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Australie, le canari dans la mine

Publié le par ottolilienthal

on vous raconte l'histoire de la Grande Barrière de corail, à l'agonie à cause du réchauffement climatique

En bien des points, les récifs coralliens ressemblent à la forêt amazonienne. Comme elle, ils sont un écosystème clé de la biodiversité. Si l'une est menacée par le feu et la déforestation, les autres, plus discrets, dépérissent sous les eaux.

Il était une fois une espèce étrange, superbe et flamboyante, capable de construire son propre squelette et de se démultiplier. Un animal aux milliards d'individus qui prend la forme de tours, d'anneaux ou de montagnes. Si solide qu'on le croit minéral. Si beau qu'on l'imagine plante. Un jour peut-être, les générations futures parleront des coraux comme d'une créature mythique.

Alors que les températures des mers augmentent tout comme celles de l'atmosphère, de nombreux récifs coralliens succombent à ce nouveau stress. Les plus célèbres d'entre eux, qui composent la Grande Barrière de corail au large de l'Australie, ne font pas exception. A l'occasion de la Journée mondiale des océans, jeudi 8 juin, franceinfo plonge dans l'histoire fascinante de cet écosystème à l'agonie.   

Elle a vécu 20 millions d'années, mais la hausse des températures a brisé sa vie

Comme tous les récifs coralliens du monde, la Grande Barrière de corail est née d'une improbable histoire d'amour. Cette romance-là débute il y a 20 millions d'années, dans le cadre désolé des eaux qui bordent le nord-est de l'Australie, désespérément pauvres en nutriments. Le corail – un drôle d'animal cousin des anémones et des méduses – aurait pu attendre paisiblement que l'évolution lui règle son compte. Mais notre héros a de la ressource. "Pour pouvoir vivre là où il n'y a pas de nourriture, il a développé un processus physiologique exceptionnel : la symbiose, la vie en commun entre deux organismes", explique le physiologiste Denis Allemand, spécialiste des coraux.

Son âme-sœur est une algue unicellulaire, la zooxanthelle. Ensemble, ces deux espèces – l'une animale, l'autre végétale – forment à la fois un audacieux couple mixte et l'un des plus anciens duos co-dépendants de notre planète. Sans attendre, la zooxanthelle emménage à l'intérieur du corail. Dans son corps, sous son exosquelette. Intrusif ? Non, vital. "Les algues font de la photosynthèse et produisent donc de l'oxygène et des sucres qui vont servir à l'animal corail", explique l'océanographe Pascale Joannot. Outre ses couleurs, le corail y puise son énergie. De quoi donner naissance à la plus grande construction animale de la planète : 2 500 récifs répartis sur 2 300 km de longueur – soit la distance qui sépare Montpellier et Oslo (Norvège) – peuplés de 400 espèces de coraux. Leur amour fusionnel s'observe depuis l'espace.

Mais en 1998, le couple vacille. La Grande Barrière connaît un premier épisode de blanchissement massif. Sous l'effet du stress lié à la hausse des températures de l'eau, le corail expulse la zooxanthelle. Ce phénomène constitue "un divorce", décrivent Pascale Joannot et Denis Allemand. Le corail perd sa couleur, laissant apparaître son squelette blanc, et surtout sa raison de vivre. Si la séparation dure trop longtemps, l'animal meurt. Une nouvelle crise survient en 2002. Puis en 2016 et 2017. Et de nouveau en 2020 et 2022. 

Selon les chercheurs australiens, seuls 2% des coraux de la Grande Barrière ont échappé à un épisode de blanchissement et plus de la moitié de ses coraux sont morts depuis 1995. Sous l'effet du réchauffement climatique, "les événements de blanchissement massif surviennent partout sur la Grande Barrière. Ils deviennent plus important, mais aussi plus longs et plus fréquents", alerte Denis Allemand. 

Elle rend d'immenses services à la nature et nos vies aussi en dépendent

La Grande Barrière n'est pas qu'une structure animale hors du commun, dont les tours peuvent se hisser jusqu'à 500 m du plancher marin. Elle est un écosystème richissime au milieu du néant. "On compare souvent les coraux à des oasis dans le désert océanique", explique Denis Allemand. Elle est le Dubaï des raies manta, le Las Vegas de Némo. Mégalopole en grande partie immergée, elle abrite 1 500 espèces de poissons, 4 000 espèces de mollusques et 240 espèces d'oiseaux. Trente espèces de baleines et de dauphins la fréquentent. Six des sept espèces de tortues marines recensées dans le monde y résident.

"La richesse créée par le corail ingénieur attire dans le récif tout un tas d'organismes : 30% des espèces marines connues vivent dans les récifs coralliens."

Denis Allemand, spécialiste des coraux

à franceinfo

Or, "quand l'oasis disparaît, il ne reste que le désert. C'est difficile de survivre dans le désert", poursuit le spécialiste des coraux, pointant les effets en cascade de cette perte de biodiversité sur la chaîne alimentaire. Les récifs coralliens dans leur ensemble fournissent 9 à 12% des poissons pêchés dans le monde. "Les gens qui vivent à proximité tirent 90% de leur apport en protéines des récifs coralliens", ajoute Pascale Joannot. Les récifs nourrissent aussi les âmes. Ils présentent "une valeur culturelle pour ces riverains : on les trouve dans les histoires, les légendes, les totems, etc. Ils ont un rôle culturel et cultuel", insiste-t-elle. Le long de la Grande Barrière, les communautés indigènes locales œuvrent d'ailleurs à sa préservation. Leurs emplois de rangers ou de guides dépendent de ces récifs mythiques, paradis des plongeurs – à terre, le tourisme fait vivre plus de 60 000 personnes.

La Grande Barrière les nourrit, les emploie et "protège la terre contre les assauts de l'océan. Une vague qui déferle sur un récif mort est moins bien arrêtée que lorsqu'elle déferle sur un récif en bonne santé", poursuit la biologiste. Les coraux nous veulent aussi du bien. Le Centre scientifique de Monaco étudie ainsi le corail en sa qualité de "modèle biologique magnifique" : "On travaille sur sa capacité à se régénérer. Il a aussi des propriétés antioxydantes absolument phénoménales (...) ou des propriétés contre le vieillissement", détaille Denis Allemand. Contre certains cancers, contre la douleur, la maladie d'Alzheimer ou l'arthrose... Chaque espèce est potentiellement porteuse d'une molécule qui débouchera sur un traitement. Une perspective qui donne envie d'en prendre soin.

Elle est mourante et nos efforts pour la sauver sont un coup d'épée dans l'eau 

Un récif peut se relever d'un épisode de blanchissement en quelques années. Mais les assauts répétés de la maladie auront un jour raison de sa résilience, condamnant la Grande Barrière. Car les récifs qui se reconstituent comptent moins d'espèces et ces dernières comptent généralement parmi les moins résistantes, explique Pascale Joannot.

Pour tenter de remédier à cet état critique, le gouvernement australien fraîchement élu a prescrit à la grande malade une cure de billets verts : il a promis d'injecter dans la protection de cet écosystème 1,2 milliard de dollars d'ici 2030. Combattre la dispersion dans l'océan des intrants issus de l'activité humaine (industrielle ou agricole), faire la guerre au plastique, œuvrer à la restauration des récifs agonisants... "Pour l'instant, on expérimente", relève Pascale Joannot, porteuse du programme participatif SOS Corail. "Il y a des tentatives de transplantations : on prend des coraux sains dans un endroit où ils se portent bien et on essaie de les faire reprendre ailleurs. Des pouponnières aussi", cite la scientifique, saluant les nombreuses initiatives menées dans le monde pour protéger les récifs. "Mais ça ne sera pas suffisant." 

Pour garantir qu'un récif ne sera pas touché par un phénomène de blanchissement, il n'existe qu'un antidote :

 

On peut faire des beaux discours et dépenser des milliards, mais pour sauver les coraux, il faut freiner le réchauffement climatique causé par l'activité humaine.

Pascale Joannot, océanologue

à franceinfo

Car sous l'eau comme partout ailleurs, le changement de température – et la hausse de l'acidité qui l'accompagne – est trop rapide pour permettre à cet écosystème de s'adapter, aussi fascinant et résilient soit-il. Les modèles scientifiques validés par le Giec anticipent ainsi la disparition de 99% des coraux en cas d'augmentation globale des températures de 2 °C d'ici 2100.

Or, selon le comparatif de programmes Climate Analytics, c'est justement là que nous conduisent les propositions du nouveau Premier ministre australien. Pourtant présenté comme déterminé à prendre à bras-le-corps la question des émissions de gaz à effet de serre du pays, ce gouvernement condamnerait donc aussi à terme ce joyau, non sans avoir englouti l'équivalent du PIB du Samoa – un Etat qui voit aussi agoniser ses récifs coralliens – dans sa sauvegarde. Les récifs coralliens, et notamment la Grande Barrière "seraient le premier écosystème à disparaître à cause de l'homme", relève Denis Allemand.

Pour éviter cela, le spécialiste des coraux compte sur un projet mondial de conservatoire du corail, "un pis-aller" néanmoins ambitieux, consistant à récupérer un maximum d'espèces de corail, afin d'assurer leur survie en laboratoire. Les scientifiques espèrent ainsi pouvoir sélectionner celles "que l'on pourraient utiliser quand les choses iraient mieux", des espèces qui résisteraient à un océan plus chaud. D'un miracle de la nature à la vie en aquarium, le destin de la Grande Barrière de corail n'est pas scellé. A condition bien sûr que l'espèce qui l'a malmené se hâte à son chevet.

France Télévisions
 
Publié

 

 

https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/biodiversite/journee-mondiale-des-oceans-on-vous-raconte-l-histoire-de-la-grande-barriere-de-corail-a-l-agonie-a-cause-du-rechauffement-climatique_5173669.html#xtor=EPR-2-[newsletterquotidienne]-20220608-[lestitres-coldroite/titre1]

Australie : le climat, non-sujet de la campagne électorale


Commentaire de Jancovici sur l'article :


"La forêt y brule. Les inondations y sont de plus en plus dévastatrices. La Grande Barrière de Corail y meurt. Et pourtant la campagne électorale qui a lieu actuellement en Australie semble aussi peu richement dotée en climat que l'était la nôtre il y a quelques semaines.

Une fois ce constat fait, il serait intéressant de comprendre pourquoi. L'Australie possède incontestablement une industrie extractive de combustibles fossiles qui "pèse" dans l'économie nationale. Ce pays est le 3è producteur mondial de charbon, à égalité avec l'Inde, et surtout le premier exportateur mondial (une moitié environ est du charbon métallurgique, utilisé pour alimenter les hauts fourneaux pour faire de l'acier).

En 2020, il était aussi le premier exportateur mondial de gaz naturel liquéfié (GNL), à parité avec le Qatar, pour un total de 106 milliards de m3 dans l'année, sachant que les Russes étaient cette année là à 200 (données BP Statistical Review).

Mais cette situation n'explique pas tout, puisque l'Hexagone, qui ne possède pas d'activités extractives sur son sol, ne s'est pas beaucoup plus souciée de la question récemment. Par ailleurs, nous avons aussi eu affaire récemment à des sécheresses importantes (avec dépérissement de forêts ou de cultures), des inondations sans précédent dans le nord de l'Europe, des canicules... et rien de tout cela n'infléchit la trajectoire à bref délai, ni les priorités politiques où la 5G et la production de voitures restent des sujets plus "importants" que l'adaptation au changement climatique ou la fin du gaz dans le chauffage.

Chez eux comme chez nous, la réponse est probablement à aller chercher du côté du "mode de vie". L'incendie chez le voisin c'est très triste, mais force est de constater qu'il ne modifie pas vite notre envie de monter en voiture, de changer la télé, de nous acheter un rôti ou de faire les soldes.

Chez les australiens comme chez nous, il faudra un plan organisé pour sortir de cette situation. Après le covid nous n'avons pas mis en route la décarbonation accélérée alors que c'était le moment le plus facile pour le faire, faute de plan. Tant que la société australienne n'aura pas un groupe organisé pour proposer un plan organisé, il est hélas à craindre que les débats électoraux restent décevants sur la question. Comme chez nous !"
https://www.lesechos.fr/…/australie-le-climat-non-sujet-de-…
(posté par Joëlle Leconte)

Une température record de 50,7 °C relevée dans l'ouest de l'Australie

De telles températures pourraient devenir courantes en raison du réchauffement climatique.

Le mercure a atteint la température record de 50,7 °C dans une ville reculée de l'ouest du pays, jeudi 13 janvier, selon le Bureau de météorologie de l'Etat d'Australie-Occidentale. La ville côtière d'Onslow "a atteint un record sans précédent : 50,7 °C, un record pour d'Australie-Occidentale et c'est la température la plus chaude jamais enregistrée en Australie depuis 62 ans", selon l'organisme.

Le directeur du Conseil australien pour le climat, Martin Rice, a souligné que ce record s'inscrivait dans une tendance à long terme du réchauffement climatique induit par la combustion du charbon, du pétrole et du gaz. Et ces températures extrêmes ont déjà des "conséquences catastrophiques mortelles" en Australie.

"Les vagues de chaleur tuent silencieusement en Australie, elles causent plus de décès que tout autre événement météorologique extrême."

Martin Rice, directeur du Conseil australien pour le climat

cité par l'AFP

L'Australie a connu un été austral 2021 marqué par d'importants feux de forêt dans l'ouest du pays et des inondations meurtrières sur sa côte est. Selon Martin Rice, sans une réduction des émissions de gaz à effet de serre, ces chaleurs record pourraient devenir courantes. "A Sydney et Melbourne, d'ici 2030, nous aurons des journées d'été à 50 °C", a-t-il estimé.

 

 

https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/une-temperature-record-de-50-7-c-relevee-dans-l-ouest-de-l-australie_4916389.html#xtor=EPR-2-[newsletterquotidienne]-20220114-[lestitres-coldroite/titre8]

Rapport 2019 sur l'environnement en Australie
Commentaire de Jean-Marc Jancovici :
"Une population 2,7 fois moins nombreuse que la nôtre, sur un territoire 14 fois plus vaste : l'Australie a pourtant subi la morsure des dommages environnementaux de manière particulièrement forte en 2019, comme le montre ce rapport de l'Australian National University : https://www.wenfo.org/…/AustraliasEnvironment_2019_SummaryR…

Le pays-continent a enregistré des records historiques (depuis l'existence de relevés) de sécheresse, débit des fleuves (trop bas), températures, surface brûlée par les incendies, espèces menacées, photosynthèse (record bas)... et en prime la première espèce déclarée éteinte pour cause de changement climatique.

Une "relance à l'identique" créera... des facteurs de pression à l'identique, et en retour nous aurons à gérer des "mauvaises surprises" bien pires que ce qui nous arrive actuellement.

Car "l'environnement", ce n'est pas juste un truc que l'on regarde par la fenêtre et qui fait joli : c'est accessoirement notre seul actif de base..."
(publié par Joëlle Leconte)

 La guerre climatique a-t-elle commencé ?

 

 

L'Australie brûle, mais on ne sait toujours pas comment arrêter l'incendie.

 

Seule la pluie, dans un pays pourtant de très haute technologie semble susceptible de mettre fin à la catastrophe. Il est temps de décréter la mobilisation générale.

 

 

Par Hervé Nifenecker,
Président fondateur de « Sauvons Le Climat »

Publié le 15 janvier 2020 dans « Le Cercle » des Échos  

 

 

Nous assistons, médusés, à l'incendie d'un continent, l'Australie. Depuis le mois d'août, près de 10 millions d'hectares (100 000 km2) de forêt (sur un total de 150 millions) sont partis en fumée, avec, en plus, l'émission de près d'un milliard de tonnes de CO2.

 

Les Australiens sont habitués aux feux de brousse et de forêt pendant la saison sèche (les mois de novembre à mars). Pour limiter leur ampleur, ils procèdent à des feux de prévention pendant la saison humide. Cette stratégie n'a pas fonctionné cette année, caractérisée par une sécheresse à la fois anormalement longue et particulièrement sévère et des températures record.

 

Les climatologues reconnaissent là les effets du réchauffement climatique. 

 

 

Contrôler les feux grâce aux bombardiers d'eau
 

Une fois un grand feu installé, il devient très difficile de le contrôler même à l'aide de bombardiers d'eau. La méthode de contrôle la plus efficace est de ne pas attendre qu'un feu se développe avant de le noyer. Pour des raisons financières, la plupart des bombardiers d'eau utilisés en Australie sont loués aux USA ou au Canada.

 

Pour 2019, les Australiens avaient loué 7 hélicoptères et 9 gros bombardiers d'eau (pour un coût d'environ 40 millions de dollars). Mais les saisons des feux des deux hémisphères ayant tendance à se recouvrir, du fait de leur allongement dans le temps, ils n'en ont reçu que la moitié à temps pour contrôler les grands feux de Nouvelles Galles du Sud et du Queensland.

 

 

Un coût considérable
 

Le gouvernement australien envisage de débloquer un fonds d'urgence de 1,4 milliard de dollars US pour faire face aux besoins des sinistrés. John Quiggin de CNN Business estime que le coût des incendies atteindra 70 milliards de dollars US. 

 

 

Un investissement rentable
 

Que serait-il arrivé si la totalité de la commande était arrivée ? Les pompiers australiens estiment qu'il manquait un équipement évalué à 15 millions de dollars par an pour contrôler les deux grands feux ci-dessus. On aurait sans doute pu diviser par deux les coûts de la catastrophe et les émissions de CO2.

 

 

Un problème mondial
 

Même s'il est le plus important, l'incendie australien a été précédé par de grands feux, difficilement maîtrisables (3 millions d'hectares en été 2019 en Sibérie) en Amazonie, en Californie, au Canada, en Grèce, au Portugal. Le pourtour méditerranéen est menacé aussi bien qu'une bonne partie de l'Afrique.

 

 

Pour un programme mondial de contrôle des feux de brousse et de forêt
 

Les grands feux de forêt qui se multiplient sont une conséquence particulièrement préoccupante du réchauffement climatique, car, par leurs émissions massives de CO2, ils renforcent les conditions qui les ont créés. La seule façon efficace de lutter contre ce processus auto-entretenu est de l'interrompre aussi tôt que possible. Dans une première étape, il y a lieu de définir les régions à risques alliant réchauffement et sécheresse. Ces régions à risque doivent faire l'objet d'une surveillance permanente par voie satellitaire ou observation terrestre. Tout début de feu doit donner lieu à intervention immédiate avec les moyens les plus efficaces comme les bombardiers d'eau. Un réseau mondial de tels bombardiers prépositionnés prêts à intervenir (avec le plein d'eau ?) pourrait être mis en place de telle manière que tout nouveau foyer puisse être noyé rapidement, (en moins d'une heure, par exemple). On peut estimer le besoin en bombardiers d'eau à quelques milliers, représentant un budget annuel de quelques milliards d'euros. La gestion de cette armada anti-feux devrait être confiée à l'ONU, par exemple dans le cadre de l'UNEP (United Nation Environment Programme). Pour le financement, on peut rêver d'une taxe à l'extraction de charbon …

 

La France, avec ses départements d'outre-mer, pourrait abriter plusieurs centres de lutte aérienne contre les grands feux.

 

 

 

Remerciements
 

L’auteur remercie Jean-Marie Seiler, Yves Bréchet et Benjamin Heard pour les données fournies.

 

https://www.sauvonsleclimat.org/images/articles/pdf_files/nifenecker_2018/Australie_La_guerre_climatique_a_t_elle_commence.pdf

« Les pompiers sont parfois au feu depuis trois mois, c’est une sollicitation énorme »

Pierre Schaller, colonel des sapeurs-pompiers et membre de la mission de cinq experts délégués par la France, a répondu à vos questions sur les feux qui touchent le pays depuis le mois de septembre.

Tout juste rentré de Canberra, Pierre Schaller, colonel des sapeurs-pompiers et membre de la mission de cinq experts délégués par la France, a répondu à vos questions sur la situation en Australie et sur le travail des « soldats du feu » sur place. Malgré sa longue expérience des incendies, il n’imaginait pas faire face à un tel phénomène.

Charlotte : La France avait proposé son aide ainsi que le groupe de pompiers qui partent d’habitude sur les gros problèmes à l’étranger. L’Australie a-t-elle accepté cette aide ? Où en est-on ?

Nous avons joui d’une situation privilégiée, le gouvernement australien a reçu 85 offres d’assistance de la part de gouvernements étrangers. Notre offre d’expertise a été acceptée, avec celle des Anglais, des Canadiens, des Américains et des Néo-Zélandais. Nous sommes très heureux d’avoir pu participer.

Ce qu’on constate, c’est qu’entre l’été austral et l’été boréal, il y a maintenant dans le temps et l’espace des incendies de forêts toute l’année, que ce soit dans l’hémisphère Nord ou l’hémisphère Sud. Cela devient un phénomène global, qui va demander une réponse globale. Les missions comme celles que nous avons menées ne peuvent qu’apporter des choses positives pour travailler ensemble.

Loic : Quel a été votre apport auprès des pompiers australiens du point de vue technique pour ce feu ?

Notre mission était une mission d’expertise pour voir de près et sans déformation l’organisation du gouvernement fédéral et régional, voir les techniques opérationnelles et les aides techniques que nous pourrions éventuellement apporter.

La question d’un éventuel renfort est possible, mais il y a une double difficulté. D’abord, la distance : c’est compliqué d’envoyer des renforts humains et matériels aussi loin et il faut que ce soit vraiment pertinent. Ensuite, il faut étudier l’intérêt par rapport à l’immensité du territoire, auquel nous ne sommes pas habitués. Nous allons discuter des suites à donner à cette mission dans les minutes qui viennent avec le ministre de l’intérieur. Il y a un intérêt immense à faire un échange de bonnes pratiques pour apprendre mutuellement.

Charlie : La plupart des pompiers australiens sont volontaires. Pensez-vous que cela ait limité l’action contre les feux (rapidité d’action, matériel…) ?

C’est une constante qui rapproche encore l’Australie de la France : on retrouve un engagement volontaire très important. Mais leur professionnalisme ne peut pas être remis en question. La grosse différence, c’est sur la question du temps : ils sont parfois au feu depuis trois mois, c’est une sollicitation énorme. Pour l’instant, la question statutaire n’a pas été évoquée avec nos camarades.

Loompa : Pouvez-vous nous raconter ce que vous avez vu sur place ?

Factuellement, ce sont des événements d’une dimension qu’aucun d’entre nous n’avait jamais connue. Entre la représentation qu’on se fait d’une situation, par rapport à ce qu’en disent les médias, et le constat de ce qu’est vraiment un feu d’un million d’hectares, c’est vertigineux. Je pense avoir une certaine expérience du feu, et ce que j’ai vu là-bas dépasse largement ce que je pouvais imaginer.

Ce qui m’a marqué, c’est qu’il y a un très bon état d’organisation du gouvernement fédéral et de chaque Etat, et ce malgré les conditions climatiques terribles, une vulnérabilité extrême des combustibles, des températures extrêmes atteignant parfois plus de 48 °C, et une sécheresse de la masse d’air impressionnante. Malgré toutes ces conditions techniques opérationnelles qui sont les plus sévères qu’on puisse imaginer, à aucun moment nous n’avons vu les structures de gestion dépassées. On a pu dire à nos collègues australiens qu’on leur tirait un immense coup de chapeau.

Victor : Trouvez-vous des similarités d’expansions et de propagation entre les feux français et les feux australiens ?

La végétation, souvent faite d’eucalyptus, de pins, de pins maritimes et de broussailles, ressemble beaucoup au paysage méditerranéen. La différence, c’est l’échelle : tout est puissance mille. Un exemple : en termes de vitesse de déplacement, c’est compliqué pour nous d’intervenir sur le bassin méditerranéen quand le feu dépasse les 1 500 mètres ou 2 000 mètres de progression par heure. Nos collègues australiens nous ont rapporté que dans le Victoria, certains méga incendies avaient une progression de 12 km/h. C’est inouï, et extrêmement difficile de construire une réponse opérationnelle efficace.

Mif : Quels moyens aéronautiques sont utilisés pour lutter contre les incendies ?

Il y a une grande qualité des infrastructures aéronautiques en Australie, notamment du fait des distances immenses du pays. J’ai les chiffres sous les yeux, actuellement l’état du parc des appareils de lutte contre les incendies est de 145 aéronefs (avions et hélicoptères). A cela s’ajoutent de nombreuses locations, faites notamment auprès du Canada et des Etats-Unis, qui ont permis de renforcer la flotte avec des centaines d’appareils, notamment des Boeing 737 et des Avro 730.

En ce moment, quelque cinq cents de ces aéronefs sont mobilisés en Australie, pour une dizaine de missions différentes : bombardement d’eau, transport de passagers, feu tactique, etc.

Lire aussi Incendies en Australie : quelles conséquences pour la biodiversité ?
Narta : Quelles solutions sont mises en place là-bas et lesquelles vous ont semblé intéressantes pour l’expérience française ?

Il y a une prise en compte de la diffusion de l’information très impressionnante, avec une grande transparence de la part des autorités et des cellules de coordination. Je pense que c’est grâce à ce travail, qui passe notamment par les téléphones portables, qu’on a pu éviter un grand nombre de victimes. C’est un progrès majeur par rapport à 2009, où plus de 230 personnes avaient été tuées dans l’Etat de Victoria. En termes de gestion de crise, on a vu des centres opérationnels incroyables. Il y a une réponse de la puissance publique qui est remarquable.

Pneu28 : Quelles mesures techniques peuvent-elles être mises en place sur le terrain pour, à terme, réduire la propagation des feux de forêts ?

Nous avons constaté que nous avons des pratiques largement similaires avec nos collègues australiens. Par exemple, nous travaillons tous avec la technique du feu contrôlé en hiver pour faire diminuer la biomasse, c’est ancestral dans nos deux pays. Ce sont des techniques qui intéressent aussi de plus en plus les Californiens, qui appellent cela le fuel management.

Par ailleurs, nous faisons aussi beaucoup appel au feu contre le feu, c’est-à-dire le « feu tactique » ou les « brûlages dirigés ». Il faut allumer un feu à l’avant d’un front, pour supprimer le combustible par le feu. Le feu ainsi créé se développe en direction de l’incendie et laisse derrière lui une zone brûlée sous contrôle des pompiers. Quand l’incendie rencontre le feu tactique, il s’éteint ou se réduit, faute de combustible.

Lire aussi Incendies en Australie : « Il est tout à fait possible que certaines espèces soient perdues à jamais »
U. : Est-ce que quelques jours de pluie suffiront à éteindre les principaux feux ?

La pluie va donner un peu de répit. Cela va se compter en heures ou en jours, selon les zones concernées. Nous, quand on est au feu et qu’il y a un orage, on est contents parce que même s’il est de courte durée, cela nous permet de souffler un peu. Mais il ne faut pas se faire d’illusions, les pluies vont avoir un effet très relatif, d’autant que l’été dure encore au moins deux bons mois. Il y a aussi des aspects négatifs car des pluies violentes entraînent ruissellement et érosion des sols calcinés.

Makrout : Quel souvenir marquant gardez-vous de votre séjour ?

Ce n’est pas une scène avec de la fumée et du feu. C’est une salle opérationnelle avec une centaine de personnes de tous les services qui écoutent religieusement le briefing de leur chef, qui explique l’ensemble de la situation dans l’Etat du Victoria. Il n’y a pas un portable qui sonne, pas un bruit, pas une télévision allumée. C’est un engagement personnel d’une qualité irréprochable en termes de gestion de situation de crise.

Et puis je retiens aussi l’accueil que nous avons reçu. Les gens qui nous arrêtent dans la rue, et nous remercient d’être venus de si loin. Les Australiens ont besoin de se sentir soutenus internationalement, et la façon dont on a été accueillis a été incroyable, malgré la fatigue et le stress. Ce qu’on leur a dit, c’est qu’il y a des milliers de jeunes Australiens qui sont venus lors des conflits mondiaux mourir pour qu’on soit libres, et qu’on n’a pas l’intention de les abandonner maintenant. On va leur tendre la main, il faut qu’on trouve des situations tous ensemble pour faire face à ce qui frappe la planète entière.

 

 

Sommes-nous en train de vivre un changement climatique abrupt?

Article de Joëlle Gergis (climatologue et écrivaine primée basée à l'Université nationale australienne) :


"Les derniers faits scientifiques sont alarmants, même pour les climatologues
En juin, j'ai prononcé un discours liminaire sur la vulnérabilité de l'Australie face au changement climatique et nos défis politiques lors de la réunion annuelle de la Société australienne de météorologie et d'océanographie, la principale conférence destinée aux professionnels de la science du climat. Je l'ai vu comme une opportunité de résumer la réalité politique et scientifique post-électorale à laquelle nous sommes maintenant confrontés.


En tant que l’une des douzaines d’auteurs australiens du sixième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) actuellement en cours, j’ai une profonde appréciation de la rapidité et de la gravité des changements climatiques en cours sur la planète. L'année dernière, j'ai également été nommée l'une des conseillères scientifiques du Climate Council, principal organisme indépendant australien fournissant des avis d'experts à la population sur la science et la politique du climat. En bref, je suis dans la position d’être l’un des rares Australiens à voir la réalité terrifiante de la crise climatique.
En préparant cet entretien, j'ai vécu quelque chose qui me déchirait. C'était la prise de conscience qu'il n'y avait maintenant nulle part où se cacher de la terrible vérité.
La dernière fois que cela m'est arrivé, je rendais visite à mon père à l'hôpital après une opération d'urgence pour une hémorragie cérébrale massive. Alors qu'il était inconscient en soins intensifs, j'ai examiné son scanner avec l'un des chirurgiens présents, qui m'a doucement expliqué que la tache sombre recouvrant près du quart de l'image de son cerveau était une flaque de sang. Bien qu'ils aient fait de leur mieux pour drainer la zone et endiguer le saignement, la nature catastrophique des dégâts était indéniable. La brutalité de la preuve était évidente - tout son poids me laissait tomber dans l'estomac.


Les résultats obtenus par la communauté scientifique spécialisée dans les sciences du climat sont également alarmants, même pour les experts.


Une mesure couramment utilisée pour étudier les effets du réchauffement planétaire est connue sous le nom de «sensibilité climatique à l'équilibre» (“equilibrium climate sensitivity”), définie comme le degré de réchauffement global de la surface qui se produira éventuellement en réponse à un doublement des concentrations de CO2 dans l'atmosphère par rapport à l'époque préindustrielle. C'est ce que l'on appelle parfois le Saint Graal de la science du climat, car elle permet de quantifier les risques spécifiques encourus par la société humaine alors que la planète continue de se réchauffer.


Nous savons que les concentrations de CO2 sont passées des niveaux préindustriels de 280 parties par million (ppm) à environ 410 ppm aujourd'hui, le plus haut niveau enregistré depuis au moins trois millions d'années. Sans efforts d'atténuation importants, nous devrions atteindre 560 ppm d'ici 2060 environ.


Lorsque le cinquième rapport d'évaluation du GIEC a été publié en 2013, il estimait qu'un tel doublement du CO2 provoquerait probablement un réchauffement de l'ordre de 1,5 à 4,5 ° C lorsque la Terre atteindra un nouvel équilibre. Cependant, les estimations préliminaires calculées à partir des derniers modèles de climat mondial (utilisés dans l'évaluation actuelle du GIEC, prévue pour 2021) sont bien plus élevées que celles de la génération précédente de modèles. Selon les premiers rapports, un doublement du CO2 pourrait en fait produire entre 2,8 et 5,8 ° C de réchauffement. Étonnamment, au moins huit des derniers modèles produits par des centres de recherche de premier plan aux États-Unis, au Royaume-Uni, au Canada et en France montrent une sensibilité au climat de 5 ° C ou plus chaude.
Lorsque ces résultats ont été diffusés pour la première fois lors d’un atelier de modélisation du climat en mars dernier, une série de courriels paniqués de mes collègues du GIEC ont inondé ma boîte de réception. Et si les modèles ont raison? La Terre a-t-elle déjà traversé une sorte de point de basculement? Sommes-nous en train de vivre un changement climatique abrupt?


Les exécutions de modèles ne sont pas encore toutes disponibles, mais il est difficile de ne pas s'inquiéter lorsque bon nombre des modèles les plus avancés au monde reproduisent indépendamment les mêmes résultats troublants.
Lors de l'adoption de l'accord de Paris des Nations unies en décembre 2015, celui-ci avait défini un objectif spécifique: maintenir le réchauffement climatique bien en dessous de 2 ° C et aussi proche que possible de 1,5 ° C au-dessus des niveaux préindustriels (définis comme les conditions climatiques de la Période 1850-1900). Bien que d'intention admirable, l'accord n'imposait pas de limites juridiquement contraignantes aux pays signataires et ne prévoyait aucun mécanisme d'exécution. Au lieu de cela, chaque pays s'est engagé à divulguer publiquement des contributions déterminées au niveau national afin de réduire les émissions. En substance, il appartient à chaque pays d'agir dans l'intérêt public.
Même si l'objectif le plus ambitieux de 1,5 ° C est atteint, 70 à 90% des coraux constructeurs de récifs seront encore détruits aujourd'hui, selon le «Rapport spécial sur le réchauffement de la planète de 1,5 ° C» du GIEC, publié en octobre dernier. . Avec 2 ° C de réchauffement, 99% des récifs coralliens tropicaux disparaissent. Un composant entier de la biosphère terrestre - notre système de support de la vie planétaire - serait éliminé. Les répercussions sur les 25% de la vie marine qui dépendent des récifs coralliens seraient profondes et incommensurables.
Alors, comment l'accord de Paris se déroule-t-il réellement?
En 2017, nous avons atteint 1 ° C de réchauffement par rapport aux conditions préindustrielles mondiales. Selon le «Rapport sur les écarts d'émissions» du Programme des Nations Unies pour l'environnement, publié en novembre 2018, les NDC actuels sans condition verront la température moyenne mondiale augmenter de 2,9 à 3,4 ° C par rapport aux niveaux préindustriels d'ici la fin du siècle.
Pour limiter le réchauffement à 2 ° C par rapport aux niveaux préindustriels, le monde doit tripler ses engagements actuels en matière de réduction des émissions. Si cela ne suffisait pas, pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5 ° C, l’ambition mondiale doit être multipliée par cinq.


Dans le même temps, le gouvernement fédéral australien s'est fixé pour objectif de réduire les émissions de 26 à 28% par rapport aux niveaux de 2005 d'ici 2030, ce qui, selon les experts, correspond davantage au réchauffement planétaire de 3 à 4 ° C. En dépit de l'affirmation du Premier ministre Scott Morrison selon laquelle nous respecterions nos engagements de l'Accord de Paris «en galère», le rapport du PNUE identifie clairement l'Australie comme l'un des pays du G20 qui n'atteindra pas ses objectifs de CDN déjà insuffisants d'ici 2030.


Même avec le réchauffement de 1 ° C que nous avons déjà connu, 50% de la Grande Barrière de Corail est morte. Nous assistons à l'effondrement catastrophique de l'écosystème du plus grand organisme vivant de la planète. Tandis que je partage cette information horrible avec des auditoires à travers le pays, je m'arrête souvent pour permettre aux gens d'essayer de vraiment prendre cette information.
De plus en plus après mes discours, je me surprends à pleurer de façon inattendue dans ma chambre d'hôtel ou sur mon vol de retour. De temps en temps, la réalité de ce que dit la science parvient à dégeler la partie de moi émotionnellement gelée que je dois maintenir pour faire mon travail. Dans ces moments, ce qui fait surface est un chagrin pur. C'est la seule sensation qui me rapproche de la douleur que je ressentais, à savoir la gravité de la lésion cérébrale de mon père. Accepter de reconnaître l'arrivée du point de non-retour est un acte de bravoure.


⚠️⚠️⚠️Mais ces jours-ci mon chagrin est rapidement remplacé par la rage. Rage volcaniquement explosive. Parce que, dans le même rapport du GIEC qui décrit en détail l’apocalypse imminente, la communauté scientifique du climat a clairement indiqué qu’il était géophysiquement possible de limiter le réchauffement à 1,5 ° C.⚠️⚠️⚠️


Les seules émissions passées ne devraient pas faire monter la température moyenne mondiale à 1,5 ° C au-dessus des niveaux préindustriels. Le rapport du GIEC indique que tout réchauffement au-delà de 1 ° C déjà enregistré serait probablement inférieur à 0,5 ° C au cours des 20 à 30 prochaines années, si toutes les émissions anthropiques de gaz à effet de serre étaient immédiatement réduites à zéro. Autrement dit, si nous agissons de manière urgente, il est techniquement possible de renverser la situation. La seule chose qui manque, c'est une politique globale forte.
Bien que le fondement même de la civilisation humaine soit en jeu, le monde est en train de dépasser sérieusement nos objectifs de l'ONU. Pire encore, les émissions mondiales de carbone augmentent toujours. En réponse, les scientifiques accordent la priorité à la recherche sur la façon dont la planète a réagi à d’autres périodes chaudes de l’histoire de la Terre.


Le résumé le plus complet des conditions vécues au cours des dernières périodes chaudes de l'histoire récente de la Terre a été publié en juin 2018 dans l'une de nos principales revues, Nature Geoscience , par 59 experts de 17 pays. ⚠️Le rapport a conclu que le réchauffement de 1,5 à 2 ° C dans le passé était suffisant pour entraîner des changements importants dans les zones climatiques et la «réorganisation spatiale» des écosystèmes terrestres et aquatiques.⚠️


Ces changements ont provoqué une fonte importante à long terme de la glace au Groenland et en Antarctique, entraînant une élévation du niveau de la mer de 6 à 13 mètres sur plusieurs milliers d'années.


L'examen du passé climatique de la Terre nous indique que même entre 1,5 et 2 ° C de réchauffement, le monde se reconfigure de manière que les gens n'apprécient pas encore. Tous les paris sont entre 3 et 4 ° C, où nous sommes actuellement. Certaines parties de l'Australie deviendront inhabitables, alors que d'autres régions de notre pays seront de plus en plus ravagées par des phénomènes météorologiques extrêmes.


Cette année, la conférence annuelle de la Société australienne de météorologie et d'océanographie s'est tenue à Darwin, où le tristement célèbre cyclone Tracy a frappé le jour de Noël de 1974, démolissant pratiquement toute la ville. Plus de 70% des bâtiments de la ville, y compris 80% de ses maisons, ont été détruits. Soixante et onze personnes ont été tuées et la plupart des 48 000 habitants sont devenus des sans-abri. Les conditions étaient si pénibles qu'environ 36 000 personnes ont été évacuées, souvent par avion militaire. Ce fut un désastre aux proportions monumentales.


En rassemblant ces informations pour ma présentation, il est devenu clair pour moi que Cyclone Tracy est un avertissement. Sans action majeure, nous verrons des cyclones tropicaux dériver dans des zones situées au sud des zones cycloniques actuelles, notamment dans le sud-est du Queensland et le nord de la Nouvelle-Galles du Sud, où les infrastructures ne sont pas prêtes à faire face aux conditions cycloniques.


Ces zones abritent actuellement plus de 3,6 millions de personnes; nous ne sommes simplement pas préparés à ce qui nous attend.


Les écoliers australiens descendent maintenant dans la rue pour une raison très rationnelle: l’immensité de l’enjeu est véritablement renversante. Garder le silence sur cette urgence planétaire ne me semble plus une option. Compte tenu du fait que la politique est déconnectée de la réalité scientifique dans ce pays, une conversation nationale urgente et pragmatique est maintenant essentielle. Autrement, vivre sur une planète déstabilisée est la terrible vérité à laquelle nous allons tous faire face.
En tant que climatologue à ce stade difficile de notre histoire, ce que je peux offrir de plus utile est le même professionnalisme que le médecin a fait preuve tard dans la nuit dans la salle de soins intensifs de Papa. Un regard lucide et compatissant sur les faits.


Nous avons encore le temps d’essayer d’éviter l’ampleur de la catastrophe, mais nous devons réagir comme nous le ferions en cas d’urgence. La question est de savoir si nous pouvons rassembler le meilleur de notre humanité dans les temps impartis."

Mois de janvier exceptionnel en Australie

Le mois de janvier 2019 restera dans les mémoires en Australie. Avec une température moyenne nationale de 30,8 °C, soit 2,9 °C au-dessus des normales 1961-1990, il s'agit du mois le plus chaud, tous mois confondus. Il se positionne largement devant janvier 2013 (29,8 °C) et février 1983 (29,4 °C). C'est la première fois que la température mensuelle moyenne à l'échelle du pays dépasse les 30 °C.

Le 22 janvier a été le jour le plus chaud de l'histoire du pays avec une température moyenne de 32,63 °C battant les 32,29 °C du 8 janvier 2013.

De nombreuses stations ont battu des records absolus durant le mois :

Station

Température maximale quotidienne (°C)

Date

Précédent record (°C, date)

Alice Springs (Territoire du Nord)

45,6

03/01

45,2 le 03/01/1960

Tarcoola (Australie-Méridionale)

49,1

24/01

49,0 le 15/01/2019
48,9 le 01/01/2014

Ceduna (Australie-Méridionale)

48,6

24/01

48,4 le 23/01/2019
47,9 le 02/01/1990

Port Augusta (Australie-Méridionale)

49,5

9e température la plus élevée jamais mesurée en Australie

24/01

48,9 le 15/01/2019
48,1 le 07/02/2009

Adelaide (West Terrace) ( Australie méridionale)

46,6

24/01

46,1 le 12/01/1939

Wilcannia (Nouvelles-Galles-du-Sud)

48,5

25/01

48,2  le 03/01/1973


 

 

Le record national de chaleur nocturne a même été battu à deux reprises durant le mois de janvier. En Nouvelle-Galles-du-Sud, après avoir mesuré 35,8 °C à Noona le 18 janvier (battant les 35,5 °C de Wittenoom du 21 janvier 2003), on a relevé 36,6 °C  à Wanaaring dans la nuit du 25 au 26 janvier ! Il s'agit d'un record absolu pour l'Australie, mais aussi pour tout l'hémisphère sud, et d'un record mondial pour un mois de janvier.

Climat : l'Australie crée un fonds pour anticiper les sécheresses
 
 
 
 

 

Les récoltes de l'hiver 2018 seront parmi les pires de l'histoire. Le fonds doté de plusieurs milliards de dollars financera notamment des projets en matière de gestion de l'eau.

L'Australie est confronté à l'un des pires épisodes caniculaires de son histoire. Alors que le mois de septembre a été le plus sec jamais enregistré, selon le Bureau météorologique du pays, le gouvernement a annoncé ce vendredi la création d'un fonds de plusieurs milliards de dollars australiens pour préparer le pays à l'impact des futures sécheresses.

 
 

 

 
 
 

Le fonds sera doté de 3,9 milliards de dollars australiens (soit 2,4 milliards d'euros). A partir de 2020, il financera à hauteur de 100 millions par an des programmes de secours aux agriculteurs touchés par les épisodes de sécheresse. Il servira également de fonds d'investissement vers l'adoption de nouvelles infrastructures pour une meilleure gestion de l'eau. « Nous anticiperons mieux les sécheresses des 10 prochaines années et au-delà », veut croire le Premier ministre, Scott Morrison.

Des agriculteurs menacés par la faillite

Cette annonce intervient après un hiver désastreux pour les agriculteurs du pays. Le Bureau gouvernemental australien pour les études agricoles et les ressources (Abares) a indiqué que dans certaines régions de culture et d'élevage, les précipitations étaient de 40 % inférieures à la moyenne des 20 dernières années.

 

Certains éleveurs s'endettent pour acheter du fourrage, quand d'autres n'hésitent pas à abattre leur bétail pour éviter la faillite. Au manque d'eau succèdent aussi des épisodes de gels désastreux dans certaines zones.

 

Au total, les récoltes hivernales devraient même être les plus faibles depuis 10 ans, selon des prévisions de l'assureur néerlandais Rabobank. L'agence météorologique australienne juge qu'il y a 80 % de probabilité que les trois prochains mois soient plus secs et plus chauds que la moyenne. Face à l'urgence, le gouvernement a, en août, débloqué 1,8 milliard de dollars pour venir en aide aux agriculteurs.

Les Echos Le 26/10

L'Australie baisse son taux directeur au plus bas historique : pourquoi elle pourrait bien être le premier pays anglosaxon à connaitre un scénario grec

La Banque centrale d'Australie a réduit mardi son taux d'intérêt directeur de 25 points de base à 2,75%, un niveau jamais atteint jusqu'à présent, afin d'encourager la croissance dans les secteurs économiques autres que les mines.

 

La Banque Centrale d'Australie, la RBA,  vient de baisser son taux directeur à 2,75% contre 3% auparavant. La baisse était attendue par les économistes , mais elle est venue plus tôt que prévue. On l'attendait pour juin. C'est un signe que la dernière baisse intervenue en décembre n'a pas produit les résultats escomptés. Nous sommes en dessous des taux qui avaient prévalu en 2009 , lors de la crise. Le niveau bas de cette époque , 3% , avait été qualifié par les autorités de taux de crise, "emergency low". On est en-dessous du taux de crise.


Les raisons invoquées par la RBA sont comme à l'accoutumée : la croissance plus faible que prévue, le chômage qui monte, le secteur manufacturier qui plonge, des exportations qui s’essoufflent. Il s'agit de stimuler l'économie, l'emploi, le logement mais il est aussi ajouté explicitement l'objectif de  faire chuter la devise. Le dollar australien est trop cher, il vaut 1,01 dollar US, il valait 60 cents du même dollar en 2009. C'est le résultat de la spéculation dite risk-on.


Pourquoi s'intéresser à l'Australie ? C'est loin, a priori nous ne sommes pas concernés. Et puis des baisses de taux directeurs, ce n'est pas rare. Sur les 168 décisions prises par les 90 banques centrales cette année plus de 20% ont été des décisions de baisse. Un chiffre qui va croissant. Rien que la semaine dernière, il y a eu quatre baisses dans le monde, dont celle de la BCE. Justement il y a beaucoup de baisses de taux et une de plus comme celle de la RBA a valeur phare, cela veut dire quelque chose: le monde rentre dans une phase délicate, une nouvelle phase de ralentissement. Une fois de plus , malgré le printemps, les jeunes pousses de Bernanke, les "green shoots" ne sont pas au rendez vous, les racines ont une fois de plus pourri.


La RBA a pris sa décision de façon anticipée parce que la situation se dégrade plus vite et plus profondément que prévu. Les espoirs de reprise au second semestre sont une fois de plus reportés.


La croissance globale recule, faiblit. Les organismes internationaux donnaient une prévision de 5,5% pour les pays émergents en 2013. Compte tenu du début d'année et des indicateurs PMI disponibles, on sera plus près des 4%. Pour les pays développés, ils donnaient 1,4% , mais il va falloir réviser plus près des 1%. Au total compte tenu du poids respectif des émergents et des développés, on s'achemine vers une croissance globale qui ne sera pas supérieure à 2%. Et pour un pays exposé comme l'Australie, cela change tout.


L'Australie est un canari dans la mine en raison de son exposition aux matières premières. Elle subit à plein la baisse des quantités vendues et la baisse des prix alors que les investissements marquent un pic. Les derniers indicateurs chinois font peur, on est à la limite de la récession avec un PMI à 50,6 seulement. Et puis les  firmes chinoises ont encore des stocks énormes de matières premières.


L'Australie a valeur importante dans le tableau de l'économie mondiale à plus d'un titre. Elle a bénéficié du grand cycle des matières premières, du grand bond chinois; elle a bénéficié d'afflux de capitaux considérables attirés par le risk-on, sa monnaie est un refuge anti-inflation, adossée aux commodities. Voila pour les bons cotés. Car à l'inverse l'économie australienne est bullaire, les salaires ont dérapé, les prix des logements sont sortis de l'épure, le secteur manufacturier hors mines n'est plus compétitif, l'épargne intérieure est très faible, le pays dépend des entrées de capitaux étrangers. Les particuliers sont très endettés, la dette extérieure nationale a été multipliée par 5 entre 2008 et 2012.

 

 

L'Australie est l'exemple de l'économie mal ajustée, vulnérable à la déflation et à un retour du risk-off. Elle est fragilisée par les excès antérieurs de la spéculation mondiale. Le secteur financier est hypertrophié très exposé à l'international pour son refinancement. 


On dit que Soros a vendu pour 1 milliard de dollars australiens à découvert. Vrai ou faux  cela fait réfléchir  Le pays est l'exemple type de ce qui s'est passé et a dysfonctionné ces dernières années. Il suffirait que la fameuse transitivité se mette en branle et la situation pourrait devenir rapidement très sérieuse.  La situation fondamentale est vulnérable et déséquilibrée. Contrairement aux apparences, le chômage est très élevé. Le chiffre officiel est de 5,6% mais le réel est de 11% , le sous emploi est de 18% , 40% de la main d'œuvre est à temps partiel ou sous employée.

De « safe haven » , le pays pourrait rapidement se transformer en enfer:

 

 

 

Bruno Bertez est un des anciens propriétaires de l'Agefi France (l'Agence économique et financière), repris en 1987 par le groupe Expansion sous la houlette de Jean-Louis Servan-Schreiber.

Il est un participant actif du Blog a Lupus, pour lequel il rédige de nombreux articles en économie et finance.

 

http://www.atlantico.fr/decryptage/australie-baisse-taux-directeur-au-plus-bas-historique-pourquoi-elle-pourrait-bien-etre-premier-pays-anglosaxon-connaitre-scenar-720811.html?page=0,1

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