaucoup de souffrance. Cependant, plus tôt nous réaliserons que le maintien de la croissance (ou du statu quo actuel) est impossible à long terme, mieux nous serons positionnés pour surmonter la discontinuité croissante entre notre passé et notre présent.
Selon la définition d'Alex Steffen, la discontinuité décrit ce que nous vivons dans nos systèmes humains en tant que résultat de nombreuses crises planétaires imbriquées : "un moment décisif, où l'expérience passée perd sa valeur en tant que guide pour la prise de décision concernant l'avenir". En poussant son concept un peu plus loin, il s'agit d'une excellente définition de ce que nous vivons actuellement en raison de l'atteinte des limites planétaires de la croissance. Hausse des prix. Des pénuries d'approvisionnement. Une crise énergétique mondiale. En d'autres termes, la discontinuité est omniprésente. Lorsque les anciennes tactiques cessent de donner des résultats, quels que soient les efforts déployés.
Quelles limites ? Il n'y a pas de limites à l'ingéniosité humaine !" - vient la réplique habituelle. C'est ici que nous devons faire une petite pause et regarder plus profondément. Nous avons créé un ensemble de crises à l'échelle planétaire (pollution, changement climatique, effondrement écologique - pour n'en citer que quelques-unes) sans précédent dans l'histoire de l'humanité. Il n'y a plus d'endroit où se cacher de nos problèmes. Il n'y a plus de second hémisphère (c'est-à-dire les Amériques) à piller pour ses ressources. Plus de peuples premiers à expulser de leurs terres ou à réduire en esclavage. Nous avons dépassé notre boîte de Petri bleu pâle, et de loin. Nous sommes maintenant dans un état permanent de dépassement, ce que nos ancêtres n'ont connu que temporairement. Nous avons déjà franchi les limites.
L'exceptionnalisme humain - comme l'écrit Tom Murphy dans son brillant essai - est une explication plausible de "la raison pour laquelle notre péril est si difficile à saisir". Nous avons tendance à placer notre espèce au centre de nos histoires : toute la vie et toute la générosité de la Terre sont là pour nous soutenir, les singes "premiers" de cet orbe bleu flottant dans un espace autrement sans fin. Nous plaçons l'humanité au sommet de toutes les forces naturelles, capable de contrôler n'importe quelle situation. Bien sûr, nous devons surmonter tous les obstacles puisque nous sommes destinés à réussir ! Et la seule façon de réussir - bien sûr - est de développer la technologie.
C'est de là que découle notre discontinuité économique actuelle. Nous aimons encore penser que nous sommes la force dominante sur cette planète et que nous pouvons nous emparer de toutes les ressources que nous désirons en y consacrant plus de technologie (donc une plus grande consommation d'énergie) et plus d'argent. Dans le monde réel, cependant, la croissance de l'offre nette d'énergie (1) s'est discrètement dérobée sous nos pieds, en raison d'une cause parfaitement naturelle : l'épuisement continu de réserves autrefois riches.
Cela nous a laissé avec un problème de pollution et d'endettement sans cesse croissant : nous avons dû investir dans le creusement et le forage (donc la pollution) de plus en plus chaque année pour remplacer les ressources perdues... Juste pour rester en place, et encore moins pour croître. Regardons les choses en face : contrairement aux mythes économiques populaires, nous n'avons pas réussi à découpler la croissance matérielle réelle (y compris la croissance des "énergies renouvelables") de l'utilisation des combustibles fossiles, et avec le pic imminent de leur extraction (2), nous sommes confrontés à la perspective réelle d'un long déclin à venir (3).
Tout cela peut sembler "pessimiste" à certains, mais au lieu d'habiller les processus naturels d'émotions humaines, et d'essayer ainsi de les faire passer pour des opinions, je propose une autre approche. Plutôt que de nier leur existence, acceptons les phénomènes naturels tels qu'ils sont : des phénomènes naturels. Vu sous cet angle, le moment exact du pic de pétrole, de gaz ou de toute autre ressource devient sans importance. Il importe peu de savoir à quelle date précise la production commencera à décliner, quand on sait - et accepte - qu'elle disparaîtra tôt ou tard. De ce point de vue - et surtout dans la perspective d'une crise planétaire imminente avec un changement climatique brutal, un effondrement écologique, une pollution chimique et le reste - prier pour plus de croissance n'est pas très différent de prier pour notre disparition accélérée.
Ce n'est qu'après avoir accepté que nous ne sommes pas la plus grande force de l'univers que nous pouvons commencer à agir efficacement et utilement. Au lieu d'essayer d'arrêter ces rochers de cent tonnes qui se jettent sur nous, nous pourrions - du moins en théorie - nous écarter. Au lieu d'essayer de nier l'épuisement des ressources et de redoubler d'efforts pour les extraire, nous pourrions commencer à rationner ce qui reste des ressources de la Terre. Planifiez à l'avance. Prendre des décisions judicieuses fondées sur une solide compréhension de la science : ce qu'il faut construire et ce qu'il ne faut pas construire. Au lieu de laisser le capitalisme ruiner nos vies, nous pourrions travailler à séparer la richesse du pouvoir politique. Au lieu d'espérer que quelqu'un rétablisse la croissance, nous pourrions empêcher les fascistes en herbe de s'emparer du pouvoir et de revendiquer des droits sur les ressources d'autrui. Au lieu d'attendre que quelqu'un invente la fusion, nous pourrions commencer à apprendre des techniques oubliées depuis longtemps pour vivre avec moins, voire sans électricité ni essence. Pourquoi ne pas commencer à transformer une quantité croissante de terres en permaculture ? Et pourquoi ne pas renforcer la résilience des communautés ? Au lieu d'essayer d'arrêter le changement climatique - ce qui est impossible dans une économie industrielle - nous pourrions faire ensemble des choix judicieux quant aux endroits à abandonner et aux lieux où déplacer les gens avant que la prochaine crise ne survienne.
Vous avez remarqué que ces suggestions semblent être d'un autre monde ? Comment elles ne peuvent pas être intégrées dans nos récits actuels ? Comment aucune d'entre elles ne concerne le plus, mais en fait le moins ? Comment des systèmes décentralisés émergeraient en conséquence ? Comment elles menacent le statu quo politique actuel... ?
Comme Noam Chomsky l'a dit une fois (4) :
"La façon intelligente de garder les gens passifs et obéissants est de limiter strictement le spectre des opinions acceptables, mais de permettre un débat très animé au sein de ce spectre - et même d'encourager les opinions les plus critiques et dissidentes. Cela donne aux gens l'impression que la pensée est libre, alors que les présupposés du système sont renforcés par les limites imposées au débat.
Dans notre cas, le débat sur l'avenir de l'énergie (et finalement l'avenir de notre civilisation) est strictement limité à l'utilisation d'un mélange d'énergies renouvelables, de quelques vieilles technologies qualifiées de "vertes" et de quelques miracles pas encore inventés. Les principes de base de notre époque restent cependant indiscutables : "nous devons maintenir une modernité à haute énergie quoi qu'il arrive et s'il est vrai que les combustibles fossiles sont polluants et s'épuiseront à l'avenir, nous passerons à d'autres technologies... et cela résoudra tout" [croisons les doigts].
Ce qui est considéré comme renouvelable ou vert fait l'objet d'un débat animé (voir le cas du nucléaire et du gaz en Europe). Mais ce qui ne peut être discuté en dehors des groupes marginalisés, c'est pourquoi nous avons besoin de toute cette énergie ? La croissance est-elle vraiment si bonne, ou même possible si tard dans le jeu ? Ces ressources sont-elles vraiment aussi propres - en plus d'être respectueuses du climat et donc incontestablement "durables" - qu'on le dit ? Est-il même physiquement possible d'opérer ce changement sans détruire le reste de la vie sur Terre ? Pourquoi en avons-nous besoin en premier lieu, s'ils ne peuvent pas être remplacés, reconstruits, recyclés plus tard ? Cette transition énergétique est-elle vraiment le "problème", ou n'est-elle qu'un simple symptôme du dépassement... de la non-durabilité globale de nos demandes sur la planète ?
Telles sont les questions que nous devons nous poser lorsque nous réfléchissons à notre situation difficile. Nous vivons une époque de grande discontinuité - utilisons-la pour expérimenter de nouvelles façons de penser, au lieu de tomber dans des pièges narratifs conçus pour nous maintenir passifs et obéissants.
Jusqu'à la prochaine fois,
B
Notes :
(1) L'énergie nette est ce qui reste après l'extraction et la conversion de l'énergie. C'est le pétrole qui reste après avoir rempli les réservoirs des camions, des plateformes de forage, des vérins de pompage et autres, ou l'électricité qui est disponible pour travailler, après avoir alimenté toutes les activités d'extraction, de fusion, de fabrication et de transport nécessaires pour installer ces panneaux et ces turbines. Cet article est un très bon point de départ, si vous souhaitez comprendre l'impact de l'énergie nette sur l'économie.
(2) L'offre de pétrole a cessé de croître en 2018, et a commencé à chuter tout au long de 2019 - déjà un an avant que la pandémie n'arrive dans les rues. Aujourd'hui, deux ans après le premier effondrement induit par le lock-down, le pétrole peine toujours à revenir à son niveau antérieur et va très probablement diminuer un peu en dessous des niveaux de 2019 au cours des deux prochaines années en raison de causes parfaitement naturelles : l'épuisement de réserves riches et faciles à extraire. Le gaz naturel connaît actuellement le même problème d'expansion et d'épuisement et, peu après le pétrole, on peut s'attendre à ce que sa disponibilité diminue également. Il nous reste donc à brûler plus de charbon que jamais dans l'histoire de l'humanité, ce qui entraîne une nouvelle hausse des émissions de CO2 (tout en rapprochant l'épuisement de la roche noire).
(3) On pourrait dire : oh, nous sommes loin de cela, mais c'est ce qui se passe avec la fracturation aux États-Unis, en dehors du Permien : il n'y a plus beaucoup d'espace pour forer. Le Permien lui-même fait environ 250 miles de large et 300 miles de long, c'est-à-dire qu'il n'est pas infini et ce n'est qu'une question de temps (quelques années peut-être) avant que nous puissions "profiter" d'une production croissante. C'est pour cette raison très simple que plus de 80 % des pays du monde connaissent déjà un déclin régulier de leur production de pétrole. Les trois grands producteurs (États-Unis, Russie, Arabie Saoudite) luttent pour atteindre les niveaux de production pré-pandémiques, et il est de plus en plus évident qu'aucun d'entre eux ne sera en mesure de dépasser durablement les niveaux de 2019 et qu'ils connaîtront donc le même sort que le reste des nations du monde.
(4) Un grand merci à Caitlin Johnston pour cette citation et pour l'avoir mise en contexte.
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France : l'inévitable dégradation de l'activité...la croissance a rebondi et fait mieux que prévu au 2e trimestre. Certes, mais c’est pourtant le chant du cygne et la rentrée est placée sur un brutal retour à la réalité... Le moral des ménages mesuré par l’Insee stagne ainsi à proximité de ses plus bas historiques. Ce n’est plus de l’inquiétude, mais une véritable défiance et les Français n’anticipent aucune amélioration de leurs finances à court terme
Comme annoncé par Jean-Marc Jancovici depuis quelques années, le "Quantitative Easing" n'aura pas duré très longtemps et n'aura peut-être repoussé la fin de la croissance que brièvement. Place au "Quantitative Tightening". Retenez ce terme.
Quelques constats et questionnements proposés par Cyrus Farhangi, membre de l'équipe d'admins de cette page.
La fin de la récréation et le retour au réel ? Si encore le QE avait permis d'investir dans la transition écologique et sociale. Mais il a surtout servi à maintenir en vie un système socialement et écologiquement insoutenable.
Pour limiter l'inflation qui dépasse maintenant les 8%, la Fed relève rapidement ses taux et va retirer des quantités conséquentes de monnaie de l'économie.
La BCE a également annoncé il y a quelques semaines la fin de ses achats d'actifs d'ici la fin de l'année.
Les observateurs s'accordent à dire qu'on est en "uncharted territory" (territoire inconnu). En effet cela pose de nombreuses questions, n'hésitez pas si vous avez ces éléments de réponse.
1) Le QE permettait depuis une quinzaine d'années de maintenir le peu de croissance qui restait. Il y avait de plus en plus de dettes... et malgré cela de moins en moins de croissance par rapport aux années 90 et 2000. Comment fait-on si on ne peut plus s'endetter quasi-gratuitement ?
2) Si les entreprises voient leurs coûts de production augmenter et l'activité stagner (ex. la croissance française au 1e trimestre était de zéro), comment feront-ils pour augmenter les salaires ?
3) Mettons qu'il y ait 5% d'inflation par an pendant 4 ans, et imaginons quelqu'un dont le salaire modeste stagne, qui possède 20 000 euros sur un Livret A (dont le taux devrait rester autour de 1%, du moins je n'ai pas entendu qu'il soit prévu de le remonter à 5%). Au bout de 4-5 ans, son épargne et son pouvoir d'achat auront fondu d'environ 20%.
Et encore, 5% d'inflation c'est pour le moment, en France. Dans le reste de la zone Euro, c'est plutôt 8%. Et si nous n'avions pas bloqué les prix de l'électricité en France et fait des remises sur le prix de l'essence en pleine période électorale, on serait au même niveau.
4) Comment va faire l'Etat pour indexer les retraites sur l'inflation ? Pour augmenter 330 milliards d'euros de 5%, il faut mobiliser 16 milliards d'euros supplémentaires rien que cette année, dans un contexte où les taux augmentent, et où il est difficile d'augmenter les impôts ou baisser les dépenses publiques radicalement sans étouffer l'économie ou casser sa dynamique (sachant par ailleurs que depuis la fin du Covid, la commande publique est un levier majeur de relance de l'activité).
5) Si l'Etat indexe effectivement les retraites sur l'inflation, il va devoir encore davantage prélever sur une économie productive qui est en difficulté. En contexte éventuel de stagflation, les salariés et les cotisants ne seraient pas contents du tout, sachant qu'il y a déjà une amertume croissante envers les seniors.
6) Au vu de ce contexte assez inédit, quelles possibilités demeurent pour éviter augmentation du chômage et/ou augmentation de l'inflation et/ou chute du pouvoir d'achat (pour les salariés comme pour les rentiers) et/ou faillite de l'Etat et/ou effondrement des marchés d'action et d'obligations et/ou chute de la valeur de l'épargne et des capitaux des petits porteurs ?
https://www.npr.org/…/quantitative-easing-meet-quantitative…
(publié par Cyrus Farhangi)
https://www.facebook.com/jeanmarc.jancovici/posts/pfbid02bMhezPPT2j1xBCSN9p6HQU6h3CBc7amFQf1qSnmRmqFaov4rGDwvux24EyGWVZZyl
L'économie de l'Ukraine va se contracter de 45,1% cette année en raison de la guerre menée par la Russie dont le PIB devrait lui-même s'effondrer de 11,2%, selon les dernières prévisions de l...
Depuis quelques années Vaclav Smil tourne publiquement le dos à l'aberration logique et à la religion de la croissance infinie. Et encore, Smil a toujours été plus que sceptique sur la thèse du pic pétrolier, très critique envers le rapport Meadows, et prudent envers le catastrophisme climatique.
Si vous n'avez jamais entendu parler de lui, disons que c'est un scientifique d'un certain calibre, un des plus renommés au monde, y compris dans les milieux d'affaires, admiré (le mot est faible) par exemple par Bill Gates.
Smil produit à lui seul autant d'analyses statistiques que la Banque Mondiale. Il présente par ailleurs l'avantage de n'avoir aucun conflit d'intérêt qui lui ferait avaler des couleuvres et défendre telle ou telle fable techno-illimitiste.
Techno-illimitisme qu'une partie de son méga-ouvrage "Growth" est consacrée à debunker. Dans une tentative de résumé de son pavé, Smil affirme :
"Sans une biosphère en bon état, il n'y a pas de vie sur notre planète. C'est très simple. C'est tout ce que vous avez besoin de savoir. Les économistes vous diront qu'on peut découpler la croissance de la consommation matérielle, mais cela est un non-sens total. Nos options sont assez claires d'un point de vue historique. Si on ne gère pas le déclin, alors on y succombe et on disparait. Nous sommes en meilleure position aujourd'hui qu'il y a 50 ou 100 ans, car notre savoir est bien plus vaste. Si on s'assoit un instant et qu'on réfléchit, on peut imaginer des solutions. Ce ne sera pas sans douleur, mais nous pouvons imaginer des moyens de minimiser cette douleur."
Autre traduction d'un extrait de cet entretien intéressant avec le Guardian :
"Il y a une tradition profonde de frugalité à la fois en Orient et en Occident, vivre dans vos moyens et mener une vie contemplative. Il y a maintenant une injonction plus bruyante pour consommer toujours plus, une plus grande salle de bain et un SUV, mais il apparait de plus en plus évident que cela ne peut pas continuer. Ce sera comme la cigarette, qui était partout il y a 50 ans. Maintenant les gens réalisent le lien clair avec le cancer du poumon, et il y a des restrictions sur le tabac. La même chose se produira lorsque les gens comprendront là où nous mène la croissance consommation matérielle. Je pense que ce n'est qu'une question de temps."
Smil fait également remarquer que l'Américain moyen consomme 150 fois plus d'énergie que l'Éthiopien moyen, le Japonais et Européen moyen 75 fois plus. Ce qui doit croître et ce qui doit décroître est globalement assez clair.
(publié par C Farhangi)
"La décroissance a commencé, de manière larvée"...Est-ce pessimiste ? Je ne sais pas, c’est peut-être juste réaliste. Mais on a encore les moyens aujourd’hui d’arbitrer entre le pire et le beaucoup moins mauvais..
La décroissance plaide pour une frugalité choisie afin de limiter les effets du changement climatique. Popularisée dans les années 2000, elle est de nouveau mise en lumière à l'occasion de la primaire écologiste.
"Nous sommes tous ensemble dans un train qui va à toute vitesse vers un précipice." Voici comment Delphine Batho, candidate à la primaire des écologistes pour la présidentielle 2022, décrit la crise climatique actuelle, sur franceinfo, début août, après la parution d'un rapport choc du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec). Pour la députée des Deux-Sèvres, une seule solution : embrasser "la décroissance". De Sandrine Rousseau à Jean-Luc Mélenchon, elle n'est pas la seule, à gauche, à vouloir s'inspirer de ce mouvement qui prône une frugalité choisie afin de limiter les effets du dérèglement climatique.
Vous n'êtes pas familier du concept ? Pas de panique, Franceinfo vous a prévu un cours accéléré pour tout comprendre à ce mot qui s'invite dans le débat politique.
Qu'est-ce que la décroissance ?
Il s'agit d'un courant de pensée philosophique, politique, social et économique popularisé en France au début des années 2000. Pour ses partisans, la croissance économique, mesurée par le produit intérieur brut (PIB), n'est pas soutenable du fait des ressources limitées de la Terre. Elle n'est pas non plus souhaitable au-delà d'un certain seuil car elle échoue depuis la fin des Trente Glorieuses à réaliser le plein emploi, la réduction des inégalités et la satisfaction de la population dans les pays développés, avancent-ils.
Ses théoriciens proposent donc de lui substituer d'autres objectifs issus de la "réflexion sur ce que sont vraiment nos besoins fondamentaux et sur la façon dont on peut y répondre de manière soutenable écologiquement et plus juste socialement", explique à franceinfo Vincent Liegey, ingénieur et auteur notamment d'Exploring Degrowth : A Critical Guide (Pluto Press, 2020).
Concrètement, ça passe par quels types de mesures ?
Plus qu'un véritable mode d'emploi pour parvenir à un système décroissant, ses adeptes proposent des mesures dans différents domaines. Une réflexion récurrente est de distinguer les biens et les activités en fonction de leurs conséquences sur le climat, comme avec un taux de TVA différencié en fonction des produits, ou un quota d'unités de charge écologique détenu par chaque consommateur et dans lequel il puiserait chaque fois qu'il achète un bien. Logiquement, nombre des propositions des décroissants touchent aux secteurs des transports, de la construction et de l'alimentation, particulièrement polluants selon l'Insee.
Une autre réflexion qui traverse le courant décroissant est celle sur l'usage et le mésusage (l'usage abusif) des ressources. L'eau pourrait ainsi ne pas être payée au même prix selon qu'il s'agisse "de la boire ou bien de l’utiliser pour remplir sa piscine", explique Timothée Parrique, auteur d'une thèse (lien en anglais) en 2019 sur la décroissance, qui sera adaptée chez Flammarion en 2022.
Afin d'améliorer la justice sociale, certains décroissants imaginent une taxation plus importante des hauts revenus et la suppression des niches fiscales, dans la lignée des travaux de l'économiste de gauche et spécialiste des inégalités Thomas Piketty. Mais aussi l'instauration d'un revenu maximum ou d'un revenu universel. Enfin, sur le volet du bien-être, de nombreux décroissants prônent la réduction du temps de travail qui permettrait, selon eux, de partager l'emploi existant et d'investir davantage le temps libre pour l'art, la culture et les liens interpersonnels.
Mais au fait, ça vient d'où ?
"La décroissance n'a pas attendu ce mot pour exister", note le philosophe Dominique Bourg, directeur de la revue La Pensée écologique et soutien de la candidate à la primaire écologiste Delphine Batho. Historiquement, la décroissance est la résultante de deux courants : la critique du développement et la prise en compte des questions écologiques. Le premier est conçu dès le début du XXe siècle par des penseurs pour qui développement ou technique ne vont pas nécessairement de pair avec le bien-être et le progrès humain. Le second naît dans les années 1970 avec un rapport intitulé "Les limites de la croissance" (en anglais) et les travaux de l'économiste roumain Nicholas Georgescu-Roegen pour qui la croissance infinie dans un monde fini est impossible
Pourtant, "les débats sur la pensée écologiste ont disparu dans les années 1980 avec le rouleau compresseur du néolibéralisme" et l'effondrement du bloc soviétique, avance Dominique Bourg. Il faut attendre le début des années 2000 pour voir ressurgir une nouvelle prise de conscience, grâce notamment "aux rapports du Giec et à l'intérêt des médias dominants pour les conséquences du dérèglement climatique".
En 2002, la revue écologiste Silence consacre un numéro à la décroissance. Le mot est notamment popularisé par l'économiste Serge Latouche et le militant anti-pub Vincent Cheynet, et il est bientôt traduit en anglais par "degrowth", qui connaît un succès mondial. Le mouvement français connaît son apogée dans les années 2000 (lancement d'une revue et d'un parti politique, organisation de colloques et publication d'une multitude de livres...). Surtout à gauche, mais pas seulement. La décroissance est également reprise par certains milieux catholiques ou d'extrême droite, attirés par l'idée d'un certain ascétisme ou le rejet de la mondialisation, comme l'explique Le Monde.
Le bouillonnement militant et intellectuel autour de la décroissance se tasse pourtant dans la décennie suivante, notamment marquée par les divergences de vue entre ses promoteurs puis par le succès de la collapsologie. Pour autant, la décroissance a infusé certains cercles militants, qui la mobilisent pour justifier le développement d’alternatives concrètes comme les ressourceries, les monnaies locales, les jardins partagés et les coopératives.
Pourquoi m'en parlez-vous maintenant ?
Parce que le concept est de nouveau placé sous le feu des projecteurs par la primaire écologiste, qui se tient entre les 16 et 28 septembre. L'une des quatre candidates, l'ancienne ministre de l'Ecologie Delphine Batho, revendique la décroissance comme étant au cœur de son engagement. Cette dernière "est la seule voie réaliste", expliquait-elle le 10 août sur franceinfo. Si son intérêt pour le sujet est longuement expliqué dans une note de campagne sur le site de son parti, Génération écologie, la candidate en dit néanmoins très peu sur la manière dont elle compte la mettre en pratique.
S'ils n'emploient pas ouvertement le terme, les autres candidats à la primaire écologiste (mais aussi des figures de la gauche comme Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon) proposent également certaines mesures proches de la décroissance. L'économiste Sandrine Rousseau, qui souligne dans son programme que "notre Terre n'a pas de ressources illimitées", plaide pour "une véritable fiscalité carbone, en stoppant les subventions aux industries polluantes" et expliquait le 25 juillet dans l'émission YouTube "Backseat" qu'il faudrait "évidemment diminuer le volume de nos consommations". Le maire de Grenoble, Eric Piolle, qui expliquait sur France Inter le 6 juillet refuser de choisir une "religion" entre "croissantiste" et "décroissantiste", promet dans son programme la mise en place d'un "ISF climatique" pour taxer les particuliers les plus pollueurs et souhaite "une loi sur la sobriété numérique qui vise la réduction de l’empreinte carbone de 40% du numérique" d'ici 2022.
L'ancien chef d'entreprise Jean-Marc Governatori assure lui aussi refuser le débat entre "croissance et décroissance", même s'il souhaite "mettre en place dès maintenant une activité humaine compatible avec la biosphère dans des objectifs de pleine santé et de plein emploi". Egalement prudent lorsqu'il emploie le mot de décroissance, comme il l'expliquait sur France Inter début juillet, l'eurodéputé Yannick Jadot annonce néanmoins dans son programme qu'il veut "augmenter la TVA sur tous les produits et services polluants et à l'obsolescence programmée" et mobiliser "20 milliards par an dès 2021 et sur 2022-2027 pour la transformation des secteurs les plus polluants".
Est-ce que la décroissance a déjà été mise en pratique ?
La décroissance "n'a jamais été appliquée à grande échelle, reconnaît Vincent Liegey, mais il y a déjà un grand nombre d'espaces dans nos sociétés dans lesquels des mesures décroissantes sont expérimentées au quotidien". Entre autres exemples, on peut citer un fourmillement d'initiatives locales autour de la low tech, de la permaculture, des circuits courts, mais aussi des espaces comme des ressourceries ou le site de seconde main Leboncoin. Plusieurs pays ont par ailleurs proposé des indicateurs de progrès autres que le PIB, tels que la Nouvelle-Zélande, la Finlande, le Bhoutan... et même la France, depuis 2015. Le développement de la démocratie participative est également salué, avec des expérimentations comme la Convention citoyenne pour le climat. Les mouvements sociaux ne sont pas en reste, avec l'apparition de groupes de défense du climat comme Extinction Rebellion ou Fridays for Future.
Qu'en disent ses détracteurs ?
La décroissance rencontre un grand nombre de critiques, à la fois extérieures et intérieures à ses cercles. Voici les principales :
La critique du "retour en arrière". Pour certains, la décroissance est synonyme d'un refus de la modernité et des technologies. Comme Emmanuel Macron, qui ironisait en septembre 2020 sur ceux qui, critiquant le déploiement de la 5G, préféreraient "le modèle amish" et le "retour à la lampe à huile". Dans un monde décroissant, bye bye les SUV et les iPhone 12. Néanmoins, "la décroissance n'est pas anti-technique, mais pour une réappropriation de la technique au service de l'amélioration du bien-être humain", assure l'essayiste Vincent Liegey.
La critique du catastrophisme. Cette première critique va de pair avec une seconde, selon laquelle les décroissants font l'impasse sur l'innovation, qui aurait toujours permis à l'humanité de relever les défis présentés par la nature. "C'est par la technique qu'on résoudra les problèmes posés. Quand on voit les progrès dans le solaire, l'éolien (...), la mise au point de bactéries pour dévorer des sacs plastiques... Cela peut aller tout aussi vite que le progrès des technologies fondées sur le carbone au XIXe siècle", estimait ainsi l'essayiste libéral Gaspard Koenig en septembre 2019 auprès de l'AFP. Il ne faut pas avoir une "foi aveugle" dans le progrès, répondent les partisans de la décroissance. Contrairement à ceux qui soutiennent la "croissance verte" ou le "développement durable", ils mettent en avant que l'alliance entre croissance économique et progrès technique n'a jamais prouvé qu'elle permettait de réduire suffisamment (lien en anglais) les pollutions pour répondre à l'urgence climatique actuelle.
La critique sur le maintien de la pauvreté. Pour les économistes libéraux, la croissance est un préalable à la redistribution des richesses. Moins de 10% de la population mondiale vit aujourd'hui sous le seuil de pauvreté, contre plus de 35% trente ans plus tôt, rapporte en effet la Banque mondiale. Pour ces critiques, les décroissants seraient donc partisans de la récession, et à terme du maintien de la pauvreté dans les pays en voie de développement. Mais la théorie de la décroissance est sélective et ne concerne "que les pays riches ayant déjà atteint des seuils de production suffisants pour satisfaire les besoins de leur population", répond l'économiste Timothée Parrique. "Les pays du Sud qui vivent dans la pauvreté doivent bien entendu produire ce dont ils ont besoin, mais pour ce faire, encore faut-il que les ressources soient disponibles – d'où la logique d’une décroissance dans les pays du Nord", ajoute-t-il. Pour éviter la confusion entre décroissance et récession, "il faudrait sans doute utiliser un terme comme celui d''acroissance', avec [un] 'a-' privatif", plaide Serge Latouche dans La Décroissance (Que sais-je ?, 2019).
La critique de la mise en œuvre. Les solutions avancées par les décroissants sont variées mais rarement présentées sous la forme d'un système cohérent qui permet d'envisager sa mise en œuvre concrète, notent plusieurs analystes, y compris parmi les adeptes de la décroissance. Quel système politique adopter pour la prise de décision en commun ? Jusqu'à quel point la production mondiale doit-elle décroître, et avec quelle population ? Comment concilier réduction du temps de travail et besoin accru de main-d'œuvre lié à une plus faible utilisation de la technologie ? "Tout le monde tâtonne là-dessus depuis dix ans et on n'a pas encore la réponse. Le design d'une société compatible avec la durabilité de la Terre est quelque chose qu'on doit encore créer et qu'on n'a pas devant nous", reconnaît Dominique Bourg.
Je n'ai pas eu le temps de tout lire, vous me faites un résumé ?
La décroissance est un courant de pensée issu de la critique de la technique et de la prise de conscience de l'urgence climatique, qui a connu son heure de gloire en France durant les années 2000. Selon ses partisans, la recherche de la croissance économique à tout prix est inutile et dangereuse, puisqu'elle ne permet ni le plein emploi, ni la réduction des inégalités et accroît les dérèglements climatiques. La décroissance est notamment défendue aujourd'hui par la candidate à la primaire écologiste Delphine Batho, mais irrigue toute une partie de la gauche – et même certains mouvements catholiques et d'extrême droite. Ses opposants estiment au contraire qu'il faut lui préférer la "croissance verte", sans renoncer au progrès technique comme moyen de surmonter la crise climatique.
https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/l-article-a-lire-pour-tout-comprendre-a-la-decroissance-pronee-par-certains-candidats-a-la-primaire-ecologiste_4747435.html#xtor=EPR-2-[newsletterquotidienne]-20210903-[lestitres-coldroite/titre4]
Seuls les fous (et les économistes) croient à une croissance sans fin...la croissance du PIB demeure la boussole suprême de nos économies que les conjoncturistes commentent et prévoient à la décimale près. De simples décélérations de quelques dixièmes de points suffisent à déclencher l’émoi.
De quoi demain sera-t-il fait ?
https://www.demain-la-decroissance.com/2021/08/12/de-quoi-demain-sera-t-il-fait/
De quoi demain sera-t-il fait ? La production de richesse va décroître, c’est inéluctable. Les machines ne fonctionneront plus, il faudra manier l’outil, au sens propre du terme, c’est à dire « à la main ». Puis l’homme ne sera plus en mesure de produire d’acier ni de le récupérer, ce sera le retour a l’âge de pierre, à une différence près, la somme des connaissances acquises sera énorme mais le savoir faire de base de la survie aura disparu
Imaginons que deux pays soient les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre au monde, imaginons qu’ils soient également parmi les plus vulnérables au réchauffement climatique, même si de façon différenciée, et imaginons qu’ils soient entrés dans une lutte pour l’hégémonie mondiale… Nous parlons bien sûr des Etats-Unis et de la Chine.
Voici un des plus gros obstacles pour contrer le dilemme du prisonnier face au réchauffement climatique et engendrer de la coopération. C’est aussi un des plus gros obstacles à la décroissance (quantitative) choisie par les Etats pour mettre fin à l’overshot et revenir dans les limites planétaires. Il s’agit du problème de la puissance politique, liée à la puissance militaire, liée à la puissance économique, liée à la puissance énergétique, liée aux énergies fossiles et nucléaires, dont la densité de puissance est la plus élevée parmi toutes les énergies. Ainsi, géopolitiquement aujourd’hui, il semble qu’un Etat puissant est un Etat polluant. Or les élites politiques d’un pays ont tendance à vouloir en augmenter leur puissance et l’Etat est leur véhicule pour ce faire. Chacun joue dans sa division et les grandes puissances ont en général tendance à vouloir devenir hégémoniques. C’est cette dynamique de recherche de puissance qui explique durant l’histoire la course aux armements, au propre et au figuré. La guerre n’étant que la continuation de la politique par d’autres moyens, et vice versa ! Même le PIB et la taille de la population deviennent géostratégiques.
La puissance est néanmoins un concept relatif en géopolitique : on est plus puissant que quelqu’un d’autre et il suffit d’une différence significative pour être plus puissant. La taille de cette différence est en quelque sorte un “matelas de sécurité” pour pallier toutes les incertitudes quant à la suffisance dissuasive de l’écart avec ses concurrents. Certaines puissances ont des moyens tels qu’elles se permettent, avec leurs seules dépenses militaires, de dépasser grosso modo la somme des dépenses de tous leurs concurrents sur la planète (les Etats-Unis). Difficile de faire mieux en termes de dissuasion.
Le problème de la course aux armements est qu’elle épuise toutes les parties et n’a pas de limite définie. C’est le principe de la “reine rouge”, issu d’Alice au Pays des Merveilles. Pour rester premier, quand tout le monde court, il faut conserver son écart avec ses poursuivants. Si ses poursuivants accélèrent, on est forcé d’accélérer pour rester premier. En géopolitique, cela incite les prétendants à l’hégémonie à ne rien lâcher en termes de puissance. Et face au réchauffement climatique, ne rien lâcher équivaut aux effondrements, et à l’augmentation des risques d’extinction.
Comment renoncer aux combustibles fossiles et à la puissance qu’ils offrent sans bousiller la planète ? Le problème n’est pas seulement pour les grandes puissances, il est aussi pour les petits qui voudraient avancer seuls.
Durant l’histoire, les sociétés plus puissantes (thermodynamiquement/physiquement) tendent à absorber les sociétés moins puissantes et à détruire leur mode de vie “moins puissant”. C’est presque une loi nécessaire de l’évolution, toutes choses égales par ailleurs. La puissance implique la capacité de détruire ce qui est moins puissant. Sur une longue période et avec d’infimes variations, une simulation (par exemple de Monte Carlo pour les experts) montrerait probablement que les unités puissantes tendent à détruire et absorber les unités moins puissantes. Il suffit d’une génération de leaders belliqueux dans l’unité la plus puissante pour absorber une unité moins puissante qui avait profité jusque-là de voisins pacifiques. A long terme, y compris en biologie, la puissance métabolique est un argument massue (même si pas le seul nous le verrons).
Comme pour le désarmement nucléaire, face au réchauffement climatique et ses implications implacables envers la réduction de voilure économique, personne ne veut être le premier à ranger son flingue dans son étui. L’être humain étant ce qu’il est, on ne peut espérer qu’abaisser lentement, parallèlement, chacun son arme en observant rigoureusement à quelle hauteur son ennemi tient encore son flingue. C’est la logique de fonctionnement des traités internationaux de désarmement ou de limitation des armes nucléaires. Tenons-nous par la barbichette pour nous désarmer ensemble. C’est aussi, in fine, la logique de l’Accord de Paris sur le Climat : que chacun dépose son flingue sur la table et propose ses réductions d’émissions aux yeux de tous.
On trouve alors ici un argument stupéfiant : les décroissants (du moins ceux qui pensent que la seule manière de mettre fin à l’overshot est la réduction de voilure de l’économie mondialisée d’un point de vue quantitatif), par réalisme, devraient examiner la question de la défense militaire avec une grande attention, voire même considérer l’option de l’arme nucléaire. Pourquoi ? Pour ne pas se faire bouffer par leurs voisins croissantistes pardi ! Et pourquoi diable lier décroissance et arme nucléaire ? Parce que l’arme qui a le plus la capacité de décorréler la puissance économique (donc l’énergie fossile) et la puissance militaire étant l’arme nucléaire, une nation décroissante pourrait y voir une manière de rester souverainement décroissante face à ses voraces voisins.
Le problème a un caractère hologrammique, c’est-à-dire qu’il se reproduit à toutes les échelles. Un petit village décroissant pourrait se féliciter d’avoir atteint la soutenabilité dans les limites de la planète, et même un certain confort de vie ma foi tout à fait satisfaisant… pour être ensuite coupé en deux par une belle autoroute à quatre bandes construite par l’Etat souverain sur le territoire duquel le petit village décroissant a eu le malheur d’espérer sa tranquillité. Faute d’avoir la puissance pour s’opposer à la puissance publique de l’Etat, les petites initiatives de transition sont toujours susceptibles d’être dévorées par la puissance qui les domine.
Au niveau individuel également, le problème de la reine rouge est prégnant : si je renonce au téléphone mobile et aux réseaux sociaux en décélérant, en décroissant, je cours le risque d’être isolé de “là où ça se passe” et même de ne plus être invité du tout. Désormais, pour rester “dans le coup” d’un point de vue individuel, dans ses relations sociales, une course technologique s’est engagée qui augmente l’empreinte écologique de la vie sociale. On ne semble plus s’y retrouver que si toutes nos relations décident ensemble de “désescalader”. Avant, on se donnait rendez-vous à un endroit donné à une heure donnée et … la plupart du temps ça fonctionnait !
Cela nous amène, en revenant à la géopolitique, à des considérations gênantes qui ne doivent pas effrayer le prospectiviste (qui n’est jamais responsable des prolongations de tendance qu’il soumet à la réflexion collective).
Si vis pacem para bellum, si tu veux la paix, prépare la guerre, disaient les anciens Romains… On pourrait dire aujourd’hui peut-être “si vis decrescientam para bellum” ?
Comme les armes nucléaires présentent certains inconvénients équivalents au réchauffement climatique en termes de hausse de la probabilité d’effondrements et d’extinctions, il y a lieu toutefois de dépasser cette conclusion immédiate. Mais on doit bien comprendre que les grandes puissances du monde se regardent et s’observent dans le domaine de l’écologie, du climat, de l’énergie fossile en particulier, si corrélé à la définition actuelle de la puissance géopolitique. Ainsi, comme pour l’armement nucléaire, on voit mal comment ces puissances accepteraient de “baisser les armes” même du seul point de vue économique, afin de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, tant qu’elles n’ont pas la garantie que leurs rivaux feront de même et qu’elles pourront le vérifier en permanence.
Si d’aventure un bloc continental voulait avancer seul (un peu comme l’Union européenne), il devrait alors être capable, faute d’accord explicite, d’imposer aux autres blocs continentaux le respect de conditions de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre. C’est pourquoi l’Union européenne parle par exemple de “carbon border adjustment”, un système qui imposerait une fiscalité climatique aux produits et services vendus sur le sol européen, par des pays qui ne seraient pas engagés suffisamment à réduire leurs propres émissions.
Enfin, renversons la table pour maintenir la tension dialectique insoutenable qui nous occupe. Nous avons dit que même d’un point de vue biologique, les métabolismes élevés (comme les mammifères) ont semble-t-il gagné sur les métabolismes plus lents (les reptiles, les dinosaures). Mais est-ce si vrai ? Il y a des exceptions. Lorsque les ressources du milieu s’amenuisent drastiquement, les métabolismes les plus gigantesques et les plus élevés sont les premiers à périr, faute de pouvoir réduire la voilure. Tandis que les métabolismes disons plus “végétatifs”, de par l’excellence de leur efficience à transformer la moindre goutte d’énergie en vie, prospèrent dans la rareté. Ce raisonnement pourrait donc donner un avantage aux pays “décroissants” par rapport à ceux qui maintiennent leur métabolisme croissantiste. A ce moment, dans une telle contrainte écologique, il se pourrait bien que la géopolitique s’aligne avec l’écologie, et qu’on n’ait plus besoin d’arme nucléaire pour dissuader les ogres. Les Etats les moins résilients seraient tellement ravagés et incapables de soutenir leurs processus économiques que les Etats sobres n’auraient plus beaucoup de soucis à se faire.
Mais tout ceci n’est (encore) que de la fiction prospective…
Cédric Chevalier
La surconsommation et l'économie de croissance sont les principaux moteurs des crises environnementales
: "54 ans après l'article de Kenneth Boulding "The Economics of the coming spaceship Earth" (https://lnkd.in/ejMCc_A ), où l'on pouvait déjà lire que dans un système fermé la croissance de la production deviendrait un problème et non une solution, et 48 ans après The Limits to Growth (https://lnkd.in/ev4N-EA ), qui a quantifié les propos du précédent d'une certaine manière, un groupe de chercheurs publie dans Nature un article pour dire que la croissance verte, c'est comme une fourmi de dix-huit mètres avec un chapeau sur la tête, ca n'existe pas.
Nos chercheurs montrent en effet que la technologie ne fait au mieux que réduire la croissance des impacts quand l'activité économique augmente, mais ne les "annule" pas.
Il est intéressant de noter que l'expression de cette incompatibilité entre croissance économique et baisse des impacts vient de physiciens, chimistes (Meadows et Boulding) et ingénieurs (une partie des auteurs du papier de Nature), mais pas d'économistes "classiques", qui, une fois qu'ils comprennent que leurs raisonnements sont basés sur des prérequis qui n'existent nulle part dans la vraie vie (dont l'absence de limites physiques), deviennent "prisonniers de leurs rentes" (comme nous tous !) et sont extrêmement rarement capables d'en sortir."
Jean Marc Jancovici
(publié par Joëlle Leconte)
https://www.facebook.com/jeanmarc.jancovici/posts/10159445875197281
https://phys.org/news/2020-06-overconsumption-growth-economy-key-drivers.html
Le think-tank The Shift Project a présenté les grandes lignes de son plan de transformation pour décarboner l’économie française et assurer sa résilience. En guise de première étape, il nous faut collectivement renoncer à l’idée de croissance....
Comprendre la fin de la croissance dans le monde en 1min avec Jean Marc Jancovici....
Chris Williamson, chef économiste de Markit, n’a pu que constater la morosité ambiante. L’indice PMI, chiffre qui mesure l’activité manufacturière, a de nouveau chuté en décembre, pour atteindre 46,3 contre 46,9 le mois précédent. Nous sommes donc loin d’atteindre les 50 nécessaires à la progression de l’activité....
Il peut être estimé qu'une bonne majorité des Français vit déjà en "décroissance"...17 témoignages reçus sur Facebook de ceux qui vivent la décroissance, copiés-collés tels quels............
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Eloi Laurent : "La croissance est une mythologie économique"
https://www.franceinter.fr/emissions/le-grand-face-a-face/le-grand-face-a-face-26-octobre-2019
Faut-il en finir avec l’obsession de la croissance ? Ne faudrait-il pas mieux se focaliser sur le bien-être plutôt que sur le PIB ? Débat avec l'économiste Eloi Laurent, qui publie « Sortir de la croissance. Mode d’emploi » aux éditions Les Liens qui libèrent. ...
Quelque chose ne tourne pas rond dans la reprise européenne : la croissance a perdu en intensité tout au long de l’année pour tomber en-dessous de 1% en rythme annualisé au troisième trimestre. Pire encore, la zone euro a perdu sa principale locomotive, l’Allemagne dont le PIB a reculé pour la première fois depuis le 1er trimestre 2015. Bilan, la comparaison avec les Etats-Unis est à nouveau douloureuse avec d’un côté une économie américaine en accélération et de l’autre une zone euro en décélération alors même qu’elle part de plus loin...
Quand le GIEC nous alerte sur le réchauffement climatique, il nous annonce aussi de mauvaises nouvelles pour l’économie. Si rien n’est fait pour développer davantage de nouvelles sources d’énergie, ou d’efficacité énergétique, en plus de brader le climat, on effondrera aussi l’économie. Evidence ? Pas pour tout le monde. On le voit pourtant à l’œil nu sur les courbes de consommation d’énergie (charbon, gaz, pétrole, nucléaire, etc.) depuis la première révolution industrielle aux Etats-Unis, en Europe ou plus récemment en Chine. Comme le montre une étude de Victor Court, chercheur à l’institut Louis Bachelier, la quantité d’énergie consommée quotidiennement par un habitant des Etats-Unis en 2000 est sept fois plus grande que celle d’une personne qui vivait dans une société préindustrielle....
...En juillet, les industriels français déclaraient une prévision de hausse de leurs investissements de 4% cette année. Alors avec 4%, la France n’avait pas de quoi tomber dans l’euphorie, mais elle pouvait y trouver les moyens de compenser les mauvais chiffres de l’exportation et le ralentissement de la consommation. Or, à la fin du troisième trimestre, leur prévision d’investissement est désormais négative, à -1%. On passerait donc de +4 à -1%. Bref, a priori, les industriels se sont mis aux abris....
« Il y aura décroissance quoi qu'il en soit. Soit on l'organise, et ça fait moins mal, soit on la subit de la nature, et là, ça va être très, très violent. » Selon Yves-Marie Abraham, professeur en gestion, il ne s'agit plus de limiter les effets du réchauffement climatique – une bataille perdue de toute façon –, mais bien de préparer nos sociétés à la vie avec moins de ressources...
Le risque est clairement en train de basculer du côté des émergents. On le voit avec la crise en Turquie, en Argentine. Mais ça tangue également sérieusement au Brésil, en Afrique du Sud, ou en Indonésie et la liste n’est pas exhaustive. Du coup de nombreux indices actions et monnaie du monde émergent ont basculé dans le rouge...
La contraction énergétique, due à l'épuisement des ressources fossiles et à l'augmentation de la demande dans le monde, risque d'entraîner une diminution de la croissance du PIB par habitant dans les pays occidentaux.
La croissance… De nombreuses personnalités politiques font de ce terme le but à atteindre, comme l’espoir d’une ère d’abondance. Pourtant, pour des raisons purement physiques, et donc indépendantes des politiques menées, nous nous dirigeons vers une récession structurelle. Pourquoi ?
Le PIB, produit intérieur brut, mesure la production économique d'un pays. Ici, nous parlerons de PIB par personne (soit le PIB divisé par le nombre d'habitants) qui permet de se concentrer sur ce que ressent un habitant. Si le PIB/personne augmente, on parlera de croissance et la population s'enrichit (en moyenne). Sinon, c'est la récession et elle s'appauvrit.
En physique, l'outil qui mesure le changement est l'énergie. Quand quelque chose s'échauffe, se déplace, rayonne, change de forme, de composition chimique ou atomique, de l'énergie est transférée. Si peu d'énergie intervient, le changement est faible, si beaucoup d'énergie est mise en jeu, il est important. Cela vaut également pour la production humaine. Tous les objets qui nous entourent sont fabriqués avec des matières premières naturelles transformées grâce à de l'énergie. Ainsi, plus l'énergie consommée par habitant est importante, plus le PIB par habitant sera élevé.
De la maîtrise du feu à nos jours, l'être humain a cherché à contrôler des sources d'énergie toujours plus concentrées et efficaces pour modeler son environnement, afin de le rendre plus sûr et confortable : réduire les risques de famine, d'attaques d'animaux ou d'ennemis, améliorer notre hygiène pour repousser les maladies, développer les moyens de transport, le confort domestique, etc.
Jusqu'au XIXe siècle, les sources d'énergie (force animale, biomasse, moulins à eau et à vent...) étaient très limitées, c'est pourquoi la croissance par personne l'était aussi. Cependant, elles ont permis de libérer des paires de bras qui pouvaient se consacrer à autre chose qu'à produire ce qui était directement nécessaire à notre survie. L'artisanat, les services sont ainsi apparus et les villes ont commencé à croître (exode rural).
L'invention de la machine à vapeur au XVIIIe siècle, qui permet de convertir de l'énergie thermique en mouvement, constitua une révolution. Ses applications étaient immenses : la mécanisation des usines, les transports, plus tard, la production d'électricité... Un kilogramme de charbon brûlé dans une machine à vapeur délivre autant d'énergie qu'une centaine de travailleurs en une journée ! Et le charbon ne coûte presque rien. Il faut beaucoup moins d'énergie pour en extraire que pour nourrir, loger et encadrer les ouvriers qu'il remplace.
Avec le charbon, le pétrole et le gaz, la quantité d'énergie accessible par personne a crû exponentiellement, entraînant le PIB/habitant, donc notre richesse. Notre niveau de vie est bien supérieur à celui de nos parents et grands-parents. Les périodes de disette sont lointaines, de même que les grandes épidémies. Cela, nous le devons à l'énergie (fossile) abondante qui a permis de libérer des bras qui ont pu se consacrer à la recherche, à l'ingénierie, aux services. Cette énergie nous a permis d'extraire des matières premières dans des proportions inédites dans l'histoire humaine, et de les transformer en objets de plus en plus complexes (avions, médicaments, ordinateurs…).
Les énergies fossiles sur lesquelles repose tout le système sont présentes en quantités finies (bien qu'importantes) sur terre et nous commençons à en toucher les limites. L'Europe a passé son pic de production de charbon dans les années 80 et de gaz et de pétrole dans les années 2000 .
Depuis, notre production domestique d'énergies fossiles diminue d'année en année et les importations de gaz et pétrole ne suffisent pas à compenser cette baisse [pour un coût raisonnable, NDLR]. La contraction énergétique qui en résulte, alliée à l'augmentation de la population européenne, entraîne une réduction de la croissance économique par personne. Nous risquons ainsi d'entrer en récession (durable) dans les prochaines années.
Lire aussi :
> En sept mois, l'humanité aurait épuisé un an de ressources terrestres
> Electricité : la France forcée de s'appuyer sur le gaz et le charbon
Si nous ne voulons pas que nos sociétés souffrent d'une récession subie, il est urgent de reconsidérer notre modèle économique (notamment la répartition des richesses) afin de conserver la paix sociale. La réduction des inégalités peut ainsi atténuer les effets de l'appauvrissement moyen inhérent à une récession.
Nous devons également améliorer l'efficacité énergétique et réduire notre consommation. La sobriété mènera aussi à une récession, mais dans laquelle nous pourrons choisir ce que nous sommes prêts à abandonner et ce que nous souhaitons conserver. Sinon, c'est la pénurie énergétique qui réduira de façon forcée notre consommation par un autre mécanisme : la pauvreté. Dans ce cas, nous subirons cette pénurie et il sera trop tard pour choisir ce que nous souhaitons garder. Une fois engagés sur cette voie, il sera difficile de faire machine arrière.
Maxence Cordiez est ingénieur dans le secteur de l'énergie
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La grande illusion | Le nouvel Economiste
Une tentative de remise en cause du modèle idéologique dominant de croissance Mauvaise nouvelle : le Père Noël n'existe pas. Et puisqu'on en est aux vérités qui fâchent : la croissance ne re...
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Pas de transition énergétique sans décroissance
http://www.sciencepresse.qc.ca/actualite/2018/04/27/transition-energetique-decroissance
Pour de nombreux politiciens, de Justin Trudeau à Emmanuel Macron , la transition vers des énergies plus vertes se fera sans diminution du niveau de vie. Faux ! Répond Sarah Cacoub. Dans son mémoire de maîtrise à HEC, Montréal, celle qui est désormais devenue consultante, conclut que la physique nous imposera de décroître. La croissance verte tant vantée est, pour Sarah Cacoub, « un oxymore » (deux mots dont le sens est opposé). Impossible de continuer à croître tout en pensant diminuer nos déchets. Elle n’est pas la première à prôner la décroissance. Mais elle ajoute au débat une des bases mêmes de la physique : les deux lois de la thermodynamique...
Pour soutenir la croissance, rien ne vaut les souteneurs. Pour la doper : la drogue. C’est par ces termes que débutait un billet que j’avais publié en 2015 sous le titre « En Italie, la prostitution et la drogue vont gonfler le PIB. L’INSEE résiste ». Deux ans de résistance, c’est déjà honorable quand les pressions sont aussi fortes. Pour l’instant, l’Insee ne cède que pour les drogues, c’est louable aussi. Mais franchement, cet économisme où tout semble reculer devant la logique du fric, quelle qu’en soit l’origine et l’usage, dans ce jeu de cour de récré pour savoir qui a le plus gros (PIB), me gonfle...
Xerfi Canal a reçu Agnès Sinaï, journaliste environnementale et enseignante à Sciences Po Paris, dans le cadre de son livre "Gouverner la décroissance : Politiques de l'Anthropocène III"...
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L'économie peut-elle décroître ? * Jean-Marc Jancovici
https://jancovici.com/transition-energetique/choix-de-societe/leconomie-peut-elle-decroitre/
Question stupide, votre honneur : évidemment que non, l’économie ne peut pas décroître. Sauf à l’occasion d’épisodes aussi brefs qu’indésirables, la vocation de l’économie, c’est de croître, et en général nous croissons bel et bien, non mais sans blague !...
Gaël Giraud, du CNRS : " Le vrai rôle de l'énergie va obliger les économistes à changer de dogme "
Contrairement à ce qui est écrit dans tous les manuels d'économie, l'énergie (et non le capital, sans elle inerte) se révèle être LE facteur essentiel de la croissance, selon Gaël Giraud, 4...
La croissance du Produit intérieur brut (PIB) a atteint 1,1% en France en 2016 a annoncé ce mardi 31 janvier l'Insee, la moitié de ce que prévoyait François Hollande dans son programme en 2012...
Xerfi Canal TV a reçu Jean-Marc Jancovici, président de The Shift Project et associé de Carbone 4, dans le cadre de son ouvrage: "Dormez tranquilles jusqu'en 2100".
Au cours de ces dernières années, marquées par les enjeux énergétique et climatique, l’innovation technologique est devenue dans l’imaginaire collectif la seule piste de sortie de crise, qui permettrait, du moins en Europe, de retrouver le chemin de la croissance. Les immenses progrès réalisés en matière de technologies de l’information et l’accumulation considérable de connaissances dans les domaines scientifiques et techniques font espérer que, bien utilisés, ils permettraient une croissance de l’activité économique découplée de l’usage des matières premières, et en premier lieu des énergies fossiles. Via l’analyse de l’intensité énergétique du PIB, indicateur permettant de quantifier ce découplage, et par l’étude de différents facteurs, physiques et sociétaux, cet article tente de montrer que ce découplage hypothétique est plus que jamais sujet à des limites incompressibles...
Effondrement de la croissance mondiale !
Les derniers chiffres du commerce chinois sont absolument terribles et ne laissent pas vraiment présager une " reprise " de la croissance mondiale, et c'est le moins que l'on puisse dire ! Tous les
http://www.insolentiae.com/effondrement-de-la-croissance-mondiale/
" La croissance verte n'existe pas " Jean-Marc Jancovici
http://www.sfen.org/fr/rgn/la-croissance-verte-nexiste-pas-jean-marc-jancovici
A l’occasion de la publication de son ouvrage Dormez tranquilles jusqu’en 2100 et autres malentendus sur le climat et l’énergie, RGN a rencontré Jean-Marc Jancovici. Connu pour son franc-parler, le fondateur du cabinet de conseil Carbone 4 et du think tank The Shift Project livre son analyse de l’état du monde. Pour lui, l’humanité doit faire le deuil d’une croissance perpétuelle néfaste pour la planète, mais doit avant cela sortir des énergies fossiles pour éviter le chaos climatique. Dans ce contexte, cet écologiste proche de Nicolas Hulot est convaincu que le nucléaire est une composante indispensable de notre avenir. Mais il s’oppose catégoriquement à l’idée d’une énergie illimitée comme la fusion, « une catastrophe pour la planète ». Au passage, il égratigne l’image idyllique d’un mix 100 % renouvelables et dénonce l’irresponsabilité des politiques dans leur gestion de la filière nucléaire. Rencontre.
Pourquoi il est désirable de dire « Adieu à la croissance » ...
En 1972, quatre jeunes scientifiques du MIT (Massachussets Institute of Technologie) rédigent à la demande du Club de Rome un rapport qu'ils intitulent The Limits to Growth. Celui-ci va choquer le monde et devenir un best-seller international. Pour la première fois, leur recherche établit les conséquences dramatiques sur le plan écologique d'une croissance économique et démographique exponentielle dans un monde fini. Leur analyse repose sur le modèle « World3 », qui permet une simulation informatique des interactions entre population, croissance industrielle, production alimentaire et limites des écosystèmes terrestres. Nous sommes avant la première crise pétrolière de 1973, et pour beaucoup d'esprits, la croissance économique est un fait durable, qui ne saurait être discuté. En avance sur leur temps, ils n'ont pas été entendus. Aujourd'hui, les limites à la croissance ont été largement dépassées. Il est plus que temps des les écouter afin d'amorcer ce virage des consciences et aller chercher et créer les conditions favorables à la résilience dont nous allons avoir tant besoin...
Cela commence à faire beaucoup, beaucoup trop pour les chefs d’entreprise. Il y a d’abord la détérioration du climat social. Commencées le 9 mars, les manifestations contre la loi El Khomri se sont poursuivies en avril pour prendre de l’ampleur en mai avec, en sus, le blocage des raffineries et des dépôts de pétrole. Des manifestations qui ont couru tout le mois de juin pour se terminer le 5 juillet. Quand on fait le compte, c’est 4 mois de grève perlée, et ce n’est peut-être pas fini, les syndicats ont d’ores ayant déjà promis un second round à la rentrée de septembre...
Chokrane - Comment sortir du mythe de la croissance
La Commission européenne constate que la France ne parvient pas à diminuer ses dépenses publiques hors charges de la dette, ni à se désendetter. Entre mars 2015 et mars 2016, le nombre des ins...
Je précise : croissance négative, entre 1973 et 2014, pour 90 % des Américains, les moins riches. Pas pour les 10 % les plus riches. C'est ce que montre ce premier graphique issu d'une publicati...
De la surpopulation à la dépopulation : pourquoi la croissance est en berne
Trop souvent, pour ne pas dire tout le temps, le facteur démographique est totalement absent de l'analyse et de la réflexion autour de tous les grands sujets alors qu'il tient une place toute ...
Le système énergétique mondial atteint ses limites par une étrange double voie Nous vivons dans une économie mondiale qui semble atteindre les limites, mais les symptômes ne sont pas ceux contre lesquels les partisans du pic pétrolier nous avaient mis en garde. Au lieu de prix élevés et d’un manque d’approvisionnement, nous sommes confrontés à des problèmes indirects provoqués par notre forte consommation de produits énergétiques... (Gail Tverberg )
Quand bien même la croissance reviendrait dans les pays développés, elle empêcherait d’atteindre les objectifs climatiques. D’autres chemins vers le progrès humain méritent d’être explorés.
Il existe de multiples explications à la « baisse tendancielle du taux de croissance (1) » observée depuis plusieurs décennies dans les pays riches, et plus récemment dans les pays émergents. Même des économistes médiatiques commencent timidement à envisager l’hypothèse d’un monde sans croissance, du moins dans les pays dits avancés. C’est le cas, aux Etats-Unis, de Paul Krugman et de Larry Summers, pour qui « une stagnation séculaire est plausible (2) ». En France, Thomas Piketty nous met lui aussi en garde : « Est-il bien raisonnable de miser sur le retour de la croissance pour régler tous nos problèmes ? Cela ne résoudra pas l’essentiel des défis auxquels les pays riches doivent faire face (3). » A son tour, Daniel Cohen nous exhorte : « Affranchissons-nous de notre dépendance à la croissance (4). »
Quelques hirondelles ne font pas le printemps, mais ces exemples ne sont pas insignifiants, bien qu’aucun ne fasse intervenir un facteur explicatif essentiel : l’épuisement, déjà en cours, de la plupart des ressources naturelles de la croissance. Matthieu Auzanneau, spécialiste du pic pétrolier, et Philippe Bihouix, expert des ressources fossiles et des minerais, en ont livré des constats rigoureux (5).
Pourtant, le culte de la croissance est à ce point ancré dans l’esprit des dirigeants politiques que, même lorsqu’ils tiennent des discours enflammés sur la lutte contre le changement climatique, ils s’empressent de rappeler qu’elle demeure un impératif. M. François Hollande a donné le ton lors de son intervention à Sassenage, en Isère, en août 2015 : « Vous savez que la France va accueillir la Conférence sur le climat ; elle doit donc être exemplaire. En même temps, la transition énergétique, l’enjeu climatique, est aussi un défi pour la croissance. La croissance, nous voulons la soutenir, la stimuler. En définitive, elle est là dès lors que nous utilisons les outils de la transition énergétique. » Le président français a ensuite prononcé le mot « croissance » quatorze fois en deux minutes, en particulier dans cette séquence : « Mon objectif est la baisse du chômage, et la baisse d’impôts est aussi une façon d’atteindre plus de croissance. Car s’il y a plus de consommation, s’il y a plus de confiance, il y aura plus de croissance. Tout est donc lié à la croissance ; la croissance peut aussi nous permettre d’avoir des baisses d’impôts, et les baisses d’impôts, d’avoir plus de croissance » (6).
Comment prétendre être exemplaire sur le climat en liant tout à la croissance ? Cette contradiction ne dérange pas nombre de dirigeants, qui partagent une nouvelle religion : la « croissance verte », cette transition censée stimuler la croissance, laquelle facilitera la transition. L’ancien président américain George W. Bush avait résumé son credo en matière d’environnement par cette formule : « La croissance économique n’est pas le problème, c’est la solution (7). »
Assurément, face au changement climatique et à d’autres manifestations de la crise écologique, il faudrait investir massivement dans les énergies renouvelables, l’isolation des bâtiments, l’efficacité énergétique, l’agroécologie, la mobilité douce, etc., et donc organiser leur croissance. Mais en mettant l’accent sur des secteurs spécifiques dont l’expansion serait souhaitable, on ignore les questions les plus gênantes. Quelles activités et productions doivent nécessairement décroître compte tenu de leur impact négatif sur le climat, la biodiversité, la santé humaine, etc. ? Par ailleurs, quelle proportion de combustibles fossiles faut-il impérativement laisser dans le sol pour limiter le réchauffement ? Et si c’est entre 60 % et 80 %, comme l’affirment les évaluations les plus récentes, quelles conséquences cela peut-il avoir sur une croissance mondiale encore très largement propulsée par ces combustibles ? Plus généralement, la croissance économique, même faible, est-elle compatible avec les taux de réduction des émissions de gaz à effet de serre aujourd’hui exigés pour ne pas franchir des seuils critiques de concentration dans l’atmosphère ?
On doit à l’économiste Michel Husson (8) des projections assez simples permettant de déterminer d’ici à 2050 le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) mondial — ou du PIB par tête — compatible avec les différents scénarios du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Il les a établies en fonction d’hypothèses sur le rythme de réduction de l’« intensité CO2 du PIB mondial » (9). Conclusion : « L’objectif plancher du GIEC [une division par deux des émissions globales entre 2010 et 2050] ne peut être atteint que par une combinaison d’hypothèses très optimistes sur le rythme de réduction de l’intensité CO2 du PIB [— 3 % par an, soit le double du rythme observé depuis vingt ans] et l’acceptation d’un ralentissement marqué de la croissance du PIB par tête [0,6 % par an en moyenne dans le monde]. Quant à l’objectif le plus ambitieux — une baisse des émissions de CO2 de 85 % d’ici à 2050 —, il semble complètement hors d’atteinte. » Il exigerait en effet une réduction drastique de l’intensité CO2, et une réduction absolue du PIB par tête.
Autant dire que la « croissance verte » est un mythe si l’on postule, en accolant ces deux termes, une croissance compatible avec la finitude des ressources matérielles (combustibles fossiles, minerais, terres arables, forêts, eau...) et avec une stricte limitation des risques climatiques et autres dommages causés aux océans, à la biodiversité, etc. Mais, alors, comment penser un monde débarrassé de ce culte ? Faut-il se résoudre à accepter une régression sociale au nom de l’écologie ?
Les dévots de la croissance sont enfermés dans des schémas de pensée où l’avenir ne peut ressembler qu’à une réactivation du passé. Ils n’imaginent pas que l’on puisse « relancer » autre chose que des quantités produites et consommées à grand renfort de campagnes publicitaires, d’obsolescence programmée et de vie à crédit. Et ils ressassent leur argument favori : sans une croissance suffisamment forte et continue, pas de créations d’emplois, pas de réduction du chômage ! Le triangle idéologique du libéral-croissancisme — la compétitivité des entreprises fait la croissance, qui fait l’emploi — est d’un simplisme affligeant. Pourtant, il continue d’orienter les décisions politiques.
En réalité, les acteurs dominants du capitalisme néolibéral adorent le chômage comme dispositif disciplinaire les autorisant, d’une part, à freiner les revendications salariales et, de l’autre, à intensifier et précariser le travail pour accroître les profits. Aucun projet post-croissance n’aboutira s’il ne convainc pas que la « relance » du bien-vivre dans un environnement préservé est nettement plus efficace pour vaincre le chômage que les recettes éculées du libéral-croissancisme.
Et pourtant, la croissance n’est nécessaire à la création d’emplois que dans le modèle actuel, qui repose sur la quête perpétuelle de gains de productivité : produire toujours plus avec le même volume de travail. Dans ce modèle, une croissance nulle ou faible, plus faible que les gains de productivité, mène à la régression du volume de travail, et donc du volume d’emplois si le temps de travail moyen par personne reste inchangé. On peut certes alors revendiquer des mesures de réduction ou de partage du temps de travail — c’est même la réponse la plus efficace à la montée du chômage à court et moyen terme ; mais on ne sort pas pour autant du productivisme.
Pour cela, il faut plutôt troquer le vieux logiciel du « partage des gains de productivité », héritage des « trente glorieuses » ou du fordisme, contre celui du partage des gains de qualité et de soutenabilité. Orienter le système de production et de consommation selon une logique qualitative du « prendre soin » (des personnes, du lien social, des objets, de la biosphère...), en plaçant la qualité des biens communs sociaux et écologiques au cœur des activités humaines et de la politique : sobriété dans la quantité, prospérité dans la qualité. Cela implique aussi de s’attaquer aux inégalités pour que les nouveaux modes de consommation soient accessibles à tous. C’est même la principale condition pour que les milieux populaires ne voient pas dans cette transition la marque d’une écologie punitive.
On constaterait alors que cette économie plus douce avec les humains, avec la nature et avec le travail, privilégiant les low tech (les « basses technologies », par opposition aux « hautes technologies », et qui n’exigent pas moins d’innovation), offre bien plus d’emplois riches de sens que l’économie productiviste actuelle. Pour une raison simple : à quantités identiques, donc sans croissance, il faut nettement plus de travail humain pour produire propre, vert et sain, dans de bonnes conditions de travail et d’emploi. L’agriculture biologique, par exemple, requiert environ 30 % à 40 % plus de travail que l’agriculture industrielle et chimique pour produire les mêmes quantités de fruits, légumes, céréales, etc.
Cette vision d’une autre « grande transformation » est-elle irréaliste ? Non, car de telles solutions sont déjà mises en œuvre un peu partout dans le monde. Elles fonctionnent, et elles tendent même à se diffuser, en dépit des tirs de barrage des thuriféraires du vieux modèle, qui sont encore aux manettes. On en trouve de nombreux exemples probants — en Inde, en Amérique latine, en Afrique, aux Etats-Unis et en Europe — dans plusieurs ouvrages ou documentaires récents (10), sans parler des expériences locales portées par le réseau Alternatiba et par son association fondatrice au Pays basque, Bizi ! (« Vivre ! » en basque).
Il appartient aux citoyens, le plus souvent en contournant les responsables politiques, et plus rarement avec leur appui, de s’insurger et de généraliser ces logiques où la triade compétitivité-croissance/consumérisme/emplois indécents-chômage cède la place à une autre : coopération-bien vivre/sobriété matérielle/emplois décents-activités utiles...
Jean Gadrey
Economiste.
J'ai juste actualisé un graphique fourni, avec de nombreux commentaires qui me semblent toujours valables, dans cette série de billets anciens sur "la baisse tendancielle du taux de croissance". On
Le blog de Bruno Colmant : La croissance s'enfuit. C'est la fin d'un monde.
D'autres déséquilibres, d'une nature amplifiée, s'avancent vers nous : la finitude des ressources naturelles, la surpopulation assortie de pulsions belliqueuses et militaires, la versatilité de...
http://blogs.lecho.be/colmant/2015/09/la-croissance-senfuit-cest-la-fin-dun-monde.html
Limites de la croissance : cette fois, le loup est là
La production du pétrole de schiste chute, celle du gaz de schiste pourrait très bientôt en faire autant. Il n'y a pas que le pétrole : les prix de toutes les principales matières premières s...
http://petrole.blog.lemonde.fr/2015/09/02/limites-de-la-croissance-cette-fois-le-loup-est-la/
" La 'croissance verte' est une mystification absolue "
Auteur de L'âge des Low Tech. Vers une civilisation techniquement soutenable, l'ingénieur Philippe Bihouix alerte sur l'épuisement croissant des ressources de métaux. Et souligne que, en raison...
http://www.reporterre.net/La-croissance-verte-est-une-mystification-absolue
" La dette publique est une blague ! La vraie dette est celle du capital naturel "
Alors que le chômage atteint un record, montrant l'inanité de la politique néo-libérale, l'économiste Thomas Piketty rappelle que l'inégalité est au cœur du malaise actuel. Il pourfend les ...