Don de sperme, fertilité, risques de consanguinité...
L’insémination artisanale, consistant à réaliser une insémination en dehors du cadre médical, présente de nombreux risques comme la transmission de MST, les violences sexuelles et la reconnaissance de la paternité par le donneur...
Rapide, gratuite, offrant la possibilité de choisir son donneur de sperme et de garder un lien avec lui si on le souhaite… L’insémination artisanale*, consistant à réaliser une insémination en dehors de tout cadre médical avec le sperme d’un donneur souvent trouvé sur Internet, présente selon ses adeptes de nombreux atouts. Mais la liste de risques auxquels s’exposent les personnes y ayant recours est tout aussi longue.
Tout d’abord, cette pratique est illégale en France et pénalement répréhensible. L’article 511-12 du Code pénal dispose que toute insémination faite en dehors du cadre légal est une infraction punie d’une peine maximale de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende. Et si, faute de preuves, cette condamnation est difficilement applicable, il ne s’agit pas du seul danger.
« Beaucoup d’hommes ne sont là que pour avoir des rapports sexuels »
Les motivations de certains donneurs peuvent tout d'abord poser question. Si la plupart des receveuses demandent un don artisanal (une éjaculation dans un pot suivie d’une injection du sperme dans le vagin via une pipette), beaucoup d’hommes souhaitent, eux, faire un don « semi-naturel » ou « naturel » (par pénétration vaginale). Sur un forum spécialisé, Patrick**, un donneur « avec un surpoids à cause de (s)on travail de cadre sup » se disant « très sérieux » et « vraiment disponible », insiste : « je suis souvent contacté pour la méthode artisanale que je ne pratique pas. » Un autre, célibataire n’ayant « pas d’attaches spécifiques », se projette déjà : « Vous êtes libre d’être dans la tenue qui vous met à l’aise, et vous pouvez également m’indiquer si vous préférez que je sois nu ou que je garde le haut. Vous avez le choix d’être passive ou active lors de l’acte. »
Simon, donneur de 25 ans dont l’annonce sur un groupe Facebook précise en gras « méthode artisanale uniquement », a « halluciné » quand il a découvert que « beaucoup d’hommes ne sont là que pour avoir des rapports sexuels ». « Ils sont quand même prêts à avoir un enfant ! »
« Il est hors de question d’échanger mon enfant contre un rapport sexuel »
Si les donneurs ne proposant que du naturel ou du semi-naturel sont faciles à reconnaître (ils doivent, sur la plupart des sites, le dire explicitement dans leur annonce), d’autres sont plus sournois. Le premier homme sur lequel est tombée Sophie s’est d’abord montré favorable à un don artisanal, avant d’ajouter « si on s’entend bien, on fera peut-être la méthode naturelle. » La trentenaire coupe court à la conversation mais l’homme la rappelle plusieurs fois et insiste, arguant que « si tout le monde y prend du plaisir et que tu as ton enfant… » Sophie s’énerve : « Pour moi, il est hors de question d’échanger mon enfant contre un rapport sexuel, quand bien même je me serais bien entendu avec le donneur. »
Certaines femmes tombent sur des hommes encore plus malsains, acceptant un don artisanal avant d’exiger, au dernier moment, d’avoir recours à la méthode « naturelle », leur assurant que celle-ci est plus efficace. « J’ai été ajouté dans un groupe de conversation privée dans lequel des donneurs s’échangeaient des contacts de femmes en disant “celle-là, tu peux aller chez elle” », témoigne Julien, donneur de 25 ans. Face à l’afflux de ce type de témoignages, l’administratrice d’un groupe Facebook a dû réagir. Répondant à une femme demandant s’il y a eu beaucoup de cas, elle explique : « Oui et on a fait le nécessaire, mais je préfère prévenir vu que beaucoup de donneurs insistent pour la méthode naturelle en disant que l’artisanale ne fonctionne pas. »
« Si je leur refusais l’artisanal, je trouverais ça malvenu »
Sébastien fait partie des hommes persuadés que la méthode artisanale est moins efficace. Il assure toutefois qu’il « essaie d’avoir une approche morale ». « Si je leur refusais l’artisanal, je trouverais ça malvenu. Pour un couple de lesbiennes, je trouve ça tout à fait normal », estime-t-il. Avant d’ajouter « si elles sont hétéros, quand elles ont le choix, elles prennent un donneur qui fera des beaux enfants selon elles. Elles vont donc en général ne pas avoir de problèmes à avoir un rapport sexuel avec cette personne. »
Les donneurs ne sont pas non plus épargnés par les situations délicates. Sébastien en sait quelque chose. Il a fini au commissariat l’année dernière. « C’était le premier couple hétérosexuel que j’aidais et le mari voulait que ça se fasse de manière naturelle. J’ai opté pour la semi-naturelle. » Deux ans plus tard, la police le convoque et évoque cette rencontre. « J’ai appris que la femme était sous l’emprise de cet homme, qui trouvait des types pour avoir des rapports avec elle, ça l’excitait. Il est en prison aujourd’hui. » Si Sébastien n’a pas été inquiété et se dit « plutôt victime de cette histoire », il a depuis tiré un trait sur les couples hétérosexuels.
Des risques de MST
Un autre risque est omniprésent : celui des maladies sexuellement transmissibles (MST). « Beaucoup de donneurs sont récusés du parcours d’AMP pour raison médicale, qu’ils aient une MST, une maladie génétique ou que la qualité de leur sperme ne soit pas assez bonne », explique à 20 Minutes l’Agence de la biomédecine. A contrario, le sperme donné pour une insémination artisanale n’est pas analysé.
Simon assure qu’aucune demandeuse ne lui a demandé ses résultats biologiques. « Les gens ne sont pas trop regardants, pourtant ça me semble primordial. » Sophie, elle, avait exigé de voir les derniers bilans sanguins de son donneur, tout en ayant conscience « qu’ils n’avaient de valeur qu’à l’instant T où il avait été prélevé. » Et cela sans compter les falsifications. « En cas de transmission d’une MST, on ne peut pas se retourner contre son donneur car l’insémination artisanale étant illégale, la faute est partagée », souligne Sophie Paricard, professeur de droit à l’Institut national universitaire d’Albi.
Reconnaissance de paternité et pension alimentaire
Les dangers concernent aussi la filiation. « La loi sur l’assistance médicale à la procréation (AMP) par don de gamètes protège beaucoup les donneurs », explique Valérie Depadt, maître de conférences à l’Université Paris-13. Si un enfant issu d’une AMP peut, depuis 2022, demander à sa majorité la levée de l’anonymat de son donneur, il ne peut en revanche lui en demander davantage. « La loi dit bien que le donneur n’a aucune obligation envers l’enfant, ni de lui répondre, ni de le voir, et évidemment l’enfant ne peut pas demander une reconnaissance de paternité », précise Sophie Paricard.
Si la loi protège le donneur agréé, il n’en est pas de même pour le clandestin, considéré par la loi comme le père. Concrètement, l’enfant pourra à tout moment réclamer une reconnaissance de paternité « qui lui sera accordée », affirme Valérie Depadt, membre de la Commission d’accès des personnes nées d’une assistance médicale à la procréation (Capadd).
Aucune protection juridique possible
« La femme peut aussi exercer une action en recherche de paternité et demander le versement d’une pension alimentaire. De la même façon, si le donneur décide de reconnaître l’enfant, même des années après sa naissance, cela fonctionnera », assure Valérie Depadt. En cas de décès de son géniteur, l’enfant issu du don pourrait également réclamer sa part d’héritage. « Personne ne peut renoncer à sa paternité, donc la justice peut obliger le donneur à prendre ses responsabilités », ajoute Sophie Paricard.
Pour se protéger, certains duos décident de signer un contrat : le donneur ne pourra pas reconnaître l’enfant et la receveuse ne pourra rien lui demander, hormis d’éventuelles questions médicales. Mais cette paperasse n’a aucune valeur juridique. « On ne peut pas contracter sur l’état civil d’un enfant car c’est de l’ordre public », insiste Valérie Depadt.
Cacher sa véritable identité
Alors pour éviter d’être retrouvés, donneurs et receveuses se donnent souvent peu d’informations sur leurs identités respectives, voire de fausses informations. « Des femmes à qui j’ai fait un don ne voulaient pas me donner leur nom de famille ou leur adresse pour éviter qu’on les retrouve, explique Christophe, donneur de 43 ans. Je connais juste leur prénom, mais je ne cherche pas à en savoir davantage. » Sophie, mère solo d’une enfant de 5 ans issue d’une insémination artisanale, a longtemps eu peur que son donneur demande la reconnaissance de sa fille. « Lorsque l’on entre dans ce type de processus, c’est un risque qu’il faut être prête à prendre car il existe. Mais plus le temps passe, moins j’ai peur, car je ne vois pas ce qu’il pourrait en tirer. »
Marjolaine, elle, a choisi comme donneur un homme marié et père de trois enfants. « Le fait qu’il ait sa famille nous faisait dire qu’il ne s’immiscerait pas dans la nôtre. » Une conviction qui s’est renforcée après avoir rencontré sa femme et leurs enfants. De son côté, Sophie a fait un autre choix pour se sentir protégée : celui d’un « serial donneur ». « Je me suis dit qu’étant géniteur de plus d’une centaine d’enfants en France, le risque qu’il vienne m’embêter était quasiment nul. » Mais elle a tout de même brouillé les pistes. « Il ne connaît pas le prénom de la petite ni la date précise de sa naissance car je ne lui ai pas envoyé la nouvelle le jour de l’accouchement. Quand on a peur, on fait ce qu’on peut. »
« Si elles se mettent toutes à me demander des sous, ça va commencer à être compliqué »
Même son de cloche côté donneurs. Sébastien, qui a réalisé plus d’une cinquantaine de dons, se sent « obligé de faire confiance ». « A priori les femmes que j’aide, notamment les couples de lesbiennes ayant une peur bleue que le géniteur réclame la garde, ne viendront pas me demander de l’argent. Franchement, on n’est pas là pour donner 200 balles par mois, on est déjà assez généreux. » Puis, il s’entend réfléchir à voix haute : « Mais c’est vrai que si elles se mettent toutes à me demander des sous, ça va commencer à être compliqué. » Sébastien a aussi peur que la dernière femme à qui il a donné son sperme, « plutôt jolie », « commence à s’attacher ». « Je lui plais bien, on a bu un verre et on a pris une nuit à l’hôtel. » Elle est tombée enceinte à la suite du don, réalisé de manière naturelle. « Je n’ai pas l’intention de fonder une famille, ni avec elle, ni tout de suite. »
De son côté, Marjolaine stresse d’autant plus que son statut de parent est en jeu. Dans le cadre d’une AMP, le statut de la mère n’ayant pas porté l’enfant est reconnu dès sa naissance si le couple a effectué une reconnaissance conjointe anticipée. Dans le cadre d’une insémination artisanale, il faut attendre six mois avant de déposer la demande d’adoption. « On doit ensuite passer devant le juge et expliquer pourquoi on veut adopter notre propre enfant », se désole Marjolaine. Leur petit garçon a 1 an et demi, mais elle n’en est toujours pas officiellement la mère, le jugement n’ayant pas encore eu lieu. « En attendant, je ne me sens pas en sécurité, pour eux, pour moi. »
« Trop risquée »
Pour toutes ces raisons, Erica**, mère de 37 ans qui avait tenté, en vain, une AMP solo, a abandonné son projet d’avoir un enfant par insémination à la maison. « Je comprends celles qui y ont recours, mais je la trouve trop risquée pour moi. »
Malgré tous les risques qu’il comporte, Sophie ne regrette pas son choix. « Quand elle sera plus grande, j’expliquerai à ma fille que j’ai demandé à un monsieur de me donner la graine. Il était d’accord pour que je lui montre sa photo et que je lui donne quelques informations basiques ». Avant d’ajouter, mi-amusée, mi-apeurée : « cela dit, si ça se trouve, il a fait comme moi et elles sont fausses ».
* Cet article est le second des trois chapitres qui composent notre enquête sur l'insémination artisanale.
** Le prénom a été modifié.
https://www.20minutes.fr/societe/4136997-20250217-celle-peux-aller-chez-multiples-risques-insemination-artisanale
Mais qui sont ces donneurs de sperme clandestins ? Sur des groupes Facebook ou des forums spécialisés, des hommes proposent de donner leur sperme à des femmes ayant recours à des inséminations à la maison, une pratique illégale et présentant de nombreux risques
Spermageddon : Le nombre de spermatozoïdes diminue dans le monde entier...
Préface. Cela fait des années que je vois ce problème dans les nouvelles scientifiques. Les données scientifiques se sont accumulées depuis suffisamment longtemps pour que l'on puisse être sûr qu'il s'agit bien d'un phénomène préoccupant, comme l'explique l'excellent article ci-dessous. Et cela ne se produit pas seulement chez les humains, mais aussi chez les chiens et d'autres espèces.
Le paragraphe le plus effrayant est peut-être le suivant : « Si le déclin se poursuit au rythme actuel, le nombre médian de spermatozoïdes atteindra zéro au milieu des années 2040. En l'espace d'une génération, « nous pourrions perdre entièrement la capacité de nous reproduire », a déclaré le magazine GQ en 2018. »
D'un point de vue positif, comme je ne vois pas un seul problème qui ne serait pas résolu par une réduction de la population (moins de pollution, perte de biodiversité, changement climatique, plus de nourriture pour tout le monde, etc. ), c'est la seule solution qui pourrait atténuer le pire du crash à venir. Mais il serait dommage qu'elle conduise à l'extinction, une énorme tragédie étant donné que nous sommes peut-être la seule espèce intelligente dans notre galaxie et dans beaucoup d'autres ..
Pendant ce temps, la droite, toutes tendances religieuses et économiques confondues, veut éliminer l'avortement pour avoir le plus grand nombre possible d'adeptes, de clients et de soldats. Hmmm. Les hommes ne sont pas vraiment nécessaires, les femmes peuvent se reproduire par parthénogenèse...
Dans les années 1990, la question a commencé à attirer beaucoup plus l'attention des scientifiques, même si certains chercheurs restaient sceptiques. Ils mettaient en cause les différences de techniques ou le fait que les études portaient principalement sur des hommes ayant déjà suivi un traitement contre l'infertilité. Ces doutes s'estompent aujourd'hui. « Il existe de nombreuses preuves scientifiques de ce déclin », déclare Albert Salas-Huetos, de l'université de Rovira i Virgili, en Espagne.
Pour des chercheurs comme Salas-Huetos, la grande question n'est plus de savoir si ce soi-disant « fléau des spermatozoïdes » se produit réellement, mais pourquoi et que faire pour y remédier. Des études commencent à mettre en lumière les toxines environnementales qui pourraient être en cause, ainsi que d'autres facteurs liés au mode de vie qui contribuent au problème. En ayant une meilleure idée des principaux suspects, nous pourrons peut-être enfin freiner cette tendance, voire l'inverser.
Baisse du nombre de spermatozoïdes
Selon un rapport récent de l'Organisation mondiale de la santé, environ une personne sur six éprouve des difficultés à concevoir un enfant. Les causes potentielles sont nombreuses, mais entre 30 et 50 % des cas sont liés à des problèmes de quantité et de qualité du sperme. Il se peut que le nombre total de spermatozoïdes soit tout simplement trop faible, ou que les cellules ressemblant à des têtards aient du mal à nager - un problème appelé mauvaise mobilité - ce qui réduit considérablement les chances des spermatozoïdes d'atteindre l'ovule, ou cellule œuf. Certains peuvent présenter des défauts génétiques dans les chromosomes qu'ils portent, ce que l'on appelle la fragmentation de l'ADN.
Shanna Swan, épidémiologiste de la reproduction à la Icahn School of Medicine at Mount Sinai, à New York, a dirigé un grand nombre des études les plus spectaculaires. Elle a commencé à s'intéresser à la question dans les années 1990, lorsque l'Académie nationale des sciences des États-Unis lui a demandé d'examiner de manière indépendante une étude danoise faisant état d'une diminution rapide du nombre de spermatozoïdes. Mme Swan s'est d'abord montrée sceptique : elle soupçonnait les chercheurs d'avoir oublié un facteur de confusion dans leur analyse. Cependant, lorsqu'elle a analysé les données, elle a continué à trouver le même taux de déclin que celui prédit par l'équipe danoise. « Nous n'avons pas du tout modifié la pente, pas jusqu'à la deuxième décimale », affirme Mme Swan.
Sa conviction n'a fait que croître au cours des décennies suivantes. En 2017, elle et ses collègues ont publié une méta-analyse qui a pris en compte les données de 185 études portant sur plus de 42 000 hommes entre 1973 et 2011, ce qui en fait la plus importante de ce type.
L'équipe de Mme Swan a examiné deux mesures différentes : la concentration de spermatozoïdes dans un millilitre de sperme et le nombre total de spermatozoïdes dans l'échantillon. En Amérique du Nord, en Europe, en Australie et en Nouvelle-Zélande, ces deux chiffres semblaient diminuer à un rythme d'environ 1,5 % par an en moyenne, soit une baisse de 50 à 60 % sur l'ensemble de la période.
Si le déclin se poursuit à ce rythme, le nombre médian de spermatozoïdes atteindra zéro au milieu des années 2040. D'ici une génération, « nous pourrions perdre entièrement la capacité de nous reproduire », a déclaré le magazine GQ en 2018.
Au moment de cette analyse, Mme Swan et son équipe ne disposaient pas de suffisamment de données pour tirer des conclusions solides sur le nombre de spermatozoïdes dans le reste du monde. Ils ont maintenant comblé cette lacune avec des données supplémentaires provenant d'Amérique du Sud, d'Asie et d'Afrique. L'article qui en découle, publié en 2023, fait état d'un déclin sur tous les continents étudiés.
Ce type d'étude présente certaines limites. Les méta-analyses peuvent être faussées par des différences entre les ensembles de données. Le comptage des spermatozoïdes est une opération délicate et la technologie utilisée a évolué au fil des ans, ce qui peut fausser les chiffres rapportés. Néanmoins, les études les plus récentes tiennent compte de ce biais potentiel et la tendance se maintient, explique Richard Lea, de l'université de Nottingham (Royaume-Uni).
Il existe également des données comparatives provenant du meilleur ami de l'homme. Les vétérinaires testent régulièrement la qualité du sperme des chiens reproducteurs, qui est soigneusement enregistrée dans le cadre de programmes d'élevage contrôlés. Cela constitue une excellente source de données pour étudier les changements potentiels de la fertilité des chiens au fil du temps. Lea et son équipe ont récemment analysé les données d'un laboratoire mesurant la motilité du sperme des chiens entre 1988 et 2014. Il est important de noter que les méthodes du laboratoire sont restées les mêmes sur cette période de 26 ans, ce qui élimine toute possibilité que des changements méthodologiques puissent fausser les résultats. « Le déclin de la qualité du sperme que nous avons constaté chez les chiens est parallèle à celui observé chez les humains », explique M. Lea.
L'importance d'une diminution du nombre de spermatozoïdes pour la fécondité globale n'est pas encore clairement établie. Le nombre de spermatozoïdes varie considérablement entre les hommes qui n'ont pas de problèmes de santé importants, mais les chiffres absolus ne semblent pas faire une grande différence pour les chances de conception jusqu'à ce qu'ils tombent en dessous d'un seuil très bas. « Et toutes les numérations moyennes de spermatozoïdes sont encore supérieures au niveau requis pour la fertilité », déclare Marion Boulicault, de l'université d'Édimbourg (Royaume-Uni). Selon elle, il est possible que nous assistions simplement à une variabilité naturelle dans une fourchette saine, plutôt qu'à un déclin sans fin.
Néanmoins, les scientifiques qui étudient cette tendance s'inquiètent de la rapidité du déclin, qui ne montre aucun signe de ralentissement. En fait, les recherches de M. Swan suggèrent qu'il pourrait même s'accélérer. « Si l'on constate un déclin de 50 % en 50 ans, il faut tirer la sonnette d'alarme », déclare Mme Salas-Huetos.
Lea, quant à elle, souligne que la diminution du nombre de spermatozoïdes coïncide avec une prévalence plus élevée de nombreux autres problèmes de reproduction à l'échelle mondiale. Un nombre croissant d'enfants naissent avec des malformations génitales, par exemple, et les taux de cancer des testicules chez les jeunes hommes sont également en hausse. « Ces données sont vraiment solides », affirme-t-il.
Quelles sont les causes du déclin des spermatozoïdes ?
L'idée est qu'il pourrait y avoir des facteurs sous-jacents liés à l'environnement ou au mode de vie à l'origine de ces différentes tendances. C'est désormais le principal domaine d'intérêt de Mme Swan, et elle affirme qu'il y a de plus en plus de preuves que les produits chimiques peuvent jouer un rôle causal majeur.
Depuis des décennies, les polluants appelés perturbateurs endocriniens (PE) sont considérés comme les principaux suspects de l'infertilité chez les hommes et les femmes. On pense que ces substances interfèrent avec la signalisation hormonale et comprennent des produits chimiques courants que l'on trouve dans certains plastiques et pesticides.
La baisse actuelle du nombre de spermatozoïdes pourrait être le résultat d'une exposition aux SAE au cours des premiers mois de développement. Nous savons que la croissance du fœtus est en partie régie par les niveaux d'hormones sexuelles et que les SAE pourraient perturber ce processus. Des études sur les animaux ont montré que l'exposition aux SAE pendant les périodes critiques du développement du fœtus peut entraîner des malformations génitales et réduire la capacité des mâles à produire des spermatozoïdes plus tard dans la vie.
De même, des recherches portant sur des personnes ayant été exposées à des SAE dans le cadre de leur activité professionnelle ont également mis en évidence des liens entre l'exposition et la diminution du nombre, de la viabilité et de la motilité des spermatozoïdes.
Risques environnementaux
Des polluants courants peuvent pénétrer dans les testicules par le biais de l'alimentation et de l'environnement. Pour tester les effets que cela peut avoir sur la qualité du sperme, l'équipe de Lea a récemment incubé des échantillons de sperme de chien et d'homme avec différentes concentrations de phtalate de diéthylhexyle et de biphényle polychloré 153. Le premier est utilisé dans les cosmétiques, les produits d'hygiène personnelle et les matériaux d'ameublement.
Le second, autrefois largement utilisé dans des produits industriels tels que la peinture et le caoutchouc, a été interdit au niveau international en 2001 après avoir été jugé potentiellement cancérigène, mais il persiste dans le sol, l'eau et les matériaux de construction. Il en résulte une diminution de la mobilité et une augmentation de la fragmentation de l'ADN des spermatozoïdes. Les recherches de M. Swan ont également mis en évidence un lien entre les phtalates et un faible nombre de spermatozoïdes. D'autres études ont abouti à des résultats similaires pour le bisphénol A, ou BPA, un produit chimique utilisé pour fabriquer des plastiques rigides, notamment des récipients de stockage alimentaire et des bouteilles de boisson rechargeables. Par exemple, une étude a montré que les hommes exposés professionnellement au BPA étaient plus susceptibles d'avoir une libido réduite, des troubles de l'érection et une diminution de la qualité du sperme.
Bien que l'agence britannique des normes alimentaires (Food Standards Agency) affirme que les niveaux de BPA généralement détectés dans les aliments ne sont pas considérés comme nocifs, elle a interdit son utilisation dans les articles destinés aux enfants en bas âge. L'agence déclare qu'elle examine les dernières preuves et qu'elle pourrait revoir les restrictions sur le BPA à l'avenir.
Quoi qu'il en soit, certains fabricants ont remplacé le BPA par d'autres substances chimiques, telles que le bisphénol F (BPF) et le bisphénol S (BPS). Une étude récente a analysé l'effet du BPA sur le sperme des taureaux, en le comparant à celui du BPF et du BPS. L'étude a montré que le BPA était le plus nuisible, mais que le BPF diminuait également la mobilité des spermatozoïdes, leur énergie et leur capacité à féconder un ovule. Le BPS n'a pas eu d'effets significatifs.
Alimentation et nombre de spermatozoïdes
Les toxines environnementales ne sont pas les seules à être dans le collimateur. Le rôle de l'alimentation dans la diminution du nombre de spermatozoïdes a également fait l'objet d'un examen minutieux. Entre 1980 et 2019, le nombre d'hommes et de garçons obèses âgés de 16 ans et plus en Angleterre est passé de 6 % à 27 %, avec des tendances similaires dans de nombreux autres pays.
De nombreuses études ont montré que les hommes en surpoids produisent moins de sperme, ont un nombre global de spermatozoïdes plus faible et une motilité des spermatozoïdes réduite. Ces facteurs peuvent à leur tour influencer les résultats des traitements de fertilité. En 2022, une équipe de chercheurs, dont Salas-Huetos, a suivi les taux de réussite de 176 couples se rendant au centre de fertilité du Massachusetts General Hospital et a mesuré le nombre de spermatozoïdes des hommes. Une augmentation de 5 centimètres du tour de taille d'un homme était associée à une baisse de 6,3 % de la concentration en spermatozoïdes et à une réduction de 9 % des chances de naissance d'un enfant vivant pour chaque cycle de traitement.
Salas-Huetos suggère que l'inflammation est en cause. L'excès de graisse corporelle produit des molécules inflammatoires qui peuvent faire des ravages sur d'autres tissus, y compris ceux des organes génitaux, et réduire la production de testostérone. « L'équilibre hormonal qu'il faut maintenir pour produire des spermatozoïdes est totalement perturbé », explique-t-il.
La qualité nutritionnelle des aliments peut également être déterminante. Une étude réalisée en 2019 a révélé que les hommes qui consomment régulièrement des fruits, des légumes, des noix et du poisson ont des concentrations de spermatozoïdes plus élevées et une meilleure mobilité que ceux qui ont une alimentation moins équilibrée. Ces aliments ont tendance à être riches en composés antioxydants, qui aident à neutraliser les molécules indésirables appelées radicaux libres.
La production de sperme semble être particulièrement sensible à cette forme de stress dû aux radicaux libres, de sorte que tout nutriment qui absorbe ces molécules peut contribuer à la santé des spermatozoïdes.
La présence d'acides gras oméga-3, qui sont des antioxydants connus aux propriétés anti-inflammatoires, semble être particulièrement importante pour prédire la qualité du sperme, selon une étude réalisée en 2020. En revanche, une forte consommation de sucre est liée à une diminution de la qualité des spermatozoïdes.
Depuis le début de la pandémie de covid-19, l'impact des virus sur les spermatozoïdes a également fait l'objet d'une plus grande attention. Plusieurs études ont montré que l'infection par le covid-19 réduit le nombre et la mobilité des spermatozoïdes, ce qui pourrait être dû au fait que le virus interfère avec les derniers stades du développement des spermatozoïdes ou que la fièvre perturbe l'homéostasie délicate nécessaire à la croissance de spermatozoïdes sains.
Ce déclin s'inverse généralement au fur et à mesure que l'infection s'atténue, bien qu'une étude portant sur des hommes ayant consulté un centre de fertilité ait montré qu'un sous-ensemble d'entre eux présentait toujours une baisse de la santé du sperme plus de trois mois après l'infection par le covid-19.
Comment améliorer le nombre de spermatozoïdes ?
Il y a de bonnes nouvelles. Si l'obésité, l'alimentation et les infections affectent la production de spermatozoïdes, les interventions sur le mode de vie et les vaccinations pourraient être en mesure de compenser une crise de fertilité - et une poignée d'essais cliniques randomisés réalisés ces dernières années permettent déjà d'être optimiste.
Emil Andersen, de l'université de Copenhague au Danemark, et ses collègues ont demandé à 56 hommes obèses de réduire leur apport calorique à 800 calories par jour pendant huit semaines. En publiant leurs résultats en 2022, Andersen et son équipe ont constaté que les participants avaient perdu 16,5 kilogrammes en moyenne et que leur nombre de spermatozoïdes avait augmenté de plus de 40 %. Le suivi des hommes pendant un an après le régime a montré que ces améliorations se maintenaient tant qu'ils conservaient leur poids, mais qu'elles disparaissaient s'ils reprenaient les kilos perdus.
Salas-Huetos et ses collègues ont quant à eux étudié les avantages de l'ajout de 60 grammes par jour de noix, d'amandes et de noisettes à l'alimentation des hommes pendant 14 semaines. Ces fruits à coque sont tous riches en antioxydants, dont l'équipe pensait qu'ils contribueraient à réduire les dommages génétiques subis par les spermatozoïdes. Il s'est avéré que les hommes qui ont suivi ce programme ont vu leur nombre de spermatozoïdes et leur mobilité augmenter, et leur fragmentation de l'ADN diminuer, alors que ceux qui ont continué à suivre leur régime alimentaire normal n'ont pas montré d'amélioration.
Il peut y avoir de nombreuses façons de tirer parti de ces avantages. Une étude italienne réalisée en 2022 a proposé à 137 hommes un régime individualisé mettant l'accent sur l'augmentation de l'activité physique et l'adhésion au « régime méditerranéen », qui intègre de nombreux éléments considérés comme bénéfiques pour la fertilité. Au bout de quatre mois, ils ont constaté une amélioration significative de la quantité et de la qualité de leurs spermatozoïdes par rapport aux personnes du groupe témoin
L'effet de l'exercice sur le nombre de spermatozoïdes
Étant donné que le régime alimentaire et l'exercice physique vont souvent de pair lorsqu'il s'agit d'interventions sur le mode de vie et d'une bonne santé, on pourrait penser que l'exercice physique est étroitement lié à un meilleur sperme. En réalité, ce n'est pas aussi simple.
De petites études ont montré que l'exercice modéré, tel que 30 minutes de cardio, trois fois par semaine, améliorait la santé des spermatozoïdes. De même, une étude récente a montré que les hommes qui soulèvent des objets lourds au travail ont un nombre de spermatozoïdes 44 % plus élevé que ceux qui ont un travail moins physique. Ils présentaient également des taux de testostérone et d'œstrogène plus élevés, ce qui a été associé à un meilleur équilibre hormonal général. Toutefois, d'autres études suggèrent qu'il ne faut pas en faire trop. Par exemple, la santé des spermatozoïdes diminue après une période d'exercice rigoureux, telle qu'une randonnée en haute montagne de 6 à 8 heures par jour pendant cinq jours, ou après un entraînement intensif de cyclisme pendant 16 semaines. Une étude plus vaste portant sur des cyclistes n'a pas établi de lien avec la fertilité (voir « Quelles sont les causes de la détérioration des spermatozoïdes ? Réalité et fiction », ci-dessous), mais des preuves supplémentaires sont nécessaires pour l'affirmer avec certitude.
Qu'en est-il alors ? « Si vous pensez à ce qu'un médecin vous dirait de changer pour améliorer la santé de votre cœur, vous améliorerez également la santé de votre sperme », affirme M. Swan.
Cinquante ans se sont écoulés depuis que Nelson et Bunge ont annoncé leurs découvertes. Si les chercheurs d'aujourd'hui débattent encore des causes, des conséquences et des remèdes spécifiques au déclin du sperme, ils sont tous d'accord sur un point : il est urgent de mieux comprendre ce phénomène.
« Cette question mérite beaucoup d'attention », déclare M. Boulicault. « La santé reproductive est un aspect très important de la vie des gens et cela signifie que la façon dont nous faisons de la science doit être très vigilante et solide.
Mme Swan compare cette situation à la crise climatique. « Nous suivons le même chemin », dit-elle. « Il y a les premières alertes, puis la grande vague de déni, puis de plus en plus de gens qui reconnaissent que la situation s'aggrave.
Vient ensuite la partie la plus difficile : agir. L'horloge tourne et les générations futures pourraient nous juger pour les décisions que nous prenons aujourd'hui.
Posté le 16 janvier 2025 par energyskeptic
Références
Davies J (2022) Spermageddon ! Les taux de spermatozoïdes des hommes ont plus que DIMINUÉ depuis les années 1970 et les experts avertissent que cette tendance pourrait « menacer la survie de l'humanité ». https://www.dailymail.co.uk/health/article-11429551/Mens-sperm-rates-halved-1970s.html
ENQUÊTE. Jonathan Meijer aurait eu plus de 550 enfants par don de gamètes aux Pays-Bas. Les familles contre-attaquent.
Dans l'école de Gouda où elle enseigne, Natalie Dijkdrenth, 39 ans, a souvent la désagréable impression de croiser des enfants avec les mêmes traits de visage, voire les mêmes tics que son fils. Chaque fois, elle se retient de poser cette question qui lui brûle les lèvres : est-ce aussi un enfant issu de son donneur de sperme, Jonathan Meijer ? Ici, à une vingtaine de kilomètres de Rotterdam, les pâturages sont verdoyants et les Tesla de cadres supérieurs sont garées devant les maisons ovales fraîchement sorties de terre. L'enseignante et sa compagne, Suzanne Daniels, 43 ans, se sont installées ici il y a quelques mois, « pour la vue et le calme ». Le couple y élève ses deux enfants : Elisa*, 15 ans, issue d'un premier mariage, et Tobias*, 11 ans, cheveux blond platine et né d'un don de spermatozoïdes.
Assise dans son salon, Natalie soupire : « On sait qu'il y a plein d'enfants de Jonathan dans le coin. La dernière fois, notre fille nous a raconté qu'elle avait rencontré un garçon qui ressemblait à Tobias. Mais elle ne peut pas le lui demander, parce que l'enfant n'est peut-être pas au courant qu'il a été conçu de cette manière. » Dans la région, le nom de Jonathan Meijer est désormais bien connu. Les autorités estiment qu'il aurait conçu entre 600 et 1 000 enfants par don de sperme aux Pays-Bas, mais aussi dans le monde entier. Bien entendu, personne n'était au courant avant que l'affaire n'éclate.
« Ce profil de donneur cochait toutes les cases »
D'aussi loin qu'elle s'en souvienne, Natalie a toujours voulu avoir des enfants. « Je viens d'une famille de quatre enfants. J'ai grandi avec beaucoup de sœurs et je voulais avoir ma propre famille », raconte-t-elle. Lorsqu'elle découvre son homosexualité, la jeune femme élimine rapidement l'option d'une PMA en clinique, qui s'apparente à un véritable parcours du combattant. À cause d'un manque de dons de sperme, l'attente est supérieure à deux ans, les prix sont élevés et, surtout, il n'y a pas de contrôle sur le géniteur. Elle ne souhaitait pas non plus adopter. « Les cliniques ne vous laissent pas le choix et je voulais un minimum de contrôle sur le processus, poursuit Natalie Dijkdrenth. Si vous n'êtes pas capable de rencontrer le donneur, comment pouvez-vous savoir quelle tête ou quelle personnalité aura votre enfant ? À sa place, je voudrais avoir une idée de mon géniteur. C'est pour cela que j'ai renoncé à la clinique. »
En 2010, elle se met donc en quête d'un profil de donneur sur les sites spécialisés. Elle tombe rapidement sur le profil de Jonathan Meijer. À l'époque âgé de 29 ans, ce blond platine aux yeux bleus se révèle rapidement sympathique. « On avait beaucoup de points communs. Il était professeur d'école, il aimait la même musique que moi, il venait d'une famille nombreuse et il allait à l'église. Il cochait toutes les cases. » Lorsque Natalie le rencontre, elle lui demande s'il a l'habitude de donner son sperme : « Il m'a dit que j'étais la troisième femme à avoir fait appel à lui et qu'il allait le proposer à cinq femmes au total. » À sa plus grande joie, Jonathan accepte également d'entretenir des contacts ponctuels avec son futur enfant, même sans parenté légale.
Des établissants peu regardants avec les donneurs de sperme
Natalie ne souhaitant pas avoir de relation sexuelle avec lui, Jonathan lui propose une autre solution : à chaque cycle d'ovulation, la future mère prévient Jonathan, qui se rend à son domicile après avoir effectué un test de dépistage d'infection sexuellement transmissible (IST). Il éjacule dans un récipient et Natalie s'insémine elle-même à domicile. Le taux de réussite de ces inséminations artisanales est faible. Mais, en janvier 2012, après cinq tentatives et une fausse couche, Natalie tombe enfin enceinte de Tobias.
Novembre 2017. Eva* fait la rencontre de Jonathan à travers la plateforme de coparentalité OneWish. Un certain « Jacob », en réalité Jonathan, la contacte pour lui proposer ses services. Le généreux donateur prétend avoir eu 12 enfants avec 8 femmes depuis 2007. Lorsque Eva lui demande s'il compte bientôt s'arrêter, il lui répond : « Oui, j'ai déjà presque atteint la limite légale », soit 25 enfants par donneur pour 12 femmes différentes aux Pays-Bas. Jonathan procède de la même manière qu'avec Natalie : il se rend à son domicile pour les inséminations. Sept tentatives plus tard, Eva tombe enceinte. Son fils, Max, naît en juin 2019.
Les deux mères ne s'en doutent pas encore mais, en réalité, Jonathan Meijer a déjà commencé à éveiller les soupçons de la Société néerlandaise d'obstétrique et de gynécologie. Dès 2017, ce collectif a saisi la justice en s'apercevant qu'un serial donneur avait engendré 102 enfants en dix ans à travers onze cliniques de fertilité néerlandaises. Depuis 1992, l'une des conditions du don est que le donneur de sperme ne donne pas simultanément son sperme ailleurs, sinon il serait impossible de contrôler le nombre de grossesses obtenues. Mais, en réalité, les établissements semblent peu regardants. « Dès que j'avais fini avec une clinique, j'allais à la suivante », raconte Jonathan Meijer lors de son procès. « Les cliniques de fertilité sont par nature contre le contrôle », pointe Ties van der Meer, président de la fondation Donorkind, qui aide les enfants nés de dons à retrouver leurs parents.
Blacklisté aux Pas-Bas, mais de mystérieux allers et retours en France
Blacklisté aux Pays-Bas, Jonathan Meijer ne se décourage pas. Il se rend (sous le nom de « Ruud ») au Danemark, où se trouve Cryos, la plus grosse banque de sperme du monde. Le marché est énorme : rien qu'en France 3,3 millions de personnes sont concernées par l'infertilité et, chaque année, des centaines de Françaises font appel à cette multinationale de la reproduction. Jonathan Meijer se rend aussi en Ukraine, où il donne au BioTexCom-Centre for Human Reproduction. Parallèlement à des plateformes de coparentalité payantes comme OneWish, il s'inscrit sur des dizaines de groupes Facebook dédiés. En l'absence de règles internationales sur le don de sperme, Jonathan Meijer semble inarrêtable.
Natalie Dijkdrenth et Suzanne Daniels se souviennent très bien du jour où elles ont découvert les mensonges de Jonathan Meijer. En 2021, Suzanne lit l'édition du jour du Volkskrant en buvant son café dans le jardin. On y parle d'un mystérieux serial donneur de sperme. Suzanne est soudain prise de vertiges : « Vous pouvez confondre un nom, mais un dessin sur toute une page, ça ne trompe pas. »« Je suis restée sans voix, se souvient Natalie. J'ai découvert qu'il avait donné son sperme, non pas à cinq femmes, comme il nous l'avait dit, mais à des centaines ! »
Beaucoup sont aux Pays-Bas, mais il y en a aussi en Allemagne, en Italie, en Australie et en Amérique du Sud. Et puis il y a ces mystérieux allers et retours en France. Il y a quelques années, Jonathan Meijer s'est notamment rendu à Rosny-sous-Bois, dans la Seine-Saint-Denis, à la demande d'une famille française. Certains experts estiment que, « après quatorze ans de dons, le donneur pourrait théoriquement avoir entre 800 et 1 000 enfants » dans le monde. Mais, en l'absence de registre et de règles internationales sur le don de sperme, il est impossible d'avoir un chiffre exact.
Le 28 avril 2023, Jonathan Meijer est condamné par le tribunal de La Haye à cesser toute publicité sur les sites Internet de don de sperme. Il n'a plus le droit de donner qu'aux familles qui ont déjà un enfant de lui. « Cette affaire a permis de créer un précédent juridique, estime l'avocat des parties civiles, Mark de Hek. S'il y a un prochain donneur de masse, on pourra le poursuivre facilement. »
« En tout, j'ai calculé que j'avais passé 50 000 heures à donner mon sperme »
Aux Pays-Bas, l'affaire Jonathan Meijer a suscité un tollé. Chaque mois, Ties van der Meer continue de recevoir des coups de téléphone de familles affolées des quatre coins du globe qui pensent avoir un enfant du serial donneur : « Nous avions 15 signalements par semaine pendant le procès, puis c'est redescendu à un par semaine. En général, les familles sont en état de choc et se demandent comment en parler à leur enfant », témoigne le professeur d'université. L'affaire a eu des répercussions jusqu'en Belgique, où le ministre des Affaires sociales et de la Santé publique a promis de légiférer pour créer une base de données des donneurs de sperme, qui devrait garantir qu'un donneur n'engendre pas trop d'enfants. Ce qui ne réglera pas la question des dons privés sur Internet.
Jonathan Meijer se défend à travers des vidéos qu'il publie sur sa chaîne YouTube (qui compte 5 000 abonnés), où il disserte sur l'importance de la famille, le retour à la nature ou la spiritualité. Le serial donneur a pris l'habitude de se filmer en chemise hawaïenne dans des décors de carte postale : l'Afrique du Sud, le Kenya ou encore la Sicile. « J'ai désespérément besoin d'une indemnisation pour couvrir les coûts énormes de la procédure judiciaire dont je fais l'objet », nous écrit-il par mail. Après avoir tenté de monnayer une interview, il accepte de nous rencontrer deux heures dans un café de Voorthuizen, un petit village composé de bâtisses nordiques et de parcs verdoyants, à une centaine de kilomètres à l'est de La Haye. Dégaine de surfeur, short treillis, sandales et tee-shirt à manches courtes malgré le froid, Jonathan Meijer n'a pas choisi l'endroit par hasard. Il assure avoir gardé le lien avec de nombreuses familles et dit avoir un rendez-vous dans le coin en fin d'après-midi.
À 42 ans, l'homme à la longue chevelure blonde a été successivement enseignant, professeur de guitare, postier puis consultant en cryptomonnaies. Aujourd'hui sculpteur sur bois, il vit sobrement dans un petit studio aux Pays-Bas. Il dit avoir commencé à donner à l'âge de 25 ans, après avoir découvert au lycée l'infertilité d'un ami touché par une maladie chronique. Il dit aussi avoir arrêté de donner en 2019, par lassitude : « J'étais toujours sur le départ : à tout moment une famille t'appelle pour l'insémination, tu avales ton repas et tu pars. En tout, j'ai calculé que j'avais passé 50 000 heures à donner mon sperme. C'était presque tous les jours, y compris les week-ends. C'était trop pour moi. Je voulais être plus en paix, et vivre ma propre vie. » Sa motivation initiale reste un grand mystère.
Une sortie collective en forêt avec une soixantaine d'enfants de Jonathan Meijer
En 2012, une étude menée par des chercheurs néerlandais avait identifié trois motivations principales, du moins pour les donneurs moyens : l'argent, la générosité et le désir de transmettre leur ADN. Suzanne Daniels penche pour la première hypothèse : « Imaginons qu'il donne huit fois par semaine et qu'il ne fasse qu'un test IST. Ces huit familles donnent 160 euros pour rembourser le test. Certaines mères nous ont dit payer 160 euros, d'autres 300 euros pour le voyage et le reste. Je vous laisse faire le calcul », note-t-elle en souriant. Jonathan Meijer reconnaît avoir menti aux mères « quelquefois ». La plupart ne lui auraient pas demandé le nombre d'enfants, « mais, pour celles qui m'ont demandé, j'ai probablement donné un chiffre différent », reconnaît-il.
Reste la question de ces centaines d'enfants qui vivront toute leur vie avec une épée de Damoclès au-dessus de leur tête. Avec 12 millions d'habitants, les Pays-Bas sont un petit pays. « À raison de 10 enfants par donneur, la probabilité d'entrer en relation avec un demi-frère ou une demi-sœur est de 0,011 %. À 200 enfants par donneur, elle est de 0,2 % », souligne l'avocat Mark de Hek. Natalie Dijkdrenth s'insurge : « Il a volé l'innocence de ces enfants. Ils n'auront jamais la même vie que nous. S'ils ne font pas gaffe, il y aura toujours un risque de consanguinité. »
Né d'un don de sperme, Ivo Von Halen en sait quelque chose. Certains de ses demi-frères et demi-sœurs se sont rencontrés à plusieurs reprises sur l'application de rencontre Tinder. « 80 % des enfants de donneur ne savent pas qu'ils sont conçus de cette manière, explique cet informaticien de 39 ans. C'est lié à l'idée que les hommes qui n'arrivent pas à se reproduire doivent se cacher. » Et tant pis si ce tabou engendre un risque de consanguinité. Depuis 2017, des dizaines de familles sont entrées en contact, à travers le groupe Facebook privé Donorkind 102 JJM, où elles s'échangent régulièrement des photos des enfants et des nouvelles. On y lit notamment cette consigne : « Pas de transmission ou d'envoi de photos ou d'histoires à [Jonathan] ! »
Au mois de mai, elles se sont même donné rendez-vous pour une sortie collective en forêt. Une soixante d'enfants de Jonathan Meijer ont pu passer quelques heures à jouer ensemble, à crapahuter dans les arbres, bref, à tisser des liens. « C'était perturbant de voir tous ces enfants avec les mêmes traits. On aurait dit un mauvais film de science-fiction », lâche Natalie. L'enseignante a coupé les ponts avec Jonathan Meijer, mais elle dit ne pas lui en vouloir. « Dans le fond, il ne s'agit ni de lui ni des mères en colère. Le vrai problème de cette affaire, ce sont les donneurs de masse. À la fin de cette histoire, quelque chose doit changer. »
* Les prénoms ont été modifiés.
À l'heure actuelle, 0,5 % des hommes dans le monde – et 8 % en Asie centrale – partagent les mêmes gènes sur leur chromosome Y, preuve qu'ils descendent tous d'un seul homme. Un monsieur qui aura donc eu, de son vivant, une tripotée de mouflets. Pour les scientifiques, il est fort probable que ce méga-étalon ait été Gengis Kahn, mort en 1227 et déjà décrit par les historiens de la dynastie Yuan (XIIIe-XIVe siècle) comme le géniteur de 20 000 enfants. Un petit millénaire plus tard, son arbre généalogique croule sous 16 millions de descendants. peggy Sastre
https://www.lepoint.fr/societe/aux-pays-bas-sur-les-traces-de-jonathan-meijer-serial-donneur-de-sperme-11-03-2024-2554670_23.php
À raison de dizaines de « petites annonces » en ligne publiées chaque jour, l'intérêt pour les dons de sperme « artisanaux » ne faiblit pas en France, malgré la démocratisation du parcours légal d'aide à la procréation....« J'en retire une forme de reconnaissance: quand la receveuse à qui j'ai fait un don est tombée enceinte, elle m'a remercié, j'ai pu voir quelques photos du bébé », raconte cet homme, géniteur de deux enfants avec une même femme
Oncle et nièce, cousin et cousine : les mariages des Habsbourg d'Espagne, au 16e et 17e siècles, étaient particulièrement consanguins. Pour la première fois, la relation avec la récurrence de leurs traits faciaux est démontrée.

Charles II, dernier des Habsbourg d'Espagne. Malade, rachitique et, à la fin de sa vie, délirant, il était surnommé "l'ensorcelé".
La mâchoire en avant, le nez pointant vers le bas : la dynastie des Habsbourg d'Espagne, qui a régné sur l'Espagne et le Portugal pendant 200 ans de 1506 à 1700, était connue pour ses traits récurrents d'une génération à l'autre… Et une forte consanguinité. Pour la première fois, une étude, publiée dans Annals of Human Biology, montre que ces deux particularités ont un lien de cause à effet.
Les Habsbourg d'Espagne, la dynastie consanguine
Au 16e siècle, se marier avec son cousin ou un membre de sa famille proche est attrayant pour les familles les plus riches et nobles : cela permet de conserver le patrimoine dans la famille. C'est ainsi que Charles Quint épouse sa cousine germaine, et que leur fils Philippe II marie sa nièce. Leur fils Philippe III épouse alors sa cousine au second degré, et, enfin, leur fils Philippe IV s'unit à sa nièce. Nait alors Charles II, dernier de sa lignée puisque, malade et rachitique, il n'arrivera jamais à avoir d'enfant dans ses 35 années de vie. Le taux de consanguinité entre les parents de Charles II atteint alors le record de 25%, soit l'équivalent d'un frère et d'une sœur, ou d'une mère et d'un fils. "La dynastie des Habsbourg était l'une des plus influentes d'Europe, mais elle est devenue réputée pour la consanguinité, qui a finalement été son échec", relate dans un communiqué le premier auteur Roman Vilas, chercheur à l’Université de Saint-Jacques-de-Compostelle.
Charles Quint, ou Charles 1er des Habsbourg d'Espagne
La mâchoire, le nez et la lèvre des Habsbourg
La fameuse "mâchoire des Habsbourg" est principalement caractérisée par un fort prognathisme (menton en avant). Ajoutée à un nez pointé vers le bas et une lèvre supérieure proéminente, signes d'une particularité médicale appelée "déficience maxillaire", elle caractérise la plupart des membres de la puissante famille. Bien que ces traits aient été depuis longtemps observés sur les portraits de la dynastie, jusqu'à présent, aucune étude n'a confirmé qu'elle était le résultat d'une consanguinité.
Pour débrouiller ce mystère, les chercheurs ont recruté 10 chirurgiens maxillo-faciaux pour diagnostiquer la déformation faciale dans 66 portraits réalistes de 15 membres de la dynastie des Habsbourg. Les chirurgiens ont relevé 11 caractéristiques de la "mâchoire de Habsbourg", ainsi que sept caractéristiques de la déficience maxillaire - dont la lèvre inférieure proéminente et la pointe nasale en surplomb.
Philippe 1er d'Espagne, de la dynastie des Habsbourg.
Une corrélation claire entre consanguinité et traits des Habsbourg
Les chirurgiens ont alors observé que c'était chez Philippe IV - roi d'Espagne et du Portugal de 1621 à 1640 – que la mâchoire des Habsbourg était la plus prononcée. Quant à la déficience maxillaire, elle était diagnostiquée au plus haut degré chez cinq membres de la famille : Maximilien Ier (régent de 1493), sa fille Marguerite d'Autriche, son neveu Charles Ier d'Espagne, son arrière-petit-fils Philippe IV (à nouveau lui) et le dernier de la lignée des Habsbourg, Charles II.
En étudiant l'arbre généalogique de la lignée sur 20 générations et calculant un facteur de consanguinité, les auteurs ont mis en évidence une base génétique commune entre la "mâchoire des Habsbourg" et la déficience maxillaire. Ils ont ainsi montré une forte relation entre le degré de consanguinité et d'une part le degré de prognathisme de la mâchoire, et d'autre part deux des sept critères de la déficience maxillaire (l'œil rond et la proéminence de la lèvre supérieure). "Nous montrons pour la première fois qu'il existe une relation positive claire entre la consanguinité et l'apparence de la mâchoire des Habsbourg", conclut Roman Vilas.
Philippe IV d'Espagne, père de Charles II. Malade et rachitique, ce dernier mourut sans enfants.
Le facteur hasard ne peut pas être exclu
D'après les auteurs, si la cause génétique de ces traits physiques n'est pas encore connue, elle serait en tout cas due au fait que l'accouplement entre parents a pour effet principal d'augmenter les chances que la progéniture hérite de formes identiques d'un gène des deux parents. De plus, "il est probable que plusieurs facteurs impliqués dans la mâchoire des Habsbourg, tels que certains défauts anatomiques congénitaux et troubles endocriniens", soient liés à la réapparition de ces traits, ajoutent les auteurs dans la publication.
Malgré tout, il existe une petite chance, au vu du faible nombre de membres de la famille, que la réapparition de ces traits soit seulement due au hasard, autrement appelée "dérive génétique". Bien qu'improbable, cette possibilité ne peut pas encore être exclue, et nécessitera des études sur d'autres familles possédant, eux aussi, la mâchoire des Habsbourg.
ENTRETIEN. L’infertilité gagne du terrain sur toute la planète. Au point de menacer l’avenir de l’humanité, prévient le professeur Hamamah.
Notre survie comme espèce est en danger. Un rapport sur l'infertilité en France, remis le 21 février 2022 au ministre de la Santé, Olivier Véran, et à Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de la Protection de l'enfance, dresse un bilan absolument alarmant de notre santé reproductive. Comment en sommes-nous arrivés là ? Alors que le recours à l'assistance médicale à la procréation ne cesse de progresser, que sait-on aujourd'hui de l'infertilité et de ses causes ? Comment sauver notre peau ? Le professeur Samir Hamamah, chef de service de biologie de la reproduction au CHU de Montpellier et coauteur du rapport, avance quelques pistes.
Le Point : L'infertilité est-elle un problème fréquent ?
Pr Samir Hamamah : Extrêmement fréquent. En France, 3,3 millions de personnes sont touchées. Autrement dit, 6,6 millions de personnes appartiennent à un couple confronté à ce problème. Pour rappel, on parle d'infertilité lorsqu'un couple ne parvient pas à concevoir naturellement après un an de rapports sexuels réguliers. C'est un gigantesque problème de santé publique. La France n'est évidemment pas le seul pays qui doit faire face à l'infertilité. Pour dresser notre rapport, ce qui nous a pris de longs mois, nous nous sommes intéressés à tous les pays qui disposent de données sur le sujet. Nous avons auditionné 140 experts dans le monde. Tous les continents, tous les pays sans exception, sont concernés. Il y a autant de personnes infertiles que de personnes diabétiques. Je savais déjà que notre santé reproductive était menacée, mais c'est plus que cela : l'espèce humaine tout entière est en danger de disparition.
À quelle échelle de temps ?
Les scénarios les plus pessimistes prévoient une extinction de l'espèce dans un siècle et demi. Deux siècles pour les plus optimistes.
C'est alarmant ! Quelles données nous permettent de faire ces projections ?
Au cours des trente dernières années, les hommes ont perdu plus de 50 % de leur production spermatique. Mais cette dégradation a commencé bien avant. Déjà en 1992, une étude danoise, parue dans le New England Journal of Medicine, estimait que depuis les années 1930 les hommes avaient perdu 1 million de spermatozoïdes par gramme de testicule et par an ! Au Danemark, un pays à la pointe dans le suivi de la fertilité, en 2040, tous les hommes en âge de procréer pourraient être infertiles si la baisse de qualité du sperme continue à ce rythme. En France, le nombre d'enfants par femme est descendu à 1,83. Au Portugal, en Espagne ou en Italie, il est de 1,3.
Pour faire perdurer une société, ce taux doit être de 2,6 au moins. Deux pays se préoccupent particulièrement de leur démographie. La Chine, d'abord : la natalité a chuté en 2021 à un niveau historiquement bas. À tel point qu'on prévoit que dans les 40 à 50 prochaines années, le pays pourrait perdre 50 % de sa population. La Russie est aussi en mauvaise posture. Il n'y a qu'à regarder le nombre de centres de PMA [procréation médicalement assistée, NDLR] que compte la ville de Moscou : 82, pour une population de 12 millions d'habitants. En comparaison, en France, nous avons 103 centres pour 67 millions d'habitants. Les Russes font tout pour renouveler leur population.
Comment expliquer une telle « épidémie » d'infertilité ? La baisse de la qualité du sperme est-elle le seul facteur ?
Non. Déjà, dans 10 à 15 % des cas, l'infertilité reste inexpliquée. Sinon, il y a trois grandes causes possibles, qui sont en fait étroitement intriquées. En premier lieu, ce que j'appelle les causes sociétales, qui poussent les femmes à retarder leur projet parental. Elles prennent le temps de terminer leurs études, de s'installer dans leur vie professionnelle et de trouver le « prince » ou la « princesse ». En l'espace de trente ans, l'âge moyen du premier accouchement des femmes françaises, par exemple, a reculé de cinq ans. Autrement dit, dans l'infertilité, la première cause, c'est l'âge de la femme. Aujourd'hui, une femme de 30 ans a un risque sur quatre de rencontrer des problèmes d'infertilité. À 40 ans, c'est une femme sur deux. Notre santé reproductive est aussi le miroir de notre hygiène de vie. L'excès de poids, le stress, la consommation de tabac, d'alcool ou de café en excès, ou encore le manque de sommeil : tout cela lui nuit. De véritables causes médicales, qui touchent à parts égales les hommes et les femmes, sont bien sûr possibles. Il peut s'agir de trompes bouchées, d'une insuffisance ovarienne prématurée ou d'un sperme très altéré. Et puis, il y a les causes environnementales.
Nous sommes bombardés par les perturbateurs endocriniens, des molécules chimiques qui parasitent notre système de régulation hormonale. Ils sont reprotoxiques pour les hommes comme pour les femmes. Ils sont partout dans nos cosmétiques, nos produits d'entretien ou notre nourriture. Ce sont des métaux lourds, des solvants, des pesticides… La liste est sans fin : on a recensé plus de 300 000 molécules chimiques pouvant être des perturbateurs endocriniens. Et nous sommes quotidiennement exposés à une centaine d'entre eux. C'est un scandale sanitaire qu'il faut absolument aborder avec transparence. Les écologistes nous parlent de l'effondrement des écosystèmes et de la biodiversité. Mais les êtres humains, aussi, sont gravement menacés !
Mais la PMA ne peut-elle pas être une réponse à l'infertilité ?
La PMA, c'est l'arbre qui cache la forêt. On a occupé l'espace médiatique depuis quarante ans en laissant croire, sans le vouloir et sans le savoir, que c'était une solution miracle à toutes les sortes d'infertilité. C'est faux : dans deux cas d'infertilité sur trois, elle est inefficace. Ce qu'il faut faire, c'est mettre en place une vraie politique de prévention, c'est agir bien en amont en informant de manière individuelle et collective sur la santé reproductive et sur tous les facteurs qui peuvent l'altérer.
Que recommandez-vous ?
Nous préconisons la création d'un logo qui alerte sur la reprotoxicité de tous les produits de la vie courante. Chaque jeune femme devrait avoir conscience, quand elle achète un parfum ou un fond de teint, que ce sont des produits qui peuvent avoir une influence néfaste. Dès le collège, il faudrait pouvoir donner aux jeunes des clés pour préserver leur santé reproductive. J'insiste, il ne s'agit en rien de promouvoir une politique nataliste. Simplement d'informer. À l'échelle nationale, nous demandons la création d'un institut national de la fertilité, sur le modèle de l'Institut national du cancer (Inca), pour incarner, coordonner, piloter, prioriser et promouvoir la recherche et l'innovation. Je le répète, il s'agit ni plus ni moins de préserver l'espèce humaine. Nous avons une responsabilité collective.
Propos recueillis par Héloïse Rambert
Le Conseil national de l'Ordre des médecins a récemment été alerté sur des soupçons visant trois gynécologues français, dont deux sont décédés. Plusieurs tests ADN, réalisés par des personnes nées de dons, soulèvent des questions quant aux pratiques de ces spécialistes.
Le document se veut être un "signalement" sur de possibles "fautes éthiques et déontologiques graves" au cours des années 1970 et 1980. Dans un e-mail adressé le 2 novembre au Conseil national de l'Ordre des médecins, et auquel franceinfo a eu accès, l'association PMAnonyme soupçonne trois gynécologues français d'avoir eu recours à leur propre sperme pour inséminer des patientes, "et ce à leur insu". L'Ordre des médecins, joint par franceinfo, confirme avoir reçu ce message, sans préciser les suites qui seront données à cette alerte. C'est la première fois que de telles accusations sont rendues publiques en France.
De premiers soupçons ont émergé récemment au sein de PMAnonyme, qui réunit des centaines de personnes nées de dons de gamètes et milite pour l'accès aux origines personnelles. Trois femmes membres de l'association ont en effet découvert des liens génétiques avec les familles des gynécologues de leurs mères. Ces trois Françaises, nées entre 1974 et 1986, ont depuis longtemps conscience de leur mode de conception. Elles ont appris, à l'adolescence ou à l'approche de la trentaine, qu'elles étaient nées d'une insémination avec donneur en cabinet de gynécologie. Avec l'anonymat du don de sperme, ces femmes ont composé avec une absence totale d'information sur leur géniteur. Les tests ADN, ces kits interdits en France mais accessibles en quelques clics sur des sites américains comme MyHeritage.fr ou 23andMe.com, sont venus bouleverser leurs recherches.
La découverte d'ADN très rapprochés
En faisant ce test, "je voulais avoir une histoire", justifie auprès de franceinfo Natacha Jolivet, née d'une insémination en 1975 dans le sud de la France. Dans son cas, la démarche a permis de faire émerger de nouveaux "cousins génétiques", c'est-à-dire des personnes ayant elles-mêmes réalisé un test et partageant avec elle une part d'ADN. Un "match" apparaît en effet sur les résultats dès que deux personnes liées par l'ADN ont recours aux mêmes sociétés de recherche sur leurs origines. Dans le cas de Natacha Jolivet, quatre de ses "cousins génétiques" présentent plus de 4% d'ADN partagé, soit un lien génétique rapproché selon les spécialistes. Un travail minutieux de croisement, entre données génétiques et arbres généalogiques déclaratifs, s'est alors enclenché.
Ces éléments consultés par franceinfo révèlent que Natacha Jolivet est descendante des parents du gynécologue de sa mère, aujourd'hui décédé. Cette conclusion résulte de l'analyse de Jonathan Grandaubert, ingénieur en développement de généalogie génétique au sein du site Geneanet.org, qui a observé les segments d'ADN communs entre Natacha et trois de ses principaux "matchs". Nathalie Jovanovic-Floricourt, une autre spécialiste de généalogie génétique, a également analysé ces données pour franceinfo. "Au vu des dates de naissance et des données de l'arbre généalogique, le gynécologue est bien le géniteur de Natacha", assure la présidente de l'association DNA Pass. "C'est indéniable."
"Maintenant, je sais. Il y a la satisfaction d'avoir trouvé, mais j'aimerais savoir pourquoi il l'a fait. Et l'a-t-il fait avec d'autres ?"
Natacha Jolivetà franceinfo
Un spécialiste de la PMA comme géniteur ?
Marjorie Mendes, née elle aussi d'une insémination en 1986, se pose les mêmes questions. Pour cette proviseure adjointe et mère de deux enfants, l'histoire a basculé "à la réception du test" il y a deux ans. "J'avais une grosse boule au ventre. Ma mère n'était absolument pas au courant" de cette démarche, confie-t-elle. A l'ouverture des résultats, la trentenaire découvre une première correspondance ADN de 4,6%, suivie de "beaucoup d'autres". "Je prends conscience que quelque chose va s'écrire", se souvient-elle. Marjorie Mendes contacte alors ses nouveaux "cousins génétiques" sur les réseaux sociaux, leurs noms étant visibles sur la base de données du test. Au gré d'échanges discrets, consultés par franceinfo, elle met ainsi au jour un nouvel arbre généalogique. Rapidement, le nom du gynécologue de sa mère apparaît au cours de ces conversations.
Au total, la proviseure adjointe compte des correspondances génétiques avec sept membres de la famille du spécialiste, toujours en vie aujourd'hui : des enfants de cousins du médecin, une cousine directe du gynécologue et le petit-fils de sa sœur. "Quand je réalise, je commence à accuser le coup, commente la trentenaire. C'est quand même une vraie violence." Quelques mois plus tard, un nouveau "match" émerge avec un homme, cette fois-ci bien plus élevé. La correspondance est de 20%, un pourcentage équivalent à un lien entre demi-frère et demi-sœur biologiques selon les spécialistes. La mère de cette personne, contactée par franceinfo, confirme avoir été une patiente du même gynécologue que la mère de Marjorie. Elle l'avait consulté pour une insémination prévue avec les spermatozoïdes de son mari.
Ce spécialiste de la PMA aurait-il eu recours à ses propres gamètes ou à celle d'un proche, comme un frère ou un cousin ? Contacté par franceinfo, le praticien réfute totalement le fait d'avoir utilisé son propre sperme et évoque un cousin. Mais les analyses du cas de Marjorie Mendes, que franceinfo a confié à trois spécialistes de généalogie génétique, mettent à mal cette version. Pour Nathalie Jovanovic-Floricourt, la prudence doit être de mise en raison de cas d'endogamie dans la famille du gynécologue. Ces mariages au sein d'un même groupe peuvent en effet fausser les niveaux d'ADN partagé, prévient la généalogiste. Les deux autres experts se montrent plus définitifs. Pour Paul Woodbury, membre de l'Association des généalogistes professionnels (APG), la probabilité que le gynécologue ou l'un de ses frères soit le géniteur de Marjorie Mendes est de "99,9%" par rapport au scénario d'un cousin par exemple. Même avis du côté de Jonathan Grandaubert.
Une pratique "artisanale mais pas interdite"
Avec l'anonymat du don en vigueur jusqu'en 2021, l'identité des géniteurs a toujours été cachée. Impossible d'établir avec certitude une paternité sans un test ADN fait par le donneur ou ses enfants reconnus. Cela n'empêche pas Pauline*, le troisième cas évoqué par PMAnonyme, d'être convaincue de l'implication du gynécologue de sa mère dans sa conception. La découverte récente de liens génétiques avec ce médecin, attestés par son test ADN et l'arbre généalogique du praticien, consultés par franceinfo, a été "un moment très éprouvant", "une trahison" pour ses parents. L'histoire entendue depuis ses 18 ans, celle d'un donneur étudiant en médecine aux origines italiennes, a volé en éclats à la suite de ses recherches. "Ma mère a été très abîmée, mon père très en colère", confie cette femme née en 1974. La quadragénaire dit avoir trouvé "une assise, une tranquillité" en ayant de premières réponses sur ses origines, mais elle reconnaît "un état de sidération".
Ces témoignages illustrent les zones d'ombre qui entouraient les parcours de PMA avant les premières lois de bioéthique. Jusqu'à la création du premier Centre d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains (Cecos), en 1973, "les inséminations artificielles se faisaient dans un certain nombre de cabinets médicaux, selon les pratiques qui étaient celles des gynécologues concernés", souligne le biologiste de la reproduction Pierre Jouannet, ancien président de la Fédération française des Cecos. Ce dernier évoque, dans le courant des années 1960, des "gynécologues qui recrutaient des étudiants en médecine pour être donneurs de sperme" frais, c'est-à-dire non congelé.
Une pratique dont certains médecins ne se cachent pas : "C'était artisanal, mais ce n'était pas interdit", reconnaît une gynécologue interrogée par franceinfo, en affirmant avoir cessé avec l'arrivée des Cecos. A l'inverse, le gynécologue de la mère de Marjorie Mendes proposait encore des gamètes dites "fraîches" en 1986, selon plusieurs témoignages recueillis par franceinfo. Il aurait ainsi parlé de cette méthode à sa patiente après plusieurs échecs avec des dons congelés, comme celle-ci l'affirme sous couvert d'anonymat.
"Pour moi, c'était une personne venue avant. Lors de l'insémination, il n'a rien dit, il m'a juste demandé un petit quelque chose pour payer la personne. J'ai demandé s'il y avait des garanties au niveau de certaines maladies, et il m'a dit de ne pas m'inquiéter."
La mère de Marjorie Mendesà franceinfo
Jusqu'aux années 1990, "rien dans la loi n'interdisait [le recours aux dons de sperme frais] et certains le faisaient", appuie Louis Bujan, qui a présidé la Fédération française des Cecos de 2009 à 2015. Malgré l'existence des banques de sperme, "ce qui se passait dans les cabinets, nous n'en étions aucunement informés. C'était libre", relève ce professeur de médecine et biologie de la reproduction, tout en appelant à "ne pas en déduire que cette pratique était fréquente". Le 31 décembre 1991, une loi y met officiellement un terme, en déclarant que "toute insémination par sperme frais provenant de dons est interdite". Mais le texte n'est pas connu de tous et des gynécologues poursuivent cette pratique, relève Louis Bujan. L'interdiction sera confirmée trois ans plus tard dans les premières lois de bioéthique.
Avant cet arsenal législatif, des médecins ont-ils pu profiter de cette technique pour utiliser leurs propres gamètes ? Déjà dans les années 1980, lorsque le chercheur Grégoire Moutel travaillait en Cecos, des patients en parcours de PMA "s'interrogeaient". Dans les cabinets privés, racontaient-ils, "le médecin partait un moment et revenait avec du sperme frais". "Etait-ce un donneur ou était-ce le médecin ?" s'interroge encore le chef du service de médecine légale et droit de santé au CHU de Caen. "J'ai eu des échos de gynécologues ayant utilisé leurs propres gamètes. C'est possible", poursuit un médecin parisien souhaitant rester anonyme. Lorsqu'il était interne, le professeur Israël Nisand, ancien président du Collège national des gynécologues-obstétriciens français, décrit avoir entendu des rumeurs similaires.
"On me racontait que des gynécologues utilisaient leur propre sperme, mais je n'ai eu la preuve à aucun moment de cela."
Israël Nisand, professeur de gynécologie-obstétriqueà franceinfo
Au cours de notre enquête, le sujet est apparu comme sensible. Nombre de soignants assurent n'avoir jamais eu d'informations à ce sujet, mais trois spécialistes rapportent à franceinfo des interrogations sur le médecin de la mère de Marjorie Mendes. Ils disent avoir chacun eu des échos sur le recours de ce gynécologue à son propre sperme. "Il y avait ces interrogations, car [ses inséminations] avaient beaucoup de succès", confie l'une de ces sources.
Vers un futur scandale sanitaire ?
Dans son e-mail à l'Ordre des médecins, PMAnonyme explique vouloir "signaler de façon informelle" ces découvertes et les questionnements qu'elles posent, "sans objectif de contentieux". Car plus de trois décennies après ces inséminations, seules les anciennes patientes de ces médecins pourraient porter plainte pour "abus de confiance", explique à franceinfo l'avocat en droit médical Antoine Béguin. "L'enfant n'a pas été victime directe, c'est la mère qui l'a été", souligne-t-il. A ce stade, aucune des trois patientes concernées n'a entamé de procédure judiciaire.
Car ces pratiques, aussi trompeuses soient-elles, leur ont permis d'avoir un enfant, soulignent certaines d'entre elles. Anne-Rozenn Jolivet, la mère de Natacha, se remémore les mots prononcés peu avant sa dernière insémination, après cinq ans d'essais infructueux. "Aujourd'hui, c'est gratuit", dit-elle avoir entendu de la part de son gynécologue. "Et puis, j'ai été enceinte. J'ai vu des photos de lui quand il était enfant et c'est exactement Natacha..." Savoir qu'il est le géniteur d'après le test ADN de sa fille la "rassure" car "je me posais la question", confie-t-elle.
"Peut-être qu'il a eu de la compassion, qu'il s'est dit : 'Cette femme, cela fait cinq ans qu'elle vient.' Il s'est engagé."
Anne-Rozenn Jolivet, mère de Natachaà franceinfo
PMAnonyme y voit plutôt "un scandale sanitaire qui débute", selon les mots de Blandine, vice-présidente de l'association. Car au fil des tests ADN, une autre pratique, déjà rendue publique, émerge : le fait que des gynécologues aient pu avoir recours au même donneur pour un nombre important d'inséminations, entraînant des risques "de consanguinité". Blandine assure avoir elle-même retrouvé sept demi-sœurs et demi-frères biologiques dans sa ville, tous issus du même cabinet médical. "Peut-on laisser des gens dans l'ignorance de ces pratiques ?"
* Le prénom a été modifié à la demande de l'intéressée.
Publié
https://www.francetvinfo.fr/sante/biologie-genetique/enquete-franceinfo-quand-des-tests-adn-jettent-le-trouble-sur-le-recours-de-gynecologues-a-leur-propre-sperme-pour-des-inseminations_4841117.html#xtor=EPR-2-[newsletterquotidienne]-20211221-[lestitres-colgauche/titre1]
Jan Wildschut, décédé en 2009, serait le père d'au moins 17 enfants, a annoncé l'hôpital Isala à Zwolle, dans lequel le praticien a exercé.
L'affaire fait scandale aux Pays-Bas : un ancien gynécologue, aujourd'hui décédé, a utilisé son propre sperme lors d'inséminations artificielles sur des femmes qui pensaient recourir à des donneurs anonymes, engendrant au moins 17 enfants, a annoncé, mardi 6 octobre 2020, l'hôpital dans lequel il exerçait. Jan Wildschut a travaillé de 1981 à 1993 auprès de la clinique de fertilité de l'hôpital Isala à Zwolle, dans le nord des Pays-Bas. Au moins 17 enfants ont été conçus via les pratiques du gynécologue, par ailleurs père de famille, a fait savoir l'hôpital dans un communiqué, qualifiant ces actes de « moralement inacceptables ».
L'établissement, appelé à l'époque hôpital Sophia, n'exclut pas la possibilité que Jan Wildschut soit le père biologique de plus d'enfants. L'hôpital, qui a appris la nouvelle fin 2019, a décidé de la rendre publique conjointement avec la famille du médecin et les enfants concernés afin de contribuer à une « plus grande transparence » en matière de dons de sperme. Selon le média local De Stentor, l'affaire a été révélée par hasard lorsqu'un des enfants a obtenu une correspondance ADN avec une nièce de Jan Wildschut, décédé en 2009, via une base de données commerciale.
« Nous n'avons jamais soupçonné qu'il aurait lui-même pu être le donneur », a déclaré auprès du journal un parent souhaitant rester anonyme, ajoutant que le gynécologue rendait une « impression amicale, engagée et honnête ». Informée de l'affaire, l'Inspection de la santé et de la jeunesse (IGJ) a indiqué qu'elle n'ouvrira pas d'enquête étant donné que les faits se sont déroulés à une époque où il n'existait aucune loi ou réglementation sur les traitements en matière de fertilité, d'après l'hôpital.
L'année dernière, une série de tests ADN a montré que l'ancien directeur d'une banque de sperme néerlandaise, soupçonné d'avoir utilisé à de nombreuses reprises son propre sperme au lieu de celui du donneur choisi, était le père biologique de 49 enfants.
Source AFP
Les jeunes hommes suisses possèdent l’un des pires spermes d’Europe, indique une nouvelle étude de scientifiques de l’Université de Genève (UNIGE). La qualité du sperme des jeunes hommes est inférieure aux normes de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Les chercheurs ont testé la qualité du sperme de 2.500 hommes âgés de 18 à 22 ans sur une période de quinze ans.
La Suisse figure parmi les pays les plus touchés par une diminution de la qualité du sperme en termes de concentration, de morphologie et de mobilité des spermatozoîdes.
60%
« Nous avons découvert que le sperme suisse est généralement de mauvaise qualité », souligne Serge Nef, directeur de recherche, professeur de médecine génétique à l’Université de Genève. L’étude a révélé qu’au moins un des trois paramètres (concentration, mobilité et morphologie) était inférieur aux seuils fixés par l’OMS pour 60% des hommes suisses et que 5% avaient un problème concernant ces trois facteurs en même temps.
Selon les seuils établis par l’OMS en 2010, les résultats de l’étude indiquent que 17% des jeunes hommes avaient une concentration de sperme inférieure à 15 millions par ml et 25% avaient moins de 40% de spermatozoïdes mobiles.
Selon plusieurs experts, il serait toutefois exagérer de parler d’une situation alarmante. On ne peut pas prétendre, au vu que de ces résultats, que la capacité reproductive des hommes suisses pourrait être compromise.
Laurent Vaucher, urologue à la clinique de Genolier, souligne que la qualité des spermatozoïdes n’aura pas nécessairement des conséquences sur la fertilité du couple à un moment donné. Un homme hypofertile peut être compensé par une femme dont la fertilité est normale, explique l’urologue. En outre, la qualité du sperme varie de trois à six mois.
Tabagisme
Les chercheurs ont également expliqué qu’il n’y a pas de différences de qualité du sperme entre les différentes régions géographiques ou linguistiques de Suisse. Aucune différence n’a été constatée entre les régions rurales et urbaines. Il s’agit de la première étude nationale sur la qualité du sperme en Suisse. On ne peut donc pas évoquer une diminution de la qualité du sperme ces dernières années.
De nombreuses études épidémiologiques menées dans les pays industrialisés au cours des dernières décennies ont montré une baisse de la qualité du sperme. En cinquante ans, la concentration moyenne de spermatozoïdes est passée de 99 millions par ml à 47 millions par ml.
À titre de comparaison, les hommes suisses avec une concentration de 47 millions par ml se situent au bas du peloton aux côtés de leurs homologues du Danemark, de Norvège et d’Allemagne.
Les causes de la qualité médiocre du sperme restent également obscures. Durant l’étude, les sujets et leurs parents ont fourni des informations sur le mode de vie et la santé. Le professeur Nef a expliqué que cela pouvait être dû à des facteurs environnementaux tels que les pesticides ou à des facteurs liés au mode de vie tels que le tabagisme, la consommation d’alcool, la consommation de drogues ou le surpoids.
Enfin, les recherches actuelles suggèrent que cette baisse de qualité du sperme est plus fréquente chez les hommes exposés au tabagisme maternel au cours du développement embryonnaire.
Avant sa mort à l'âge de 89 ans, l'ex-directeur aurait admis avoir eu une soixantaine d'enfants du temps où il travaillait à la clinique.
L'ancien directeur d'une banque de sperme aux Pays-Bas, décédé en 2017, est le père biologique de 49 enfants nés d'une fécondation in vitro, a annoncé ce vendredi une organisation représentant les parents et les enfants au cœur du scandale.
Jan Karbaat, médecin et ancien directeur d'une banque de sperme située à Barendrecht, dans le sud des Pays-Bas, est soupçonné d'avoir utilisé à de nombreuses reprises son propre sperme au lieu de celui du donneur choisi.
Les résultats d'une série de tests ADN réalisés ce matin dans un hôpital à Nimègue (sud-ouest) "ont montré que 49 enfants dans l'affaire sont des descendants directs" de M. Karbaat, a indiqué l'organisation Defence for Children (défense pour les enfants) dans un communiqué.
"Les résultats confirment de sérieux soupçons selon lesquels Karbaat utilisait son propre sperme dans sa clinique", a-t-elle ajouté.
Le scandale né autour de cette affaire a pris de l'ampleur en février, lorsqu'un tribunal néerlandais a décidé que le prélèvement ADN réalisé sur les affaires personnelles de M. Karbaat devait être mis à la disposition des parents et de leurs enfants afin qu'ils puissent effectuer leurs propres comparaisons.
Avant sa mort à l'âge de 89 ans, Jan Karbaat aurait admis avoir eu une soixantaine d'enfants du temps où il travaillait à la clinique, qui avait fermé ses portes en 2009 en raison de pratiques douteuses. Le groupe d'enfants présumés de M. Karbaat et leurs familles avaient intenté une action en justice pour obtenir le profil ADN du médecin.
L'avocat des plaignants avait notamment avancé des irrégularités dans la ressemblance entre tel enfant et leur donneur supposé, alors que d'autres enfants affichaient une ressemblance avec l'ancien directeur de la clinique.
Les avocats de la famille de M. Karbaat avaient quant à eux affirmé que le droit à la vie privée de leurs clients devait être respecté.
La décision des juges d'autoriser un test de paternité a cependant "placé le droit des enfants avant celui de Karbaat et sa famille", a réagi Iara de Witte, conseillère au sein de Defence for Children.
"Maintenant, après des années d'incertitude, les plaignants peuvent enfin clore ce chapitre et commencer à digérer le fait qu'ils sont l'un des nombreux descendants de Karbaat", a-t-elle estimé.
L'humanité va-t-elle vivre une pénurie de spermatozoïdes?
http://www.slate.fr/story/166910/humanite-penurie-spermatozoides-fertilite-hommes
Depuis 1973, le taux de spermatozoïde de la population a radicalement chuté et n’est pas près de remonter....
Des couples et des femmes célibataires font appel à des banques de sperme américaines et sélectionnent souvent des donneurs au teint clair.
Depuis 2011 au Brésil, les importations de sperme venant des États-Unis ont augmenté d'environ 3000%. De plus en plus de couples infertiles, femmes célibataires ou couples de femmes font appel à des banques de sperme américaines, et choisissent en majorité des donneurs à la peau et aux yeux clairs.
Plus de 50% de la population brésilienne est noire et métisse, mais l'élite politique et sociale est en grande partie composée de descendants de colons et immigrés européens qui ont la peau plus blanche. Dans ce contexte, choisir un donneur blanc est vu «comme une façon d'assurer que son enfant aura de meilleures opportunités, comme un meilleur salaire et un meilleur traitement de la part de la police», écrit la journaliste Samantha Pearson dans le Wall Street Journal.
L'autre facteur qui entre en jeu est que ceux qui ont les moyens de payer des dons de sperme et des procédures in-vitro ont plus tendance à être blancs, et veulent des enfants qui leur ressemblent.
Selon les autorités sanitaires brésiliennes, un tiers des dons de sperme importés viennent de donneurs blonds et 52% d'hommes aux yeux bleus. Selon le directeur d'une banque de sperme de Seattle aux Etats-Unis, ces préférences reflètent le marché global, où la demande est majoritairement pour les donneurs blonds aux yeux bleus (c'est par exemple aussi le cas en Inde).
Au Brésil, les femmes qui n'ont pas assez d'argent pour acheter du sperme américain (environ 1500 dollars la fiole) ont une autre solution moins coûteuse: sur Facebook, des hommes au teint clair proposent de vendre leur sperme ou d'avoir des rapports sexuels.
Le Wall Street Journal a retrouvé l'un d'eux, João Carlos Holland de Barcellos, un informaticien de 61 ans qui est blond aux yeux bleus et vend régulièrement des échantillons de son sperme dans son appartement.
Repéré par Claire Levenson —
Avec son large sourire, ses cheveux blancs et sa bonne réputation, il a longtemps inspiré confiance. Jan Karbaat, pionnier de la procréation médicalement assistée aux Pays-Bas, n’était-il, en fait, qu’un médecin à l’esprit dérangé, convaincu qu’il était sur terre pour partager ses gènes et son intelligence avec une vaste descendance ? Il aurait, en tout cas, inséminé avec son propre sperme – et non celui de donneurs, anonymes ou non – des dizaines de femmes. A l’une d’entre elles, il aurait même affirmé qu’il était le père biologique de 60 enfants.....
Par le passé, la London Sperm Bank s'est fait taxer d'eugénisme.Plus importante banque de sperme de Londres, elle lance une appli qui permet de choisir son donneur de sperme et même paramétrer des alertes en fonction de critères précis....
Don de sperme sur Facebook : " Il y aurait un donneur plutôt africain ? " - Rue89 - L'Obs
Francis est un donneur de sperme sauvage, comme on dit. La sauvagerie, c'est un bien grand mot pour dire que Francis ne passe pas par les circuits habituels pour faire ses offrandes. L'homme de 57 ...
http://rue89.nouvelobs.com/2016/09/19/don-sperme-facebook-y-aurait-donneur-plutot-africain-265187
Un médecin accusé d'avoir inséminé 50 patientes avec son propre sperme
Un médecin américain, spécialiste de l'infertilité, est accusé d'avoir inséminé 50 de ses patientes avec son propre sperme entre les années 1970 et 1980, rapportent des médias locaux. Dona...
Xytec Corp., une banque de sperme américaine, s'est laissé berner par un donneur atteint de schizophrénie. L'homme serait le père biologique de 36 enfants.
Même le réalisateur de Starbuck, comédie canadienne hilarante sortie en salle en 2011, n'avait pas imaginé un tel scénario. Le film racontait les péripéties de David Wozniak, donneur de sperme compulsif, papa anonyme de 533 enfants dans tout le pays. Tout se passait comme prévu jusqu'à ce que 142 de ses descendants décident, un jour, d'engager des poursuites judiciaires pour tenter d'obtenir la véritable identité de leur papa...
L'histoire qui se joue en ce moment devant les juridictions américaines est nettement plus tragique : 36 enfants sont nés d'un père schizophrène qui aurait réussi à duper la vigilance de la Xytex Corporation, une banque de sperme implantée en Géorgie. Depuis que le Toronto Star a révélé l'affaire il y a plusieurs mois, elle ne cesse de faire les gros titres de la presse anglo-saxonne. Le Guardian, le Washington Post et le New York Daily News y consacraient encore plusieurs articles vendredi 15 avril pour annoncer le dépôt d'une nouvelle plainte devant les tribunaux.
Depuis le début des années 2000, le donneur 9623 est présenté par la Xytex Corp. comme le meilleur parmi les meilleurs. Amateur de musique, batteur dans un groupe de rock-indé, travaillant dans le secteur des neurosciences et doté d'un QI exceptionnellement haut de 160, équivalant à celui de Einstein et de Stephen Hawking. Selon sa fiche – que nous reproduisons ci-dessous en intégralité –, 9623 est célibataire, né en 1976, parle anglais et allemand, mesure 1,90 m pour 77 kilos, a des yeux bleus et les cheveux bruns. Son caractère est également décrit : « généreux » et « passionné », il adore cuisiner, faire du sport et passer du temps en famille. Aucune maladie particulière n'est rapportée par la banque.
Avec un profil pareil, 9623 fait fureur auprès des familles qui n'arrivent pas à avoir d'enfants. En une décennie, 17 filles et 19 petits garçons issus de 26 familles différentes naissent grâce à son sperme. Jusqu'à ce qu'en 2014 sa véritable identité soit révélée par mégarde : 9623 avait oublié d'effacer son adresse e-mail dans un message envoyé à une mère. Après quelques recherches sur Internet, le pot aux roses est rapidement découvert. 9623 s'appelle en réalité James Christian Aggeles. Il est schizophrène et atteint de plusieurs troubles mentaux, a été condamné plusieurs fois par la justice, et a notamment écopé d'une peine de 8 mois de prison pour le cambriolage d'une maison en 2005.
« C'est un rêve qui a tourné au cauchemar », confie Angela Collins, jeune maman, au Toronto Star. La mère, comme plusieurs autres plaignantes, craint que la « santé de son fils ne se dégrade à sa puberté ». Plusieurs familles ont porté plainte devant les juridictions de Géorgie, où la Xytex Corp. a son siège. Douze millions de dollars de dommages et intérêts ont été réclamés. Mais la banque de sperme se défend et affirme que tous les standards industriels ont été respectés. Des tests pour le HIV, les hépatites A et B et pour la syphilis ont été menés. Aggeles a été soumis à des examens psychologiques et physiques, ainsi qu'à des questionnaires sur son histoire personnelle et familiale. Seulement 5 % des dons de sperme sont acceptés, assure la banque.
En octobre 2015, les plaintes sont rejetées par le tribunal. Le préjudice de « wrongful birth » n'est pas reconnu dans l'État de Géorgie, estime le juge américain. Ce « wrongful birth » est un peu l'équivalent dans notre droit de la jurisprudence Perruche rendue par la Cour de cassation en 1989, et qui reconnaît le droit d'un enfant né handicapé de demander réparation à la suite d'une faute médicale ayant privé sa mère de la possibilité de recourir à une interruption de grossesse. Très controversé, cet arrêt consacre en quelque sorte un « préjudice du seul fait d'être né ». En l'espèce, la mère du petit Nicolas Perruche avait porté plainte contre l'État, car son médecin n'avait pas correctement diagnostiqué une rubéole. La mère avait attaqué en considérant que, si elle avait su que son bébé était malade, elle aurait avorté.
Dans l'affaire américaine, les plaignants ont donc essuyé un échec en première instance puis en appel devant les juridictions de Géorgie. Dans son arrêt, très motivé, le juge relève cependant que la science a une nouvelle fois dépassé l'état du droit, et qu'une évolution législative s'impose sans doute pour prendre en compte ce genre de situation. Depuis deux ans, Angela Collins s'est donc rabattue sur le front médiatique. Elle multiplie les lettres aux industriels et aux responsables politiques dans l'espoir qu'ils durcissent la législation et renforcent le contrôle des donneurs. C'est la « Erin Brockovich » du sperme, soutient son avocate. Mercredi 13 avril, Angela Collins a déposé une nouvelle plainte. Selon le document, consulté par le Toronto Star, la banque aurait continué à vendre le sperme du donneur alors même que la supercherie avait été révélée au grand jour. Un nouveau procès devrait bientôt être ordonné. La banque campe toujours sur ses positions.
L'incroyable combat de la Erin Brockovich du sperme
Même le réalisateur de Starbuck, comédie canadienne hilarante sortie en salle en 2011, n'avait pas imaginé un tel scénario. Le film racontait les péripéties de David Wozniak, donneur de sper...