Populisme et oligarchie...
Le paradoxe du capitalisme est qu’il s’appuie sur la croissance et le développement tout en dissimulant une logique beaucoup plus sombre et vorace : celle du cannibalisme. À travers cette métaphore, la philosophe américaine Nancy Frase décrit un système qui exploite, consomme et détruit, tout en prétendant au progrès et à la durabilité. Comme le souligne Nancy Fraser, le capitalisme fonctionne en exploitant systématiquement des « externalités » , des sphères non marchandes qu’il transforme en ressources exploitables. La nature, réduite à une simple réserve de matières premières, devient la première proie de ce processus. Le capitalisme dévore la forêt, assèche les rivières, épuise les sols, tout en prétendant qu’il s’agit là d’un progrès nécessaire.
Cette exploitation n’est pas un échange équilibré, mais une destruction asymétrique, car le capitalisme consomme plus qu’il ne peut restaurer. En ce sens, il ne se contente pas de prélever : il détruit, engloutit, et régurgite sous forme de déchets. Cette dévastation environnementale est d’autant plus insidieuse qu’elle est accompagnée de récits de légitimation comme la croissance verte, le développement durable ou la compensation carbone qui ne servent qu’à masquer la voracité intrinsèque du système.
Non content de dévorer la nature, le capitalisme cannibale s’attaque également aux relations sociales. Selon Nancy Fraser, le capitalisme repose sur une forme d’exploitation à deux niveaux : non seulement il exploite la force de travail salariée, mais il dépend aussi d’un travail « invisible » non rémunéré. Les sphères de la reproduction sociale – soins, éducation, solidarités communautaires – deviennent des réservoirs silencieux de valeur que le capitalisme puise sans reconnaissance ni réciprocité.
Par exemple, le travail domestique, invisibilisé, est essentiel à la survie du système économique, mais il reste exclu des circuits marchands. De la même manière, les communautés autochtones, pillées pour leurs ressources ou leur savoir-faire, subissent une extraction culturelle et symbolique qui les dépossède de leur propre patrimoine. Ce cannibalisme social fonctionne à travers un double discours : d’une part, il valorise l’individu comme étant libre et autonome, mais d’autre part, il dépend d’une infrastructure collective qu’il refuse de reconnaître. L’épuisement des solidarités, l’éclatement des structures familiales et communautaires, et la marchandisation des relations humaines témoignent de cette voracité systémique.
Le paradoxe est que le capitalisme, en s’attaquant aux fondements mêmes qui assurent sa durabilité entre dans une logique d’autodestruction. Cette autophagie se manifeste par l’épuisement des ressources naturelles, la précarisation extrême de la main-d’œuvre et la dégradation des infrastructures sociales indispensables à sa propre reproduction.
En détruisant la nature, le capitalisme compromet les écosystèmes qui soutiennent ses chaînes d’approvisionnement. En intensifiant l’exploitation des travailleurs, il fragilise les bases économiques sur lesquelles repose la demande. Et en déstabilisant les structures sociales, il menace les solidarités qui permettent à ses rouages de fonctionner. Ainsi, le système consomme non seulement ses extérieurs, mais également ses propres fondations.
Cette autodestruction est accélérée par une compétition acharnée entre les acteurs économiques. Obsédées par la maximisation rapide des profits, les entreprises mettent en place des stratégies qui compromettent leur viabilité à long terme.
L’externalisation excessive, la compression des dépenses sociales et la poursuite aveugle d’une croissance illimitée dans un monde aux ressources finies illustrent cette logique autodestructrice. En définitive, le capitalisme apparaît comme un système vorace, à la fois orienté vers l’exploitation extérieure et replié sur lui-même, détruisant non seulement ce qui l’entoure, mais également ses propres fondations.
Référence : Nancy Fraser, Le capitalisme est un cannibalisme, Agone, 2025.
Benoit Hellbrunn
https://www.xerficanal.com/strategie-management/emission/Benoit-Heilbrunn-Le-capitalisme-est-un-cannibalisme-explication_
Publié le jeudi 23 janvier 2025
Zuck. cautionne la m…
Ces derniers mois, Mark Zuckerberg a changé d’apparence. Exit les tee-shirts monochromes et la coupe de cheveux de ses débuts, en hommage à l’empereur romain Auguste ; désormais, le patron de Meta (Facebook, Instagram…) exhibe longues boucles, pectoraux et chaîne en or. Mais sous cet abord plus détendu se cache un raidissement.
Après avoir passé la dernière décennie à s’excuser devant les régulateurs du monde entier — pour des scandales liés aux données personnelles ou le désordre causé par ses algorithmes —, « Zuck » a changé de braquet. Longtemps proche du Parti démocrate, la quatrième fortune mondiale a choisi de ne pas choisir lors de la dernière élection présidentielle. « Je ne soutiens ni l’un ni l’autre des candidats », expliquait-il.
Pourtant, à quelques jours de l’investiture de Donald Trump, il met dorénavant beaucoup d’énergie à rester soluble dans le national-populisme du locataire de la Maison-Blanche. Élimination de son programme de fact-checking signé avec les médias en 2016, assouplissement à la Elon Musk de sa politique de modération, nomination d’un entrepreneur trumpiste au conseil d’administration de l’entreprise…
En l’espace de quelques heures, Zuckerberg a annoncé une série de mesures propres à flatter la nouvelle administration.
Désormais, selon un mémo interne obtenu par le média américain The Intercept, il sera ainsi possible d’écrire sur Facebook et Instagram que « les gays sont des monstres » ou que « les immigrés sont des saloperies de merde ».
La preuve que ces nouvelles règles, édictées au nom du respect du premier amendement de la Constitution américaine, ne font qu’instrumentaliser la liberté d’expression au profit de l’extrême droite.
On peut d’ores et déjà souhaiter bien du courage aux autorités européennes pour faire respecter les réglementations adoptées ces dernières années pour contrer la désinformation et les discours de haine, au premier rang desquelles le récent Digital Services Act (DSA), car Zuckerberg vient de leur déclarer la guerre.
Au-delà du froid calcul économique, ce virage trumpiste peut aussi être analysé sous le prisme de la pure soumission : pendant la campagne électorale, le président élu avait accusé — sans preuves — le patron de Meta d’avoir conspiré contre lui en 2020, allant jusqu’à menacer de le jeter en prison s’il recommençait. Zuckerberg serait donc moins guidé par une adhésion idéologique que par une allégeance digne d’une oligarchie dirigée par la force. Ce qui est peut-être le plus inquiétant
Olivier Tesquet – Édito Télérama N° 15/01/2025
https://librejugement.org/2025/01/16/zuck-cautionne-la-m/
Il était loin, l'« optimisme » professé par le président sortant ces quatre dernières années, pendant cette courte allocution de moins de vingt minutes, prononcée à une heure de grande écoute derrière le Bureau ovale. « Je veux mettre en garde le pays contre certaines choses qui m’inquiètent grandement », a dit le démocrate de 82 ans, cinq jours avant de laisser le pouvoir à son plus grand rival, le président élu républicain.
« Il s’agit de la dangereuse concentration du pouvoir aux mains de très peu de personnes ultra-riches » et des « conséquences dangereuses si leur pouvoir est laissé sans limites », a-t-il dit. « Une oligarchie prend forme en Amérique » et elle « menace concrètement notre démocratie toute entière, nos droits et libertés élémentaires », a poursuivi Joe Biden, dans une allusion évidente à Donald Trump, milliardaire, ainsi qu’aux richissimes patrons de la tech, au premier rang desquels Elon Musk.
Il a évoqué l’apparition d’un « complexe technologico-industriel » au pouvoir immense, faisant écho au discours d’adieu de l’ancien président Dwight Eisenhower, lequel avait mis en garde en 1961 contre la montée en puissance du « complexe militaro-industriel ». Le patron de Tesla, SpaceX et X, allié indéfectible et tonitruant du président élu, mais aussi Jeff Bezos (Amazon, Blue Origin) et Mark Zuckerberg (Meta) assisteront à l’investiture de Donald Trump lundi, d’après la chaîne de télévision américaine NBC.
Ces « trois personnes possèdent aujourd’hui plus de richesses que la moitié la plus pauvre de la société américaine », s'était insurgé mardi Bernie Sanders, figure de la gauche aux Etats-Unis.
« Les Américains sont ensevelis sous une avalanche de désinformation qui permet l’abus de pouvoir », a encore déploré Joe Biden, en appelant à faire « rendre des comptes » aux réseaux sociaux et à mettre en place des « garde-fous » sur l’intelligence artificielle.
Mises en garde. La « concentration de richesse et de pouvoir (...) porte atteinte au sens de l’unité et du bien commun », a encore dit le 46ème président des Etats-Unis, qui était entouré de membres de sa famille. Il s’est alarmé aussi des « forces puissantes » qui voudraient « éliminer les mesures que nous avons prises pour affronter la crise climatique. » Ces mises en garde très fortes ont relégué au second plan, dans son discours, la volonté de défendre son bilan, en particulier le lancement de gigantesques plans d’investissement et le rétablissement des grandes alliances internationales des Etats-Unis.
Lorsqu’il rendra à son rival républicain lundi les clés de la Maison Blanche, qu’il lui avait enlevées de haute lutte voici quatre ans, le démocrate de 82 ans vivra une immense humiliation. En 2019, Joe Biden avait assuré que Donald Trump « resterait dans l’histoire comme une aberration passagère ». Mais c’est sa présidence à lui qui fait pour le moment figure d’anomalie, ou d’ultime hoquet d’une époque révolue, dans un pays secoué par de violentes mutations politiques, culturelles et économiques.
Impopulaire. Joe Biden avait prêté serment deux semaines après l’assaut du Capitole par des partisans de Donald Trump, qui refusaient de reconnaître la défaite de leur champion à la présidentielle. Président impopulaire, il n’a jamais pu lever les inquiétudes sur son âge ni faire pièce à l’attrait de la rhétorique populiste de Donald Trump. Seulement 36% des Américains portent un regard positif sur sa présidence et 33% ont de lui une opinion favorable, selon un sondage publié mercredi par la chaîne CNN.
Si Joe Biden lègue à son successeur une croissance robuste et un chômage très faible, son mandat reste synonyme pour les ménages américains de très forte hausse du coût de la vie. Le président démocrate avait décidé au printemps 2023 de se représenter face à Donald Trump mais s’est retiré de la course en juillet, cédant la place à la vice-présidente Kamala Harris, nettement battue le 5 novembre. Concluant son discours, au soir de cinquante années de vie politique, Joe Biden a lancé à ses compatriotes: « A votre tour de monter la garde ».
Aurélia END
https://www.lopinion.fr/international/joe-biden-met-en-garde-contre-linfluence-grandissante-dune-oligarchie-aux-etats-unis?
« L’état de défaut des sociétés centralisées comme la nôtre est l’oligarchie. Un oligarque est quelqu’un qui transforme son pouvoir économique (argent) en pouvoir politique. Ce sont des gens très riches qui deviennent politiquement très puissants. Les oligarques accélèrent la transformation des démocraties en oligarchies, et c’est là que nous allons À MOINS de produire des contre-mouvements massifs »
Georges Monbiot
(cité dans les commentaires du blog de Tim Morgan)
Les États-Unis seront-ils contrôlés par une clique de milliardaires ? Le risque de glissement vers une oligarchie est réel....La récente victoire de Donald Trump aux élections américaines est telle qu’aucun des contre-pouvoirs habituels n’entravera son mandat. Dans ces conditions, et au regard de l’historique du futur président, n’y a-t-il pas un risque de voir glisser les États-Unis vers une oligarchie autoritaire ?
L'éléphant dans la pièce...
Personne ne va désigner l'inégalité extrême des richesses comme la cause immédiate de ce qui va se passer au cours de la prochaine décennie, mais cela ne veut pas dire que ce n'est pas la cause tectonique.
Ah, oui, l'éléphant dans la pièce, un problème qui est 1) grand et évident et 2) qui ne peut être résolu par les habituelles retouches politiques indolores, alors nous faisons comme s'il n'existait pas. Le déni et l'illusion sont les « solutions » préférées parce qu'elles fonctionnent très bien jusqu'à ce que l'éléphant commence à se déchaîner, ce qui nous fait dire que « personne n'a pu le voir venir ».
Oui, l'éléphant dans la pièce, ce sur quoi tout le monde devrait se concentrer au lieu de l'ignorer. Dans l'air du temps, la pièce est tellement remplie d'éléphants qu'il ne reste presque plus de place pour ceux qui ignorent l'écrasement éléphantesque.
Car l'éléphant dans la pièce est aussi l'abréviation de YICBIC (prononcé Yick-Bik) : oui, c'est du clickbait, mais c'est du clickbait important, alors cliquez ici et je vous éclairerai sur le très très gros problème que personne d'autre n'ose aborder, le problème qui va perturber tous nos jolis petits plans pour continuer à s'enrichir tous les jours, de toutes les façons.
Déplacez donc votre regard du troupeau d'éléphants dans la pièce vers l'autre éléphant, celui qui est vraiment ignoré : l'inégalité extrême des richesses. Cet éléphant reçoit de temps en temps une petite tape sur l'arrière-train, plus ou moins équivalente à la douleur du psoriasis ou à la probabilité qu'un événement Carrington fasse sauter tous les appareils numériques de la planète.
Et si l'inégalité des richesses dépasse aujourd'hui le pic de 1928-1929, juste avant cette décennie de troubles, la Grande Dépression ? Ce n'était qu'une simple coïncidence. La cause n'était pas l'extrême inégalité des richesses, mais une erreur de politique de la Fed, bla bla bla.
S'il est si facile d'ignorer l'inégalité extrême des richesses, c'est parce que nous ne ressentons pas l'inégalité des richesses en tant que telle, nous ressentons une baisse de notre niveau de vie à mesure que les richesses sont siphonnées vers les 10 % les plus riches. Nous avons le sentiment d'être à la traîne, que notre situation est de plus en plus précaire, et la source de ce déclin semble être l'inflation - une baisse du pouvoir d'achat de nos revenus alors que les prix montent en flèche - et la concurrence mondiale de la main-d'œuvre à bas coût.
Oui, ce sont des facteurs, mais le véritable moteur de l'extrême inégalité des richesses est difficile à cerner parce qu'il opère sa magie derrière les circonvolutions difficiles à comprendre de la finance : la financiarisation, qui s'est transformée au cours des 15 dernières années en une hyper-financiarisation suralimentée dans laquelle le capital s'est élevé pour dominer l'ensemble de l'économie et le zeitgeist culturel. Tout est désormais subordonné à l'accroissement de la domination du capital.
Nous comprenons tous l'inflation, la flambée des prix et l'augmentation de la valeur des actifs, mais il est difficile de comprendre les rouages financiers qui génèrent ces conséquences, et cela est rendu encore plus difficile par des fictions volontairement trompeuses conçues pour obscurcir, détourner ou expliquer les mécanismes réels de la financiarisation.
Par exemple, le fonds fiduciaire de la sécurité sociale, une façade fictive conçue pour masquer la réalité : la sécurité sociale et Medicare/Medicaid sont des programmes par répartition, financés par les recettes fiscales et l'argent emprunté (c'est-à-dire les dépenses fédérales déficitaires).
La réponse est évidente : les 10 % les plus riches, qui ont connu une expansion sans précédent de leur patrimoine privé à mesure que la financiarisation saignait les revenus et détournait les gains de l'économie vers les revenus et les actifs concentrés dans les 10 % les plus riches.
Oui, ces mêmes 10 % qui se trouvent au sommet de tous les secteurs de l'économie, de la finance aux médias. Si nous éliminons les différences culturelles et politiques au sein des 10 % les plus riches - tous les éléphants dans la pièce qu'ils signalent bruyamment au reste d'entre nous - nous trouvons une base d'unanimité / de consensus qui dépasse tous les clivages culturels et politiques : notre richesse doit continuer à augmenter parce que nous sommes si intelligents / précieux / dignes, et il n'y a aucune raison pour que nous sacrifiions notre richesse pour rééquilibrer l'extrême inégalité des richesses.
Les 10 % les plus riches sont unis par leur conviction que leur richesse, lancée comme une fusée, est gagnée et méritée, et la « solution » à l'inégalité extrême des richesses consiste à jeter quelques miettes aux 90 % qui ont été saignés à blanc / laissés pour compte : une poignée de « logements abordables » subventionnés, une réduction d'impôt dont 95 % des gains vont aux 10 % les plus riches, et ainsi de suite : des signaux de vertu bienveillants qui ne changent rien au système financier qui génère l'inégalité extrême des richesses.
La « solution » consiste donc à laisser tourner le moteur de l'inégalité extrême des richesses et à caresser le derrière de l'éléphant dans la pièce : vous pouvez vous extraire des sables mouvants de la précarité et de la baisse du niveau de vie en devenant un influenceur ou un day-trader d'options à expiration zéro jour - le ciel est la limite, bébé.
En d'autres termes : L'Amérique est une société sans classe, tout le monde peut devenir riche s'il travaille très dur et joue pour gagner au casino de la financiarisation. Cette illusion d'absence de classes sociales masque parfaitement la réalité : la quasi-totalité de la richesse générée par l'économie est revenue à ceux qui ont acheté des actifs avant que la bulle spéculative n'envoie les valorisations des actifs et les revenus liés à la finance en orbite basse.
L'employé qui gagnait 13 dollars de l'heure en 2010 pourrait gagner 17 ou 18 dollars de l'heure aujourd'hui, peut-être juste assez pour suivre l'inflation de 46 % depuis 2010, ou peut-être pas. Pendant ce temps, les actions ont été multipliées par dix et l'immobilier par 2,5. Alors, qui a pris du retard et qui a pris de l'avance, le salarié ou le propriétaire d'actifs ?
(Je tiens à jour une feuille de calcul de mes revenus ajustés en fonction de l'inflation officielle et du pouvoir d'achat - ce qu'une heure de salaire peut acheter dans le monde réel - depuis 1970 - et selon cette mesure, je n'ai jamais gagné plus en termes de pouvoir d'achat qu'en 1976, à l'âge de 23 ans. Le graphique ci-dessous montre comment les salaires ont atteint leur maximum dans les années 1970).
Le cliché sans cesse répété est que le système ne génère pas de gagnants et de perdants, alors que la réalité est que le système génère des gagnants et des perdants de par sa conception même. L'entrée gratuite au casino n'est pas la même chose que de profiter des jeux truqués.
Les lecteurs de longue date sont probablement fatigués de ces graphiques, parce qu'ils démontent tous les discours égocentriques et les distractions des 10 % les plus riches. L'étude de la RAND intitulée Trends in Income From 1975 to 2018 (Tendances des revenus de 1975 à 2018) a conclu que le capital a prélevé 50 000 milliards de dollars sur le travail entre 1975 et 2018.
En utilisant les données de la base de données FRED de la Réserve fédérale (série A4102E1A156NBEA), le correspondant Alain M. a calculé que la somme réelle pour la période allant de 1970 à 2022 (2022 étant les données disponibles les plus récentes) était un montant stupéfiant de 149 000 milliards de dollars : sa feuille de calcul est disponible ici au format PDF : Part des salariés dans le revenu intérieur brut 1970-2022.
Si la part des salariés dans le revenu intérieur brut était restée à 51 % au lieu de tomber à 43 %, les salariés auraient reçu 149 000 milliards de dollars supplémentaires au cours de ces 52 années. Cela représente environ 3 000 milliards de dollars par an, soit 22 000 dollars supplémentaires par an pour les 134 millions de travailleurs américains à temps plein ou 18 000 dollars supplémentaires par an pour l'ensemble de la main-d'œuvre du pays (temps plein, temps partiel, travailleurs indépendants, gig workers), soit 163 millions de personnes.
Il n'est pas étonnant que les salariés aient l'impression que leur niveau de vie baisse depuis des décennies : il baisse depuis des décennies, en dépit de tous les discours sur la formidable économie que nous avons. Oui, mais formidable pour qui ?
Les 50 % de ménages américains les plus pauvres n'ont pas bénéficié d'une hausse de 10 % ; leur part de la richesse financière du pays a en fait diminué. Nous avons votre grande économie ici, mon grand :
Les 0,01 % les plus fortunés ont vécu une expérience bien différente, leur richesse ayant grimpé bien au-delà de l'inflation. Ce sont ces personnes qui se retrouvent dans l'embarras du choix de l'enclave étrangère où elles vont prendre leur retraite ; oh, diable, achetez simplement une villa dans chacune d'entre elles :
C'est une société sans classe, du moins si l'on regarde d'en haut. Ceux qui regardent vers le haut ont une perspective différente :
Quelle bulle ? Nous ne voyons pas de bulle. Pas d'éléphants, pas de bulles, juste un ciel bleu devant nous :
J'ai gagné du terrain comme tous ceux qui ont acheté des actifs il y a longtemps, pour la même raison : l'appréciation des actifs a absorbé tous les gains. Ce n'est pas grâce à mon intelligence, ni à mon éducation (voyons, un diplôme de philosophie ?), ni à mon travail acharné (oh, s'il vous plaît - tout le travail vraiment acharné est mal payé), ni à rien d'autre que de la chance.
À mon avis, il devrait y avoir des impôts nuls sur tous les revenus jusqu'au salaire médian de 60 000 dollars par an - pas d'impôts sur la sécurité sociale, rien - et des impôts progressivement plus élevés sur tous les revenus / gains en capital provenant du capital / de la finance au-delà d'un montant modeste, disons la moitié du salaire médian (30 000 dollars par an), ainsi qu'une taxe sur les transactions pour chaque opération financière soumise, qu'elle soit exécutée ou non. Le transfert de la charge fiscale du travail vers le capital/la finance permettrait au moins d'amorcer le rééquilibrage qui se fait attendre.
Nous voilà donc en train d'ignorer avec suffisance l'éléphant de l'extrême inégalité des richesses dans la pièce, en nous empressant de l'expliquer par une tape sur l'arrière-train. Oui, l'économie a changé et, bon sang, nous sommes les gagnants, mais ce n'est pas le résultat d'un jeu truqué en notre faveur ; c'est la mondialisation, une meilleure éducation, nous avons travaillé dur. Oui, maintenant tout s'explique : nous sommes les gagnants dans l'ordre naturel des choses.
Personne n'accusera l'extrême inégalité des richesses d'être la cause immédiate de ce qui va se passer au cours de la prochaine décennie, mais cela ne veut pas dire qu'elle n'en est pas la cause tectonique. Alors que nous nous glorifions des merveilles exposées par la mer qui se retire étrangement de la plage, nous sommes aveugles au tsunami qui se précipite vers nous. Nous n'appelons pas l'inégalité extrême des richesses la cause, mais c'est la tempête qui a mis le tsunami en mouvement.
Une dernière réflexion à l'intention de ceux qui se félicitent de l'extrême inégalité des richesses en allant chercher leurs gains : rendre les riches encore plus riches en leur accordant davantage d'avantages fiscaux, en renforçant la financiarisation, en augmentant les gains des casinos truqués et en continuant à gonfler la bulle du tout (IA !) ne va pas réparer ce qui est cassé ; cela va accélérer l'effondrement de l'ensemble du statu quo, qui a tout misé sur le capital et la finance.
Le choix est assez simple : rééquilibrer radicalement l'économie maintenant ou s'accrocher à sa chaise de plage lorsque la vague aura tout emporté.
Charles Hugh Smith
https://charleshughsmith.blogspot.com/2024/11/the-elephant-in-room-no-other-elephant.html
En 20 ans les inégalités de patrimoine ont explosé...Les 25% les plus riches détiennent plus de 70% des biens immobiliers, parmi ces derniers les 5% les plus richement dotés en concentrent à eux seuls près de 30%...le patrimoine des 10% les plus riches, très souvent propriétaires de leur logement, a progressé de 4,3% l’an, atteignant ainsi un gain cumulé de 163%.
Dans le paysage politique français, les relations entre le monde des affaires et le gouvernement ont toujours suscité un intérêt particulier. L’une des figures les plus emblématiques de cette interaction est Bernard Arnault, président de LVMH, dont les relations avec le président Emmanuel Macron ont été largement commentées, notamment dans le contexte d’une dissolution parlementaire récente
Les fonds spéculatifs de Wall Street ont décidé de miser contre les technologies «vertes» et le développement durable...
Le principe de la vente à découvert (ou short selling en anglais) a été popularisé par le film The Big Short: Le Casse du siècle (2015), tiré du livre éponyme du journaliste Michael Lewis. Celui-ci met en scène les quelques investisseurs qui ont vu venir la crise des subprimes de 2007-2008 et ont donc misé sur l'effondrement du marché immobilier américain, empochant au passage un énorme pactole. Miser sur une perte de valeur est un moyen de se faire beaucoup d'argent, rapidement, et les fonds spéculatifs ou hedge funds l'ont bien compris.
Pour schématiser, le short selling (position courte) est un pari à la baisse: l'investisseur empoche un gain si l'actif financier qu'il a ciblé perd de la valeur. C'est le contraire du long selling (position longue) qui parie à la hausse. Le scénario de The Big Short est-il en train de se reproduire pour l'économie «verte»? En tout cas, de nombreux fonds spéculatifs ont misé sur son échec, raconte l'agence de presse américaine Bloomberg, en se basant sur les positions longues et courtes de 500 hedge funds, disponibles sur la plateforme spécialisée Hazeltree.
«Bloomberg a analysé, secteur par secteur, les paris placés par les fonds spéculatifs dont les actifs gérés se situent entre 50 millions et 50 milliards de dollars, explique le média américain. On peut noter quelques points positifs, comme l'énergie éolienne et les réseaux électriques. Mais dans l'ensemble, les données indiquent une réticence des fonds spéculatifs à passer au “vert”.» Autrement dit, il est préférable de se remplir les poches en étant pessimiste.
Leur frilosité s'explique notamment par l'emprise de la Chine sur les technologies «vertes», dans un contexte de guerre commerciale entre Pékin, Washington et dans une moindre mesure l'Union européenne. «Partout où la Chine domine, fuyez», résume Per Lekander, pourtant à la tête d'un fonds londonien nommé Clean Energy Transition LLP. C'est pour cette raison que les fonds spéculatifs se montrent pessimistes à l'égard de l'énergie solaire, pourtant en plein boom. Avantager des concurrents directs ne seraient pas bon à plus long terme?
Le pessimisme domine également les paris des hedge funds sur les voitures électriques. «Je ne dis pas que les véhicules électriques sont morts pour toujours, je dis simplement que la croissance est plus faible et que l'industrie a surinvesti», poursuit Per Lekander, qui a misé contre Tesla et des sous-traitants de l'industrie automobile. Le constructeur chinois BYD, avec son modèle intégré, est vu plus favorablement par certains fonds spéculatifs.
Les hedge funds se montrent plus optimistes concernant le secteur éolien –qui a pourtant connu bien des déboires– car la commande publique pour des «gigaparcs» lui permettrait de rebondir. Idem concernant les réseaux électriques, dans un contexte de hausse de la consommation d'électricité lié à l'électrification croissante de l'économie, mais aussi au développement de l'intelligence artificielle générative, très énergivore.
Néanmoins, ces fonds spéculatifs gardent surtout foi dans les énergies fossiles et en particulier dans le charbon. La consommation d'électricité est en forte hausse en Chine et en Inde, deux grandes nations toujours accros au coke. Ce dernier est pourtant de moins en moins compétitif, notamment par rapport à l'énergie solaire et la tendance pourrait donc bientôt s'inverser là aussi… Mais pas tout de suite.
Pour Barry Norris, fondateur et directeur des investissements du fonds spéculatif britannique Argonaut Capital Partners LLP, les énergies fossiles vont rester indispensables au fonctionnement de l'économie. «La transition énergétique est en train d'échouer et échouera», assure-t-il, disant tout haut ce que beaucoup de fonds spéculatifs pensent probablement tout bas. Pas sûr que l'attitude cynique des hedge funds, émanations la plus pure des dérives du capitalisme, arrange les choses.
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https://korii.slate.fr/biz/fonds-speculatifs-pari-echec-transition-ecologique-investissement-energie-verte-renouvelable-short-long-selling-hedge-funds-economie
Après la Première Guerre mondiale, les électeurs ont opté pour un retour à « business as usual ». Compte tenu de la gravité des résultats, leur choix en 1945 a été une victoire écrasante pour un gouvernement travailliste déterminé à mettre en œuvre ce que Beveridge (libéral) avait promis. Ils ne votaient pas pour ce qui leur convenait personnellement, mais pour le genre de pays qu’ils voulaient dans l’avenir.
Je ne dis pas que la cupidité n’existait pas en 1945, ni qu’il n’y a pas d’altruisme aujourd’hui. Les néolibéraux n’ont pas inventé la cupidité en 1979. Mais ils ont fait de leur mieux pour l’approuver et la valider depuis. Dans ces conditions, il est considéré comme « intelligent » de jouer avec le système. Cela inclut le jeu du système de protection sociale, mais cela comprend également l’évasion fiscale, la dissimulation d’argent à l’étranger et l’utilisation de la politique pour faire des profits.
Vous avez raison de dire que l’État-providence est en période d’emprunt.
Mais le vrai changement nécessaire est moins structurel qu’idéologique.
Comment, avec les extrêmes d’inégalité que nous connaissons aujourd’hui, allons-nous convaincre les gens qu’il n’y a rien de « malin » à tromper le système de protection sociale?
(commentaire de Tim Morgan sur son blog)
« ce qui intimide les hommes – la peur que sans pouvoir gouvernemental les pires hommes triompheraient alors que les meilleurs seraient opprimés – est précisément ce qui s’est passé, et se passe encore, dans tous les Etats, puisque partout le pouvoir est entre les mains des pires hommes ; comme en effet, il ne peut en être autrement, car seuls les pires hommes pourraient accomplir tous ces actes rusés, vils et cruels qui sont nécessaires à la participation au pouvoir ».
(Tolstoï)
Alors que nous nous revendiquons intellectuellement libres et avancés, notre corps social se contente d’un simulacre d’adhésion et nous nous abandonnons à une confortable obéissance passive, pour préserver notre pactole peau-de-chagrin, aux dépens de ce que nous pourrions imaginer. Chaque jour, nous nous plions aux injonctions des dominants qui nous divisent. La révolution n’est plus à nos portes.
Taxation des ultra-riches : un accord inédit au G20...La taxation des ultra-riches : c’est le sujet qui monte depuis quelques mois déjà dans les grandes instances du G20, et qui vient de franchir une étape historique. Un accord vient en effet d’être trouvé par les ministres des finances du G20, qui rassemble les économies mondiales les plus puissantes, pour engager une coopération globale afin de renforcer la fiscalité sur les milliardaires
« L'illusion de la liberté perdurera aussi longtemps qu'il sera rentable de continuer l'illusion. Au moment où l'illusion devient trop coûteuse à entretenir, ils démonteront simplement le décor, ils retireront les rideaux, ils écarteront les tables et les chaises, et vous verrez le mur de briques au fond de la pièce"
—Frank Zappa
L’instabilité politique et la crainte d’une hausse des taxes poussent les grandes fortunes françaises à envisager de quitter le pays, explique le site d’information américain “Bloomberg”.
D’après le dernier rapport d’UBS, publié début juillet 2024, le nombre de millionnaires (en dollars) devrait augmenter de 16 % en France d’ici à 2029. Mais “ce groupe flippe”, écrit le site d’information américain Bloomberg. En effet, depuis les élections européennes, la dissolution puis les législatives anticipées, l’incertitude politique leur pèse : les super-riches sont “de plus en plus inquiets de l’instabilité politique et budgétaire, au point que certains pourraient décider de partir, selon les gestionnaires de patrimoine”.
Avant même le second tour des législatives, certains clients de Julien Magitteri, conseiller en patrimoine privé et associé fondateur du Barnes Family Office by Côme, avaient même déplacé leurs capitaux vers la Suisse et le Luxembourg. Emmanuel Angelier, président et cofondateur de la société de gestion de patrimoine La Financière d’Orion, rapporte quant à lui les “appels de clients paniqués” envisageant l’expatriation si la gauche, incluant La France insoumise, ou l’extrême droite venait à gouverner, mettant ainsi fin aux politiques favorables mises en place par Emmanuel Macron depuis 2018 (dont la suppression de l’ISF et la flat tax de 30 %, notamment). Leurs craintes ne se sont pas envolées le soir des résultats du second tour, car, selon eux, “la situation est un signal d’alarme quant à une volatilité potentielle à l’approche de l’élection présidentielle de 2027”.
Xenia Legendre, associée directrice établie à Paris au sein du cabinet d’avocats Hogan Lovells, se souvient que, “à la suite du Brexit, il y a eu un afflux de banquiers en France, mais ces hauts revenus partiront parce qu’ils ne voudront pas payer plus d’impôts”. Et, les super-riches français pourraient partir avec eux.
Selon les différentes personnes interrogées par Bloomberg, leurs destinations privilégiées sont l’Italie, Dubaï, Singapour et les États-Unis, mais “la réinstallation prend du temps et les choix sont parfois difficiles, en fonction de la situation familiale et professionnelle de l’individu”.
Ingrid Therwath
https://www.courrierinternational.com/article/politique-les-super-riches-flippent-et-songent-a-s-expatrier_220487
Pourquoi le RN est en train de devenir le parti des milliardaires...
La classe aisée vire conservatrice. Après En Marche, l’argent électoral choisit le RN. Peu importe le parti, les grands donateurs font les candidats et passent commande.
Fini En Marche et ses bailleurs parisiens chics. Place au RN et ses bailleurs cathos tradis chics. L’argent a trouvé son nouveau poulain, et c’est Bardella et Le Pen. Au fond, depuis Sarkozy et sa croisière sur le yacht luxueux de Bolloré, le ton est donné.
Les grands donateurs font et défont les candidats. Peu importe le parti ou son étiquette initiale, les politiques sponsorisées privilégient les souhaits des sponsors. Et cela se voit: à mesure qu’il collecte des fonds, le RN adapte son discours aux desideratas de ses bailleurs en «rassurant les patrons»
Comment nos démocraties en sont-elles arrivées là? En favorisant en priorité une classe aisée qui s’est surenrichie et ne veut nullement renoncer à ses privilèges ni entendre parler de solidarité et de redistribution. Et elle n’a jamais eu autant de moyens pour financer les candidats qui l’enrichiront encore plus. Ces mots désuets que sont «redistribution» et «solidarité», qui étaient d’usage courant à l’époque de Mitterand, créateur de l’ISF (l’impôt sur la fortune), sont maintenant classés «extrême-gauche» et même les citoyens les plus modestes ne les comprennent plus, en tout cas moins bien que des discours anti-immigrés.
Pourtant, les grandes fortunes, qui se proclament ultra-libérales, doivent une bonne partie de leur enrichissement à l’aide directe de l’Etat, plus intensive que jamais ces 15 dernières années. Les exemples ne manquent pas. A chaque crise que l’on a connue – subprimes, euro, Covid, Ukraine – un transfert massif de richesses publiques s’est opéré vers les actionnaires et les multinationales, à travers différents canaux:
- En France, les subventions versées par l’Etat aux entreprises du CAC 40 est passé de 65 à 150 milliards depuis 2008 (avec accélération pendant le Covid), sans conditions ni contreparties, tandis qu’elles paient des dividendes record.
- Aux USA, en Europe et en Suisse, les Etats ont sauvé en 2008 et 2023 le système bancaire, sans qu’aucun bonus ou profit lié aux bulles spéculatives ne soit jamais retourné.
- Les baisses d’impôts ont été drastiques: la France est le deuxième pays au monde ayant connu le plus fort recul du taux d’imposition des entreprises entre 2021 et 2022.
- Les injections d’argent dans la bourse ont été phénoménales, et les planches à billets ont doublé artificiellement les gains des investisseurs privés.
- Les financements publics de la recherche pharmaceutique, comme ceux destinés aux vaccins Covid, ont généré d’énormes profits dont la totalité a fini dans les poches des actionnaires privés, créant des dizaines de milliardaires sans aucun retour pour les contribuables qui les ont financés.
En revanche, durant ces mêmes crises, les populations de salariés, commerçants, épargnants et retraités ont subi de plein fouet l’inflation, l’austérité, les faillites, les pertes de gains et le surendettement, sans aucune aide comparable à ce qui est cité plus haut. En gros, ces catégories ont payé l’entier des crises.
Paupérisation d’un côté, surenrichissement de l’autre. D’où le mécontentement social qui menace aujourd’hui les démocraties. Si la mécanique de répartition des richesses est à ce point détraquée, c’est en raison du renforcement, au fil des crises, de la prise en compte par l’Eta t de divers intérêts spécifiques, et de sa négligence de l’intérêt public. L’influence des grands groupes industriels sur les Etats est illustrée par l’explosion de l’activité des lobbies à Bruxelles, très bien documentée par l’Ong Corporate Europe Observatory, par exemple ici, ici, ici et ici.
«Les politiques redistributives de gauche deviennent une impossibilité pratique, parce que l’hyperrichesse crée fatalement le clientélisme politique»Myret Zaki
Cet argent donné au privé ne reviendra plus dans les caisses étatiques. L’erreur irréversible de l’Etat réside là, et le blocage des démocraties réside là. Les politiques redistributives de gauche deviennent une impossibilité pratique, parce que l’hyperrichesse crée fatalement le clientélisme politique. C’est le mécanisme qu’explique très bien Francis Fukuyama lorsqu’il décrit la ploutocratie. Les poches trop bien garnies par un Etat complaisant, les grands donateurs font la gouvernance et possèdent les médias. C’est vrai depuis longtemps aux Etats-Unis, et c’est maintenant une réalité en France. Un candidat gagne de l’audience, fait beaucoup de voix, comme Jordan Bardella? Les donateurs se tournent vers lui. Car qu’est-ce qui manque à une classe aisée qui représente moins de 1% des électeurs? L’audience.
D’abord, il y a Vincent Bolloré et ses 10 milliards de fortune, qui a mis son empire médiatique au service de l'extrême droite. Il s’est impliqué au point d’avoir lui-même orchestré l’alliance entre la droite et l'extrême droite pour assurer le succès du RN. Pas vraiment un succès populaire. Il a tant dépensé sur la visibilité du RN sur CNews, C8, Europe 1, le JDD, que cette véritable croisade peut s’apparenter à du financement occulte, tant la valeur de cette visibilité est grande, la seule chaîne C8 lui coûtant 400 millions en pertes sur 8 ans. Aux côtés de la «galaxie Bolloré», le RN bénéficie de la «galaxie Stérin», selon une enquête du journal «Le Monde».
Pierre-Edouard Stérin, milliardaire catholique conservateur, exilé fiscal en Belgique et opposé au droit à l’avortement, est le nouveau mécène du RN, et voit dans Bardella le poulain idéal. Pour démarcher les milliardaires, le RN s’est entouré de hauts diplômés puisés dans les réseaux catholiques et nationalistes, comme le financier François Durvye, numéro deux de Stérin, ou l’investisseur Alexis Rostand, dont les conseils sont calqués sur les intérêts des grands groupes industriels. Le parti, qui a remboursé ses emprunts russes, s’aligne à présent sur ces riches «catho tradi». Ces donateurs ne sponsoriseront pas de politiques sociales, mais des politiques de préservation de leur patrimoine. Quant à leur idéologie racialiste, elle n’offrira aucun moyen de résoudre la difficile équation française, si ce n’est qu’elle aggravera les tensions.
«Quel que soit le positionnement initial d’un parti, qui a justifié sa popularité d’origine, sa politique ultérieure ne pourra que refléter l’idéologie de ses donateurs. C’est pourquoi, avant de regarder le candidat, c’est à ses donateurs et à leurs idées qu’il faut s’intéresser»Myret Zaki
Au final, le RN, comme Macron, va donc gouverner contre une partie du pays. Il gouvernera pour le sommet et priorisera les intérêts de ses sponsors sur fond d’agitation sociale toujours plus aiguë. Quel que soit le positionnement initial d’un parti, qui a justifié sa popularité d’origine, sa politique ultérieure ne pourra que refléter l’idéologie de ses donateurs. C’est pourquoi, avant de regarder le candidat, c’est à ses donateurs et à leurs idées qu’il faut s’intéresser.
En France, le poids des donateurs aisés était devenu particulièrement visible avec l’émergence d’En Marche. En 2017, ils s’étaient mobilisés pour porter au pouvoir Emmanuel Macron, qui avait su rester une page blanche en termes de programme politique, l’adaptant au gré de la collecte. Il avait levé 16 millions à une vitesse sans précédent, grâce aux contributions maximales de nombreux gestionnaires d’actifs et cadres supérieurs basés à Paris. Ce phénomène intervenait après 8 années d’enrichissement boursier aidé par les injections des banques centrales, qui avaient doublé l’indice CAC 40 et quadruplé le S&P 500, une hausse jamais vue sur une si petite période. La première chose qu’avait fait le nouvel élu à l’Elysée était de supprimer l’ISF, sans aucun effet positif pour l’économie française, uniquement pour les fortunes concernées.
«Au final, dans une ploutocratie, le parti de facto le plus puissant d’un pays, ça n’est autre que l’argent lui-même»Myret Zaki
Aujourd’hui, la seule nouveauté est que les donateurs aisés sont en train de faire du RN le nouvel «En Marche». C’est cette alliance du RN avec la classe fortunée qui porte Jordan Bardella. Ayant donné les gages qu’il faut sur l’absence de concessions sociales, il satisfait les donateurs, car c’est cela qui les intéresse en premier lieu. Et même aujourd’hui, des patrons de PME s’inquiètent que le programme du RN soit «trop social» et les oblige à payer davantage leurs 50 employés.
Mais qu’ils se rassurent. On assiste à un processus d’embourgeoisement du RN, qui passe par son entente avec LR et Reconquête. Au final, dans une ploutocratie, le parti de facto le plus puissant d’un pays, ça n’est autre que l’argent lui-même. Comment ne pas y voir le prélude d’une véritable crise politique et de gouvernance ces prochaines années?
Myret Zaki 04 07 24
https://www.blick.ch/fr/news/opinion/la-chronique-de-myret-zaki-pourquoi-le-rn-est-en-train-de-devenir-le-parti-des-milliardaires-id19909320.html
La désaffection envers la classe politique et les inégalités nourrissent la montée du populisme des deux côtés de la Manche, assure le politologue Anand Menon.
Professeur de politique européenne au King's College de Londres et directeur du centre de réflexion UK in a Changing Europe, un think tank dédié à l'étude du Brexit, Anand Menon commente les résultats des récentes élections européennes vus de Londres. Il observe des similitudes frappantes entre la situation politique au Royaume-Uni et en France, mais aussi plusieurs différences de taille.
Le Point : En 2016, le Royaume-Uni décidait de quitter l'Union européenne avec fracas. Aujourd'hui, à l'approche des élections britanniques du 4 juillet, le parti populiste Reform UK grimpe dans les sondages. Faut-il y voir un parallèle avec le succès du Rassemblement national lors des élections européennes en France ?
Anand Menon : Ce qui relie ces événements, c'est un sentiment de déconnexion entre les gouvernants et les gouvernés. La population a la sensation que le pays est dirigé par une élite prospère et globalisée qui ne représente pas ses intérêts et ne lui ressemble pas. Plus on s'éloigne de la capitale – et des centres de pouvoir – et plus cette notion s'exprime avec force. À cela s'ajoute l'impression de faire partie des laissés-pour-compte sur le plan économique. La crise financière de 2008, le Covid et la forte inflation de ces dernières années ont remis en cause toutes les certitudes, notamment sur le front de la croissance.
Les inégalités se sont également creusées. Or, elles sont aujourd'hui davantage fondées sur les différences de patrimoine que sur celles de revenus, un fossé que les systèmes fiscaux peinent à combler. Les contextes français et britanniques diffèrent toutefois sur le plan politique. Au Royaume-Uni, plusieurs années de gouvernement conservateur marquées par le chaos ont permis à la gauche de regagner du terrain. Ce n'est pas le cas en France, qui a plutôt connu une période de stabilité sous Emmanuel Macron.
L'immigration figure aussi en bonne place tant dans l'argumentaire de Reform UK que du Rassemblement national. Ces deux mouvements sont-ils alignés sur cette question ?
L'immigration illégale est dénoncée avec force par ces deux entités, qui exhibent aussi un penchant anti-islam marqué. Mais il y a une différence de taille. En France, la libre circulation qui prévaut dans l'Union européenne n'est pas remise en question par la droite populiste, elle est considérée comme un acquis. Au Royaume-Uni en revanche, l'absence de contrôles aux frontières européennes est perçue comme la racine du problème, expliquant la hausse importante des traversées de La Manche dans des embarcations de fortune.
Les résultats des élections européennes signalent-ils, plus généralement, un renforcement de la droite dure à l'échelle du continent ?
Absolument pas. Chercher à identifier des tendances claires reflétant la situation dans l'ensemble des 27 pays composant le bloc européen est un exercice extrêmement réducteur. En Suède et en Finlande, où les inégalités sont moins marquées, la droite dure est en recul. En Espagne, le centre droit progresse. Au Portugal, c'est le centre gauche qui gagne du terrain. Je ne vois pas de schéma généralisé. La réalité est plus fragmentée et complexe que les unes des journaux ne le laissent entendre.
https://www.lepoint.fr/monde/au-royaume-uni-comme-en-france-la-population-a-la-sensation-d-etre-dirigee-par-une-elite-prospere-et-globalisee-15-06-2024-2563070_24.php
Les milliardaires américains, désormais plus puissants que les Etats ?.....Ils sont six. Leurs entreprises sont nées au tournant du siècle et ils sont déjà centi-milliardaires. Ils sont aujourd’hui plus forts que les Etats. Ils décident de notre avenir, et les citoyens n’ont pas leur mot à dire, car on ne vote pas pour eux.
S'éloigner du marché....
La récente série de billets sur la lénocratie (du latin leno, proxénète) - c'est-à-dire la forme d'économie politique dans laquelle l'activité économique productive est réduite à néant par diverses formes de proxénétisme imposé par la loi - a suscité une réaction que je trouve intéressante. Presque personne n'a essayé d'argumenter que la lénocratie est une description injuste de l'état actuel des choses aux États-Unis et dans leurs proches alliés. Tout le monde semble parfaitement conscient du fait que la plupart des personnes qui gagnent beaucoup d'argent dans nos grandes kleptocraties post-industrielles le font en exploitant ceux qui produisent réellement des biens et des services, exactement de la même manière qu'un proxénète exploite des travailleurs du sexe.
Non, la question qui revient sans cesse est aussi simple que difficile : que pouvons-nous faire ? J'ai proposé une réponse il y a un mois, en discutant de la manière dont les lénocraties modernes fonctionnent en faisant miroiter divers appâts. Si vous mordez à l'hameçon - et presque tout ce qui suinte des orifices de l'économie de consommation est considéré comme un appât - l'hameçon s'enfonce. Si vous passez votre chemin sans tomber dans le piège, vous êtes libre. Cette réponse n'est cependant pas exhaustive et il convient d'examiner certaines des autres possibilités.
Nous pouvons commencer par examiner attentivement les réalités de la vie moderne. Admettons qu'il soit de plus en plus difficile de faire payer un travail honnête de nos jours parce qu'un régiment de lénocrates soutenus par des lois et des réglementations locales, étatiques et fédérales exigent tous une part des bénéfices. Admettons que la lénocratie se soit tellement développée que les États-Unis ne puissent plus accomplir des tâches aussi simples que réparer un pont endommagé ou fournir des obus d'artillerie pour leurs guerres par procuration dans un délai et à un coût raisonnables. Admettons également que tout cela s'aggrave à mesure que l'économie réelle des biens et services non financiers se rétrécit, laissant une horde de plus en plus nombreuse de lénocrates tenter frénétiquement d'extraire leurs prises habituelles d'une société qui en est aux premiers stades de la rigidité cadavérique. Dans ces conditions, pouvons-nous faire quelque chose pour nous protéger d'une lénocratie qui s'emballe, ou devons-nous simplement nous retrancher et attendre l'implosion inévitable du système ?
Dans la mesure où cette question vise à justifier l'activisme politique, je suis désolé de dire que j'ai très peu d'espoir à offrir à l'échelle nationale. Il y a encore beaucoup de travail à faire dans le domaine de la politique locale, et même à des niveaux plus généraux, mais soyons francs. L'appareil gouvernemental représentatif des États-Unis et de la plupart de leurs alliés a été mis de côté il y a longtemps, devenant une sorte de spectacle où des clowns pas tout à fait prêts pour le grand chapiteau exécutent leurs routines comiques pour un public de péquenauds.
Dans l'Occident moderne, la plupart des politiques réelles sont décidées dans les vastes domaines qui se chevauchent des bureaucraties gouvernementales, des entreprises et des organisations à but non lucratif, avant d'être soumises aux formalités du pouvoir législatif comme une réflexion après coup. Nous en avons eu un bel exemple il y a peu, lorsque le président de la Chambre des représentants, Mike Johnson, a fait volte-face et a abandonné son opposition à un financement accru de l'Ukraine et sa demande d'une protection accrue des frontières américaines après une petite conversation tranquille avec des bureaucrates fédéraux. Cela a montré assez clairement où se trouve le véritable pouvoir.
Cela ne signifie pas qu'il n'y a rien à faire. Cela signifie que l'on ne peut rien faire en s'appuyant sur des outils qui ont depuis longtemps perdu leur avantage, ou en jouant à des jeux que la maison a truqués pour qu'elle ne perde jamais. On ne réussit pas dans un environnement difficile en faisant ce que tout le monde attend de vous. On ne réussit pas non plus dans un environnement difficile en concourant sur le terrain de l'autre, où il fixe les règles et peut les changer à volonté. On gagne en faisant ce qui est inattendu et en déplaçant la lutte ailleurs, là où l'on peut fixer les règles et faire pencher la balance en sa faveur.
Il est important de rappeler ici que le pouvoir n'est jamais une abstraction ; il dépend toujours du contexte. Pendant la vingtaine d'années qu'ils ont passées à tenter de contraindre le peuple afghan à se soumettre à la volonté des kleptocrates occidentaux, les États-Unis avaient bien plus de pouvoir, dans tous les sens du terme, que les forces talibanes qui s'opposaient à eux. Aussi écrasante soit-elle, la puissance militaire, économique et culturelle des États-Unis s'est avérée inutile face à une nation qui s'est fait une spécialité d'humilier les puissants empires depuis l'Antiquité. Pourquoi ? Parce que les talibans savaient éviter les situations dans lesquelles la puissance américaine pouvait être déployée efficacement, et choisissaient plutôt les modes de combat où l'envahisseur, immense mais maladroit, était désavantagé.
Le même principe est tout aussi valable dans le type de contestation non violente que j'ai à l'esprit ici. La violence elle-même constitue un excellent test pour le principe dont je parle ici. À ce stade du jeu, il est certain que le vaste système bureaucratique qui dirige ce pays dispose d'un avantage extrêmement disproportionné en ce qui concerne la violence. Commencez à tirer sur les personnes chargées de faire respecter toutes ces lois et réglementations, et le résultat peut être clairement décrit comme un « suicide par les flics ». Encore une fois, on gagne en se battant selon ses propres termes, et non selon des termes qui avantagent l'autre camp.
Comment y parvenir dans le cas présent ? Vous commencez par vos propres choix et votre propre vie, le domaine sur lequel vous avez le plus de contrôle.
Le grand secret des lénocraties d'aujourd'hui, comme je l'ai suggéré il y a un mois, est qu'elles dépendent tellement de la soumission volontaire de leurs victimes. Bien sûr, il y a des façons dont cela n'est pas vrai, des exactions qui ne peuvent être évitées sans courir de grands risques, mais il y a beaucoup d'autres façons dont vous pouvez vous retirer si vous êtes prêt à faire certains changements ou à vous passer de certaines choses. Dans des sociétés aussi encombrées, aussi délabrées et aussi décrépites que les nôtres, l'une des maximes de Robert Anton Wilson - « le gouvernement est une illusion dans l'esprit des gouvernants » - est presque vraie. Il serait encore plus juste de dire que le gouvernement est une illusion dans l'esprit des gouvernés. Guérissez de cette illusion, reconnaissez que la plus grande partie de ce qui se passe dans l'Amérique d'aujourd'hui n'est pas géré et même pas remarqué par les bureaucrates, et le monde deviendra beaucoup plus intéressant.
La même chose est encore plus vraie dans les contextes non politiques. Prenons l'exemple de l'emploi, le moyen le plus courant par lequel les gens des sociétés lénocratiques modernes subviennent à leurs besoins. Être l'employé de quelqu'un semble tellement normal et naturel pour la plupart des gens de nos jours qu'il faut parfois un réel effort pour reconnaître à quel point le système de l'emploi est compliqué et exploiteur. Partons des premiers principes. Il y a quelqu'un qui a besoin d'un bien ou d'un service, et quelqu'un d'autre qui sait comment fournir ce bien ou ce service. Ces deux personnes se mettent-elles d'accord sur un échange de valeur - par exemple, une somme d'argent en échange du bien ou du service -, se serrent-elles la main, procèdent-elles à l'échange et c'est tout ? Dans la plupart des sociétés humaines, c'est le cas, mais dans une société lénocratique, ce n'est pas le cas.
Non, dans une société lénocratique, il y a généralement au moins une personne, un employeur, qui s'insère dans la transaction et en retire une part. Dans une lénocratie bureaucratique mature comme la nôtre, il y a des dizaines ou des centaines de personnes qui prennent chacune une part de la transaction. Prenons l'exemple d'une personne qui veut un hamburger et qui se rend dans un fast-food en manque de personnel pour l'acheter. Le jeune homme pressé et surmené derrière le comptoir prépare le hamburger, l'emballe, le remet à l'employé et enregistre la vente. Sur cette vente, seule une petite partie sert à payer au jeune le salaire inadéquat qu'il reçoit. Le reste est aspiré directement dans la ziggourat de l'entreprise, avec des chèques de plus en plus gros en cours de route ; un royaume toujours plus vaste de bureaucratie managériale s'y greffe, les plus gros chèques allant aux titulaires des bureaux d'angle, et ce qui reste s'envole du sommet de la ziggourat pour pleuvoir sur les actionnaires.
L'une des vérités éternelles de la lénocratie est que personne dans une bureaucratie managériale n'est jamais disposé à envisager de recevoir un salaire moins élevé. Une autre est que personne dans une bureaucratie managériale n'est jamais disposé à envisager d'avoir moins de subordonnés. Enfin, les actionnaires, eux aussi, s'attendent toujours à ce que leurs actions prennent de la valeur et que leurs revenus augmentent. Par conséquent, année après année, la part revenant aux personnes qui effectuent réellement le travail diminue, tandis que celle qui monte dans le ziggourat gonfle. C'est l'un des principaux facteurs d'appauvrissement et d'appauvrissement dans l'Amérique d'aujourd'hui, même si, bien sûr, les médias d'entreprise n'en parlent pas.
Existe-t-il des alternatives ? Bien sûr qu'il y en a. Une fois de plus, le grand secret de la lénocratie est qu'elle dépend tellement de la soumission volontaire de ses victimes. Il existe de nombreux moyens de s'en sortir qui n'impliquent pas d'être l'employé de qui que ce soit, et tous partagent un énorme avantage que l'emploi n'a pas : le revenu que vous en tirez sert à soutenir un nombre beaucoup plus restreint de bureaucrates. Tant que vous gagnerez de l'argent, vous devrez supporter les exactions qui soutiennent ceux qui sont payés avec l'argent des contribuables, mais il y en a beaucoup d'autres que vous pouvez ignorer sans problème, ce qui signifie qu'une part beaucoup plus importante de votre revenu vous revient.
C'est pourquoi toutes les personnes que je connais et qui prospèrent dans l'économie américaine d'aujourd'hui sont des travailleurs indépendants. La grande majorité d'entre eux ont trouvé des marchés de niche qui correspondent à leurs particularités personnelles et qui ne sont pas bien servis par la mentalité « taille unique » des dirigeants d'entreprise d'aujourd'hui. C'est ainsi que je gagne ma vie, par exemple, et qu'un nombre croissant d'autres personnes font de même. Si vous travaillez à votre compte, vous conservez une part beaucoup plus importante de la valeur de votre travail et vous pouvez généralement offrir une meilleure qualité à vos clients à un prix plus raisonnable - après tout, ni vous ni vos clients n'avez à vous soucier de couvrir les salaires et les avantages sociaux d'une faune de bureau surévaluée, comme le font les employés et leurs clients.
Cela est possible parce que, dans l'économie américaine actuelle, un grand nombre de besoins ne sont pas satisfaits parce que les grandes entreprises ont décidé qu'il ne valait pas la peine de les satisfaire, alors que les barrières imposées par le gouvernement aux petites entreprises peuvent souvent être contournées par un individu entreprenant qui n'a pas peur de maintenir les choses à une échelle petite et locale. Je ne voudrais certainement pas suggérer à quiconque d'enfreindre la loi, mais il peut être utile de noter que beaucoup de gens travaillent aujourd'hui au noir : ils n'ont pas de licence d'exploitation, ils ne passent pas par les innombrables obstacles bureaucratiques qui ont été mis en place pour protéger les grandes entreprises de la concurrence, ils fournissent simplement des biens et des services de manière informelle et reçoivent leur salaire de manière tout aussi informelle. Parfois, ils ne reçoivent pas de salaire, au sens strict du terme, et cela nous amène à une dimension encore plus difficile de notre thème.
En dépit de l'argumentation de haut vol des manuels d'économie, une économie de marché utilisant l'argent comme intermédiaire des échanges n'est pas la seule façon d'organiser une économie. Elle n'est pas non plus toujours la meilleure. L'histoire montre que les économies de marché émergent à un certain stade du développement économique de toute société humaine complexe, à peu près au moment où la société passe de la relative stabilité économique de son enfance à la phase de croissance de son adolescence. Au cours de ces années tumultueuses, la croissance de la lénocratie peut rarement suivre la croissance de la production de biens et de services, et personne ne se préoccupe beaucoup des lénocrates ; très souvent, à ce stade, ils fournissent encore un service ou un autre en échange de leur part.
Cependant, lorsque la maturité arrive et que la production de biens et de services ralentit et plafonne, la lénocratie continue à se développer. Cela produit l'illusion d'une croissance économique continue, puisqu'il y a toujours plus d'argent qui change de mains et plus de personnes occupées à un travail prétendument productif, mais les services finissent par prédominer sur les biens. La plupart des « services » en question sont inutiles pour les individus et n'ont de valeur que dans une sphère bureaucratique en expansion constante, dans laquelle les bureaucrates publics et privés deviennent de plus en plus indiscernables. L'inflation entre en jeu lorsque la monnaie est dépréciée pour que l'argent continue d'affluer vers les lénocrates en l'absence d'activité productive. On se retrouve alors dans la situation classique d'une civilisation en phase terminale, pleine de bureaucraties affairées à toutes les activités rituelles qui occupent leur temps - faire des offrandes à Isis et à Râ dans l'Égypte ancienne, faire circuler des mémos dans l'Amérique moderne - tandis que les systèmes essentiels se désagrègent lentement sous le poids de plus en plus lourd d'une négligence malveillante.
C'est le comportement des gens ordinaires dans les sociétés terminales comme celles-ci qui mérite une attention particulière. Plus la part de richesse accaparée par les classes lénocratiques privilégiées est importante, moins les autres ont de raisons de participer au système, et de plus en plus de personnes cessent donc de participer. Il y a de nombreuses façons de le faire. Très souvent, ils cessent d'avoir des enfants, car le simple fardeau économique que représente l'éducation d'un enfant dans une lénocratie en phase terminale devient un facteur de dissuasion massif pour la reproduction. Très souvent aussi, ils embrassent de nouveaux mouvements religieux qui glorifient la pauvreté, le célibat et la non-participation à la vie culturelle et économique de la lénocratie. Ce n'est pas un hasard si le monachisme, par exemple, est devenu extrêmement populaire à la fin de l'époque romaine, ou à plusieurs périodes équivalentes de l'histoire de l'Inde et de la Chine ; devenir moine ou nonne, c'est entre autres choses tendre un doigt d'honneur décent mais sans équivoque à une société qui exige trop et donne trop peu en retour.
Pourtant, il existe des moyens moins radicaux de faire la même chose, et la plupart d'entre eux consistent à trouver un moyen de sortir des économies de marché qui ont été truquées au détriment de tout le monde, sauf de l'élite lénocratique. Après tout, il existe de nombreux types d'économies qui ne reposent pas sur des échanges marchands. Tout bien ou service que vous fournissez pour vous-même est en dehors de l'économie de marché. Il en va de même pour tout bien ou service que les membres d'une famille se fournissent mutuellement. Il en va de même pour tout bien ou service que vous fournissez directement à quelqu'un d'autre en échange d'une contrepartie non financière. C'est à partir de cette dernière forme d'échange que le féodalisme, l'économie politique normale d'une société post-marchande, émerge au fil du temps.
Tout au long de ma carrière de blogueur, j'ai eu l'occasion de lever les yeux au ciel devant les nombreuses personnes pour qui le terme « féodal » est un mot chargé d'émotion plutôt qu'une description d'un système d'économie politique. Une économie féodale repose entièrement sur des contrats coutumiers. Voici le paysan qui veut cultiver sa terre sans être dérangé par des pillards ; voici le seigneur de guerre local dont la bande de jeunes durs à cuire est heureuse de sortir et de se battre. Le chef de guerre s'engage à défendre le paysan, et le paysan s'engage à soutenir le chef de guerre : tant de grains par boisseau, tant de jours de travail pendant la morte saison, et lorsque le chef de guerre part au combat, le paysan prend une lance et un vieux casque de fer et marche avec lui.
Le paysan et le chef de guerre ne négocient pas les conditions, et c'est ce qui différencie une économie féodale d'une économie de marché. Ces mêmes conditions sont en place depuis des temps immémoriaux - bien souvent, l'arrière-grand-père du paysan avait la même relation avec l'arrière-grand-père du seigneur de la guerre, et toutes les parties à la transaction supposent qu'il en sera de même pour leurs arrière-petits-enfants respectifs. Statique ? Bien sûr. Inégal et injuste ? Cela aussi. Pourtant, le paysan médiéval moyen travaillait moins d'heures par semaine, avait plus de vacances et conservait une plus grande part de la valeur de son travail que vous.
Nous sommes à quelques siècles du moment où l'on peut s'attendre à ce que le féodalisme émerge dans le monde désindustriel du futur. Cependant, les citoyens ordinaires de l'Amérique lénocratique tardive se détournent déjà, de manière moins évidente, d'une économie de marché truquée de manière aussi flagrante à leur détriment. La forte baisse du taux de natalité est un signe révélateur. De plus en plus de gens font le calcul, additionnent les sommes qu'ils doivent payer de leur poche pour avoir le privilège d'être employés, et réalisent qu'ils feraient mieux de faire autre chose de leur temps. Il en va de même pour le nombre croissant de personnes qui travaillent au noir, qui trouvent leur propre moyen de gagner un peu d'argent en dehors de l'économie d'entreprise, ou qui abandonnent complètement la main-d'œuvre rémunérée pour devenir des femmes ou des hommes au foyer, des aides à domicile pour un parent plus âgé ou un jeune couple avec des enfants, etc.
Je ne peux pas vous dire, cher lecteur, si l'une ou l'autre de ces options vous conviendrait ; il est dans la nature de ces périodes qu'une taille unique ne convienne jamais à tout le monde. Vous devrez faire vos propres choix et vous sentir à votre place. Néanmoins, je pense que vous constaterez que moins vous soutiendrez de lénocrates à la sueur de votre front, plus vous serez heureux et prospère. De même, je pense que plus vous ferez de choses pour vous-même, ou ferez en sorte qu'elles soient faites d'une manière ou d'une autre en dehors de l'économie de marché, plus vous aurez de facilité dans notre économie troublée, et plus vous ferez d'achats auprès de particuliers ou de petites entreprises locales au lieu de grandes chaînes d'entreprises lénocratiques, plus vous serez heureux des résultats obtenus.
Il y a bien sûr un autre aspect à cette question. Tout comme un proxénète ne peut survivre sans les travailleurs du sexe qu'il exploite, alors qu'ils peuvent très bien survivre sans lui, la lénocratie dépend, pour sa survie, de la volonté des gens ordinaires de continuer à la soutenir par leurs achats, leur travail et leur loyauté. Que vous continuiez ou non à lui apporter ce soutien - pourquoi, c'est aussi quelque chose que vous devrez décider pour vous-même.
John Michael Greer
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)
Selon les professeurs d’épidémiologie britanniques Richard Wilkinson et Kate Pickett, les sociétés où le fossé entre les riches et les pauvres est large enregistrent des taux plus élevés d’homicides, d’emprisonnement, de mortalité infantile, d’obésité, de toxicomanie et de grossesse chez les adolescentes. Dans un commentaire de mars pour Nature, ils ont écrit :
« Une plus grande égalité réduira la consommation malsaine et excessive, et augmentera la solidarité et la cohésion nécessaires pour rendre les sociétés plus adaptables face au climat et à d’autres urgences. »
En outre, leurs recherches montrent que les sociétés plus égalitaires ont des impacts beaucoup moins graves sur la nature. Plus le degré d’inégalité est élevé, plus les performances en matière de pollution atmosphérique, de recyclage des déchets et d’émissions de carbone sont faibles.
Le message est clair : limiter la dégradation écologique tout en améliorant la qualité de vie de l’humanité exige de bannir l’extravagance matérielle des personnes les plus riches du monde, en particulier l’équipage croissant de milliardaires mondiaux. Cependant, cela devrait faire partie d’un effort beaucoup plus large pour débarrasser les sociétés riches de la surexploitation systémique et de la surproduction qui menacent d’être notre perte mondiale.
extraits de l'article :
"L’effondrement écologique n’est pas encore arrivé, mais vous pouvez le voir venir..."
http://ottolilienthal.over-blog.com/2015/02/effondrements.html
Un pour cent des foyers fiscaux concentrent bien 96% des dividendes...En 2021, 400 000 foyers fiscaux sur 40 millions concentraient bien 96% des dividendes versés...Le document montre même que 0,01% des foyers fiscaux captent à eux seuls un tiers des dividendes. Concrètement, cela veut dire que 4 000 foyers fiscaux perçoivent chacun plus d'un million d'euros
Le maintien coûte que coûte de la paix sociale devient insoutenable...Le maintien de la paix sociale et la sauvegarde de la démocratie coûtent de plus en plus cher aux grandes économies avancées. Les gouvernements doivent en effet désarmer par des transferts toujours plus élevés fléchés sur les ménages la conflictualité inhérente à un partage primaire de la valeur qui donne la part belle au capital
"Alors qu’entre 1953 et 1973 dans les États occidentaux, les riches et les pauvres ont connu une prospérité croissante, après 1973, les riches n’ont pu prospérer qu’aux dépens des pauvres. »
« [1973] a marqué un point d’inflexion où le coût de l’énergie était trop élevé pour permettre la poursuite de la croissance de la prospérité générale"
(Tim Watkins)
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Credit Suisse a versé en dix ans pas moins de 32 milliards de francs suisses en dividendes et actions. Dans le même temps, l’ancien géant bancaire a enregistré une perte de 3,2 milliards de francs suisses.
32 milliards de francs suisses. C’est la somme astronomique qu’a versé le Credit Suisse (CS) en bonus et dividendes sur dix ans, rapporte Le Temps, le 17 mars 2024, relayant des informations du SonntagsZeitung. L’hebdomadaire zurichois a pu consulter un rapport rédigé par les avocats d’UBS, la banque qui a racheté CS. Ces derniers représentent des investisseurs qui s’estiment lésés. Et pour cause, alors que les chiffres sont vertigineux, Credit Suisse a enregistré, sur la même période, une perte de 3,2 milliards de francs suisses.
Dans le détail, plus de 1 500 gestionnaires de risques ont ainsi reçu un million de francs chaque année. CS a dû piocher dans son capital pour régler la note, faute de résultats positifs. À ces versements, il faut ajouter de mauvaises transactions, comme le rachat de DLJ, une banque américaine, pour 19,6 milliards de francs suisses, relève Le Temps. L’ensemble de la structure Credit Suisse a eu du mal à faire face à ces défis financiers. En outre, sa holding Credit Suisse AG a continué de creuser la tombe de la banque helvète. Elle ne lui a rapporté que 300 millions de francs de dividendes entre 2016 et 2020, ce qui ne permettait pas de couvrir les frais de fonctionnement, et ce, alors que les actionnaires ont reçu pas moins de 4,6 milliards de francs suisses dans le même temps.
Le département fédéral des finances étudie le dossier
Pour faire face, Credit Suisse a accordé des prêts internes à sa filiale. En outre CS a décidé de recourir aux obligations AT1, qui servent d’amortisseurs si les niveaux de capitaux d’une banque passent sous un certain seuil. La stratégie a été loin d’être payante pour la banque suisse. Les intérêts faramineux, s’élevant à un milliard de francs suisses au total, ont amené les agences de notation avoir le CS dans son viseur.
Le Département fédéral des finances étudie avec attention le dossier. Il doit déterminer si les opérations engagées par Credit Suisse étaient légales ou non. Le cadre légal impose aux banques de compenser les pertes des années précédentes avant de verser quelques dividendes que ce soit.
Pierre Fougères Publié le
https://www.capital.fr/entreprises-marches/lincroyable-montant-des-bonus-verses-par-credit-suisse-avant-son-rachat-par-ubs-1493916
BFMTV et RMC vendus à CMA CGM : "Quand on possède un tel empire médiatique, on a un outil de négociation avec le pouvoir", analyse un historien des médias...."c'est un groupe qui a réalisé 42 milliards d'euros de bénéfices en deux ans et qui n'a payé que 2 % d'impôts grâce à la bienveillance de l'État"
La compagnie des Thames Water, qui fournit de l'eau à 25% des anglais, est en quasi faillite avec plus de €20 milliards de dettes. L'entreprise a "oublié" de réparer les conduites percées et a utilisé les dividendes pour vider la substance économique de l'entreprise.
Aujourd'hui, les dirigeants demandent au gouvernement d'augmenter de 40% les prix de l'eau, de pouvoir payer les dividendes aux actionnaires comme le Qatar et la Chine ainsi qu'une diminution des amendes.
https://2000watts.org/index.php/energies-fossiles/peak-oil/1368-energies-economie-petrole-et-peak-oil-revue-mondiale-fevrier-24.html
« 1 % contrôlent toute la richesse et le pouvoir ; 4 % – sont achetés et payés : politiciens, médias (1), secteur financier – ce sont leurs marionnettes ; 5 % réalisent ce qui se passe ; et 90 % sont endormis. Le 1 % fait tout ce qu’il peut pour s’assurer que le 5 % ne réveille pas les 90 %. »
(avis internaute)
(1) La totalité de la grande presse française appartient à des milliardaires...seules de petites
publications comme le "Canard enchainé" sont indépendants. On pourra déguster le paragraphe :
http://ottolilienthal.over-blog.com/2015/09/on-ne-prete-qu-aux-patrons-de-presse-riches.html
avec un verre de rouge à portée la main pour tenir le choc.
Le problème est de savoir comment nous intégrons le système capitaliste de croissance perpétuelle dans tous les scénarios possibles. C’est impossible. Quelque chose doit se casser.
Si au moins les énergies renouvelables étaient autosuffisantes ..., mais pour l’instant, nous en sommes loin.
Il est clair que les énergies renouvelables économisent une partie de la consommation de gaz et de pétrole (et presque tout le charbon), mais on ne peut prétendre éliminer 100 % des fossiles, car il n’y a pas de substitut viable. Peut-être dans 50 ans, mais dans 10 ans, on aura de gros problèmes.
La "solution climatique" ne sert à rien si seuls les citoyens européens y participent, parce que ce qui sera arrêté ici sera réclamé en Asie par exemple.
Oui, vient le gouvernement des "guerriers" (loi des cycles sociaux), par la force ou par la force. Et l’alternative est le cas total, avec le choix entre le mauvais ou le pire.
Quark
Les 1% les plus riches détiennent plus que l’ensemble de la classe moyenne aux USA, et ce phénomène est similaire au sein de tous les pays occidentaux.
La déchéance de notre classe moyenne est une bombe à retardement dont le compte à rebours indique que nous sommes proches de la liquéfaction sociale.
Michel Santi
le système est en train de mourir et il faut s’adapter à autre chose. Ce sont les élites capitalistes oligarchiques mondiales (dont le centre est l’occident moderne) qui tentent de jouer un jeu très dangereux et inutile pour maintenir leur pouvoir à tout prix, dans un type de société où les bourgeois sont l’alpha et l’oméga de tout. Et comme pour un marteau tout problème est un clou, pour tout capitaliste tout est traité comme une marchandise. De toute évidence, ils accélèrent leur propre destruction, essentiellement parce qu’ils détestent tout système différent du leur et ne conçoivent pas un monde différent de celui qu’ils gouvernent
(un internaute)
Boeing est une entreprise qui a oublié qu’elle faisait des avions et que quand on les fait mal, ils tombent et un avion qui tombe ce sont des centaines de morts.
Les sociétés d’eaux minérales ont également oublié qu’elles vendaient de l’eau « pure » et faisaient elles aussi n’importe quoi.
Les laboratoires pharmaceutiques régulièrement condamnés oublient qu’ils doivent soigner les gens…
Bref, les grandes multinationales mentent comme des arracheuses de dents et la course aux profits n’a jamais été aussi délirante avec toutes les dérives que cela implique.
Il ne sert à rien de faire de la RSE et de l’éthique pour ce genre de résultats !
D’ailleurs plus on parle de responsabilité sociale des entreprises, d’éthique ou de « raison d’être » et plus c’est l’inverse et l’exact opposé qui se produit.
Charles Sannat
"Cash Investigation" révèle les stratégies du patronat pour ne pas reconnaître certaines maladies professionnelles...Selon elle, "c’est impossible de le prouver, donc qu'est-ce que ça va permettre ? De rejeter beaucoup de situations". Et de fait, "Cash" a vérifié : dès la modification du tableau en 2011, la reconnaissance des maladies professionnelles de l’épaule a baissé de presque 32%. Une stratégie efficace...
"Le capitalisme est la croyance extraordinaire que les hommes les plus méchants, pour les motifs les plus méchants, travaillent d'une manière ou d'une autre pour le bénéfice de tous"
(John Maynard Keynes)
Le capitalisme ne peut se transformer qu'en autocratie
...pour se désintégrer complètement peu de temps après
L'histoire du capitalisme a un arc qui lui est propre. Elle a un début, un point culminant et, oui, une fin - avec ou sans révolutions, changement climatique ou destruction écologique. Le capitalisme suit une trajectoire d'évolution naturelle qui culmine dans une dystopie orwellienne, juste avant sa disparition rapide. Rejoignez-moi dans cette brève revue des origines du capitalisme pour comprendre pourquoi toutes les tentatives de démantèlement ont échoué - et continueront d'échouer - jusqu'à ce que les technologies autoritaires qui le rendent possible disparaissent dans un avenir pas si lointain.
Selon Investopedia, "le capitalisme est un système économique caractérisé par la propriété privée des moyens de production, le travail étant exclusivement rémunéré. Le capitalisme dépend de l'application des droits de propriété privée, qui incitent à l'investissement et à l'utilisation productive du capital". Ce qui manque cruellement à cette définition - comme toujours lorsqu'il s'agit d'économie - c'est le rôle de la technologie et de l'énergie. Ces deux facteurs ont joué un rôle crucial dans la conception de cette idée, sans parler de sa transformation en l'hydre qu'elle est devenue. Contrairement à ce que l'on pense généralement, je soutiens que ni l'un ni l'autre de ces facteurs essentiels - l'énergie et la technologie - n'ont été créés par le capitalisme lui-même, mais que c'est tout à fait l'inverse. C'est l'utilisation de la technologie et la disponibilité toujours croissante de l'énergie qui ont rendu le capitalisme possible, et c'est donc la perte de ces éléments qui finira par le mettre à genoux.
On ne peut espérer démanteler le capitalisme sans abandonner la technologie.
Je sais qu'il s'agit là d'une déclaration brutale, qui incitera peut-être certains de mes lecteurs à souligner à quel point je suis anti-technologie, et comment une révolution socialiste / des technologies vertes / le bitcoin / l'or / ou d'autres choses du même genre pourraient changer la donne du jour au lendemain. Tout ce que je demande, c'est de faire preuve de patience pendant encore quelques minutes.
Commençons par la colonisation, la boîte de Pétri dans laquelle la conception du capitalisme a eu lieu. D'après ce qui est enseigné dans les écoles occidentales (ou du moins là où je vis), la colonisation n'a été que le résultat de facteurs politiques et de décisions conscientes. La découverte des Amériques (que l'on prenait alors pour les Indes occidentales) a été rapidement suivie du génocide des populations indigènes et de l'accaparement par la force de leurs richesses et de leurs terres. La traite des esclaves a fourni aux colons un flux abondant de main-d'œuvre, souvent contrainte de travailler dans des conditions extrêmement difficiles. L'afflux d'or et d'autres matières premières en provenance des colonies nouvellement établies a rapidement transformé les sociétés européennes et donné naissance au capitalisme.
Ce qui manque cruellement à cette histoire, c'est la technologie qui a permis tout cela : les voiliers. Sans des navires suffisamment grands et solides, développés et perfectionnés pendant des siècles, ou sans des systèmes de navigation tels que la boussole, le sablier, l'astrolabe et le quadrant, il aurait été impossible à Christophe Colomb de se rendre aux Caraïbes et d'en revenir vivant. Notez que ces technologies existaient déjà, prêtes à être utilisées, bien avant que toute cette histoire ne commence. Ce n'est pas la colonisation qui a fait apparaître les voiliers et la navigation, mais l'inverse : ce sont ces technologies qui ont permis aux nations européennes de conquérir une grande partie du monde.
Il est peut-être encore plus important de noter que ces technologies étaient - comme l'aurait dit le regretté sociologue Lewis Mumford - de nature autocratique. En d'autres termes, les navires n'auraient pas pu être développés et construits sans un système hiérarchique et sans l'utilisation de la force et de l'agression. C'est peut-être un fait moins connu de l'histoire européenne, mais même après la conception des royaumes occidentaux, le continent était peuplé de tribus indigènes qui habitaient de nombreuses régions boisées et vivaient aux côtés des différents États d'Europe. Ainsi, avant que la colonisation des Amériques n'ait lieu, les grandes puissances européennes étaient déjà occupées à exterminer ces tribus et leur riche culture, désireuses de s'emparer de leurs ressources : en l'occurrence, le bois nécessaire à la construction de grands navires.
La construction d'un grand voilier - et a fortiori son équipage - nécessitait également une hiérarchie stricte et un royaume capable d'accumuler suffisamment de surplus de nourriture pour les menuisiers et les marins. Rien de tout cela n'était volontaire : les hommes étaient souvent recrutés de force pour rejoindre les équipages des navires, et la nourriture était confisquée aux paysans par les moyens bien établis d'un système féodal. Comme nous pouvons le constater, la technologie même - les navires - portait déjà les germes de la colonisation bien avant que Christophe Colomb ne prenne la mer en 1492. En d'autres termes, la colonisation - et plus tard le capitalisme - s'est produite parce qu'elle le pouvait, et non parce que quelqu'un a eu l'idée de la réaliser.
Comparez cela à ce qui s'est passé dans des sociétés plus égalitaires, comme les Polynésiens. Elles n'ont jamais évolué vers des civilisations despotiques contrôlant le commerce mondial, car elles utilisaient des technologies plus démocratiques, comme les petits catamarans. Ces navires auraient pu être construits et pilotés par une poignée d'humains, et surtout sans qu'il soit nécessaire de créer de grandes sociétés hiérarchiques, de confisquer des terres, de la nourriture et d'autres ressources. Le fait même que n'importe qui ait pu construire de tels navires (ou ses propres armes et outils d'ailleurs), a rendu ces technologies largement accessibles à tous les membres de la société. Lorsque tout le monde dispose du même arc et des mêmes flèches ou des mêmes moyens de subvenir aux besoins de sa famille, qui a besoin d'un roi pour autre chose que des rôles cérémoniels ? Cette démocratisation naturelle des technologies exigeait une structure beaucoup plus égalitaire où chacun avait son mot à dire, par opposition aux États autocratiques qui recouraient à l'oppression et à la guerre à grande échelle pour maintenir leur base technologique.
C'est dans ce contexte de technologies autoritaires utilisées par des États autoritaires que le capitalisme est apparu pour la première fois. Des abstractions telles que les droits de propriété (au-delà de la propriété personnelle) ont donné naissance à des sociétés privées qui se procuraient des fonds pour leurs voyages en vendant et en offrant des dividendes sur leurs actions. L'immense flux de richesses et de matières premières vers l'Europe a commencé à changer de mains sur les marchés d'échange. Les gens investissent dans l'espoir de réaliser des bénéfices. De nouvelles entreprises apparaissent un peu partout, financées par des prêts bancaires.
Rien de tout cela n'était possible, cependant, sans dépouiller les flux massifs de marchandises et de richesses de leur histoire tachée de sang. Les marchandises ont été appelées "marchandises" non seulement pour rendre leur prix plus comparable, et donc plus facile à échanger, mais aussi pour les dépouiller du contexte dans lequel elles ont été fabriquées. Les bijoux aztèques tachés de sang ont été délibérément effacés lorsque ces pièces complexes de métaux précieux ont été fondues et façonnées en pièces et lingots d'or uniformes. La sueur et les larmes des esclaves travaillant dans les plantations ont été effacées de la mémoire dès que le sucre et le coton qu'ils produisaient ont été versés dans des sacs uniformes. Tout a été transformé en petites unités de marchandises bien ordonnées, sans aucune histoire préalable.
Le même processus de décontextualisation s'est déroulé dans les plantations. Les espèces végétales, comme la canne à sucre, ont été arrachées à leur habitat d'origine - en même temps que les esclaves d'origine africaine - et placées dans un environnement stérilisé, dépourvu de ses habitants d'origine. Là, elles n'ont eu d'autre choix que d'accomplir leur tâche : faire fructifier leurs récoltes pour des coûts d'investissement faibles, voire minimes. Ce mépris total pour les habitats d'origine et les besoins de toutes les espèces (pas seulement humaines) a donné naissance à un processus facile à reproduire dans le monde entier. Tuer, détruire, remplacer, récolter. Rincer et répéter.
Sans aucun intérêt pour le contexte des deux côtés du processus, il était facile d'oublier que tout cela n'était qu'un boom ponctuel. On ne peut exterminer et voler une culture riche qu'une seule fois. On ne peut abattre une forêt ancienne et vendre son bois précieux qu'une seule fois dans une vie. On ne peut établir qu'un nombre limité de fermes d'esclaves avant de manquer de terres propices.
Comme on pouvait s'y attendre, une recette aussi "réussie" ne pouvait aboutir qu'à une croissance exponentielle - du moins jusqu'à ce que des limites soient atteintes. Ceux qui ont averti que cela ne pouvait pas continuer indéfiniment sur la base d'un ensemble fini de ressources ont été traités de tous les noms et mis à l'écart. Il était tout simplement trop rentable de continuer à piller la planète - une ressource finie après l'autre. La terre. Le charbon. Le pétrole. Le cuivre. Lithium. Le même processus s'est répété à chaque fois : explorer, tuer les habitants de la terre, extraire une réserve finie, puis passer à la prochaine grande opportunité.
Au diable les limites.
Si l'on considère l'essence des technologies "renouvelables", rien n'a changé. En fait, les choses n'ont fait qu'empirer. Les métaux des terres rares, le cuivre, l'argent, le nickel, le cadmium, le sable de haute pureté, l'acier sont tous nécessaires en plus grandes quantités en raison de la densité énergétique extrêmement faible et de l'intermittence des "énergies renouvelables". Les sites éoliens et solaires doivent être surdimensionnés de 4 à 7 fois pour atteindre le même niveau de production qu'une centrale au charbon ou au gaz. L'exploitation minière et la destruction de la nature doivent également s'accélérer à un rythme similaire, voire plus si l'on tient compte de la baisse rapide des teneurs en minerai. Le tout alimenté par des combustibles fossiles, bien sûr.
Les "énergies renouvelables" n'ont rien de renouvelable. Elles dépendent des mêmes technologies autocratiques que les combustibles fossiles qu'elles visent à remplacer.
Enfin, si l'on considère que les nations colonisatrices et leurs alliés sont responsables de 92 % des émissions excédentaires de dioxyde de carbone et de 74 % de l'utilisation excessive de matériaux dans le monde, il est clair que la crise écologique actuelle relève de la responsabilité des économies industrialisées en général et des entreprises qui les dirigent en particulier. En ce sens, la révolution verte n'est qu'une ultime tentative pour maintenir ce déséquilibre malsain du pouvoir et, en fin de compte, la domination des intérêts des entreprises, véritables vainqueurs de la colonisation.
Le capitalisme est apparu comme une réponse naturelle à l'utilisation de la technologie et à l'abondance temporaire de matières premières. C'était tout simplement le moyen le plus efficace de piller la planète, et il l'a donc emporté haut la main à chaque fois qu'il a été contesté. Même ses concurrents, dont on a fait grand cas, ont été construits sur la base de ses principes fondamentaux. Bien entendu, la manière dont les bénéfices sont distribués ou dont les actifs productifs sont détenus peut être très différente, ce qui se traduit par une inégalité plus ou moins grande au sein de la société. Indépendamment de la répartition des richesses et des questions de propriété, cependant, l'essence de tout système industriel à grande échelle est restée intrinsèquement autocratique. Tant que les ressources nécessaires à la construction d'appareils technologiques (qu'il s'agisse de voiliers, de machines à vapeur, de panneaux solaires ou de bitcoins) doivent être expropriées et extraites jusqu'à épuisement, le système restera le même.
Puisque l'économie, quel que soit le nom qu'on lui donne, ne s'intéresse qu'au retour net sur investissement, et non à la santé ou au bien-être des humains et du monde plus qu'humain, elle finira par se retourner contre sa propre population au fur et à mesure que sa base de ressources s'épuisera. Tant que tout, des matières premières à la main-d'œuvre, pouvait être extrait loin des "bastions de la démocratie", les citoyens étaient libres, mais seulement dans la mesure où cela ne nuisait pas aux intérêts des entreprises. Cela a donné l'illusion du progrès, ou d'une vie meilleure grâce à la technologie, ainsi que d'une meilleure santé, de soins pour les jeunes et les personnes âgées ou de droits pour les minorités.
Au fur et à mesure que les ressources se sont raréfiées, produisant de moins en moins de bénéfices, le système a commencé à montrer son vrai visage : l'autocratie. Les démocraties modernes de la planète ont commencé à se transformer en une variante locale d'un totalitarisme doux ou inversé. Il s'agit d'un arrangement politique dans lequel les entreprises exercent un pouvoir subtil mais substantiel sur un système qui semble superficiellement démocratique. Pensez-y : les entreprises donatrices rédigent des lois, souvent à l'encontre des intérêts des électeurs. Une prise de contrôle complète des médias et du discours civique. La fermeture de la dissidence et l'étiquetage de tout ce qui n'est pas le récit dominant comme étant de la désinformation dangereuse. La liberté et la démocratie se sont avérées n'être qu'une brève anomalie dans ce système intrinsèquement inhumain qui remonte à l'émergence des premiers empires.
Bientôt, lorsque la bulle de l'endettement éclatera, les gouvernements du monde entier n'auront d'autre choix que de prendre le contrôle total du système monétaire, quitte à interdire toute autre forme d'échange (bitcoin, or, ou quelque chose d'aussi simple que l'argent liquide). En contrôlant ce pour quoi l'argent peut être dépensé (et pour combien de temps en lui donnant une date d'expiration), les gouvernements centraux auront une chance de gérer la descente économique en aval d'une baisse constante de la production d'énergie.
La saisie des maisons des personnes incapables de payer leurs dettes et leur transformation en locataires, par exemple, semble être un autre moyen pour le superorganisme financier d'essayer de maintenir sa rentabilité. Vous posséderez moins (et de moins en moins) et serez... "heureux". Une vie modeste, peu énergivore et peu consommatrice sera présentée comme "verte et durable" afin d'atténuer la situation et de la rendre plus facile à accepter. Ne vous méprenez pas, je pense que la réduction de la consommation est la seule solution, mais seulement si tout le monde s'y met de manière concertée. Comme John Kenneth Galbraith l'a judicieusement observé, cependant :
"Les personnes privilégiées risqueront toujours de se détruire complètement plutôt que de renoncer à une partie matérielle de leur avantage. La myopie intellectuelle, souvent appelée stupidité, y est sans doute pour quelque chose. Mais les privilégiés ont aussi le sentiment que leurs privilèges, aussi flagrants qu'ils puissent paraître aux yeux des autres, sont un droit solennel, fondamental, donné par Dieu".
La classe dirigeante n'est donc pas du tout intéressée par la création d'un système plus durable. Elle a un autre objectif : rester au sommet, quoi qu'il arrive. Elle saisira donc toutes les occasions qui se présenteront au cours de cette longue période d'urgence pour concentrer le pouvoir, évincer les opposants politiques tout en essayant de maintenir le flux de profits vers un cercle de donateurs de plus en plus restreint. Encore une fois, un système entièrement dépendant de technologies autocratiques ne peut évoluer vers autre chose qu'une dystopie orwellienne. Dès que les apports énergétiques - qui maintiennent la base technologique sous-jacente - tombent en dessous d'un niveau minimal, le système s'effondre sous son propre poids.
L'évolution vers un monde de plus en plus numérisé (identité numérique, monnaie numérique, achats numériques) est donc un moyen incroyablement peu perspicace de maintenir le pouvoir. Alors que le réseau électrique commence à s'effondrer dans de nombreux endroits (en raison du manque de combustibles fossiles), ces systèmes autocratiques seront de plus en plus difficiles à maintenir. Les coupures de courant devenant plus fréquentes et plus longues, il sera de plus en plus difficile de payer au magasin ou de se connecter aux services gouvernementaux numériques - sans parler des nombreux travaux de bureau qui nécessitent un ordinateur et une connexion Internet stable.
Le système capitaliste centralisé actuel disparaîtra alors plus vite qu'on ne l'imagine. Le pouvoir politique retombera au niveau le plus bas possible (les municipalités) et les compétences réelles redeviendront un moyen respectueux de gagner un revenu. Le monde deviendra de plus en plus localisé et les gens seront obligés de compter sur le travail manuel pour survivre. D'un autre côté, en l'absence de chaînes d'approvisionnement sur les six continents, ils seront également contraints d'utiliser des technologies improvisées de faible technicité - et donc plus démocratiques - ouvrant ainsi la voie à la construction d'un monde nouveau, plus égalitaire. Combien d'entre nous vivront pour voir cela, quelles technologies resteront viables, ou combien de temps cela prendra, c'est ce que tout le monde peut deviner... Une chose semble sûre : des temps très intéressants nous attendent.
À la prochaine fois,
B
Notes :
Pour mémoire : Au cours des XIVe et XVe siècles, la Chine a également développé des navires d'exploration océanique, mais beaucoup plus grands et plus sophistiqués que leurs homologues européens, ce qui lui a permis d'étendre ses relations commerciales à l'Afrique de l'Est et à l'ensemble de l'océan Indien. À la suite d'un changement de pouvoir, l'attention s'est toutefois tournée vers l'intérieur, pour protéger la Chine des Mongols grâce à la construction et à l'expansion de la Grande Muraille. Le célèbre explorateur Zheng He s'est embarqué pour son dernier voyage en 1431 (six décennies avant que Christophe Colomb ne prenne la mer) et est mort sur le chemin du retour. Après sa mort, les explorations n'étaient plus financées, les navires étaient laissés à l'abandon ou brûlés sur les quais. Lorsque la Chine revient sur la scène plus de cent ans plus tard, le monde a déjà été transformé par le colonialisme.
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"le capitalisme est la croyance extraordinaire que les hommes les plus méchants, pour les motifs les plus méchants, travaillent d'une manière ou d'une autre pour le bénéfice de tous"
(John Maynard KEYNES)
"Jamais auparavant un groupe de personnes aussi réduit n'était devenu aussi riche en infligeant autant de dégâts"
Jean Jouzel : "Le capitalisme est incompatible avec la lutte contre le réchauffement climatique"....Le capitalisme tel qu'on le vit actuellement n'est pas compatible avec la lutte contre le réchauffement climatique. C'est vraiment un changement profond de mode de société auquel j'appelle. Si on reste dans le même cadre d'organisation de nos sociétés, je crains qu'on n'y arrive pas".
Débâcle de Truss : des marchés devenus lanceurs d'alerte - Michel Santi
https://michelsanti.fr/neoliberalisme/debacle-de-truss-des-marches-devenus-lanceurs-dalerte
Débâcle de Truss : des marchés devenus lanceurs d’alerte...ce néolibéralisme cultivé à l’excès par Thatcher, par Reagan, par Friedman et consorts a heureusement rendu l’âme sous les coups de boutoir … de ces mêmes marchés...Comment oublier l’effet dévastateur des années Reagan qui fut l’initiateur d’une politique ayant laminé à court, à moyen et à long terme la part de l’industrie dans le revenu national (de 21,5 % en 1980 à 12 % en 2005)
Le dernier coup de notre civilisation capitaliste... ou comment les solutions proposées ne font qu'aggraver le problème.
Pour ceux de mes lecteurs qui suivent ce blog depuis un certain temps maintenant, il est probablement devenu assez clair que cette civilisation industrielle capitaliste mondiale de haute technologie se termine. Ce que nous vivons ces jours-ci n'est rien d'autre que l'ouverture d'une période de long et lent déclin - qui prendra des décennies, voire un siècle à se dérouler - à moins d'un Armageddon littéral déclenché par des fondamentalistes qui y voient un moyen de rédemption. La dynamique sous-jacente, cependant, est commune à toutes les sociétés précédemment disparues : toutes les civilisations s'élèvent et tombent selon des schémas familiers et la nôtre n'est en aucun cas une exception. Que peuvent faire nos dirigeants et la classe politique en général à ce sujet ? Quels sont les moyens proposés pour éviter notre destin ? Ce sera le sujet du billet d'aujourd'hui.
Plus grand, meilleur, plus vert... ?
Les énergies renouvelables semblent faire l'objet de toutes les attentions pour lutter contre le changement climatique et, par la même occasion, contre les méchants États pétroliers. Ces ressources sont censées faire baisser les prix de l'électricité (après tout, ce sont les sources d'électricité les moins chères de nos jours) et nous donnent le seul espoir de poursuivre nos modes de vie confortables en Occident.
Pourtant, après un demi-siècle d'arguties sur le nucleaire et les énergies renouvelables, le pétrole, le gaz et le charbon alimentent toujours 85 % de l'économie réelle. Tout comme il y a 50 ans. Comme en témoignent les contrats d'électricité de l'Allemagne pour l'année à venir, après avoir connu une hausse vertigineuse de 500 % au cours de l'année écoulée, nous n'en sommes pas encore là... Mais atteindrons-nous jamais cette utopie ?
Pas vraiment.
Après avoir passé l'année dernière à rechercher si un tel changement majeur dans les ressources énergétiques est possible, je dois dire que c'est peu probable. Contrairement aux croyances modernes, nous ne disposons tout simplement pas des ressources, des technologies et du temps nécessaires pour remplacer les combustibles fossiles par autre chose à grande échelle. Des combustibles qui, en plus de surchauffer la planète, se rapprochent de plus en plus du bord de leur propre déclin terminal.
Comme je ne cesse d'en avertir mes lecteurs depuis près d'un an, cette crise n'est pas née d'une guerre, ni d'un rebondissement tant vanté après une pandémie - ces événements n'ont fait qu'empirer la situation. À ma grande surprise, ces faits et mes déclarations antérieures, publiées il y a dix mois, ont finalement été confirmés par le Financial Times, qui n'a toutefois pas admis que le pic pétrolier était bien là. Je suppose que nous n'aurons pas à attendre longtemps pour que cela soit admis aussi - seulement pour être utilisé comme un Casus Belli contre des états peu coopératifs, ou pour faire d'autres un protectorat.
Il s'agit d'un problème majeur, qui ne peut être résolu en ajoutant des énergies renouvelables au réseau et en espérant que les industries qui ont été rendues possibles par les combustibles fossiles changeront de source d'énergie (et tous leurs équipements connexes) du jour au lendemain - si tant est que cela soit possible. (Cette série d'articles peut être un bon point de départ pour comprendre ce qui me fait dire cela. Pour une version courte, cliquez ici).
En bref, la crise énergétique actuelle, qui a débuté il y a plus d'un an, n'est pas une anomalie. Elle n'est qu'un avant-goût de ce à quoi ressemblera la fin de l'ère des combustibles fossiles : sale, inégale et marquée par une stupidité extraordinaire.
Le vrai problème
Mis à part les aspects technologiques, un tel changement dans la consommation d'énergie ne répond toujours pas à la situation difficile de notre civilisation. En fait, il ne fait qu'aggraver la crise indicible de notre époque : l'épuisement insoutenable des ressources naturelles et minérales - la raison ultime de l'échec de toute civilisation.
Le changement climatique, la pollution, la sixième extinction de masse, les pandémies, les ruptures de la chaîne d'approvisionnement, les guerres, les crises successives sont autant de signes révélateurs du dépassement de nos possibilités. Aujourd'hui, nous devons nous battre bec et ongles pour rester à la pointe de tous ces problèmes - en même temps.
Si le monde était un endroit rationnel, dirigé par des personnes rationnelles et avant-gardistes, nous admettrions simplement, en tant que société, que l'ère de la croissance non durable est terminée et que l'inévitable début de la contraction est à nos portes. Nous devrions réduire nos activités jusqu'à ce que nous atteignions un état d'équilibre durable, ce qui serait considéré comme parfaitement normal et largement accepté.
En toute logique, nous nous efforcerions de réduire notre consommation d'énergie et de parvenir à une diminution pacifique de la population par le biais du contrôle des naissances et de l'éducation des femmes afin de prévenir les guerres et les conflits. Nous conclurions des accords internationaux sur la manière d'utiliser moins les ressources restantes de la Terre et de laisser une planète plus saine à nos descendants.
Menée avec soin et de manière coordonnée, cette décroissance planifiée ferait d'une pierre plusieurs coups : elle réduirait efficacement la charge polluante (de toutes sortes, et pas seulement le CO2), l'épuisement des ressources et des écosystèmes, retarderait l'apparition et réduirait la gravité du changement climatique, tout en prévenant la pauvreté et la faim.
Attention, il n'y a rien de révolutionnaire dans tout cela. Comme le dit le vieil adage :
"Si vous vous trouvez dans un trou, la première chose à faire est d'arrêter de creuser".
Les Verts ont raison de dire que nous devrions arrêter de forer pour trouver du pétrole - mais nous devrions également arrêter de creuser pour trouver des minéraux rares, de puiser dans des réserves d'eau limitées et de polluer les rivières et les nappes phréatiques avec une boue toxique radioactive.
Nous devons cesser de creuser notre propre tombe.
Comme le fait remarquer à juste titre un récent éditorial du Guardian :
L'exploitation minière des minéraux de terres rares génère de grands volumes de matériaux toxiques et radioactifs. La transition vers la neutralité climatique ne peut pas signifier le remplacement d'une dépendance aux combustibles fossiles sales par une dépendance aux matières premières dont l'extraction laisse de grandes étendues de la Terre inhabitables. [...] Guillaume Pitron a écrit dans son livre La guerre des métaux rares qu'au cours des trois prochaines décennies, "nous devrons extraire plus de minerais que les humains n'en ont extrait au cours des 70 000 dernières années".
Comparez cela avec le fait de "sauver la planète".
Une course folle
Revenons maintenant à la réalité. Faire en sorte que la classe politique prenne le train de la décroissance en marche est une course de dupes. Leur pouvoir n'est pas basé sur leur bonne volonté d'aider les gens qu'ils gouvernent, mais sur la richesse et la façon d'en faire plus. Ils ont été sélectionnés sur la base de leurs mérites à ignorer les besoins humains et de leurs talents à ne servir personne d'autre qu'un ensemble de puissants partisans ploutocratiques. Il semble de plus en plus que Chris Hedges, lauréat du prix Pulitzer, avait raison de dire :
"Il n'y a aucun moyen dans le système politique américain de voter contre les intérêts de Goldman Sachs. C'est impossible."
Eh bien, si je peux corriger : Il n'y a aucun moyen dans aucun système politique de voter contre l'intérêt de l'élite dirigeante. C'est impossible. Contrairement à ce que les politiciens voudraient nous faire croire, ce ne sont pas eux, mais le groupe de personnes ultérieures - la classe ploutocratique milliardaire - qui mènent la barque. C'est ce groupe de personnes, qui change constamment (en fonction de l'industrie qui exerce le plus grand pouvoir de lobbying), qui fournit à ses politiciens préférés des budgets électoraux, tout en attendant en retour une législation laxiste, des allégements fiscaux, des subventions et de grosses commandes gouvernementales.
Faut-il s'étonner que le pillage de la planète sous le déguisement de la loi et des accords commerciaux internationaux soit si rentable ?
Quelle différence y a-t-il alors entre la construction de cette utopie verte et l'obtention de davantage de combustibles fossiles ? À mon avis : pas grand-chose. Nous devrions utiliser les énergies renouvelables comme un parachute pour nous faire atterrir en toute sécurité dans un monde désindustrialisé, et non comme un moyen de poursuivre ce modèle complètement fou.
Si vous pensez que les riches et les puissants vont se limiter, ou laisser ce savoureux troupeau de mammouths en liberté, laissant les individus les chasser et récolter les bénéfices, alors il y a de fortes chances que vous vous fassiez des illusions. Le système est lourdement truqué pour profiter aux entreprises, aux régulateurs et à tous les intermédiaires (inutiles) - et non aux utilisateurs finaux qui installent les panneaux sur leurs toits.
C'est le nœud de notre problème - et le problème de nombreuses civilisations antérieures qui ont déjà terminé leur propre cycle de croissance, de prospérité et de chute. Leurs élites cessent simplement d'être une minorité créative et ne deviennent rien de plus qu'un fardeau pour leur société. Elles sont devenues séniles et ressemblent beaucoup au proverbial vieux chien : elles ne connaissent qu'un seul truc pour faire des affaires et pensent que nous vivons encore au bon vieux temps, lorsque les ressources étaient abondantes et que les conséquences de leur utilisation étaient très éloignées. Maintenant que les conséquences sont arrivées, nos élites se sont retrouvées crise après crise, ce qui équivaut à une longue urgence.
Je doute, cependant, qu'aucun d'entre eux ne se rende compte du véritable enjeu de notre époque. Au lieu de cela, elles continueront à maltraiter notre situation difficile qui exige moins de technologie et de pillage - pas plus de la même chose.
Tout en étant occupées à poursuivre l'écocide par différents moyens et émerveillées par leurs propres pouvoirs technocratiques, nos élites ont oublié les problèmes croissants de la moitié inférieure de la société : la désindustrialisation non planifiée, l'augmentation des prix de la nourriture et de l'énergie, l'accroissement des inégalités - une crise générale du coût de la vie. Tous ces éléments appellent une correction qui, si elle est trop longtemps retardée, pourrait ne pas être rationnelle ou technique, mais viscérale : fondée sur une croyance religieuse selon laquelle la fin des temps est arrivée et que les pécheurs du monde doivent brûler dans un feu purificateur... Un schéma bien trop familier vers la fin de l'ère de rationalité d'une civilisation et sa perte de contact avec la réalité - mais nous y reviendrons dans un autre billet.
Jusqu'à la prochaine fois,
B
Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite)
L'impossible transition écologique (sous le capitalisme) - Extrait - Presse-toi à gauche !
https://www.pressegauche.org/L-impossible-transition-ecologique-sous-le-capitalisme-Extrait
L’impossible transition écologique sous le capitalisme... le cadre dans lequel cette option écologique peut être donnée exige une société juste et égalitaire pour éviter les guerres pour un bien rare : l’énergie ; une société capable de générer un nouveau mode de vie avec des valeurs et une culture alternatives à celle du profit individualiste
Le capitalisme néolibéral n’est plus compatible avec le défi climatique
Chaque jour me rend plus inquiet, car nous sommes devant les silences qui précèdent les grands périls. Une planification étatique est indispensable.
Commentaire de Jean-Marc Jancovici sur Linkedin : "Il a occupé des fonctions de dirigeant dans le conseil en stratégie, la finance, la bourse, et préside le "Belgian Finance Center", qui a pour objet de promouvoir la place financière belge.
"Il", c'est Bruno Colmant, dont on peut donc dire, sans que cela ne comporte le moindre jugement de valeur, qu'il a baigné pendant l'essentiel de sa vie professionnelle dans la mondialisation et le "capitalisme néolibéral".
En effet, les clients des "grands cabinets de conseil en stratégie" sont essentiellement des multinationales, en général ravies de l'existence du capitalisme libéral mondialisé, puisque qu'elles tiennent le haut du pavé dans ce système.
De même, sans "capitalisme néolibéral", les institutions financières feraient de moins bonnes affaires, car il n'y aurait pas de marchés financiers aussi développés !
Il est donc pour le moins inattendu que ce soit ce genre de profil qui signe une tribune dans "La Libre Belgique", où elle condamne on ne peut plus clairement la logique de ce système, allant même jusqu'à comparer notre situation (face aux périls environnementaux) à celle de 1937, où les signaux d'alarme se multipliaient sans que personne n'agisse à la mesure de la menace qui devait mettre l'Europe à feu et à sang peu après.
Invoquant - positivement - Meadows (c'est rare pour un acteur des marchés financiers, je peux en témoigner !), René Dumont et Pie XI, et soulignant - très négativement cette fois - les risques "d'hystérie mondiale" et de perte de contrôle qui nous menacent à un horizon pas si lointain si nous ne savons pas relever le défi environnemental, l'auteur appelle à oublier d'urgence Adam Smith et la religion des marchés. Pour en rajouter une couche sur ce sujet, on peut lire ou relire le pamphlet croustillant de Stephane Foucart "Des Marchés et des Dieux" : https://bit.ly/3Cg3OHl
Bien évidemment, d'aucun(e)s pourront dire que c'est facile de dissuader les autres de s'attabler une fois que l'on a bien profité du repas. Il n'en reste pas moins que c'est souvent de l'intérieur que les charges les plus efficaces sont menées : si cette tribune parvient jusqu'aux yeux de quelques dirigeants européens, comme elle vient de "l'un des leurs", elle sera peut-être beaucoup plus utile pour les ébranler que si elle venait d'Attac ou de la CGT.
Car l'essentiel est bien de changer le logiciel européen d'urgence. Notre projet, historiquement fondé sur le libre échange et "les marchés", va droit dans le mur à l'heure de la contraction physique des ressources. Que cette conclusion soit portée par un nombre croissant de personnes "de l'intérieur" augmente la probabilité d'une nécessaire modification des règles. Espérons à temps."
https://www.lalibre.be/…/le-capitalisme-neoliberal-nest-pl…/
(posté par Joëlle Leconte)
https://www.facebook.com/jeanmarc.jancovici/posts/pfbid0sxt7yqJu6mf6Jh3XHoZuLgr17HRFiGpHtvV3iQ7cHcNJneRvRVygJQitYpzVv4X1l
C’est le Bronx dans le pays de sa majesté et pour une fois, Meghan Markle, la princesse woke, n’est pas à la manœuvre. Pris de panique, les anglais se sont précipités aux stations d’essence pour faire le plein. Du coup, une grande partie des stations sont vides. L’Angleterre n’a pas un problème d’essence mais de logistique.
De plus, après avoir libéralisé son marché de l’électricité et du gaz, les anglais se retrouvent devant des factures énergétiques épouvantables. Si vous voulez connaître l’impact de la libéralisation du marché du gaz et de l’électricité, l’Angleterre est un bon point de départ. Au lieu de garantir des prix bas, c’est tout le contraire. Les entreprises s’entendent pour fixer des prix élevés et font tout pour réduire leurs coûts. Du coup, toute l’infrastructure énergétique anglaise se délabre. Certains pointent du doigt le Brexit, mais en réalité, la libéralisation à outrance plaide coupable.
Avec la hausse des prix du gaz, deux entreprises d’engrais ont cessé leur production. Du côté des fournisseurs de gaz, People's Energy, Utility Point, PfP Energy, MoneyPlus Energy, Green Energy et Avro, ont fait faillite laissant 1,5 million de foyers sans gaz.
La compagnie pétrolière Shell va installer 50'000 bornes de recharges électriques durant les 4 prochaines années sur le territoire. Dans l’ambiance actuelle, l’annonce est piquante.
Les pétroliers et gaziers ont demandé au gouvernement d’exploiter 18 nouveaux gisements dans la Mer du Nord. Cette demande va tester la volonté de Londres d’atteindre zéro émissions d’ici à 2050
https://2000watts.org/index.php/energies-fossiles/peak-oil/1226-energies-economie-petrole-et-peak-oil-revue-mondiale-septembre-2021.html
16 chiffres qui indiquent que le capitalisme américain atteint ses limites - Business AM
https://fr.businessam.be/16-chiffres-qui-indiquent-que-le-capitalisme-americain-atteint-ses-limites/
16 chiffres qui indiquent que le capitalisme américain atteint ses limites...Dans la théorie, et selon le fameux rêve américain, tout le monde peut réussir. Mais aujourd’hui, on peut penser que cette politique a atteint ses limites, car dans les faits, ce n’est pas le cas.
..les banques centrales sont passées du rôle de grandes modératrices à celui de pousse au crime...elles sont un maillon décisif du grand dérèglement du capitalisme, et de ce sentiment d’un jeu à la Ponzi qui finira mal..
7 graphiques montrant comment le capitalisme de ‘destruction créatrice’ s’est transformé en capitalisme de planche à billets....l’économie est soutenue par une intervention gouvernementale sous la forme d’une baisse continue du taux d’intérêt principal et d’une politique monétaire expansionniste.
En permettant à des entreprises non compétitives de survivre, ces programmes de soutien faussent la concurrence. Mais il vont aussi faire exploser la dette publique. Et rien ne dit que la croissance ou l'inflation seront au rendez-vous pour la résorber...
‘Le système capitaliste doit être revu’: l’appel ne provient pas de militants de gauche, mais de la nouvelle rédactrice en chef du Financial Times ou encore du fondateur du Forum économique mondial... le capitalisme a besoin d’un ‘reset’, a-t-elle estimé.
Une publication de Natixis : La crise du coronavirus sonne-t-elle la fin du capitalisme néo-libéral ?
Commentaire de jean-Marc Jancovici :
"[La crise du coronavirus va très probablement provoquer] la fin du "capitalisme néo-libéral" qui avait choisi la globalisation, la réduction du rôle de l’Etat et de la pression fiscale, les privatisations, dans certains pays la faiblesse de la protection sociale"
De qui est cette citation ? De la France Insoumise ? De Extinction Rebellion ? D'un repenti de l'Organisation Mondiale du Commerce ou de la DG Concurrence européenne ?
Que nenni : cette phrase résume un papier de recherche de Natixis, la banque d'affaires du groupe BPCE
Ont-ils (ou auront-ils) raison ? L'avenir le dira, mais le simple fait de l'évoquer à ce stade est un signe des temps intéressants. Affaire à suivre !"
Publication complète ici : https://lnkd.in/g_diX47
(publié par Joëlle Leconte)
https://www.facebook.com/jeanmarc.jancovici/posts/10159154400702281
La crise du coronavirus signe-t-elle la fin du libéralisme total ...le paradigme a clairement changé et l’État français mentionne la possibilité de nationalisations pour aider les entreprises...Dans la stratégie du gouvernement, c’est un virage net à 180 degrés...
C’est une histoire condamnée à se répéter indéfiniment car, depuis la nuit des temps, l’enrichissement des uns s’est toujours pratiqué au détriment des autres. Les inégalités sont souvent décrites par la classe aisée comme un effet collatéral inévitable, quasi-mécanique, de la prospérité et des innovations censées pourtant profiter à l’ensemble de la communauté....
...Il y a des décennies, Barry Commoner a montré que les crises environnementales, énergétiques et économiques avaient une cause commune: un système qui exige des profits accrus à tout prix....
Les grands maîtres du capitalisme l'admettent : le système est brisé - Express
https://fr.express.live/les-grands-maitres-du-capitalisme-ladmettent-le-systeme-est-brise/
.....La fin du capitalisme commence quand la pauvreté devient le produit final d’un monde plein d’abondance, disait Karl Marx. Il risque d’avoir une nouvelle fois raison. Une grande partie de la société semble être exclue des fruits de la croissance économique..................................
Dans notre monde gyroscopique, les votes du Brexit et de l’élection de Donald Trump à la présidence américaine sont des faits majeurs. Ils ne relèvent pas de tendances marginales mais de discontinuités sociopolitiques cruciales. Ces deux votes sont d’ailleurs autant les symptômes que les aboutissements de prédispositions qui trouvent peut-être leur origine il y a quatre décennies.
Il y a deux générations, un nouvel ordre économique s’est idéologiquement imposé: le néolibéralisme. Ce terme désigne une version dérivée du libéralisme, que certains assimilent au paroxysme de la logique libérale. Il a apporté des innovations spectaculaires entraînant une croissance économique extraordinaire. Sa naissance coïncida avec l’orientation politique menée par Margaret Thatcher (Première ministre de 1979 à 1990) au Royaume-Uni et par Ronald Reagan (Président de 1981 à 1989) aux États-Unis, à la suite du désastre économique qui confronta le monde occidental, dans les années 70, à une vague d’inflation et à un chômage structurel de masse.
Ce courant néolibéral abolit les règles macro-prudentielles édictées dans les années trente et conduisit à démanteler, en Europe, les grands monopoles d’État. Singulièrement, c’est au moment de la révolution néolibérale que la France choisit d’élire le premier président socialiste depuis le Front populaire de 1936, mais la parenthèse socialiste ne dura que deux ans.
Le néolibéralisme modifie le sens du temps économique en empruntant ses richesses au futur.
Ce choc néolibéral entraîna une mutation sociologique titanesque en Europe, d’autant qu’il coïncida avec la chute du mur, en 1989. L’Europe traditionnelle s’était longtemps appuyée sur un capitalisme rhénan né de l’ordolibéralisme allemand des années 30 et fondé sur un dialogue social de qualité entre les différents acteurs de production et l’État. L’ordolibéralisme découle lui-même de l’École économique de Fribourg selon laquelle l’État doit créer un cadre institutionnel propice à l’économie et maintenir un niveau sain de concurrence. L’État a donc un rôle d’"ordonnateur". Ce modèle économique se base sur l’idée d’une responsabilisation solidaire.
Emprunter au futur
Le néolibéralisme, d’essence protestante, fut donc un choc puissant puisque le modèle social-démocrate européen d’après-guerre était fondé sur la contribution conjointe des facteurs de production à la prospérité collective, partageant les richesses obtenues. Au contraire, le néolibéralisme modifie le sens du temps économique en empruntant ses richesses au futur, raison pour laquelle la notion d’économie de marché, au sein duquel tout se négocie et s’emprunte, s’est développée.
Le consensus de Washington de 1990, qui officialisa cette révolution avec le soutien du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale et du Trésor américain, consacra d’ailleurs ce modèle d’économie de marché. Dans les pays anglo-saxons, les attributs du capital furent ainsi restaurés au détriment du travail. Selon la "théorie du choc", élaborée en 2007 par la journaliste Naomi Klein, tout événement fractal, à l’instar de la vague néolibérale, devait être exploité pour dissoudre les structures collectives et solidaires.
Dans les pays anglo-saxons, les attributs du capital furent ainsi restaurés au détriment du travail.
Pendant quarante ans, le modèle néolibéral s’est donc amplifié, tirant profit de la mondialisation et de la récente digitalisation. Il s’est d’autant plus renforcé que ses contre-modèles (le maoïsme et le marxisme-léninisme) se sont effondrés. Mais aujourd’hui, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, c’est-à-dire ceux qui ont promu le néolibéralisme et l’économie de marché universelle, se referment. Ces deux pays veulent la mobilité des capitaux, mais plus celle du travail. Ils s’extraient donc du modèle qu’ils ont promu à leur bénéfice.
Les autres pays, et certainement ceux d’Europe occidentale, sont indirectement vassalisés, tout en restant dépendants de capitaux américains. Le néolibéralisme anglo-saxon deviendrait alors, très singulièrement, un néocolonialisme. Et les pays européens, désormais dépendants d’une expansion digitale émanant essentiellement des Etats-Unis, deviennent des pays colonisés.
Et le capitalisme?
Avec le recul du temps, nous avons confondu le néolibéralisme avec un ordre économique intemporel. Nous avons, à juste titre, cru que le multilatéralisme était le garant de la prospérité mondiale mais deux puissances mondiales s’en extraient. Nous avons aussi confondu la mondialisation avec le temps des colonies. Ou, plus précisément, nous avions pensé coloniser d’autres pays en développement, au travers d’une délocalisation de notre production, sans comprendre que l’Europe devenait la colonie des pays, dont les Etats-Unis, qui s’extraient de cette même mondialisation.
Avec le recul du temps, nous avons confondu le néolibéralisme avec un ordre économique intemporel.
L’Europe a mondialisé à l’est sans réaliser qu’elle devenait vassalisée par l’ouest. Il est donc possible que la parenthèse néolibérale dont la première césure fut marquée par les élections de Margaret Thatcher et de Ronald Reagan se referme avec une autre césure: le référendum de David Cameron et l’élection de Donald Trump.
Mais attention: si le néolibéralisme est en phase de contraction, cela ne veut pas dire que le capitalisme s’apaise. Au contraire! Il va s’amplifier. L’autre question est de savoir si le populisme qui a accompagné ces évolutions britannique et américaine pourrait se diffuser en Europe? Après tout, nous vivons toujours, avec retard, les évolutions sociétales anglo-saxonnes. Et c’est bien le cas, mais de manière différente puisque l’Europe a fondé la notion d’État-providence.
Chez nous, il s’agit d’un rejet des États qui n’ont pas su protéger leurs populations contre certains méfaits du néolibéralisme. Depuis la crise de 2008, le travail devient précaire et le pouvoir de négociation salariale des travailleurs est limité dans une économie désormais digitale et robotisée. L’Europe est menacée d’un chômage endémique et structurel pour les personnes moins qualifiées alors que la mobilité des capitaux met en concurrence les systèmes sociaux.
Si le néolibéralisme est en phase de contraction, cela ne veut pas dire que le capitalisme s’apaise, au contraire!
Nos démocraties, en partie épuisées par des forces politiques traditionnelles qui ne prennent pas la mesure des enjeux sociétaux et s’accommodant mal de la souveraineté du marché, s’inscrivent aujourd’hui dans des élans populistes qui rejettent un État traditionnel n’offrant pas de bouclier satisfaisant contre les dérives du marché mondialisé. Le populisme reflète bien sûr des craintes existentielles devant les débats contemporains comme l’immigration. Mais il est aussi l’expression d’un déclin démocratique qui va caractériser structurellement les prochaines décennies. Les États européens, s’ils ne s’ajustent pas, deviendront les premières victimes non seulement de la mondialisation néolibérale mais aussi de sa récente contraction, malgré le fait que le budget public de nombreux états dépasse 50% du PIB!
C’est là que se tient tout le paradoxe de ces élans du peuple: en menaçant les structures étatiques qui ont accompagné un capitalisme anglo-saxon néolibéral désormais en contraction, le populisme s’attaque en réalité au premier acteur susceptible de le contrer. Les piliers de nos démocraties, ainsi affaiblis, disparaîtraient dans les sables mouvants d’un ordre marchand entretenant l’individualisme et la peur collective. Au motif d’être la négation du néolibéralisme, le populisme en serait l’aboutissement. Ceci n’est pas sans rappeler le conte de Georges Sand, dans lequel le héros, Gribouille, se jette dans l’étang pour échapper à la pluie.
En menaçant les structures étatiques qui ont accompagné un capitalisme anglo-saxon néolibéral désormais en contraction, le populisme s’attaque en réalité au premier acteur susceptible de le contrer.
À moins que l’exclusion et l’ostracisme soient des choix démocratiquement partagés et que la pensée choisisse d’être enlisée, la question se pose de savoir ce que nous souhaitons aujourd’hui. Une société d’ouverture dans l’intelligence de la justice et de la sécurité? Ou une société apeurée qui fragmente les classes sociales, les attachements territoriaux et les affinités linguistiques et culturelles? J’ai la conviction que les individualismes doivent être rassemblés dans un projet collectif dirigé par un État au service de la bienveillance sociale, résolument tourné vers la prévalence du bien-être harmonieux des générations futures.
Cela passera par un nouveau pacte social équilibré, par la restauration d’un dialogue social véritable et par une considération écologique absolue, même si ces trois objectifs sont, à certains égards et à court terme, contradictoires. Si une parenthèse anglo-saxonne de 40 ans se ferme, il faut que l’Europe trouve cette mystérieuse troisième voie sociale-libérale qui combine la spontanéité du capitalisme et la bienveillance sociale.
Bruno Colmant
Professeur à l'ULB, l'UCLouvain et la Vlerick Business School, membre de l'Académie royale de Belgique
La fin du capitalisme a sonné lorsque la pauvreté devient le produit final d'un monde d'abondance, disait Karl Marx. C'est ce qui se produit lorsque trop de richesses sont concentrées dans les mains de trop peu de personnes. Le magazine libéral The Economist publie un dossier consacré à cette problématique cette semaine. Le titre ne laisse planer aucun doute : "La prochaine révolution capitaliste"....
Une énergie considérable est déployée pour le répéter : « L’ère de l’énergie bon marché est terminée », alertent des biophysiciens finlandais dans un rapport remis aux Nations unies le 14 août 2018. Mais plutôt que de seulement reprendre ce constat à d’autres scientifiques, ils en tirent une conclusion sans appel : le modèle économique issu de l’ère industrielle arrive lui aussi à son terme...
Ce capitalisme qui doit tout à la Réforme
http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/ce-capitalisme-qui-doit-tout-a-la-reforme-756908.html
Il y a 500 ans, Martin Luther publiait ses 95 thèses, ouvrage fondateur du protestantisme qui allait déclencher l'effondrement du catholicisme et l'avènement du capitalisme. Mais aujourd'hui, c'est le capitalisme qui se fissure de toutes parts...
Il y a 500 ans, presque jour pour jour, le 31 octobre 1517, un moine allemand de l'ordre des Augustins, Martin Luther, envoyait une lettre à son archevêque exprimant son inquiétude au sujet de certaines pratiques des responsables de l'Église.
À l'époque de Luther, les ecclésiastiques avaient pris l'habitude de vendre des «indulgences» à tous ceux qui voulaient être pardonnés pour leurs péchés.
Martin Luther a estimé que cette pratique était un affront terrible à la doctrine chrétienne. Il a envoyé une lettre dans la chaîne de commandement de son ordre religieux en présentant 95 points logiques.
La lettre de Luther n'était guère une œuvre révolutionnaire. Il était poli. Formel. Presque apologétique.
Il demande en fait pardon à l'Archevèque d'avoir "osé penser à une lettre à la hauteur de Sa Sublimité".
Et pourtant, cette lettre est responsable du lancement de l'une des plus importantes transformations sociales de toute l'histoire de l'humanité, ce que nous appelons aujourd'hui la Réforme protestante.
La Réforme était en fait le rejet de l'autorité centrale ... et plus spécifiquement, l'Église.
Quand la chute de Rome au 5ème siècle AD a laissé un vide à travers l'Europe occidentale, c'est l'Eglise Catholique qui est intervenue pour remplir ce vide.
Au XVIe siècle, l'Église avait solidement consolidé son influence sur presque tous les aspects de la vie - le commerce, la politique, l'économie, les affaires familiales, la guerre, les tendances sociales, etc.
Au cœur du pouvoir de l'Église se trouvait son monopole théologique.
Il faut se rappeler que la Bible était écrite en latin à l'époque ... une langue que peu de gens du peuple pouvaient parler, et encore moins lire. Les responsables de l'Église avaient donc un contrôle incontesté sur leur troupeau.
Imaginez que des extraterrestres arrivent sur Terre demain matin en brandissant un livre rempli de secrets cachés de l'univers.
Cela semble excitant. Sauf que le livre est seulement écrit dans leur langue étrangère. Donc, quiconque voulait comprendre les secrets n'aurait d'autre choix que d'écouter les extraterrestres.
L'Église avait cette même autorité il y a 500 ans ... bien qu'il y avait déjà une communauté croissante qui s'était lassée de l'obéissance aveugle.
Martin Luther est devenu le champion des catholiques las de l'autorité de l'Église.
Il a été immédiatement considéré comme une menace par le pape à Rome, et les responsables de l'Église ont ordonné à leurs meilleurs érudits de réfuter les arguments de Luther.
Luther a répondu en écrivant une explication courte et simple de son point de vue dans la langue allemande locale afin que les gens ordinaires puissent le lire et le comprendre.
Cette lettre fut incroyablement populaire et très largement diffusée ... ce qui rendit le Pape encore plus furieux.
A chaque effort de l'Église pour faire taire Martin Luther et le calomnier, il a répondu avec des essais plus simples, en allemand, pour les habitants.
Sa popularité a augmenté. Les jeunes ont afflué à son secours, au point qu'ils ont saisi et détruit une partie de la propagande anti-Luther de l'Église.
Au moment où l'Église excommunia Martin Luther en 1521, il était déjà un héros et un symbole de la révolution.
L'année suivante, la traduction en allemand du Nouveau Testament par Luther était publiée.
C'était révolutionnaire. Pour la première fois en 1000 ans, les gens avaient des moyens pour rejeter l'autorité de l'Église et explorer leurs propres croyances spirituelles.
Soudainement, il n'y avait plus d'intermédiaire entre un individu et sa relation avec un pouvoir supérieur - c'était le summum de la décentralisation.
Sous-tendait toute cette révolution était une technologie relativement nouvelle de changement de jeu - la presse d'imprimerie de type mobile.
L'imprimerie existe déjà en Europe depuis plusieurs décennies. Mais ce n'est que avec l’arrivée de Martin Luther que l’imprimerie commença à intervenir dans le changement social.
Grâce à cette puissante technologie, Luther et ses disciples ont pu publier rapidement leurs idées (y compris la Bible en langue allemande) et les diffuser à travers le continent plus rapidement que jamais auparavant…
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Les sociétés cotées, que ce soit aux États-Unis ou en Europe, sont assises sur une montagne de cash. Et généralement, quand une entreprise se trouve dans ce cas-là, elle a trois possibilité...