affaire Fillon
La Cour de cassation a définitivement confirmé mercredi la culpabilité de François Fillon dans l'affaire des emplois fictifs de son épouse
Ce mercredi, la Cour de cassation s'est prononcée sur le pourvoi de François Fillon et de son épouse condamnés pour emplois fictifs. A 14h10, la justice a tranché et l'ancien Premier ministre a été reconnu définitivement coupable.
La haute juridiction a toutefois ordonné un nouveau procès concernant les peines prononcées à son encontre et les dommages et intérêts. Les prévenus avaient formé des recours contre la décision de la cour d’appel de Paris qui, le 9 mai 2022, a infligé à l’ex-locataire de Matignon quatre ans d’emprisonnement dont un an ferme, 375.000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité. Pénélope Fillon a été sanctionnée de deux ans de prison avec sursis ainsi que 375.000 euros d’amende et Marc Joulaud, ancien député suppléant de François Fillon dans la Sarthe, de trois ans de prison avec sursis, avec des inéligibilités respectives de deux et cinq ans.
Les prévenus, qui ont toujours clamé leur innocence, avaient en outre été condamnés à verser 800.000 euros de dommages et intérêts à l’Assemblée nationale.
20 Minutes avec AFP
https://www.20minutes.fr/justice/4088070-20240424-affaire-fillon-ancien-premier-ministre-definitivement-juge-coupable-affaire-emplois-fictif
Après avoir remporté une première manche devant le Conseil constitutionnel, les avocats de François et Penelope Fillon ont tenté de faire casser l’arrêt qui les a condamnés en 2022. Réponse le 24 avril.
Certains pourvois en cassation peuvent légitimement être qualifiés de « dilatoires ». Peu consistants, ils n'ont d'autre but que de faire gagner du temps au condamné. Celui que les avocats de François Fillon ont plaidé ce mercredi 28 février, quai de l'Horloge à Paris, est d'une tout autre nature.
Il pourrait bien conduire la haute juridiction à réduire à néant l'arrêt de la cour d'appel de Paris qui, le 9 mai 2022, avait condamné l'ex-Premier ministre à quatre ans d'emprisonnement, dont un ferme, et à 375 000 euros d'amende dans l'affaire des emplois fictifs de son épouse Penelope – punie pour sa part de deux ans de prison avec sursis et d'une amende du même montant.
« Il est trop tard »
Sitôt la foudre tombée sur leurs têtes, les époux Fillon avaient formé un pourvoi contre cette décision et soumis, dans la foulée, une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) à la chambre criminelle, ainsi saisie. Dans leur ligne de mire : un vieux texte du Code de procédure pénale, l'article 385. Celui-ci ne permet plus à un justiciable de soulever des « nullités de procédure » devant le tribunal correctionnel quand celui-ci a été saisi par un juge d'instruction, seul compétent pour y répondre – « les purger », dans le jargon judiciaire.
À LIRE AUSSI Comment Fillon en est arrivé là « Est-il concevable en France qu'un justiciable puisse s'entendre dire “il est trop tard” alors qu'il découvre, devant ses juges, que l'instruction menée contre lui a été entachée de graves irrégularités ? Peut-on concevoir qu'il ne puisse plus contester la violation de ses droits après la fin de l'instruction, quand bien même des irrégularités ne seraient apparues qu'après son renvoi devant le tribunal ? » avait plaidé, en leur nom, Me François-Henri Briard, le 19 septembre dernier devant le Conseil constitutionnel, lors de l'examen de la QPC.
« Non », ont répondu les neuf Sages – ils n'étaient en réalité que six, Alain Juppé et deux autres juges, venus des rangs de la droite, s'étant déportés pour ne pas être taxés de partialité. Dans sa décision du 28 septembre, le Conseil devait ainsi déclarer l'article 385 « contraire à la Constitution ».
Prenant soin de préciser qu'ils ne se prononçaient pas « sur le fond du dossier », les gardiens de la « loi fondamentale » ont considéré que la règle de procédure pénale contestée par la QPC méconnaissait « les droits de la défense » et « le droit à un recours juridictionnel effectif » dès lors qu'elle « ne permettait pas à un justiciable de contester l'irrégularité d'un acte ou d'un élément de procédure apparue après la clôture de l'instruction ».
Audition hallucinante
De quels « moyens de procédure » les époux Fillon auraient-ils été privés ? Quelles « irrégularités » l'article 385 les aurait-il empêchés de « soulever » devant les magistrats qui, par deux fois, en première instance puis en appel, les ont condamnés pour « détournement de fonds publics », « complicité » et « recel d'abus de biens sociaux » ? Sur quels éléments se fondent-ils pour affirmer qu'ils n'ont pas bénéficié d'un « procès loyal, indépendant et impartial » ?
À LIRE AUSSI Les confessions de François FillonPour le comprendre, il faut remonter au 10 juin 2020. Les époux Fillon ont comparu trois mois plus tôt devant le tribunal correctionnel et attendent de savoir à quelle sauce la justice va les manger. À l'audience, les magistrats du Parquet national financier (PNF) leur ont fait passer un mauvais quart d'heure. Ils brossent d'eux un portrait au vitriol, dépeignant François Fillon en homme « cynique », animé d'un « profond sentiment d'impunité » et « en proie à l'appât du gain », et faisant de son épouse Penelope « la victime consentante » d'un détournement reposant sur un emploi d'assistante parlementaire « fictif et artificiel ».
Ce 10 juin, donc, les Fillon attendent la sentence avec une certaine fébrilité quand Éliane Houlette, ex-procureure financière, à l'origine de leurs ennuis judiciaires, confie ses états d'âme à une commission d'enquête parlementaire sur « les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire ». Son audition est retransmise sur le site de l'Assemblée nationale et elle est proprement hallucinante.
Dossier politiquement explosif
Que dit cette ancienne haute magistrate ? Que le parquet général – sa hiérarchie – a exercé sur elle « une pression » constante et quotidienne dans l'affaire du « Penelopegate », que les demandes de « remontées d'informations » ont été pressantes et permanentes dans ce dossier « signalé » – surveillé de près et au plus haut sommet, en langage vulgaire.
L'emploi fictif de Penelope Fillon avait été révélé le 24 janvier 2017 par Le Canard enchaîné, à trois mois du premier tour de la présidentielle – François Fillon défend alors les couleurs de la droite après avoir remporté la primaire organisée dans son camp. Et que raconte, trois ans plus tard, la patronne du PNF aux députés ? Que l'affaire Fillon, sur laquelle enquêtait son parquet, a fait l'objet d'un « contrôle très étroit » de « sa » procureure générale, Catherine Champrenault, laquelle l'abreuvait en permanence de demandes de rapports et de précisions sur ce dossier politiquement explosif.
À LIRE AUSSI Affaire Fillon : l'ex-procureur national financier assure avoir subi des « pressions » Devant la représentation nationale, Éliane Houlette évoque encore « une réunion » à la cour d'appel lors de laquelle il lui fut demandé d'ouvrir toutes affaires cessantes une information judiciaire contre François Fillon et son épouse, visés jusque-là par une simple enquête préliminaire. « Le choix procédural que j'avais adopté ne convenait pas. On m'engageait à changer de voie », rapporte ainsi la procureure financière, évoquant « une dépêche » de la procureure générale.
Une rapidité surprenante
A-t-elle obéi à des instructions dont elle contestait in petto le bien-fondé ? Ou était-elle elle-même convaincue de la nécessité de confier le dossier à un juge, ce qu'on la pressait de faire ? Éliane Houlette dément avoir reçu des instructions de la chancellerie, mais elle insiste sur les « très, très nombreuses demandes [sic] » de sa hiérarchie. « J'ai gardé toutes les demandes, confie-t-elle aux députés de la commission parlementaire. Elles sont d'un degré de précision ahurissant. […] Je les ai ressenties comme une énorme pression », se plaint-elle devant les parlementaires.
À LIRE AUSSI Le juge Tournaire en examenÉliane Houlette aura beau revenir sur ses tonitruantes déclarations, quelques jours plus tard, assurant que ses propos ont été « déformés » ou « mal compris », le poison du soupçon s'est instillé dans la procédure. La mise en examen de François Fillon n'était plus qu'une affaire de jours.
Un mois seulement après être sortie dans la presse, l'affaire est confiée au juge Serge Tournaire, réputé pour sa sévérité. Sans faiblir et avec une rapidité surprenante, celui-ci met François Fillon en examen, le 14 mars. On connaît la suite : la campagne électorale de l'ex-Premier ministre de Nicolas Sarkozy prendra l'allure d'un chemin de croix, jusqu'à son élimination au premier tour de l'élection présidentielle, prélude au couronnement d'Emmanuel Macron, le 7 mai 2017.
« Faire table rase »
« Un assassinat politique », dénonce Me Briard, avocat des Fillon devant la Cour de cassation. « Le procès instruit contre mes clients fut-il équitable ? Des pressions politiques ont-elles été exercées sur la procureure [Houlette] pour accélérer les poursuites en pleine élection présidentielle ? Ces questions cruciales, mes clients ont tenté de les poser devant le tribunal correctionnel, puis à hauteur d'appel. On leur a dit “trop tard”, la porte de l'article 385 s'était refermée », plaidait-il en septembre dernier devant le Conseil constitutionnel.
À LIRE AUSSI FOG – Justice, qu'as-tu fait de ta balance ? Ce mercredi, Me Briard va demander à la Cour de cassation (chambre criminelle) de « tirer les conséquences » de la décision du Conseil constitutionnel pour François Fillon, son épouse et Marc Joulaud – député suppléant de la Sarthe, également condamné dans le « Penelopegate ».
« Je vais demander à la Cour de faire table rase de l'arrêt prononçant leur condamnation. À trois reprises, celui-ci s'appuie sur l'article 385 [censuré depuis par le Conseil constitutionnel, NDLR] pour déclarer irrecevable l'exception de nullité soulevée durant l'audience par mes clients sur l'indépendance de Mme Houlette et les circonstances dans lesquelles elle fut amenée à prendre son réquisitoire introductif [en vue d'ouvrir une information judiciaire, NDLR] », confie au Point Me Briard.
Mes clients peuvent légitimement nourrir un doute sérieux sur la façon dont ils ont été poursuivis et jugés.Me Briard, avocat du couple Fillon
L'avocat des Fillon devrait également convoquer, dans sa plaidoirie, la théorie de « l'impartialité objective », consacrée en 1923 par Gordon Hewart, lord chief justice d'Angleterre. « La justice ne doit pas seulement être rendue, elle doit donner l'apparence d'être rendue de façon certaine et incontestable », énonce cette doctrine, reprise depuis par la Cour européenne des droits de l'homme sous le nom de « théorie des apparences » dans l'arrêt Delcourt contre Belgique, en 1970.
« Mme Houlette dit avoir signé son réquisitoire sous la pression ; elle le dit clairement. Dès lors, mes clients peuvent légitimement nourrir un doute sérieux sur la façon dont ils ont été poursuivis et jugés », entend soutenir Me François-Henri Briard. « L'article 385 les a privés de ce débat, pourtant fondamental », insiste-t-il.
À LIRE AUSSI « Arrêtez votre numéro » : au procès d'Éric Dupond-Moretti, une leçon de corporatisme judiciaireDans un discours devant l'Académie des sciences morales et politiques, le 6 février dernier, Christophe Soulard, premier président de la Cour de cassation, a consacré de longs développements à la théorie de l'impartialité objective. Du pain bénit pour la défense des Fillon, qui ne devrait pas manquer d'en faire état.
Me Briard, qui plaidera aux côtés de Patrice Spinosi, croisera le fer avec l'avocat général Pascal Bougy, qui, selon nos informations, devrait conclure à un rejet du pourvoi. Conformément à sa pratique, la chambre criminelle a mis, à l'issue des débats, son arrêt en délibéré au 24 avril. Dans l'hypothèse d'une cassation, une nouvelle cour d'appel serait désignée et un troisième procès se déroulerait. Dans le cas contraire, la condamnation des époux Fillon deviendrait définitive. Il ne leur resterait plus alors qu'à se tourner vers la Cour européenne des droits de l'homme, sur le fondement de l'article 6 qui consacre le droit à un « procès équitable ».
https://www.lepoint.fr/societe/des-pressions-sur-la-procureure-l-ultime-cartouche-des-epoux-fillon-28-02-2024-2553700_23.php?boc=3627676&nl_key=ea892c9bf26a7f7afeaffd33e0f6585511db5b12c41b69d649cb8370f928ba6c&m_i=y_jy37ZpI84GJSzL1jGaZCpNv435N7OIVOoWmI6JSZ9c7l4bJWqhklLejp44F33FKKrCSWbni5K1wn0IR2nrb8lFqclFyS&M_BT=6286141392673#xtor=EPR-6-[Newsletter-Matinale]-20240305-[Vous_Avez_Aime]
L'ancien Premier ministre François Fillon a été condamné ce lundi en appel à quatre ans de prison, dont un an ferme, 375.000 euros d'amende et dix ans d'inéligibilité dans l'affaire des emplois fictifs de son épouse Penelope Fillon. Cette dernière s'est vu infliger deux ans de prison avec sursis et 375.000 euros d'amende
L'un des procureurs avait observé que "sous l'Ancien régime", le détournement de fonds publics, l'un des délits reprochés à François Fillon, était puni de "mort par pendaison".
https://www.europe1.fr/politique/a-son-proces-francois-fillon-deplore-des-degats-irreparables-3952102
François Fillon démontre une fois de plus que la politique est un moyen confortable pour devenir riche. En Suisse, le cocktail "politicien et avocat" est optimal afin de toucher le jackpot. En France, rejoindre un Conseil d’Administration est plus glamour.
Ainsi, l’ancien premier ministre rejoint le conseil d’administration du groupe pétrolier russe Zaroubejneft. En juin 2020, il avait été condamné à 5 ans de prison dont deux ferme pour une affaire d’emplois fictifs. La nomination aurait été demandée par Vladimir Poutine.
L’ancien chancelier allemand Gerhard Schröder et l’ancienne cheffe de la diplomatie autrichienne Karin Kneissl font également partie de ce conseil d’administration.
A défaut d’avoir du bon monde, il y a du beau monde.
extrait de https://2000watts.org/index.php/energies-fossiles/peak-oil/1219-energies-economie-petrole-et-peak-oil-revue-mondiale-juillet-2021.html
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Après les aveux d'Éliane Houlette : le bal des hypocrites - Vu du Droit
https://www.vududroit.com/2020/06/apres-les-aveux-deliane-houlette-le-bal-des-hypocrites/
Le spasme qui a saisi le monde politique après les déclarations de l’ancienne patronne du PNF devant la commission parlementaire d’enquête est finalement très amusant. Tout le monde savait que le raid judiciaire contre Fillon était une opération savamment préparée..
L'affaire Fillon rebondit. Suite à nos révélations, l'ex-candidat à l'Élysée réclame un supplément d'information. Le jugement, prévu le 29 juin, devrait être reporté.
Rebondissement dans l'affaire Fillon. L'avocat de l'ex-candidat à la présidentielle, Me Antonin Lévy, et celui de son épouse, Pierre Cornut-Gentille, ont déposé ce mardi une requête réclamant un supplément d'information, suite aux propos d'Éliane Houlette tenus lors de son audition devant la représentation nationale. Le 10 juin dernier, comme révélé par Le Point, l'ancienne patronne du Parquet national financier (PNF) avait en effet déclaré avoir subi des « pressions » de sa hiérarchie, début 2017, pour faire remonter, quasiment en temps réel, des informations sur tous les actes d'enquête en cours.
Cette demande de François Fillon devrait avoir pour première conséquence de repousser la date du jugement, attendu le 29 juin prochain, après un procès tenu en mars. Lors de l'audience, la défense de François Fillon avait déjà fustigé les multiples fuites dans la presse. Une plainte pour violation du secret de l'enquête et du secret professionnel avait également été déposée dès février 2017.
François et Penelope Fillon entendent désormais prouver que les remontées d'informations évoquées par Éliane Houlette lors de son audition devant la commission d'enquête dédiée aux « obstacles à l'indépendance de l'Institution judiciaire » ont pu être transmises au pouvoir exécutif, via le parquet général et la Direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) de la chancellerie. Avec, comme objectif final, l'instrumentalisation de ces informations et l'élimination de la course à la présidentielle d'un candidat très haut placé dans les sondages.
Le 10 juin dernier, Éliane Houlette a en effet longuement décrit les demandes incessantes de sa hiérarchie – en l'espèce le parquet général de Paris – sur la moindre investigation menée par ses services : « Les demandes de précisions, de chronologie générale – tout ça à deux ou trois jours d'intervalle –, les demandes d'éléments sur les auditions, les demandes de notes des conseils des mis en cause… Les rapports que j'ai adressés, je les ai relus avant cette audition [devant la commission de l'Assemblée nationale, NDLR]. Il y a des rapports qui étaient circonstanciés, qui faisaient dix pages, précis, clairs, voilà », a-t-elle dit.
Surtout, l'ex-patronne du PNF a expliqué avoir été convoquée à une réunion, le 15 février, par la procureure générale près la cour d'appel de Paris, Catherine Champrenault, qui souhaitait la convaincre de l'utilité d'ouvrir une information judiciaire plutôt que de mener des investigations dans le cadre d'une enquête préliminaire.
Éliane Houlette a également assuré avoir reçu une dépêche (un message) le 17 février, lui demandant d'ouvrir une information judiciaire, ce qu'a reconnu Catherine Champrenault dans un communiqué du 19 juin, écrivant qu'elle avait effectivement envoyé un courrier « préconisant » l'ouverture d'une information judiciaire. Au sens du Code de procédure pénale (CPP), un tel courrier peut s'apparenter à une instruction dans une affaire individuelle. Or, notre droit impose normalement que toute instruction de ce type soit versée au dossier d'instruction, ce qui n'a pas été le cas dans l'affaire Fillon.
C'est précisément ce qui permet aujourd'hui à la défense du couple de demander un supplément d'information, en vue d'obtenir copie des travaux menés par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Le 19 juin dernier, le chef de l'État, garant de l'autorité judiciaire, a en effet mandaté le CSM et lui a demandé de mener une enquête sur « le fonctionnement de la justice dans l'affaire de M. François Fillon ».
« Le président de la République a demandé au CSM d'analyser si le Parquet national financier a pu exercer son activité en toute sérénité, sans pression, dans le cadre d'un dialogue normal et habituel avec le parquet général », peut-on lire dans le communiqué de l'Élysée.
Une fois cette enquête du CSM terminée et versée au dossier Fillon, les avocats ne devraient pas manquer de demander une réouverture des débats pour pouvoir discuter de ces nouveaux éléments. Avec, toujours, une question centrale : la justice s'est-elle montrée impartiale ? Contacté par Le Point, Me Antonin Lévy confirme : « Nous avons saisi la juridiction d'une demande de réouverture des débats afin que les événements récents puissent être pris en compte par le tribunal dans son délibéré. Ces événements confirment les conditions de l'enquête que nous dénonçons depuis le premier jour et éclairent d'un jour nouveau la conduite à charge des investigations. »
...les états d’âme de Madame Éliane Houlette qui avec une certaine ingénuité avoue tout de go que le pouvoir politique est intervenu directement et indirectement à tous moment dans la procédure déclenchée contre François Fillon au mois de février 2017....
"Ce n'est pas Penelope Fillon qui s'adapte à son contrat, c'est son contrat qui s'adapte à elle"....Le tribunal correctionnel de Paris rendra son jugement le 29 juin prochain...
L’archive est cruelle. Pour lancer son réquisitoire, le vice-procureur financier Aurélien Létocart n’a pas eu à chercher bien loin. « ll y a injustice sociale entre ceux qui travaillent dur pour peu et ceux qui ne travaillent pas et reçoivent de l’argent public », déclarait François Fillon lors d’un déplacement à Poitiers en septembre 2012. À l’époque, l’ex-Premier ministre incarne dans le paysage politique le visage de la rigueur et de l’austérité. Alors, dans une salle comble et face à un public venu entendre la justice requérir à l’encontre du couple Fillon, cette citation lancée en préambule a fait son petit effet.
Au terme de deux semaines d’audience et de quatre heures d’une démonstration féroce et intraitable, le parquet national financier a demandé au tribunal de condamner François Fillon à une peine de cinq ans de prison dont deux ferme. Le tout assorti d’une amende de 375.000 et d’une peine de dix ans d’inéligibilité. Jugeant l’activité fournie par Penelope Fillon comme étant fictive lorsqu’elle était salariée de son mari puis de son suppléant, les deux magistrats du Parquet national financier (PNF) ont requis une peine de trois ans de prison avec sursis et 375.000 euros d’amende à l’égard de l’épouse du prévenu. Contre Marc Joulaud, fidèle parmi les fidèles et suppléant de Fillon, une peine de deux ans d’emprisonnement et 20.000€ d’amende a été demandée.
Un « défi cognitif »
Point par point, Aurélien Létocart a pilonné les « incohérences » et « l’exagération » du couple pour tenter de démontrer, coûte que coûte, l’activité de Penelope Fillon comme collaboratrice parlementaire lors des différents mandats de son mari. Les nombreuses attestations fournies par les avocats de François et Penelope Fillon et l’examen minutieux des « preuves » censé démontrer cette activité ont elles aussi été balayés par l’accusation. « Même les très proches collaborateurs de François Fillon ont du admettre que leurs relations de travail avec Madame Fillon se limitaient à quelques contacts mensuels (…) les témoignages se font sur des perceptions, des impressions et rarement sur des éléments tangibles », a avancé le vice-procureur.
Une stratégie de défense que le magistrat a qualifié de « défi cognitif » et d'« insulte au bon sens ». Saluant au passage une enquête de qualité, Aurélien Létocart a estimé que les prévenus avaient tout simplement été « dans l’incapacité de matérialiser l’activité de Penelope Fillon » malgré les « 9 perquisitions, 42 réquisitions, 15 transports des magistrats sur divers lieux et les 43 auditions de témoins ». Certes Penelope Fillon a bel et bien eu une activité locale, sociale et associative au cours de sa vie mais rien ne permettant d’être véritablement rattaché à une activité de collaboratrice parlementaire, a pointé l’accusation. Et rien ne justifiant d’être rémunérée près d’un million d’euros au total entre 1998 et 2013, le tout sur des fonds publics.
« L’enquête et les débats ont démontré l’inconsistance des tâches effectuées par Penelope Fillon dans le cadre de ces contrats. Quel salarié n’est pas en mesure de décrire de façon circonstanciée le contenu de son travail ? (…) Quel salarié se désintéresse à ce point des conditions financières de son embauche ? », a interrogé le vice-procureur financier faisant ainsi référence au contrat de travail prérempli par son mari en 2002 et signé sans sourciller par son suppléant Marc Joulaud.
Un « profond sentiment d’impunité »
Après les réquisitions de son confrère Bruno Nataf sur le volet de l’abus de bien social, Aurélien Létocart a brossé un portrait acerbe du principal prévenu, François Fillon. Car selon lui, l’élu a développé dès le début de sa vie politique une habitude de « captation d’argent public s’affranchissant des règles. » Une habitude et une « pratique délictueuse » qui a perduré et fut même systématisée par François Fillon, a martelé le magistrat. Pointant au passage le « profond sentiment d’impunité », le « cynisme » du principal prévenu « qui n’a pas hésité à faire de la probité sa marque de fabrique » et son « mépris du bien commun », les procureurs ont appelé le tribunal à prononcer une peine « exemplaire » et « dissuasive ».
Ils ont en revanche estimé que Penelope Fillon comme Marc Joulaud avaient été « pris en otage » par l’ex-candidat à l’élection présidentielle. Les peines réclamées à leur encontre sont donc plus faibles que celle demandée pour François Fillon. Le visage tourné vers le sol à l’énoncé des peines, les trois prévenus n’ont accordé aucun regard aux représentants du parquet. Aurélien Létocart, lui, a terminé son réquisitoire comme il l’avait entamé, en citant François Fillon : « C’est trop facile d’être généreux avec l’argent des autres, au détriment de l’emploi des autres ».
Cruelles archives.
L'ex-trader peut-il dédouaner les époux Fillon de leurs responsabilités ? Robert Bourgi est porté disparu. Quant à Richard Ferrand, il joue au poker.

L'ex-trader peut-il dédouaner les époux Fillon de leurs responsabilités ? Robert Bourgi est porté disparu. Quant à Richard Ferrand, il joue au poker.
Par Romain Gubert
Septième audience du procès Fillon. Penelope Fillon est moins fébrile. Elle a soudain un peu plus d'assurance. Sans doute parce que son calvaire touche à sa fin. Dans quelques jours, elle ne sera plus obligée de répondre aux questions de la cour, de s'expliquer sur ce fameux emploi à l'Assemblée nationale, de parler des comices agricoles et des concours de parties de cartes auxquels elle devait assister. La présidente lui demande ce qu'elle fait maintenant de ses journées : « J'attends la fin de cette affaire. Puis je chercherai une activité. Je ne l'ai pas fait jusque-là. Je ne voulais pas gêner… »
François Fillon détaille ses revenus actuels sans gêne : sa retraite, son activité dans le fonds d'investissement Tikehau, ses conférences. Il n'a jamais gagné autant d'argent. Mais, maintenant qu'il a quitté la politique, personne ne peut s'en indigner. C'est sa vie. Sa nouvelle vie. Lui aussi pense à la journée de jeudi. Quand toute cette affaire sera derrière. Et qu'il n'aura plus à répondre aux questions de la présidente. Et à reprendre Penelope en public lorsqu'elle faisait un faux pas. Il faudra encore attendre le jugement, bien sûr, mais lui aussi pourra enfin penser à la suite sans avoir à subir les attaques des procureurs.
Il reste encore deux grosses audiences. Le réquisitoire et les plaidoiries. En attendant, les Fillon doivent encore avaler quelques couleuvres. Leurs avocats ont eu une drôle d'idée. Lundi 9 mars, ils ont convié Jérôme Kerviel. Oui, le trader qui a fait perdre 5 milliards à la Société générale quand François Fillon était à Matignon et qu'il a fallu sauver la banque en quelques heures. Jérôme Kerviel ne le sait pas – il n'est pas à la barre pour témoigner –, mais aujourd'hui il est la star du procès. L'ancien trader a rencontré le pape. Il a refait sa vie. Il s'est marié. Il a eu une petite fille. Il est devenu un symbole pour l'ultra-gauche. Jean-Luc Mélenchon a même publié une tribune intitulée « Kerviel est innocent ». Il se fait discret.
Les avocats de la défense auraient trouvé dans les décisions de justice qui concernent Jérôme Kerviel et la Société générale le moyen d'éviter aux époux Fillon d'avoir à rembourser l'Assemblée nationale des sommes (indues ? c'est tout l'enjeu de ce procès) perçues par Penelope Fillon. Dans l'affaire Kerviel, le trader avait été dédouané d'une partie de ses responsabilités parce que son employeur, la Société générale, n'avait pas été assez vigilant. La banque n'avait pas mis en place suffisamment de barrières et de procédures de contrôle.

L'ex-trader peut-il dédouaner les époux Fillon de leurs responsabilités ? Robert Bourgi est porté disparu. Quant à Richard Ferrand, il joue au poker.
Par Romain Gubert
Septième audience du procès Fillon. Penelope Fillon est moins fébrile. Elle a soudain un peu plus d'assurance. Sans doute parce que son calvaire touche à sa fin. Dans quelques jours, elle ne sera plus obligée de répondre aux questions de la cour, de s'expliquer sur ce fameux emploi à l'Assemblée nationale, de parler des comices agricoles et des concours de parties de cartes auxquels elle devait assister. La présidente lui demande ce qu'elle fait maintenant de ses journées : « J'attends la fin de cette affaire. Puis je chercherai une activité. Je ne l'ai pas fait jusque-là. Je ne voulais pas gêner… »
François Fillon détaille ses revenus actuels sans gêne : sa retraite, son activité dans le fonds d'investissement Tikehau, ses conférences. Il n'a jamais gagné autant d'argent. Mais, maintenant qu'il a quitté la politique, personne ne peut s'en indigner. C'est sa vie. Sa nouvelle vie. Lui aussi pense à la journée de jeudi. Quand toute cette affaire sera derrière. Et qu'il n'aura plus à répondre aux questions de la présidente. Et à reprendre Penelope en public lorsqu'elle faisait un faux pas. Il faudra encore attendre le jugement, bien sûr, mais lui aussi pourra enfin penser à la suite sans avoir à subir les attaques des procureurs.
Il reste encore deux grosses audiences. Le réquisitoire et les plaidoiries. En attendant, les Fillon doivent encore avaler quelques couleuvres. Leurs avocats ont eu une drôle d'idée. Lundi 9 mars, ils ont convié Jérôme Kerviel. Oui, le trader qui a fait perdre 5 milliards à la Société générale quand François Fillon était à Matignon et qu'il a fallu sauver la banque en quelques heures. Jérôme Kerviel ne le sait pas – il n'est pas à la barre pour témoigner –, mais aujourd'hui il est la star du procès. L'ancien trader a rencontré le pape. Il a refait sa vie. Il s'est marié. Il a eu une petite fille. Il est devenu un symbole pour l'ultra-gauche. Jean-Luc Mélenchon a même publié une tribune intitulée « Kerviel est innocent ». Il se fait discret.
Les avocats de la défense auraient trouvé dans les décisions de justice qui concernent Jérôme Kerviel et la Société générale le moyen d'éviter aux époux Fillon d'avoir à rembourser l'Assemblée nationale des sommes (indues ? c'est tout l'enjeu de ce procès) perçues par Penelope Fillon. Dans l'affaire Kerviel, le trader avait été dédouané d'une partie de ses responsabilités parce que son employeur, la Société générale, n'avait pas été assez vigilant. La banque n'avait pas mis en place suffisamment de barrières et de procédures de contrôle.
L'idée des avocats des époux Fillon est simple : l'Assemblée nationale, qui versait les salaires de Penelope (et était donc son employeur officiel), n'a pas été assez rigoureuse. L'Assemblée n'a pas comptabilisé ses vacances, ses horaires, etc. Argument des avocats : si les époux Fillon sont condamnés, ils n'auront pas à rembourser les sommes indûment perçues. Soit tout de même un million d'euros. Cela révolte Yves Claisse, l'avocat de la partie civile, jusque-là très silencieux. Pour lui, Kerviel n'a rien à faire dans ce procès. Il joue. Et surtout se moque de ses confrères qui font passer Penelope Fillon pour Jérôme Kerviel et l'Assemblée nationale pour la Société générale.
Maître Claisse en a gros sur le cœur. Un peu plus tôt, ses confrères ont aussi convié Richard Ferrand, son client, à la barre. Le président de l'Assemblée nationale n'est évidemment pas là physiquement. Mais, comme l'Assemblée, contrairement au Sénat, s'est portée partie civile et qu'en cas de condamnation elle souhaite récupérer les sommes indûment versées à Penelope Fillon, la défense veut tout savoir. Est-ce Richard Ferrand lui-même qui a mandaté un avocat ? Est-ce la questure ? À quel titre l'Assemblée, qui n'est pas une personne morale, peut-elle réclamer le remboursement de ces sommes ? Yves Claisse est bien embarrassé. Il a bien des mails échangés avec la présidence de l'Assemblée nationale, mais ceux-ci sont confidentiels. Il doit donc fournir une lettre officielle prouvant qu'il n'est pas là par hasard. Et, dans la nuit de dimanche à lundi, il n'a pas pu joindre l'Assemblée. « Je vous rassure. Je ne suis pas là depuis dix jours parce que je n'avais rien d'autre à faire. » Et il rassure François Fillon. Non, Richard Ferrand n'a pas particulièrement cherché à lui nuire.
Si le tribunal le relaxe, l'Assemblée ne demandera pas les remboursements. Mais, si Penelope et lui sont condamnés, alors il faudra payer. En somme, l'avocat de l'Assemblée explique qu'il est là pour jouer une partie de billard. Ou plutôt de poker. C'est quitte ou double. Mais François Fillon n'est pas en cause. C'est une question de principe, annonce l'avocat, qui rappelle que l'Assemblée s'était déjà portée partie civile dans le procès d'Alain Marsaud qui employait fictivement sa fille et que l'ancien député a dû rembourser 300 000 euros. Richard Ferrand n'a donc pas de comptes à régler avec François Fillon ; rien de personnel dans cette histoire.
Reste Robert Bourgi, l'homme qui offrait des costumes d'une valeur de plusieurs milliers d'euros à François Fillon. Et s'en est vanté pour se venger d'un Fillon trop ingrat avec lui… et Nicolas Sarkozy. Une affaire qui a fait beaucoup plus de mal à la campagne de François Fillon à la présidentielle de 2017 que l'emploi présumé fictif de Penelope ou sa collaboration à La Revue des deux mondes. Depuis le début du procès, son nom est comme gommé. Les procureurs ont tenté d'aborder le sujet une fois, une seule, à la fin d'une journée d'audience. Maître Antonin Lévy, l'avocat de François Fillon, a bondi de son siège. L'affaire des costumes est effectivement évoquée sur plusieurs pages dans l'ordonnance de renvoi, mais les enquêteurs n'ont pas pu aller bien loin. Fillon n'est donc pas poursuivi sur ce terrain. La présidente a suivi maître Lévy. Bourgi reste donc porté disparu. À moins que les procureurs, dans leur réquisitoire, n'en fassent un « vrai » personnage de ce procès.
Il était un peu plus de 16 h quand Bruno Nataf, l’un des deux vice-procureurs du Parquet national financier, a laissé parler son cœur. « En vérité, nous avons mal pour vous, Madame… » Trois mètres devant lui, à la barre, Penelope Fillon se débat, d’une voix blanche depuis plus d’une heure, avec les détails d’un dossier d’accusation qui semblent la dépasser. Qui l’engloutissent complètement…
Et pourtant, il ne reste plus que « l’honneur » à sauver. Celui d’un ancien candidat à l'Elysée, celui de son épouse. C’est en tout cas l’objectif que François Fillon a annoncé, à la même barre, à peine une heure plus tôt. « L’élection présidentielle [de 2017] est perdue, mon courant de pensée aussi, a-t-il indiqué dans son propos liminaire. Les dégâts sont [de toute façon] irréparables… »
Mais on ne connaît peut-être pas encore leur réelle étendue. Au premier jour du procès consacré au fond de l’affaire dite des « emplois fictifs », Penelope Fillon a sombré à la barre, incapable d’expliquer ce qu’elle a fait auprès de lui depuis 1981, alors qu’elle était rémunérée pour un travail d’assistante parlementaire.
Un rapport sur l’organisation du secrétariat à 30.000 francs
Nathalie Gavarino, la présidente de la 32e chambre devant laquelle ils comparaissent pour « détournement de fonds publics », dispose d’une voix douce. Mais ses questions sont tranchantes. « Vous faisiez des recherches en bibliothèque ? », lui demande-t-elle alors que le tribunal s’attarde sur les études sur « l’aménagement du bocage sabolien » ou « la vie économique de la Sarthe en 1986 » que Penelope est censée avoir pondu pour le compte de François. « Euh non… C’était un travail très général… Très local… », répond-elle sans que cela n’ait aucun sens. « Cela faisait combien de pages ? » Nouvelle hésitation à la barre… « Une cinquantaine peut-être… Soixante ? » On ne le saura jamais : personne n’en a retrouvé la trace.
Enfin si. Sur les fiches de paye. Car Penelope Fillon était grassement payée pour tout cela. Plus que les autres collaborateurs de son mari, à l’exception de celui chargé d’écrire les discours. Et quand elle passait à mi-temps, son salaire baissait d’un tiers seulement… Un rapport sur « l’organisation du secrétariat » de son mari ? 30.000 francs. « Soit neuf fois le SMIC », fait remarquer l’un des deux procureurs chargés de porter l’accusation. A la barre, Penelope se liquéfie.
Elle blêmit aussi quand vient l’heure d’aborder la question des congés. Elle n’en posait jamais. Mais en prenait. Et se faisait tout de même payer une indemnité compensatrice à la fin de chaque contrat… « Je pensais que l’Assemblée nationale s’occupait de regarder... », finit-elle par lâcher. « Mais comment l’Assemblée pouvait-elle savoir quand vous partiez en vacances ? », lui demande alors Aurélien Létocard, l’autre vice-procureur du parquet, comme une évidence.
Penelope était « la plus diplômée »
Pas besoin d’attendre de réponse. Pour toutes les questions administratives, Penelope renvoie vers son mari, qui a passé une bonne partie de l’audience à regarder le plafond. Vers 17 h, le voilà qui s’avance à son tour à la barre. Les deux mains bien à plat sur le pupitre, il défend le travail de son épouse.
Et il a pour lui d’avoir la force de conviction d’un homme rompu à la politique. « Il n’y a pas un seul discours que Penelope n’a pas relu (…) Elle connaissait remarquablement bien les interlocuteurs qui étaient les miens (…) Elle était la plus diplômée de mes collaborateurs », enchaîne-t-il. Et surtout, « c’est moi qui fixais la rémunération en fonction des règles de l’Assemblée nationale. »
Le discours est habile. D’autant plus persuasif qu’il est invérifiable. La présidente de la 32e chambre le sait parfaitement et rappelle toujours de sa voix douce qu’elle consacrera une partie de procès à étudier les preuves véritables du travail effectué par Penelope Fillon. Avant ça, le procureur s’était permis de rappeler qu’il avait de la « compassion » pour elle. Sans doute parce qu’il sait que le procès doit encore durer jusqu’au 11 mars. Et que, tout comme son mari, elle encourt une peine de dix ans de prison.
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https://www.20minutes.fr/justice/2727895-20200227-proces-fillon-madame-mal-lance-procureur-penelope
En choisissant de ne pas se constituer partie civile dans le procès Fillon, le Sénat s'assoit sur une coquette somme.
Une étourderie ou une courtoisie ? Le Canard enchaîné rapporte ce mercredi 26 février que le Sénat, contrairement à l'Assemblée nationale, ne s'est pas constitué partie civile au procès Fillon. Pourtant, deux des enfants de l'ancien candidat à la présidentielle ont bien touché des salaires d'attaché parlementaire. 117.400 euros qui ne reviendront pas sur les comptes du Sénat et devraient donc rester dans les poches du couple Fillon.
Interrogé par l'hebdomadaire, le cabinet de Gérard Larcher affirme que "pour les enfants, il n'y a pas de procédure. Les juges n'ont pas retenu contre eux la charge d'emploi fictif". Sauf que les juges d'instruction ont découvert que la quasi-totalité des salaires versés à ses enfants était revenue à François Fillon. Des sommes qui, selon le principal intéressé, auraient servi à payer le mariage de sa fille ou encore financer les études de son fils.
Contrairement au Sénat, l'Assemblée veut être remboursée
D'autant que François Fillon est bien poursuivi pour détournement de fonds publics pour avoir employé sa femme à l'Assemblée, mais également pour avoir "entre 2005 et 2007 rémunéré ses enfants Marie Fillon et Charles Fillon, au titre de collaborateurs de sénateur, pour des prestations fictives ou surévaluées", rappelle Le Canard enchaîné. En ne se constituant pas partie civile, le Sénat s'assoit donc sur plus de 117.000 euros.
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Une courtoisie faite à François Fillon que ne s'est pas permise l'Assemblée nationale, qui a quant à elle décidé de se porter partie civile en août dernier. En effet, le Palais Bourbon réclame au total plus d'un million d'euros à l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, à son ex-suppléant Marc Joulaud, ainsi qu'à Penelope Fillon. En plus de cette somme, François Fillon encourt 10 ans de prison et 150.000 euros d'amende.
https://www.capital.fr/economie-politique/le-cadeau-a-117-000-euros-du-senat-a-francois-fillon-1363187
Trois années se sont écoulées depuis la publication de l’article « Pour Fillon, Pénélope est un bon filon » en une du Canard Enchaîné. Trois années au cours desquelles le candidat (LR) déchu à l’élection présidentielle de 2017 est resté dans l’ombre. La seule incursion dans le paysage médiatique de l’ex-Premier ministre ? Une interview accordée le 30 janvier à France 2. Pour François Fillon, elle avait un objectif : préparer le terrain judiciaire en livrant « sa vérité » sur l’affaire dite du « Penelope Gate ». Une « vérité » qu’il aura loisir d’exposer dès ce lundi – sauf renvoi de la première journée d’audience en raison de la grève des avocats – devant le tribunal correctionnel de Paris chargé de le juger pour « détournement de fonds publics » et « abus de biens sociaux ».
A ses côtés, son épouse Penelope Fillon devra répondre des chefs de « complicité et recel de détournement de fonds publics » et « recel d’abus de bien sociaux ». Tout comme son suppléant et successeur à l’Assemblée nationale, Marc Joulaud, lui aussi poursuivi pour « détournement de fonds publics ». Pendant des mois, les enquêteurs chargés des investigations, se sont penchés sur ce trio. Que leur reprochent les magistrats ? Quelle est leur défense et que risquent-ils ? 20 Minutes fait le point avant trois semaines de procès.
François Fillon, l’homme au cœur du dossier
L’ancien Premier ministre est le plus exposé dans ce dossier. Elu dès 1981 dans la 4e circonscription de la Sarthe, François Fillon n’avait – jusqu’à la déflagration et sa chute précipitée par l’affaire – jamais quitté la vie politique française. Député, président du conseil général de la Sarthe, ministre de l’Enseignement supérieur, ministre des Affaires sociales, sénateur, Premier ministre ou encore candidat de la droite à l’élection présidentielle : il a arpenté, pendant 35 ans, les arcanes du pouvoir.
- Que lui est-il reproché ?
François Fillon est jugé pour plusieurs faits. La justice lui reproche d’avoir employé et rémunéré son épouse comme « collaboratrice parlementaire » à temps plein sous sa mandature puis sous celle de son suppléant pour un salaire total estimé à 1 million d’euros versés entre 1998 et 2013. Un travail présumé fictif. Les magistrats lui reprochent aussi de ne pas avoir déclaré un prêt de 50.000 euros accordé généreusement par son ami Marc Ladreit de Lacharrière, propriétaire de la Revue des Deux Mondes et employeur, lui aussi, de Penelope Fillon à la demande son mari. Pour l’abus de bien social dans le volet relatif à La Revue des Deux Mondes, François Fillon encourt une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement et de 375.000 euros d’amende. Pour le détournement de fonds publics, il risque une peine maximale de dix ans de prison et de 1 million d’euros d’amende. L’Assemblée nationale, partie civile au procès, réclamera de son côté un total de 1,08 million d'euros aux trois prévenus.
- Quelle est sa ligne de défense ?
François Fillon assure que sa femme Penelope a bel et bien occupé et effectué son travail d’assistante parlementaire. Cultivant « la discrétion » et favorisant « l’oralité », l’épouse de l’ex-candidat LR était selon lui son « relais local » dans la Sarthe. S’appuyant sur plus de 500 documents versés à l’instruction censés prouver l’activité réelle de sa femme entre 1998 et 2007 puis entre 2012 et 2013, François Fillon compte aussi sur les témoignages de certains de ses proches. Cinq de ses anciens collaborateurs à l’Assemblée nationale ont, selon lui, apporté les preuves de l’omniprésence et du rôle indispensable de sa femme dans l’exercice de ses mandats.
- Que dit l’instruction ?
Les juges qui ont décidé de renvoyer François Fillon devant le tribunal mettent très fortement en doute les éléments apportés par l’ancien Premier ministre. « Destinés à faire masse, pour convaincre de la réalité du travail de collaborateur parlementaire de Penelope Fillon, ces documents ne démontraient rien, ou confirmaient l’abus de langage consistant à qualifier de "travail" (…) la plus anodine de ses activités », écrivent-ils. Quant à « l’omission » de déclarer le prêt contracté auprès de son ami, les juges estiment qu’il « semblerait plutôt qu’il ait préféré dissimuler (…) le bénéfice d’un prêt dans des conditions très favorables ».
Penelope Fillon, « Penny », l’épouse discrète
De l’avis de ses amis, des collaborateurs de son époux et de son propre aveu, Penelope Clarke, devenue Penelope Fillon en juin 1980, est une femme « discrète », « timide » et « réservée ». Née au pays de Galles, cette mère de cinq enfants passionnée de littérature était – jusqu’à ce 25 janvier 2017 – peu connue du grand public.
- Que lui est-il reproché ?
Personnage central de l’enquête, Penelope Clarke est jugée pour « complicité de détournement de fonds publics » et « abus de bien sociaux ». D’abord employée par son mari député pour des « missions ponctuelles », elle est engagée à temps plein comme collaboratrice parlementaire dès 1998. A l’époque, elle perçoit jusqu’à 20.000 francs (3.048 euros) par mois. Salariée lors du dernier mandat de son époux entre 2012 et 2013, elle perçoit, ces années-là, 3.450 euros net par mois. Mais les documents permettant de démontrer une « activité réelle » manquent, selon la justice.
Dépourvue de bureau à l’Assemblée, de badge d’accès ou même d’adresse email, elle échangeait avec les autres assistants de François Fillon à quelques occasions, sur la gestion de son agenda ou pour faciliter des demandes ponctuelles d’administrés. Puis, « lassée par la politique », elle sollicite son mari en 2012 pour trouver une nouvelle « activité ». Mise en relation avec Marc Ladreit de Lacharrière, propriétaire de la Revue des Deux Mondes, elle signe cette même année un contrat de « conseillère littéraire » pour 3.900 euros net par mois. En un an, seules deux de ses fiches de lecture seront publiées. Faute d’activité, elle finira par rompre son contrat fin 2013.
- Quelle est sa ligne de défense ?
Penelope Fillon a expliqué aux enquêteurs qu’elle avait commencé à travailler auprès de son mari de façon « plus structurée » à partir de 1998. Son rôle principal portait sur la gestion du courrier adressé à son mari et sur la rédaction de « points, fiches, mémos » pour préparer les interventions de François Fillon lors d’événements locaux. Il lui arrivait aussi de le « représenter » à sa place et de recevoir à leur domicile des administrés.
Les déclarations d’autres collaborateurs de l’ex-Premier ministre, démontrent, selon elle, son implication à ses côtés lors de ses différents mandats tout comme les 500 pages de documents fournis aux enquêteurs. Concernant la Revue des Deux Mondes, elle a dit « regretter » de ne pas avoir été suffisamment sollicitée mais justifie cette absence d’activité par des tensions internes entre le propriétaire du titre et son rédacteur en chef.
- Que dit l’instruction ?
Dire que les magistrats chargés de l’instruction n’ont pas été convaincus par sa défense est un euphémisme. Dans leur ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, ils étrillent la version livrée par Penelope et François Fillon. « L’enquête a révélé que Penelope Fillon avait mené, à partir de 1981 (…) une vie de femme au foyer (…) Confrontés à l’absence d’éléments de preuve (…) Penelope et François Fillon, tout en faisant verser une masse de documents sans intérêt, ont développé la thèse d’une collaboration essentiellement orale, n’ayant donné lieu à la production d’aucun écrit et connue d’un tout petit cercle de proches », écrivent-ils en conclusion, taclant au passage une présentation des choses « pas très sérieuse » et des déclarations « invraisemblables ».
Marc Joulaud, le « timide » suppléant
Suppléant de François Fillon à l’Assemblée nationale entre 2002 et 2012, Marc Joulaud est l’actuel maire de Sablé-sur-Sarthe, fief de l’ancien candidat à l’élection présidentielle. Candidat aux municipales de mars, ce fidèle du couple Fillon est décrit par ses co-prévenus et certains de ses collaborateurs comme « timide ». Agé aujourd’hui de 62 ans, Marc Joulaud a effectué toute sa carrière dans l’ombre de son « mentor ».
- Que lui est-il reproché ?
Marc Joulaud est renvoyé devant le tribunal pour « détournement de fonds publics ». Il encourt lui aussi une peine de dix ans de prison et 1 million d’euros d’amende. Succédant à François Fillon sur les bancs du Palais-Bourbon après sa nomination au gouvernement en 2002, l’ex-député de la Sarthe est soupçonné d’avoir employé Penelope Fillon pour des activités jugées « fictives ou surévaluées ». A l’époque, Marc Joulaud a seulement 34 ans lorsqu’il signe le contrat de travail intégralement prérempli de l’épouse de François Fillon. Ses autres collaborateurs, eux, ignoraient la fonction supposément occupée par Penelope Fillon lors de son mandat.
- Quelle est sa ligne de défense ?
Face aux enquêteurs, Marc Joulaud a expliqué que Penelope Fillon l’avait aidé à s’implanter localement, à tisser des liens et, comme pour son époux, l’avait représenté lors de manifestations locales. Il a reconnu qu’il n’exerçait sur elle aucune autorité hiérarchique et évoquait avec le couple une « collaboration à trois nécessitant confiance et loyauté absolue ». Mieux rémunérée que lui lorsqu’il était député lorsqu’elle était son attachée parlementaire, Penelope Fillon était, selon Marc Joulaud, « la meilleure collaboratrice possible » pour « s’installer et grandir dans cette fonction ».
- Que dit l’instruction ?
Là encore, les magistrats font une sévère analyse de la défense avancé par l’élu. Ils pointent les déclarations de Penelope Fillon, qui a reconnu elle-même qu’elle ne fournissait à Marc Joulaud ni notes, fiches ou revues de presse, qu’elle ne corrigeait pas ses discours, n’avait ni horaire de travail ni bureau. Les juges ont balayé l’argument consistant à mettre en avant le rôle de guide dans la vie politique sarthoise joué par Penelope Fillon et justifiant son embauche à ses côtés. « A supposer que Marc Joulaud ait été réellement handicapé par une timidité maladive, on voit mal comment Penelope Fillon, qui s’est décrite elle-même comme particulièrement réservée, aurait pu lui être d’un quelconque secours », note l’instruction.
Si, tout au long de l’instruction, ni le couple ni Marc Joulaud ne sont parvenus à lever les doutes des magistrats instructeurs, il leur reste désormais neuf journées pour tenter de convaincre celles et ceux chargés de les juger.
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Affaire Pénélope Fillon : emplois suspects, zones d'ombre... Le résumé complet du feuilleton de 2017
...l'ancien candidat LR à l'Elysée et son épouse seront jugés au tribunal correctionnel de Paris, du 24 février au 11 mars 2020....