le risque semences...
Arthur Ernest Watkins (1898-1967) était un scientifique britannique qui a œuvré dans le domaine de la biologie végétale durant la première moitié du XXe siècle. De nature «discrète et timide», il n'a pourtant pas manqué de se faire remarquer en nous épargnant peut-être de dévastatrices famines. Rien que ça. Considéré comme un pionnier de la génétique des plantes, le botaniste s'est amusé à récolter des échantillons de blé provenant de trente-deux pays différents, au cours des années 1920 et 1930.
Aujourd'hui conservés au John Innes Centre, situé à Norwich (est de l'Angleterre), ces échantillons constituent la plus grande collection mondiale du genre. Cette dernière comporte une diversité génétique impressionnante qui pourrait permettre de protéger le blé des menaces climatiques et des maladies, développe le magazine Popular Mechanics.
Assemblée à partir de 1928, la collection d'Arthur E. Watkins a récemment fait l'objet d'une étude menée par des scientifiques du John Innes Centre et de l'Institut de génomique agricole de Shenzhen, en Chine. En séquençant les 827 variétés présentes, les chercheurs ont découvert que le blé moderne ne possède que 40% de cette diversité génétique. Publiés le 17 juin dans la revue scientifique Nature, ces résultats indiquent que 60% des gènes bénéfiques présents dans les échantillons d'Arthur E. Watkins sont absents des variétés contemporaines.
«Nous avons découvert que les variétés locales d'Arthur E. Watkins sont pleines de variations utiles qui sont tout simplement absentes dans le blé moderne et il est impératif de les intégrer dans la sélection moderne», a déclaré Simon Griffiths, coauteur de l'étude et chercheur au John Innes Centre, dans un communiqué de presse.
Les recherches montrent que parmi les sept groupes ancestraux trouvés dans la collection du botaniste anglais, seuls deux sont utilisés dans la sélection végétale moderne. Cette diversité génétique pourrait nous aider à développer des souches de blé plus résistantes aux maladies fongiques et aux conditions climatiques extrêmes. Par exemple, un gène identifié dans les échantillons d'Arthur E. Watkins, lors d'une étude distincte, offre une résistance efficace contre les maladies du blé dites «charbons» et contre l'oïdium.
Ces découvertes peuvent également avoir une importance dans la lutte contre le changement climatique. Elles pourraient permettre de créer des variétés nécessitant moins d'engrais azotés, réduisant ainsi les émissions de gaz à effet de serre.
Avec des ressources telles que le Watkins & Worldwide Wheat, une plateforme d'information dédiée à l'étude génomique du blé, la science ouvre la voie à une agriculture plus résistante et durable, face à des défis colossaux (notamment au niveau climatique). Reste à savoir si, lorsqu'il collectionnait ses graines, Arthur E. Watkins pensait devenir un tel protagoniste de l'histoire du blé ou s'il est simplement devenu un héros malgré lui.
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https://korii.slate.fr/et-caetera/collection-centenaire-graines-botaniste-anglais-sauver-monde-arthur-ernest-watkins-futur-agriculture-recherche-biologie
Conséquence de la guerre en Ukraine, les semenciers français, très présents dans ce pays maintenant dévasté, s'inquiètent de la disponibilité des graines en 2023.
Y aura-t-il assez de semences l'année prochaine ? C'est, du fait de la guerre en Ukraine, un sujet d'inquiétude pour les semenciers en France, premier exportateur mondial de ces petites graines qui donneront les blés, tournesols ou luzernes de demain.
Pour pouvoir semer, il faut avoir des graines. Ces graines viennent d'entreprises semencières qui travaillent avec des "agriculteurs multiplicateurs", qui vont consacrer une partie de leur activité à la production de semences, expliquent Didier Nury et Rachel Blumel, respectivement vice-président et directrice générale de l'Union française des semenciers (UFS).
Ces semences seront commercialisées à deux fins : soit pour être mises en terre pour donner blés, maïs, tournesols etc., qui seront ensuite vendus sur le marché pour faire du pain, de l'alimentation pour bétail ou de l'huile ; soit à nouveau cultivées en vue de reconstituer le stock de semences pour la saison suivante.
L'Ukraine, gros exportateur de blé, de colza et de tournesol, est aussi un acteur majeur de la production de semences, activité stratégique pour ses équilibres agricoles mais aussi ceux de ses partenaires économiques. En 2020, le pays a produit des semences de céréales sur 70.000 hectares, contre 120.000 pour la France et environ 115.000 pour l'Espagne et l'Allemagne.
L'Ukraine est la deuxième destination hors UE des exportations françaises de semences et plants. Plusieurs entreprises françaises y ont implanté des unités de production et de distribution. Ces activités, conjuguées aux exportations, représentent près de 400 millions des 3,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires des entreprises semencières françaises. Une quinzaine d'entreprises ont été impactées par la guerre (problèmes de transport, approvisionnement, sécurité).
L'impact du conflit
L'Ukraine exporte surtout des commodités (blé, tournesol) sur les marchés. Privée d'une partie de ses semences, elle produira donc moins et exportera moins, indépendamment de l'amélioration des conditions d'exportation. Les agriculteurs, qui étaient exemptés de conscription, ont pu semer presque partout, mais avec des difficultés : manque de carburant pour les tracteurs, champs minés près des lignes de front, destruction de matériel agricole.
On évalue ainsi la perte de la production de semences à entre 40 et 50%. C'est cela qui va poser problème. Parce que ce qui ne sera pas semé ne sera pas disponible pour être mis en culture l'hiver prochain. Il n'y aura pas de pénurie pour 2023 en France. En revanche, il va commencer à y en avoir au niveau de l'Union européenne dès 2023 et en 2024.
Peut-on pallier ce manque ?
La France aurait la possibilité technique de compenser, mais la flambée des cours des productions agricoles a rendu les semences moins attractives. Les agriculteurs ont été plus nombreux à privilégier la vente sur les marchés. En temps normal, le tournesol-semence, par exemple, est mieux payé que celui destiné à la fabrication d'huile, ce qui encourage les agriculteurs multiplicateurs.
On ambitionnait cette année d'augmenter la production française de semences de tournesol, mais on n'a semé que 15.000 hectares, en baisse d'environ 10% par rapport à 2021. La disponibilité en semences pour 2023 sera donc amputée d'autant. La production de semences demande aussi plus de travail. Nous avons des contraintes d'irrigation – pour le maïs, le tournesol – au moment de la pollinisation : il faut éviter le stress hydrique pour que la plante produise ensuite à pleine capacité.
Nous avons aussi des contraintes d'isolement : on demande à ce qu'il y ait entre 500 et 1.000 mètres entre les cultures pour garder la pureté de la variété qui en résultera – pour éviter les transferts via les pollens. Pour la production mondiale à venir de tournesol, tout dépendra de la récolte de semences en Californie, Turquie, Russie ou Argentine. Les espèces d'hiver, comme le blé, étaient déjà semées quand le conflit a débuté : s'il y a un problème de disponibilité, ce sera plutôt en 2024.
Capital avec AFP
https://www.capital.fr/economie-politique/disponibilite-des-semences-linquietude-grandit-avec-le-conflit-en-ukraine-1440772
Depuis une semaine, les alertes à une sécheresse précoce se multiplient : 15 départements français sont déjà touchés, et depuis le début de l’année on déplore un tiers de précipitations en moins dans l’ensemble du territoire[1]. Les épisodes de forte chaleur que nous connaissons actuellement, au moment très symbolique des « saints de glace », font par ailleurs craindre un été particulièrement dur..
Record de chaleur dans le Svalbard norvégien, en Arctique
https://www.20minutes.fr/planete/2828847-20200725-arctique-record-chaleur-svalbard-norvegien
Record de chaleur dans le Svalbard norvégien..l'«Arche de Noé végétale», censée être une parade contre le changement climatique a elle-même été victime du réchauffement. Quelque 20 millions d'euros de travaux ont dû y être menés en raison d'une infiltration d'eau provoquée par la fonte du pergélisol en 2016.
La plus ancienne banque de semences au monde se trouve au coeur du centre historique de Saint-Pétersbourg, à deux pas de la cathédrale Saint-Isaac, en bord de rivière Moïka. Et sa première antenne hors-sol russe est installée ce jeudi à Charly, une commune aux portes des monts et des coteaux du Lyonnais............................
Le Savant, l'imposteur et Staline, Comment nourrir le peuple (VF - 54')
This is "Le Savant, l'imposteur et Staline, Comment nourrir le peuple (VF - 54')" by Association Science Télévision on Vimeo,...
Reporterre sur France Inter : Le coffre-fort des semences victime du changement climatique
Lundi 22 mai 2017 - En raison de températures anormalement élevées en Arctique, de l'eau s'est infiltrée dans le tunnel d'entrée de la Réserve mondiale de semences du Svalbard, en Norvège. C...
https://reporterre.net/Reporterre-sur-France-Inter-Le-coffre-fort-des-semences-victime-du-changement
Quid de l’héritage de Vavilov?
Retour au présent. Les banques de graines sont maintenant largement reconnues comme étant la meilleure manière de rassombler, préserver, et redistribuer des variétés végétales perdues, en danger, ou prometteuses dans un contexte de changement climatique. Pourquoi la graine comme unité de conservation? C’est assez facile à deviner : laissez au fond de votre placard un pois chiche sec et une laitue, oubliez le tout et partez à Hawaii pendant un mois, et relevez le résultat au retour. Mon hypothèse est que le pois-chiche aura une meilleure gueule que la laitue. Oui, niveau préservation de matériel génétique et reserves nécessaires à la croissance, les graines sont championnes. Leurs propriétés chimiques et structurales les gardes viables pour des années. Et quand je dis des années: Il n’y a pas si longtemps des scientifiques israeliens ont fait germer une graine de palmier datier datée (haha) d’ il y a 2000 ans. Qui sait, peut-être que cette graine a été sucée et recrachée par Jésus en personne!
Reprenons-nous. Puis, Prenons l’exemple du riz.
Le riz. 22 espèces dont 2 intensément cultivées. au sein desquelles on trouve plus de 140 000 variétés. Certaines poussent sous le niveau de la mer, d’ autres à 3000 mètres d’altitude, certaines ont les pieds dans l’eau (douce ou salée), d’autres sont incroyablement tolérantes à la sécheresse.
Restons sur notre exemple du riz. Il existe une multitude de banque de grains de riz très locales dans les pays producteurs. En Inde par exemple, Debal Deb met l’ accent sur les anciennes variétés, la gratuité d’accès, et le fait que sa banque est vivante: il cultive toutes ses variétés (environ 900 variétés traditionnelles) pour assurer un stock constant de graines fraîches, accessibles à tous les cultivateurs de la région à conditions qu’ils lui ramènent une poignée de graines à la première récolte.
L’Institut international de recherche sur le riz (IRRI, apparemment il faut tout vous traduire bande d’ectoplasmes) a ses quartiers aux Phillipines et stocke des graines de quelques 121,595 variétés de riz. Des milliers ont été développées par IRRI.
Donc sur tous les continents, chaque échelle spatiale de banque de graine stocke (en théorie) la majorité des graines conservées aux échelle plus locales, en plus d’autres variétés ou croisements uniques. C’est un peu comme un système de poupées russes.
Ce n’ est pas tout. Car à l’échelle supra-inter-extragalactique, nous avons…
…l’antre du plus méchant des méchants magnanimes tortionnaires russes de tous les films de James Bond réunis!!!
Ah non pardon, c’ est le Global Seed Vault.
Et c’est à Svalbard.
Passez quand vous voulez. Il y a un aéroport et un camping. Si si, en haut à gauche. Tout ce qu’ il faut pour des vacances inoubliables. |
La Réserve mondiale de semences du Svalbard (Svalbard Seed Vault en anglais) est le niveau suprême de conservation, supposé assurer la survie de quelque 4.5 milliards de variétés contre toute catastrophe naturelle ou surnaturelle (tant qu’on y est)… ou humaine. C’est en fait juste un entrepôt, rien de tres exceptionnel, on peut en faire la visite virtuelle sur le site, vous verrez ca ressemble à la partie moche d’Ikea où on récupère ses Igberfrük et autres Mählahü en fin de visite. Loin de la mer et de toute activité sismique et humaine ce gros congélo souterrain est doublement protégé par -18°C de système électrique et -6°C (grand maximum) de permafrost.
Le remplissage de l’entrepot en question a commencé avec une boite de grains de riz en 2008 et contient actuellement 864 309 variétés d’espèces végétales cultivées. Autrement dit il est plein au sixième. Mais alors attention, on n’y entre pas comme dans un moulin. Toutes les stocks du SSV sont des sauvegardes de sauvegardes de stocks d’autres banques de graines, en quelque sorte un sanctuaire de dernier recours en cas d’échec consécutif de toutes les mesures préalables en temps de crise grave. Comme dit mon Papa, « ceintures ET bretelles. ». Sachant cela, vous et moi nous disons que personne n’y puisera rien avant au moins… pfiou…. des centaines d’années! Peut-être même jamais!
Et bien figurez vous que l’on a tenu 7 ans avant de tirer la première ultime sonnette d’alarme. Pas mal, 7 ans. La première rétribution a lieu en octobre 2015, alors que la guerre civile et internationale fait exploser de nombreuses villes syriennes et détruit du même coup les réserves de la banque de graines internationale d’Alep
38 073 graines de blé, lentilles, pois chiches et autres cultures de subsistance sont envoyées au Maroc et au Liban pour être « ressuscitées » après l’évènement… Matière à réflexion pour tous ceux qui pensaient que ce saugrenu projet Svalbard n’en valait pas ses 9 millions d’euros initiaux (le prix d’ un tronçon de 1.46 km d’autoroute française, soit dit en passant).
Ceinture et bretelles, c’ est mon Papa qui l’a dit.
Au niveau local, une conservation efficace passe par des réseaux solides et actif, partout dans le monde, d’échange de graines et des conservation ‘in vivo’ d’ un maximum de variétés cultivées… Beaucoup d’associations, coopératives, et gouvernements locaux sont sur le coup dans bien des pays, mais dans le contexte de mondialisation actuel on est loin du système parfait, et je vais arrêter ce paragraphe maintenant là tout de suite avant de commencer à écrire l’équivalent de 40 blogposts traitant de ce sujet politico-economico-social pour lequel je n’ai d’ailleurs pas assez de qualifications merci de votre compréhension.
Le mois dernier, la revue Nature publie un article révélant que la majorité des espèces sauvages apparentée aux espèces végétales domestiquées ne figurent pas au registre des banques de graines. Et le Global Seed Vault n’est plein qu’au sixième? On pourrait commencer par là. On a souvent observé que les variétés plus anciennes étaient plus résistantes aux pressions environnementales telles que les maladies ou les variations climatiques extrêmes. Cela sous-entend un bénéfice à garder ou réintroduire des gènes primitifs avantageux perdus pendent l’intense processus de sélection artificielle qu’ ont connu toutes les espèces végétales que l’on achète au quotidien.
Finalement je vous vois venir gros comme une maison et donc je vais vous couper l’herbe sous le pied et poser la question moi-même: Et le rôle des OGMs dans tout ça? Après tout on n’a pas besoin de stocker des quantités monumentales de graines aux génomes différents si on peut les fabriquer soi-même…
Et bien pour le moment le Global Seed Vault n’accepte pas d’OGMs. Les OGMs ont peut-être un rôle à jouer dans le sauvetage de certaines espèces (comme le châtaigner d’Amérique) face à des perturbations de large échelle. Mais fabriquer des OGMs coûte cher, donne des résultats incertains, et pose tout un tas de problèmes de brevet et autre barrières à la diffusion…
La nature (et nous agri-ingénieurs) possède pour chaque espèce une richesse extraordinaire de variétés comestibles et fertiles entre elles, pourquoi ne pas s’en servir?
L’objectif du premier jardin Vavilov, au cœur du campus mondial du groupe Seb à Ecully, est de préserver et de multiplier des végétaux domestiques et sauvages issus des collections inestimables de l’Institut à Saint-Pétersbourg, une des plus anciennes banques de graines mondiales...