Italie : hiver démographique et économique ?

Publié le par ottolilienthal

Militaires déployés en Italie pour protéger le personnel médical contre les attaques...

Les forces militaires italiennes seront déployées pour protéger le personnel médical d’un hôpital de la région de Calabre, dans le sud du pays, à partir de lundi. Cette décision fait suite à une recrudescence d’attaques violentes de la part de patients et de leurs proches dans tout le pays.

Au cours des derniers mois, de nombreuses agressions ont été commises contre le personnel médical dans le sud de l’Italie, ce qui a incité l’Association médicale italienne à demander une intervention militaire pour assurer leur sécurité. L’escalade a culminé avec une attaque à l’hôpital Policlinico de Foggia, où un groupe de patients et de proches a agressé le personnel médical à la suite du décès d’un patient au cours d’une intervention chirurgicale. Les images de l’incident sont devenues virales sur les réseaux sociaux.

Violence à l’encontre du personnel de santé

La fréquence alarmante de ces incidents a alimenté la frustration des patients, qui sont souvent confrontés à de longues listes d’attente et au manque de personnel dans les hôpitaux. Les médecins ont fait part de leurs préoccupations concernant les bas salaires, qui entraînent un épuisement professionnel et une pénurie de professionnels de la santé. La pandémie de COVID-19 a exacerbé ces problèmes, poussant de nombreux travailleurs de la santé à chercher un emploi à l’étranger.

Conséquences pour les délinquants

En réponse à l’escalade de la violence, les associations médicales ont demandé des mesures plus strictes à l’encontre des contrevenants, notamment la suspension de l’accès aux soins gratuits pour ceux qui agressent les travailleurs de la santé ou endommagent les installations hospitalières.

https://fr.businessam.be/militaires-italiens-personnel-medical-violence/

Plus que limiter l’immigration clandestine, le plus grand défi de Meloni est d’attirer des travailleurs étrangers...
Rome n’a pas le choix : pour au moins une génération, le marché du travail dépendra de l’immigration
 
Les faits -

Selon une étude, le nord de la Péninsule, coeur productif du pays, aura besoin d’environ un million de travailleurs étrangers avant 2040 pour compenser le vieillissement de la population.

Les projections démographiques de l’Italie sont claires : le pays va avoir besoin de beaucoup d’immigrés dans les quinze prochaines années pour faire face à la réduction de la population en âge de travailler, premier symptôme du bouleversement démographique. Ainsi, certaines fondations spécialisées commencent à dresser des scénarios et des actions à entreprendre pour éviter la crise du marché du travail.

https://www.lopinion.fr/international/plus-que-limiter-limmigration-clandestine-le-plus-grand-defi-de-meloni-est-dattirer-des-travailleurs-etrangers?utm_campaign=Edition_de_7h30&utm_medium=email&utm_source=newsletter&actId=%7EaEu0lzDjtmJLHX39ZY32B53BdxQmA5aAIQN6_j_esGM3Vr7iqgF6oM9Sn5SLWU9YLv99rOcMouu4gQDxMMHJq8uA4YBZ7tThXgVxNR94pMxWTOZWWBhQ%3D&actCampaignType=CAMPAIGN_MAIL&actSource=509950

«C'est pire que le Titanic»: en Italie, le système de santé publique s'effondre...

Entre manque de moyens, listes d'attente interminables et tentation du privé, le système sanitaire italien traverse une crise importante.

S'il est un domaine dans lequel le système de santé italien excelle, c'est celui d'enseigner l'art de la patience. Marcello Fagiano, un professeur de collège de bientôt 40 ans qui habite à Cavour, une petite ville du nord-ouest du pays, a été diagnostiqué en 2023 d'une inflammation de la vésicule biliaire, qui doit lui être retirée lors d'une intervention chirurgicale. Cependant, il lui a fallu pas moins de douze mois pour obtenir un rendez-vous pour l'opération.

Une année marquée par une succession de visites dans le privé à presque 200 euros chacune, pour faire les examens nécessaires dans des délais acceptables tout en espérant que tel ou tel autre spécialiste utilise ses relations dans les hôpitaux publics pour lui trouver un créneau pour l'intervention. Et ce n'est pas tout. La procédure, initialement prévue en mars dernier, a dû être repoussée plusieurs fois pour raisons médicales. Marcello est toujours en attente d'une nouvelle date.

«Il s'agit d'un système très peu vertueux, il faut avoir les bons contacts et être en mesure de payer pour les visites, afin de rencontrer des gens qui peuvent t'aider. Je trouve tout ça horrible», affirme Marcello, qui a même envisagé de mettre fin à son calvaire en se faisant opérer directement dans le privé. Le coût, entre 8.000 et 10.000 euros, étant bien au-delà de ses moyens, il était à deux doigts de demander un prêt à sa famille, ce qu'il a pu éviter seulement grâce à un nouveau traitement qui a enfin réduit les douleurs et rendu l'opération un peu moins urgente.

Un manque de fonds chronique

Les histoires comme celle de Marcello sont devenues de plus en plus fréquentes en Italie, où le système de santé est au bord du gouffre. Les associations de défense des droits des citoyens dénoncent des temps d'attente dans le public qui peuvent aller jusqu'à deux ans pour une mammographie, trois mois pour une chirurgie urgente pour retirer un cancer de l'utérus, ou deux mois pour une visite cardiologique à faire théoriquement dans les dix jours.

Selon l'Institut national de statistique, en 2023, 4,5 millions d'Italiens (7,6% de la population, contre 7% l'année précédente) ont renoncé à des prestations sanitaires considérées nécessaires en raison des listes d'attente, des difficultés d'accès ou des coûts.

Cette situation inquiétante s'explique largement par un manque de fonds devenu chronique. En offrant une couverture universelle et en bonne partie gratuite financée par les impôts, le système de santé publique (Sistema Sanitario Nazionale) a contribué depuis sa création en 1978 à une croissance vertigineuse de l'espérance de vie de la population italienne, de 73,8 à 83,6 ans en 2019. Mais alors que le pays a désormais la deuxième population la plus vieille au monde, avec 2,5 millions de personnes âgées en plus par rapport à il y a vingt ans, les ressources destinées à la santé se sont dramatiquement réduites depuis la crise financière de 2007-2008.

La pandémie de Covid-19 a conduit à une augmentation temporaire du budget, mais sans que cela se traduise par une inversion de tendance de longue durée. En 2022, les dépenses publiques italiennes consacrées à la santé s'élevaient à peine à 6,7% du PIB, contre 10,3% en France et 10,9% en Allemagne.

Le chiffre a baissé légèrement en 2023 et, selon les dernières prévisions du gouvernement, il est destiné à diminuer encore dans les prochaines années. Les lits disponibles dans les hôpitaux italiens (publics et privés) sont passés de presque 270.000 en 2000 à moins de 180.000 en 2021. Le Covid-19 a aussi contribué à l'accumulation des retards, en raison du grand nombre de prestations reportées pendant la pandémie qu'il faut maintenant rattraper.

«Je le vois tous les jours avec mes patients: il y a une difficulté énorme à accéder aux visites et aux examens, même quand on les prescrit en urgence», affirme Luciano Congiu, médecin généraliste à Cagliari, en Sardaigne, et secrétaire régional du syndicat de médecins Sindacato Medici Italiani.

La tentation du secteur privé

La situation est très compliquée aussi pour ceux qui travaillent dans le secteur, qui se retrouvent souvent débordés. «Dans mon service, nous sommes chroniquement en sous-effectif, raconte Anna*, une jeune cardiologue qui travaille dans un grand hôpital du nord du pays. Nous avons tous des heures supplémentaires qui ne sont ni payées ni récupérées, et des congés que nous n'arrivons pas à prendre.» En raison du nombre de patients, il lui arrive de ne pas pouvoir dédier plus de quinze minutes à chaque visite.

Les salaires, eux, sont beaucoup plus bas qu'ailleurs en Europe. Le revenu moyen d'un médecin spécialiste italien est d'environ 78.000 euros bruts par an, contre 86.500 en France et 148.400 en Allemagne.

Les dépenses sanitaires soutenues par les ménages s'élèvent en Italie à plus de 20% du total national, alors qu'elles ne dépassent pas 9% en France.  

«Les opérateurs de santé en ont marre, il y a un niveau de démotivation hallucinant», dénonce Lara Pezzano, infirmière et responsable des politiques sanitaires de l'administration municipale de Pinerolo, une ville de 30.000 habitants dans le nord-ouest.

Sans surprise, de plus en plus de médecins et infirmiers sont tentés par le secteur privé, où les rythmes sont moins durs et les rémunérations plus élevées. «La chose la plus triste c'est qu'il ne s'agit plus seulement de gens âgés et fatigués. Désormais il y a aussi beaucoup de jeunes qui préfèrent commencer directement dans le privé», affirme Lara Pezzano. Cela participe des problèmes de recrutement croissants du secteur public. «Dans les cinq prochaines années, environ un tiers des médecins de famille partiront à la retraite et ils ne seront pas remplacés», avertit Luciano Congiu.

Entre-temps, les patients et leurs familles ont déjà beaucoup de mal à s'orienter. Nicola Giordano, qui habite dans une petite ville proche de Pinerolo et dont la mère septuagénaire est récemment décédée d'un cancer aux ovaires, parle d'une longue série de passages d'un établissement à l'autre, d'heures interminables en salle d'attente et de professionnels peu et mal renseignés sur le dossier de la patiente qui leur avait été envoyée. «On a eu l'impression d'être complètement seuls», raconte-t-il.

Mise en garde contre un système «à l'américaine»

Avec le système public en crise, les malades qui peuvent se le permettre se retournent eux aussi vers les structures payantes privées, qui garantissent des temps beaucoup plus rapides. Les dépenses sanitaires soutenues par les ménages s'élèvent en Italie à plus de 20% du total national, alors qu'elles ne dépassent pas 11% en Allemagne et 9% en France.

Dans une tribune publiée en avril dernier, quatorze médecins et scientifiques parmi les plus prominents du pays mettent en garde contre un glissement vers un modèle de type américain, où seuls les riches peuvent se permettre des soins tempestifs et de qualité, et affirment qu'une augmentation massive du budget de la santé est «urgente et indispensable».

De son côté, le gouvernement de droite de la Première ministre Giorgia Meloni estime que les longues listes d'attente sont aussi dues à un excès d'examens inutiles prescrits par les médecins, soucieux de possibles poursuites judiciaires pour erreur ou négligence. Pour combattre cette tendance, l'exécutif est en train de mettre en place un nouveau système de monitorage des ordonnances et a prolongé un bouclier juridique pour les médecins créé pendant la pandémie.

Mais le gouvernement, qui inclut la Ligue, un parti fédéraliste bien implanté dans le nord riche du pays, a aussi au programme le renforcement de l'autonomie de chaque région en matière de santé publique, ce qui inquiète beaucoup dans le secteur.

Le système sanitaire italien est déjà fortement décentralisé, avec des difficultés beaucoup plus accentuées dans les zones plus pauvres du sud du pays, mais la réforme pourrait ouvrir la voie pour la première fois à des inégalités salariales importantes entre les hôpitaux des différentes régions, avec le risque de provoquer un exode massif de personnel vers le nord. «L'image qui me vient à l'esprit est celle d'un navire qui coule; ceux qui peuvent se sauvent sur des chaloupes, mais il y en a pas assez pour tout le monde, conclut Luciano Congiu. C'est pire que le Titanic.»

Le ministère de la Santé n'a pas donné suite à notre demande d'entretien pour cet article.

 

*Le prénom a été changé.

Michele Barbero — Édité par Louis Pillot -

https://www.slate.fr/story/266850/italie-systeme-sante-publique-s-effondre-crise-manque-moyens-listes-attentes-patients-tentation-prive-medecins-infirmiers?utm_source=pocket-newtab-fr-fr

Un grand plan pour sauver l'Italie de l'effondrement

Hier, M. Angelino Alfano, leader du parti "Peuple de la liberté" (PdL), a présenté publiquement un plan visant à sauver l'Italie de l'effondrement économique. Au moment où il s'est exprimé, je roulais sur l'autoroute et, par hasard, ma radio était réglée sur une chaîne qui diffusait la présentation. Comme je n'avais rien d'autre à faire, je l'ai écouté en entier. Et j'ai été horrifié.

Je m'explique. Cette note n'est pas censée être dirigée contre un homme politique ou un parti en particulier. M. Alfano est le successeur de M. Berlusconi à la tête du PdL et je lui reconnais la capacité de parler en une série de phrases vaguement intelligibles. C'est déjà un cran au-dessus de bon nombre de ses collègues. Ce qui m'a horrifié, c'est que ce qu'il a dit aurait pu être dit par n'importe quel homme politique, de gauche ou de droite, conservateur ou libéral, n'importe où dans le monde. Et cela explique pourquoi nous sommes dans le pétrin.

Alors, qu'est-ce que M. Alfano et ses conseillers ont concocté pour sauver l'Italie de l'effondrement ? Eh bien, si j'ai bien compris, les biens de l'État (parcs, bâtiments, terrains, hôpitaux, etc.) devraient être transformés en une sorte de fonds géant et les investisseurs seraient autorisés à acheter des parts. Cela permettrait de faire rentrer de l'argent dans les caisses vides de l'État et de sauver l'Italie de l'effondrement financier.

Je peux imaginer un million de raisons pour lesquelles ce plan ne fonctionnerait pas, mais vous pouvez constater par vous-même qu'il s'agit essentiellement d'un jeu de poudre aux yeux. Les propriétés de l'État ne seraient pas vendues, mais elles ne seraient pas non plus conservées. Elles "flotteraient" dans un no man's land et cela générerait, d'une manière ou d'une autre, un gigantesque transfert de liquidités qui sauverait miraculeusement l'Italie de l'effondrement.

Mais ce n'est pas la nature improbable du plan qui m'a dérangé. Hier, en écoutant M. Alfano, je m'attendais à ce qu'il y ait au moins quelque chose de plus qu'une discussion sur la manière d'équilibrer les comptes. Je veux dire que les partis politiques avaient l'habitude de se préoccuper de l'avenir des gens. Ils n'étaient pas censés se préoccuper uniquement de transférer de l'argent d'un endroit à l'autre. Mais j'ai été déçu. La seule préoccupation pour l'avenir exprimée dans le discours était de "relancer la croissance".

Réfléchissez-y. Comment est-il possible que le chef du plus grand parti national ne s'intéresse pas à ce que nous devrions faire exactement pour éviter de retomber dans le genre de problèmes que nous connaissons ? Je veux dire que si nous nous effondrons, il doit y avoir une raison à cela. L'Italie a été raisonnablement prospère pendant près d'un demi-siècle après la Seconde Guerre mondiale, ne pouvez-vous même pas vaguement penser qu'il doit y avoir une raison si tout s'effondre aujourd'hui ? Ne pouvez-vous pas concevoir que la solution ne consiste peut-être pas à manipuler les livres de comptes, mais à prendre en compte le fait que le monde, là-bas, a changé ? Il y a des problèmes de ressources, d'énergie, de pollution et toutes sortes de changements globaux, dont le changement climatique. Ne peut-on pas penser que les anciennes "solutions" (c'est-à-dire la croissance) sont devenues des problèmes ?

Mais pas de manière. Aucune mention des ressources, de l'énergie, de la pollution, de tout le reste. Comme je l'ai dit, je ne désigne pas ici M. Alfano comme un mauvais politicien. Ce n'est pas sa faute. Simplement, le débat politique a évolué de telle manière que la plupart des gens vivent au jour le jour, essayant principalement de survivre. Le débat politique a décliné à un point tel qu'il n'y a plus d'intérêt pour les causes des problèmes, plus d'intérêt pour les solutions à long terme, plus d'attention pour quoi que ce soit sauf pour l'espoir qu'un politicien sorte le lapin du chapeau.

Un jeu de poudre aux yeux.

Ugo Bardi
Professeur de chimie, analyste
Université de Florence, Italie

La dette de l'Italie attaquée par les fonds spéculatifs
A un mois des élections législatives en Italie, de plus en plus de "hedge funds" vendent à découvert sa dette publique. Avec des effets sur la campagne de la droite nationaliste.
 

Un article du média de la City de Londres, le Financial Times, abondamment relayé ces dernières 24 heures en Italie, vient confirmer les intuitions de beaucoup de commentateurs italiens: les fonds de gestion alternative ont entrepris de mettre à l’épreuve la troisième économie de la zone euro, afin, cela va de soi, d'en tirer parti.

Leurs paris à la baisse sur la dette italienne ne se sont jamais révélés aussi élevés depuis la grande crise financière de 2008. D’après les données de S&P Global, la valeur totale des obligations italiennes empruntées par ces investisseurs, à cet effet, dépasse à présent les 39 milliards d’euros.

Les justifications avancées ne relèvent pas des analyses les plus sophistiquées sur le nouveau paysage électoral qui se dessine pour les élections législatives du 25 septembre. Dans le quotidien économique britannique, un "gros" investisseur dans les hedge funds, qui n’est pas nommé, juge que "l’Italie semble le pays le plus vulnérable", ce qui expliquerait qu’il soit désormais "répandu" de jouer la divergence entre les taux d’intérêt allemands et italiens.

Vente à découvert

Mark Dowdey, dirigeant à Londres de Blue Bay Asset Management, filiale de la banque canadienne RBC, énonce, lui, ouvertement son raisonnement: nous sommes face au pays le plus exposé à la poussée des cours du gaz et, puis "la politique y est difficile". Manière, là aussi, de tirer les conclusions d’une tourmente institutionnelle à Rome avant qu'elle se produise. Alors, l'investisseur déclare vendre à découvert des titres à dix ans, en ayant recours à des contrats à terme.

En rapportant l'article annonçant de tels nuages financiers, la chaîne d’information publique italienne RAI News ne peut qu’établir le constat d’un creusement de l’écart avec le taux de référence allemand, et l’inquiétude à cet égard des épargnants italiens, parmi lesquels se trouvent forcément bon nombre de ces électeurs qui comptent renverser la table politique dans un mois.

Par son titre, le quotidien milanais Corriere della Sera, traditionnellement proche des milieux industriels, ne conçoit pas davantage d’illusions : "La plus grande campagne spéculative contre la dette du pays est en cours". Un intermédiaire de marché italien, Pietro Cali (Copernico SIM) y considère que "le spectre de 2008 est bien présent dans la tête des investisseurs" et que la démission du Premier ministre Mario Draghi, le mois dernier, a mis au jour "un fort attrait pour des stratégies courtes" sur l’Italie, dès lors que "les hedge funds sont toujours prêts à exploiter les craintes des investisseurs."

Bras de fer avec la BCE

Le décrochage de la dette italienne devient-il alors inéluctable, puisque la droite anti-UE accèderait au pouvoir? La thèse d'un écroulement à l’annonce des résultats du scrutin du 25 septembre, tout le monde n’y croit pas encore. Toujours dans le Financial Times, Decio Nascimento, le directeur des investissements du fonds alternatif américain Norbury Partners, met en garde les téméraires qui croient pouvoir remporter un "bras de fer" contre la Banque centrale européenne (BCE), qui a installé en juillet un nouvel outil d'intervention destiné, potentiellement, à empêcher une fragmentation des taux d’emprunt dans la zone euro.

Et c’est exactement ce que pense Augusto Minzolini, qui dirige Il Giornale, journal favorable à un bloc de droite nettement en tête dans les sondages. "Nous ne sommes pas comme en 2008", parce que "cette fois", assure-t-il confiant, "il y a le bouclier de la BCE", sauf que manifestement cet argument de la menace en provenance de Francfort ne convainc pas encore les hedge funds.

Héritage Thatcher

Frères d’Italie (FdI), la formation dite "post-fasciste", saisit, au demeurant, tout le risque que porte cette défiance de marché et, en conséquence, s'est lancée dans une tentative de normalisation auprès de ces mêmes arbitragistes internationaux. La cheffe de FdI, Giorgia Meloni, reste, et de loin, la mieux placée dans les intentions de vote pour succéder au président Draghi. Elle s’est adressé, hier, à ces marchés dubitatifs via l’agence britannique Reuters : "Nous ne voulons pas détruire l’Europe. Nous ne voulons pas faire de choses folles". Cette députée, qui s'est forgé l'image d'unique figure de l'opposition nationale, réaffirme que son gouvernement "ne mettrait pas en péril les finances publiques".

Récemment dans un entretien au magazine conservateur londonien The Spectator, dans cet exercice de campagne, Giorgia Meloni s’est même revendiquée de l’héritage de Margaret Thatcher, la figure la plus marquante du libéralisme contemporain. De ce point de vue, il lui reste bien du chemin pour emporter l’adhésion, y compris au sein de sa propre alliance politique. Il Foglio, un quotidien conservateur milanais soutien de toujours de l’ancien Premier ministre Silvio Berlusconi, écrit ainsi que malgré "l’image que Giorgia Meloni tente de projeter à l’étranger, la réalité est que son programme a une forte empreinte protectionniste, étatiste et hostile au marché. Beaucoup plus lepénien que thatchérien". L'aggiornamento n'a pas encore abouti.

Benaouda Abdeddaïm Editorialiste international

En Italie, une sécheresse historique affecte la production agricole et énergétique

"Un déficit de pluviométrie de plus de 50 % depuis le début de l’année 2022 touche tout le nord et le centre du pays, provoquant une crise inédite. Dans le delta du Pô, le débit du fleuve est si faible que l’eau de la mer Adriatique remonte de plus en plus loin dans les terres.
Samedi 25 juin, Mgr Mario Delpini, archevêque de Milan, s’est rendu dans la petite église Saint-Ambroise de Trezzano sul Naviglio (Lombardie).
Là, en compagnie du prêtre de la paroisse, du maire de la ville, de plusieurs dizaines de familles et des représentants locaux de la Coldiretti, le puissant groupement des agriculteurs locaux, l’homme d’Eglise s’est recueilli longuement, récitant le rosaire pour implorer le retour de la pluie, qui rendrait « l’eau et la fraîcheur à la terre asséchée ».


Le même jour, le prélat s’est rendu dans deux autres paroisses de zones agricoles de son diocèse, particulièrement éprouvées par le manque d’eau, pour y poursuivre sa prière.


Pour l’heure, les prévisions météorologiques dans le nord de l’Italie restent désespérément monotones : du bleu, partout, et des températures caniculaires, c’est tout ce que les oracles annoncent pour les dix prochains jours.
Certes, il y a bien eu, autour du 20 juin, une vague d’orages épars qui ont permis de remonter quelque peu le niveau des cours d’eau. A Crémone, les relevés ont montré que le niveau du Pô était remonté d’une vingtaine de centimètres, mais celui-ci reste dramatiquement bas : mesuré à – 8,44 mètres, mercredi, il est péniblement arrivé, deux jours plus tard, au niveau catastrophique de – 8,23 mètres.


Mince filet d’eau


C’est en parcourant d’ouest en est le cours du plus grand fleuve du nord de l’Italie que l’on perçoit l’ampleur du drame.
A Turin (Piémont), le débit du Pô a été mesuré à 20 % de son niveau habituel. Plus à l’est, les rizières sèchent littéralement sur pied et, à Ferrare (Emilie-Romagne), les promeneurs peuvent descendre dans le lit du fleuve et longer le mince filet d’eau, qui peine à avancer au milieu d’une immensité de terre sableuse.


En aval, la situation est encore plus préoccupante : dans le delta du Pô, le débit du fleuve est si faible que l’eau de la mer Adriatique remonte de plus en plus loin à l’intérieur des terres. Le phénomène est perceptible à l’œil nu, et les relevés des agences environnementales de la région indiquent des traces de sel jusqu’à 30 kilomètres en amont de l’embouchure du fleuve, une situation qui est potentiellement dévastatrice pour la flore sauvage et les terres cultivables.


Or, la plaine du Pô, qui concentre une bonne part de la richesse nationale – on estime que le bassin du fleuve concentre 40 % du PIB italien –, est depuis toujours la plus importante région agricole du pays.
Selon la Confédération italienne des agriculteurs, la moitié de la production de la zone est en péril. La même source annonce d’ores et déjà une baisse de production de 30 % concernant les melons, et jusqu’à 50 % de pertes pour le maïs et le soja.


Les conséquences de l’extrême sécheresse qui touche la plaine du Pô ne s’arrêtent pas à l’agriculture : elles sont également considérables en matière énergétique.
Plusieurs centrales thermoélectriques placées aux abords du fleuve sont à l’arrêt depuis des semaines, faute de possibilité d’alimenter leurs circuits de refroidissement, tandis que les centrales hydroélectriques ne disposent plus du minimum d’eau nécessaire pour fonctionner.


Ainsi, les quatre turbines de la centrale de l’île Serafini, aux confins de la Lombardie et de l’Emilie-Romagne, sont à l’arrêt depuis plusieurs semaines. La production d’électricité est en sous-régime (de 30 % à 50 %) depuis le début de l’année et cette perte de puissance survient au pire moment, alors que la guerre en Ukraine et la réduction des importations gazières en provenance de la Russie laisse planer la menace d’une crise énergétique majeure.


« Diminuer les pertes »


L’été 2022 est le sixième épisode de stress hydrique grave qu’ait connu le Pô depuis le début des années 2000, mais la crise actuelle est de loin la plus sérieuse depuis soixante-dix ans que des mesures sont réalisées.
Du reste, elle ne touche pas la seule vallée du Pô. Avec un déficit de pluviométrie de plus de 50 % depuis le début de l’année, c’est l’ensemble du nord et du centre du pays qui sont touchés. Partout en Italie, même si la plupart des élus locaux font tout pour éviter les mesures contraignantes et appellent surtout leurs concitoyens au civisme, les arrêtés municipaux se multiplient. Fontaines publiques à l’arrêt, arrosage interdit entre 8 heures et 21 heures, restrictions d’eau la nuit…

 


Pour l’heure, ces mesures ne touchent pas les grands centres urbains, mais l’été vient à peine de commencer et la saison sèche est encore longue.


Interrogé sur la situation au Sénat, le 15 juin, le ministre de la transition écologique Roberto Cingolani a identifié plusieurs pistes d’« interventions structurelles » à réaliser dans les prochaines années.
« Il faut un investissement massif pour diminuer les pertes d’eau, qui dépassent les 40 % sur nos 24 000 kilomètres de canalisations, et augmenter nos capacités de stockage des eaux de pluie, en créant un certain nombre de bassins », a-t-il expliqué.


« Un quart des précipitations que nous avons suffirait aux besoins de l’agriculture et, sur ce sujet, nous pouvons recourir aux financements du plan de relance européen », a ajouté le ministre.


Habituée à un régime de précipitations plutôt favorable, la Péninsule souffre d’un sous-investissement structurel dans son réseau de canalisations. La répétition des épisodes de sécheresse risque de forcer le pays, dans les prochaines années, à prendre le problème à bras-le-corps."
https://www.lemonde.fr/…/en-italie-une-secheresse-historiqu…
(posté par Joëlle Leconte)

Le patronat italien « effrayé » par le risque de récession

Confindustria publie des prévisions alarmistes sur la situation économique de l'économie italienne frappée par une inflation historique et l'explosion du prix de l'énergie et des matières premières. Le patronat redoute une récession l'an prochain si le gouvernement ne prend pas des mesures urgentes pour affronter les conséquences de la guerre en Ukraine.

Le patronat italien demande à Mario Draghi de se réveiller. Après une croissance rêvée de +6,7 % en 2021, le cauchemar de la récession hante de nouveau les acteurs de l'économie de la péninsule. Trois nouveaux maux s'abattent désormais sur elle, amplifiés par la guerre en Ukraine : l'explosion du prix de l'énergie et des matières premières, l'inflation galopante avec un record historique de 7 % et les difficultés d'approvisionnement. Le gouvernement publiera cette semaine le Document économique et financier (DEF) qui fixe les objectifs de croissance et de finances publiques. Sa prévision de croissance sera revue à la baisse, bien inférieure à 3 % contre 4,1 % initialement annoncés.

« Dans le meilleur des scénarios, si la guerre en Ukraine s'achève d'ici l'été, nous aurons une croissance divisée par deux cette année à 1,9 % déplore Carlo Bonomi le président de Confindustria. Si elle se prolonge, nous connaîtrons une récession en 2023. Une récession technique est plus que probable au cours de ce premier semestre. A cause de l'augmentation de 68 milliards d'euros de la facture énergétique pour les entreprises, 16,4 % d'entre elles ont déjà réduit leur production et 30 % s'apprêtent à le faire ou tout simplement à la suspendre. Nous sommes effrayés et lançons un sérieux cri d'alarme. »

Le plan de relance insuffisant

Un cri d'alarme dont se fait l'écho l'ISTAT qui redoute une croissance pratiquement nulle au cours du dernier trimestre. Le patronat estime ainsi insuffisantes les mesures adoptées par le gouvernement et réclame un plafonnement du prix du gaz , une part d'énergies renouvelables consacrée uniquement à l'industrie, une baisse des taxes sur le prix du carburant et un soutien fiscal à la reconversion industrielle . « Dans ce contexte, le plan de relance européen ne suffit plus et il faut le revoir », insiste Carlo Bonomi.

Le ministre de l'Economie oppose, pour l'instant, une fin de non-recevoir . Mais l'inflation, l'explosion du prix des matières premières et de l'énergie ainsi que les difficultés d'approvisionnement nécessiteront de revoir les critères et les budgets des futurs grands chantiers d'infrastructure.

Pas d'alternative

Le « plan de relance se poursuit comme prévu et la dernière inspection de la Commission européenne s'est conclue positivement », s'est félicité Daniele Franco alors que Bruxelles doit verser cette année 41 milliards d'euros dans le cadre du plan Next Generation EU. Le ministre reconnaît néanmoins de grandes difficultés et une grande incertitude provoquée par la guerre en Ukraine qui devront être prises en considération avec le risque de devoir mettre à disposition des ressources financières supplémentaires. « Elles devront être trouvées au niveau national, explique-t-il. Le plan de relance ne doit pas être modifié mais mis en oeuvre, il n'y a pas d'alternative tout comme le lancement des réformes pour conforter les investissements publics et privés. »

Olivier Tosseri (Correspondant à Rome)

 

La menace italienne croissante sur l’Eurozone

Le premier pays sauvé par ce plan de relance est l’Italie. Le déséquilibre budgétaire de l’Italie et les diverses « négociations » que le pays a eu avec l’Union Européenne pour obtenir des exemptions d’équilibre budgétaire deviennent un refrain quasi constant et un travail a plein temps de tout nouveaux élus italiens. Il faut reconnaitre qu’elle a assuré un rôle de premier plan dans les problèmes de migration venant de l’Afrique.

En effet, les prévisions de 2019 sont battues en brèche par les conséquences de la crise du coronavirus : le Trésor Italien vient d’annoncer un déficit de 12% du PIB.

Certes, l’Italie a pris de plein fouet le confinement et a réussi à remettre de l’ordre dans sa situation sanitaire mais la conséquence directe est une hausse de l’endettement qui va atteindre 156% du PIB (contre 134% en 2019). De ce fait, l’Italie rejoint le niveau de la Grèce. Heureusement pour le pays, l’agence de notation Fitch a décidé de maintenir l’Italie dans la catégorie « investment grade » en dégradant sa note d’un cran a BBB-[3]. Mais il s’en faut de peu pour voir passer le pays de l’autre cote dans la catégorie « junk ».

C’est dire que le sauvetage de Bruxelles était indispensable. Mais 200 milliards d’euros dont 81,4 milliards de subventions, le montant le plus élevé de l’Union Européenne, ne permettront que de gagner quelques mois si le pays ne se reforme pas.

La situation bancaire

Dans la situation précaire du monde bancaire, l’Italie peine à sortir de décennies de mauvais crédits. Avec une prévision de 11% sur l’ensemble du pays, beaucoup d’institutions financières sont menacées. Ce ne sont pas les grandes banques (Unicredit et San Paolo) qui sont le plus en danger mais bien les caisses d’épargne et les banques régionales qui, politisées, ont été moins disciplinées dans l’octroi de crédit. Par exemple dans le secteur de la construction, 23% des prêts octroyés sont considérés comme des prêts bancaires non productifs.[4]

Si l’Italie n’a pas été friande de garanties publics a son secteur bancaire, elle a cependant reussi a enfreindre la reglementation Europeenne pour s’assurerv le contrôle d’une banque « politique » Monte dei Paschi di Siena.

Comme tous les Etats-Membres, l’Italie devra présenter son plan de relance a la majorité qualifiée des Vingt-Sept membres (55% des pays et 65% de la population).[5] L’obtention de subventions par l’Italie est donc soumise à une série de réformes en matière de pensions, de justice, de soins de santé et d’éducation. Le plan doit également intégrer des mesures liées à la transition verte et au numérique.

Subitement, pour la droite, la souveraineté de l’Italie a été la victime du coronavirus en étant contrainte d’accepter les conditions pour l’obtention des fonds. Qui plus est les subventions ne seront payées que si le plan de réformes est approuvé. Les Etats-Membres devront présenter leur plan de relance à la majorité des vingt-sept membres.

Les prêts ne sont pas conditionnels. Mais ils s’ajoutent à l’endettement ou refinancement des dettes existantes. Le gouvernement Conte s’est battu pour éviter ces réformes. C’est là que l’opposition des quatre frugaux a joué un rôle essentiel. L’enthousiasme de la nuit des annonces passe, c’est à une action difficile que se prépare le gouvernement italien. Tiendra-t-il ?

Ce fonds de relance n’est pas parfait, mais c’est la première étape vers une initiative plus large qui s’inscrit dans les projets d’union fiscale et de marches des capitaux. Il est triste de voir qu’il est fallu une crise sanitaire de cette envergure pour pousser les pays à agir dans cette direction, mais il serait encore plus triste de voir cette initiative mise à mal par des pays peu vigilants comme l’Italie ou l’Espagne.

 

(extrait de https://www.lemonde.fr/blog/finance/2020/07/30/chronique-dune-crise-financiere-annoncee-30-le-fonds-de-relance-europeen-favorise-litalie/

Georges Ugeux

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