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Daech...

Publié le par ottolilienthal

Daesh : origine et histoire de cette organisation terroriste née en Irak

L’attaque mortelle au couteau près de la tour Eiffel à Paris, samedi 2 décembre 2023, dont l’auteur avait fait allégeance à Daesh, rappelle la menace que représente encore le groupe terroriste, y compris en France. Également appelée « État islamique », l’organisation est née en 2006 dans le contexte de marginalisation des sunnites irakiens, avant de s’étendre jusqu’à la Syrie.

L’auteur de l’attaque mortelle au couteau près de la tour Eiffel à Paris, samedi 2 décembre 2023, avait fait allégeance à Daesh. Le lendemain, l’organisation terroriste a revendiqué l’attentat perpétré au cours d’une messe dans le gymnase d’une université aux Philippines, qui a tué au moins quatre personnes.

Daesh, aussi appelé « État islamique » (EI), est une organisation djihadiste née dans le sillage de l’invasion américaine en Irak et de la chute de Saddam Hussein, qui a eu une emprise territoriale en Irak et en Syrie entre 2014 et 2019.

Les sunnites marginalisés

L’organisation, aux racines irakiennes, naît en 2006 en pleine guerre civile entre chiites et sunnites. Ces derniers, évincés de l’armée et de la fonction publique après la chute de Saddam Hussein, désœuvrés ou en prison pour certains, développent une forte hostilité à l’égard des États-Unis. Une partie d’entre eux rejoint des réseaux islamistes, dont Al-Qaida. Ce dernier forme avec cinq autres groupes djihadistes un Conseil consultatif des moudjahidines, qui proclame l’« État islamique » d’Irak en 2006. « L’“État islamique” est une excroissance directe d’Al-Qaida en Irak à la suite de notre invasion de ce pays », confie ainsi Barack Obama à Vice News en 2015.

La nouvelle organisation, qui a recours au terrorisme anti-chiite, croît au fur et à mesure de l’exclusion des Arabes sunnites de l’appareil d’État irakien. En 2011, les manifestations, principalement sunnites, qui éclatent dans le contexte des printemps arabes sont réprimées par Bagdad.

L’extension syrienne

À partir de 2012, alors que la Syrie est en proie à une guerre civile et que son territoire est morcelé entre le régime et les rebelles, les groupes djihadistes prospèrent. « La puissance et la visibilité de l’“État islamique” se sont brutalement accrues avec l’extension de ses ambitions politico-militaires à la Syrie voisine, elle aussi engagée dans une guerre civile meurtrière, conséquence du printemps arabe de 2011 », écrit l’historien et spécialiste de l’Irak Pierre-Jean Luizard (1). Daesh s’étend et se renomme en 2013 « Dawla Islamiyya Fil’Iraq Wa Sham » (État islamique en Irak et en Syrie), désigné par ses initiales.

À cheval sur ces deux pays, Daesh gagne en puissance avec le délitement des États et rompt ses liens avec Al-Qaida. En janvier 2014, le groupe djihadiste prend la ville de Falloudja, dans la province irakienne sunnite d’Al-Anbar. C’est une victoire symbolique et un défi au pouvoir central à Bagdad. En juin, il conquiert Mossoul et l’émir de l’organisation, Abou Bakr Al Baghdadi, proclame l’établissement d’un califat islamique sur les terres syriennes et irakiennes qu’il contrôle.

Une rhétorique djihadiste internationale

« Musulmans (…), rejetez la démocratie, la laïcité, le nationalisme et les autres ordures de l’Occident. Revenez à votre religion », exhorte Abou Mohammed Al Adnani, le porte-parole de Daesh, qui appelle les autres groupes djihadistes à le rejoindre. Il adopte une rhétorique hostile à l’Occident, qu’il accuse d’avoir créé des États factices au Moyen-Orient. Le mouvement syro-irakien fait ainsi son entrée dans la galaxie djihadiste internationale.

« La propagande de l’État islamique a ceci de particulier qu’elle peut parler aussi bien à un Arabe sunnite d’Irak pétri de culture bédouine qu’à un jeune vivant dans les démocraties occidentales sans avoir obligatoirement des racines issues de l’immigration ou même musulmanes », explique le chercheur Pierre-Jean Luizard en 2019 (2).

Des ambitions étatiques

Daesh réalise ses ambitions étatiques. « La proclamation du califat, en juin 2014, symbolise le pouvoir exécutif. Le pouvoir judiciaire est représenté par un réseau de juges religieux qui rendent la justice en fonction d’une vision salafiste de la charia et la font appliquer. Il n’y a pas de pouvoir législatif puisque la charia est censée tout régler. Un système fiscal a été mis en place », décrit encore le chercheur.

Sur son territoire, Daesh est accusé par les Nations unies d’être responsable de crimes de guerre, crime contre l’humanité, nettoyage ethnique et génocide. Une coalition internationale, menée par les États-Unis, combat le califat, en expansion géographique jusqu’en 2015.

Après de longs mois de siège, la force multinationale finit par reprendre l’autoproclamée capitale du califat, Mossoul, en 2017. En mars 2019, les territoires occupés par Daesh dans le nord-est de la Syrie sont complètement libérés.

Daesh ne disparaît pas pour autant. Des cellules clandestines « dormantes » perdurent au Moyen-Orient, tandis que son influence s’étend, avec l’allégeance de nombreux groupes djihadistes dans d’autres régions, notamment le Nigeria, le Sinaï ou encore l’Afghanistan.

  • Vinciane Joly,

(1) Pierre-Jean Luizard, « De quoi Daesh est-il le nom ? », dans La Grande Histoire de l’islam, Sciences humaines, « Petite bibliothèque », 2018.

(2) Entretien avec Pierre-Jean Luizard, « Des racines historiques à la faillite des États : comment l’État islamique (EI) est monté en puissance », dans Les Clés du Moyen-Orient, 2019.

Attentats du 13-Novembre : Au procès, les proches des terroristes racontent les « mensonges » de Daesh

Il aura fallu sept années à Jennifer Clain pour « prendre du recul ». À 30 ans, la nièce des deux djihadistes ayant revendiqué les attentats du 13 novembre 2015 parle désormais « à l’imparfait » quand elle évoque ses années passées en Syrie avec Daesh. Incarcérée à Beauvais (Oise) dans l’attente de son propre procès, la « revenante » a livré pour la première fois à un tribunal le récit de son séjour passé au sein de l’organisation terroriste. Sa mère, également interrogée ce mercredi par la cour d’assises spéciale, a, elle aussi, dénoncé le poids de « l’idéologie » radicale de ses frères Fabien et Jean-Michel Clain, et le « formatage » des terroristes de Daesh.

« Je cautionnais »

Arrivée en Syrie en juillet 2014 à l’âge de 23 ans avec ses quatre enfants et son mari, Jennifer Clain assure qu’elle n’a rien su de la préparation des attaques de Paris et Saint-Denis. « Je l’ai appris le lendemain ou le surlendemain. Avec mes oncles, on n’en a jamais parlé », a-t-elle précisé à la cour. À l’époque, la jeune femme réfute fermement l’implication de ses proches dans les attentats. « J’ai cru que les médias avaient grossi les faits et que mes oncles n’avaient absolument rien à voir là-dedans », confie-t-elle. Pourtant, depuis son installation à Raqqa, Jennifer Clain est témoin de la violence de l’organisation terroriste. Les vidéos des exactions commises par les djihadistes et mises en scène par la branche « média » du groupe pour lesquels ses oncles travaillaient, elle les a « pratiquement toutes vues », reconnait-elle.

Sans détour, elle explique qu’elle « cautionnait » : « Il y avait même des exécutions en pleine rue (…) La majeure partie des gens qui étaient là-bas approuvaient. En tout cas, au début ». Une dispute entre la jeune femme et ses oncles va toutefois fissurer la confiance qu’elle plaçait en eux. Le ton hésitant, Jennifer Clain raconte que deux de ses « connaissances », membres de Daesh, ont été arrêtées par le groupe terroriste. Ses oncles « pensaient qu’elles voulaient se rebeller », poursuit-elle. Au fil des mois, une scission s’opère parmi les étrangers venus rejoindre les rangs de l’État islamique. « Beaucoup de personnes, dont moi, avaient vu que Daesh n’était pas ce qu’il prétendait être. Certains dirigeants suivaient leurs propres intérêts, ça n’avait plus rien à voir avec Dieu », lâche-t-elle.

Des doutes et des mensonges

À la fin de l’année 2017, après trois années passées en Syrie, Jennifer Clain se décide à quitter le groupe djihadiste. Mais elle n’en dit pas un mot à ses oncles : « Je commençais à remettre en doute, c’était dangereux pour ma vie. » Le président Jean-Louis Périès l’interroge : « Ça fait penser à quel régime politique ? ». Elle réfléchit quelques secondes, puis lance : « Franchement, ça ressemble énormément au régime nazi. Même si à l’époque, je ne le voyais pas comme ça. » Emportant avec elle ses enfants, la « revenante » a été interpellée à la frontière turque avant d’être expulsée vers la France en septembre 2019 puis incarcérée.

Entendu en fin de journée par les magistrats, un autre témoin indirect de la vie menée sous le califat a décrit les « mensonges » des djihadistes. Kaltoum A., avait 16 ans lorsqu’elle a rencontré Foued Mohamed Aggad, l’un des trois terroristes du Bataclan. Le couple est séparé depuis plusieurs mois quand Aggad décide de rejoindre Daesh en Syrie. Refusant leur rupture, le jeune Strasbourgeois donne régulièrement des nouvelles à Kaltoum.

« Il était surveillé et il était obligé de faire croire que j’étais son épouse pour être autorisé à m’appeler », se souvient-elle. Pendant ses appels, Foued Mohamed Aggad livre une version idyllique du djihad : « Il me disait qu’il vivait dans une villa, qu’il mangeait super bien. » Un récit contredit par son propre frère, parti avec lui mais rapidement revenu en France : « Lui racontait à sa maman que dans la villa ils étaient 110, qu’ils mangeaient du pain et de l’huile et qu’ils servaient de larbins. »

Au fil des jours, Kaltoum recueille les confidences d’Aggad qui ne cache pas les activités du groupe djihadiste. L’étudiante, inquiète de se voir accusée de complicité, et décidée à rompre, coupe rapidement les liens : « C’était trop pour moi », souffle-t-elle. Elle change de numéro et n’aura plus jamais de contact avec Foued Mohamed Aggad. « J’ai essayé d’oublier. Jusqu’au jour où il est réapparu sur tous les écrans ».

Hélène Sergent
13-Novembre : Comment les attentats ont-ils été préparés par l'EI ?

Une note de la DGSI dresse le profil des commanditaires, mais révèle aussi le processus d'organisation de l'attaque, explique le "Journal du dimanche".

Abou Bakr al-Baghdadi dirigeait la Copex. (Illustration)

Abou Bakr al-Baghdadi dirigeait la Copex. (Illustration)

© EyePress News
 
On sait un peu mieux comment fonctionne le "califat" de l'EI
 

Des milliers de documents abandonnés par le groupe terroriste Etat islamique (EI) dans les zones sinistrées d'Irak et de Syrie ont été analysés par le New York Times qui révèle, après un an d'investigation, comment les djihadistes ont pu instaurer leur califat trois ans durant.

Plus de 15.000 pages de documents ont été collectées par la journaliste Rukmini Callimachi qui les a analysées, avec l'aide d'une équipe de journalistes et experts, pour livrer une enquête de fond déconstruisant le mode opératoire du groupe terroriste Etat islamique.

En peu de temps, les djihadistes ont pu établir leur pseudo-état, baptisé califat, en s'appuyant sur "deux outils complémentaires: la brutalité et la bureaucratie", décrypte l'enquête baptisée "The ISIS files".

"Ils ont bâti leur état sur le dos de ce qui existait auparavant, absorbant les connaissances administratives des centaines de cadres gouvernementaux. Une examination de la façon dont le groupe gouvernait révèle un modèle de collaboration entre les militants et les civils sous leur férule".

L'EI s'est en outre assuré de pouvoir compter sur un flux de rentrées financières, non pas issues du commerce du pétrole principalement, mais bien de l'agriculture locale, dont les exploitations ne pouvaient être bombardées par la coalition internationale. "Les carnets, livres de comptes et budgets décrivent comment les militants ont monétisé chaque centimètre de territoire conquis, taxant chaque boisseau de blé, litre de lait de brebis et chaque pastèque vendus sur les marchés qu'ils contrôlaient. Avec l'agriculture seule, ils ont récolté des centaines de millions de dollars", décrit l'enquête.

 

Celle-ci démontre que ces revenus dépassaient ceux obtenus grâce au pétrole. Un tableau trouvé dans un attaché-case fait état de gain de 1,9 million de dollars en une journée seule par la vente d'orge et de blé. Un autre évoque un bénéfice de 3 millions de dollars en trois mois grâce à la vente de farine en trois endroits à Mossoul seulement. "C'est le commerce quotidien et l'agriculture - pas le pétrole - qui ont alimenté le califat", ressort-il de l'investigation.

L'analyse des documents couplée aux explications d'un ancien fonctionnaire irakien responsable de l'agriculture en province, forcé d'oeuvrer sous l'EI, démontre en outre comment le califat s'est saisi des terres de chrétiens ou chiites, pour les allouer à des sunnites irakiens. Les militants "ont pris nos dossiers, les ont parcourus, cherchant des propriétés qui appartenaient à des chiites ou des apostats, certains d'entre eux qui avaient quitté le califat", explique celui-ci.

La publication du New York Times révèle encore les punitions infligées pour les méfaits relevés par l'Etat islamique: l'emprisonnement pour une coupe de cheveux inappropriée ou une partie de domino et la lapidation pour l'adultère ou un niqab laissant apparaitre le regard d'une jeune fille, par exemple. "Des spécialistes de la religion évaluaient le crime, et remplissaient un formulaire", décrit l'enquête évoquant la police de la moralité.

A mesure que la brutalité du califat s'étalait dans les rues, avec des exécutions publiques, les services de base comme la récolte des déchets ou l'accès à l'eau et à l'électricité s'amélioraient, témoignent encore d'autres survivants. "Les militants ont imposé une discipline qui s'avérait manquante (...) Rares sont ceux qui ont quelque chose de bon à dire à propos de leurs anciens dirigeants - à moins d'être incités à parler des services qu'ils ont fournis", observe la journaliste à l'issue de ses recherches et interviews. "Il faut être honnête", selon l'un des témoins interrogés, "il faisait plus propre sous l'EI".

 

06/04/18

Source: Belga

Un sniper abat un islamiste à... 3,45 km de distance !

 

Un tireur d'élite canadien en opération en Irak a réussi à abattre un islamiste de Daech qui se trouvait à 3450 mètres de lui ! La balle tirée a mis dix secondes pour atteindre sa cible, rapporte le journal canadien The Globe and Mail.

Il s'agit du record du monde de distance pour un tir létal. Le précédent était détenu par un Britannique (2475 mètres, avec une carabine .338 Lapua Magnum, en 2009). 

Un fusil de type McMillan TAC-50

On ne connaît pas l'identité exacte de la cible, ni le rôle qu’elle occupait au sein de l’organisation terroriste. L'anonymat du sniper a également été préservé. Mais on connaît l'arme utilisée : un fusil de type McMillan TAC-50.

Une source militaire précise qu'il était préférable, pour cette mission, d'utiliser un tireur d’élite plutôt que de recourir à un bombardement qui aurait pu occasionner des victimes collatérales comme des civils.

Pourquoi les musulmans n'ont pas su s'opposer à Daech

Dans "Les Musulmans au défi de Daech", Mahmoud Hussein montre comment l'islam a échoué à se réformer, laissant le champ libre à une vision littérale du Coran.

"De proto-État, Daech se transforme en organisation criminelle et mafieuse"

L'enquête parlementaire sur le financement de Daech constate son affaiblissement dans tous les domaines, sauf celui de la propagande. Tour d'horizon.

 

 

 

Le compte rendu d'une enquête parlementaire, lancée après les attentats de novembre et janvier et menée par Jean-Frédéric Poisson, sur les moyens de Daech, a été publié mercredi 20 juillet. À l'origine de cette mission d'information, les soupçons de Jana Hybascova, ambassadrice de l'Union européenne en Irak, concernant l'achat par les pays européens de pétrole à l'organisation terroriste. Rappelons que Daech contrôle des territoires où vivent 5 à 8 millions de personnes et dispose de ressources estimées à 2 milliards de dollars. Retour sur les constats et propositions majeurs de cette enquête.

  • 1. Baisse notable des revenus financiers et humains de Daech

Pétrole. Les revenus tirés du pétrole, estimés à 1 milliard de dollars en 2014, ont chuté en 2016 en raison de la baisse du cours du carburant et des transactions peu coûteuse d'un pétrole de médiocre qualité. Daech a de plus en plus de difficultés à renouveler ses installations vieillissantes et à recruter des techniciens qualifiés. Enfin, les frappes de la coalition et des Russes ont détérioré l'acheminement du pétrole et sa vente.

Propositions. Outre les actions contre la production et l'acheminement des ressources pétrolières, la coalition doit lutter contre la commercialisation des biens pétroliers de l'organisation.

Circulation d'œuvres d'art. Les défaites militaires de Daech ont réduit son nombre d'œuvres d'art même si l'organisation dispose d'un « département des antiquités » qui délivre des autorisations de fouilles à des trafiquants.

Propositions. Lutter contre les galeristes aisés qui achètent ces œuvres. Poursuivre la sensibilisation des acteurs du monde de l'art avec la création d'une base de données unique des biens culturels volés afin d'anticiper la remise sur le marché des œuvres pillées.

Trafic d'êtres humains. Ressources financières secondaires mais essentielles pour la propagande, les kidnappings ou les trafics d'esclaves vont augmenter si Daech prend le contrôle du trafic de migrants en Libye, plateforme pour les réseaux de prostitution à destination de l'Europe.

Propositions : Étendre la zone d'activité de l'opération Sophia aux larges des côtes libyennes pour contrôler et intercepter les bateaux.

Effectifs. En deux ans, le nombre de combattants de Daech a fortement chuté. Les experts comptaient entre 20 000 et 35 000 « soldats » en 2014, les effectifs seraient de 12 000 individus aujourd'hui.

  • 2. Affaiblissement de l'influence de Daech dans les zones frontalières

Constat. Sur les plus de 1 000 kilomètres de frontières entre la Turquie et l'Irak et la Syrie, le rôle de Daech a été fortement amoindri, gênant ses opérations de contrebande.

Propositions. Consolider la coopération douanière au niveau européen et international, mais aussi avec la Turquie.

  • 3. « Les États européens ne participent pas au financement de Daech »

C'est ce qu'a affirmé Jean-Frédéric Poisson lors de sa conférence de presse mercredi 20 juillet. Les financements étrangers de l'EI sont une « source de fantasmes », selon la mission.

  • 4. Lafarge blanchi

Constat. Soupçonné d'avoir financé indirectement Daech par une enquête du Monde datant du 21 juin, le groupe Lafarge, premier cimentier mondial, est hors de cause selon le rapport parlementaire. On peut lire dans celui-ci que la situation instable de la zone a pu générer des soupçons, mais « les personnels concernés ont été sanctionnés immédiatement : le groupe a procédé à leur licenciement. {…} Les responsables du groupe échangent régulièrement avec les autorités françaises ».

  • 5. D'un pseudo-État à une organisation mafieuse

Constat. Le modèle économique de Daech est en pleine mutation : « De proto-État, elle semble se transformer en organisation criminelle et mafieuse. » La part des ressources naturelles dans les sources de financement est passée de 80 à 60 %, baisse compensée par une hausse des impôts pour les populations et une recrudescence des crimes et trafics. Mais Daech n'est plus autosuffisant et doit importer de plus en plus.

  • 6. Dénonciation de l'inaction des plateformes du Web

Constat. « L'angle mort de la lutte contre Daech reste Internet », déplore Myriam Benraad, spécialiste de l'Irak et des pays arabes. Vecteurs clés de la propagande de Daech, les réseaux sociaux ont des effets quantitatifs et qualitatifs sur leurs recrutements. D'une part, la décentralisation de l'information permet une meilleure diffusion, de l'autre, il est possible de cibler des femmes et des jeunes individus en gardant l'anonymat.

Proposition. Renforcer les dispositifs de détection des contenus illicites sur Internet et veiller au respect des droits fondamentaux. Cela passe par une responsabilisation des fournisseurs d'accès à Internet et le renforcement de contre-discours.

 

L'illusion du paradis, moteur des kamikazes

 

 

 

Au bout de leur mission suicide, ils en sont persuadés, le paradis. A Istanbul, Paris ou Bruxelles, la conviction que l'éden est au bout du sacrifice motive les kamikazes mais elle ne vient d'aucun texte, selon des experts et islamologues.

 

Mardi soir à l'aéroport d’Istanbul un témoin, Oftah Mohammed Abdullah, a raconté avoir vu l'un des assaillants: "Il avait une veste courte et avait caché un fusil (dessous). Il l'a sorti et a commencé à tirer sur les gens. Il marchait comme un prophète".

Le paradis, "c'est une adhésion existentielle", explique à l'AFP le sociologue Farhad Khosrokhavar, directeur d'études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris. "Ils y croient dur comme fer. Mettre en cause cela serait n'y rien comprendre. Cette certitude leur donne une sérénité et une force extraordinaire".

"Certains ont dit que les tueurs du Bataclan (en novembre à Paris), par exemple, devaient être drogués pour être si calmes et déterminés. C'est faux. Ils n'en avaient pas besoin", ajoute-t-il. Des survivants du massacre dans la salle de concert ont raconté que les tireurs agissaient posément, calmement, parfois le sourire aux lèvres en mitraillant une foule sans défense. Après leur mort, des analyses de sang ont été effectuées: rien.

D'où leur vient cette croyance ? Comment leur est-elle inculquée ?

Dans un reportage titré "Soldats d'Allah", diffusé le 2 mai par la chaîne française Canal Plus, le journaliste Saïd Ramzi infiltre une cellule d'aspirants-jihadistes en France. L'émir du groupe, un jeune Franco-Turc se faisant appeler Oussama, lui décrit les joies qui les attendent à l'issue d'une mission suicide qui n'aura toutefois jamais lieu.

"Vers le paradis, c'est ça le chemin", lui murmure-t-il en souriant. "Viens, frère, on va au paradis. Nos femmes nous y attendent, avec des anges comme serviteurs. Tu auras un palais, un cheval ailé fait d'or et de rubis".

- Fragilité et psychiatrie -

En plus des délices de l'au-delà, les kamikazes sont certains que leur geste leur permettra d'ouvrir la porte des cieux à des dizaines de leurs proches, pour le salut desquels ils ont la certitude de se sacrifier.

Des dizaines d'imams, de spécialistes, d'exégètes du Coran et de la sunna (recueil des paroles et enseignements du Prophète) ont eu beau démentir cette notion du paradis promis aux jihadistes et, par procuration, à leurs proches, rien n'y fait.

"Tuer des gens pour aller au paradis, ce n'est bien entendu nulle part dans les textes", indique à l'AFP l'islamologue Ghaleb Bencheikh. "Des idéologues, manipulateurs, fanatiques, radicalisés, tout ce qu'on veut, manipulent cette idée de jihad, qui veut dire effort et non pas combat, ajoutant moult détails de description de ce paradis: c'est une construction humaine".

Selon lui, les fameuses 72 vierges promises aux kamikazes, les passe-droits pour le paradis qu'ils peuvent réserver à leurs proches, les délices sans fin, les chevaux ailés d'or et de rubis ne sont que des leurres destinés à tromper les faibles, les crédules ou les malades mentaux.

"Les houris (vierges soumises), les rivières de vin, de miel et de lait : ce sont des descriptions allégoriques. Mais malheureusement, quand on est fragile d'esprit, on peut y croire mordicus", ajoute Ghaleb Bencheikh.

 

 

"Ces sujets se disent : + je suis délinquant, je vais passer pour le militant d'une cause et de surcroît il m'est promis un au-delà meilleur et durable. Non seulement je vais tuer des gens, des enfants, mais comme c'est pour la bonne cause je vais être récompensé. C'est l'inversion totale des valeurs. Ça relève aussi de la psychiatrie".

Le 13 juin, alors qu'il est cerné par la police dans la maison du couple de fonctionnaires de police qu'il vient d'assassiner en région parisienne, Larossi Abballa avait été jusqu'à filmer et mettre en ligne son testament.

"Imagine-toi, ô Musulman. Il te suffit de t'élancer, de mourir, et te voilà au paradis, avec ton prophète (…) Quelle immense faveur !", dit-il, lisant un texte préparé à l'avance. "A ce moment là plus de soucis, plus d'épreuves. Seulement une jouissance sans fin !"

 

Copyright © 2016 AFP. Tous droits de reproduction et de représentation réservés.

Si l'EI se fonde sur la religion, pourquoi est-il si violent ?

La soudaine notoriété de Daech a suscité de multiples hypothèses quant à ses origines. Quels sont les événements qui ont conduit à l'émergence de ce groupe djihadiste ?

 

 

 

Malgré ce que l'on entend ici ou là, la religion n'est pas intrinsèquement pacifique. Ce présupposé repose largement sur l'idée, héritée du protestantisme, selon laquelle la religion est une pratique spirituelle, propre à chaque individu, et pervertie uniquement par des considérations bassement matérielles, notamment politiques.

Pourtant, des gens tuent – et adorent – au nom de la religion. Prétendre que le choix de l'une d'entre elles est plus juste que l'autre est non seulement problématique, mais historiquement faux. Les croisades, les attentats contre les cliniques qui pratiquent l'avortement, certains assassinats politiques, et les attaques des colons israéliens contre des biens matériels appartenant aux Palestiniens – pour ne citer que quelques exemples – ont été, et sont encore, motivés par la religion.

Ceci est dû au fait qu'elle repose sur la notion métaphysique de « croyant » et de « non-croyant » – une distinction fondée sur les concepts de bien et de mal, qui peut opportunément servir à justifier les actes de n'importe quel groupe.

Un passé imaginaire

Daech, une organisation fondamentalement violente qui prétend refléter fidèlement l'islam du prophète Mahomet, fait partie de ceux-là. Elle s'apparente à d'autres courants réformistes islamiques qui cherchent à ressusciter, à l'époque moderne, l'idée qu'ils se font du système politique et social que Mahomet (570-632) et ses premiers fidèles instaurèrent et vécurent en Arabie au VIIe siècle après Jésus-Christ.

Le problème, c'est que nous savons très peu de choses de ce système, si ce n'est par le biais de sources beaucoup plus tardives, comme la biographie (sira) de Mahomet ou les travaux d'historiens comme ceux d'al-Tabari (839-923).

La restauration du califat est l'un des principes fondateurs de Daech. Cette entité géopolitique, synonyme de l'empire islamique qui s'étendait du Maroc et de l'Espagne, à l'ouest, jusqu'aux Indes, à l'est, constitue le symbole de l'apogée de l'islam.

 

La destruction du monde débuterait par une lutte entre les forces du bien (les musulmans) et celles du mal. Cette vision apocalyptique, Daech se l'est appropriée. Là encore, il est utile de rappeler deux choses. La première, c'est que la majorité des musulmans n'accorde aucun crédit à cette vision des choses. La seconde, c'est que cette notion de « fin du monde » n'est évidemment pas propre à l'islam. On la retrouve dans le judaïsme et le christianisme, où elle ne relève pas du tout de l'orthodoxie.

Tolérance médiévale

Indépendamment du concept d'apocalypse, l'islam était-il particulièrement violent au VIIe siècle ? Sans émettre de jugement définitif sur ce sujet, on peut en tout cas rappeler les assassinats de trois des quatre premiers califes (successeurs) de Mahomet, ou les intenses débats théologiques de l'époque sur le fait de savoir qui était musulman ou non.

Les débats se concentraient notamment sur l'âme des grands pécheurs. Ces derniers restaient-ils toujours musulmans, ou bien leurs péchés les avaient-ils exclus de la communauté des fidèles ? Dans la doctrine de la plupart des musulmans, c'est à Dieu de statuer, et non aux hommes. Cependant, des groupes comme Daech prétendent en décider à la place de Dieu, ce qui ne correspond en rien aux croyances de la majorité des musulmans orthodoxes.

Un tel point de vue n'est certes pas incompatible avec l'islam, mais prétendre que des groupes comme Daech incarnent une interprétation médiévale de la doctrine islamique est injuste pour l'islam médiéval.

 

Une bayt al-hikma (maison de sagesse), construite au VIIIe siècle à Bagdad, symbolise ce que l'on a appelé l'âge d'or de la civilisation islamique. Pendant cette période de l'Histoire, des musulmans, des juifs et des chrétiens étudiaient les textes philosophiques et scientifiques de la Grèce antique.

Ces érudits ont contribué à faire progresser diverses disciplines, dont les mathématiques, l'astronomie, la médecine, l'alchimie ou la chimie, notamment. En un siècle à peine, l'islam était devenu un empire cosmopolite qui n'avait rien à voir avec l'interprétation stricte et dogmatique qu'en font des groupes comme Daech aujourd'hui.

Un outil puissant

Les critiques occidentaux qui tentent de faire croire que l'islam est responsable des actions de Daech, et qui brandissent celles-ci comme une preuve supplémentaire de la violence intrinsèque de cette religion, négligent d'autres causes profondes, et très récentes.

Parmi elles, citons le passé colonialiste européen dans la région, le soutien des États-Unis et de l'Europe à divers dictateurs impitoyables au Moyen-Orient et l'instabilité engendrée par l'invasion américaine en Irak après les attentats du 11-Septembre 2001. Sur la base de cette histoire moderne, Daech et d'autres groupes nourrissent un rêve « romantique », celui de ressusciter le règne idéalisé du puissant califat islamique.

La capacité indéniable de la religion à ne pas s'embarrasser de nuances quand il s'agit de faire la différence entre « fidèles » et « infidèles », ou entre le « bien » et le « mal », en fait une idéologie puissante. Entre les mains de démagogues, le discours religieux – utilisé de manière sélective et manipulé afin d'atteindre des objectifs précis – s'avère redoutable.

S'il est inexact de dire que la rhétorique de Daech est non-islamique, il importe de souligner ici qu'elle ne représente qu'un courant très particulier de l'islam, certainement pas le principal.

* Aaron Hughes, spécialiste en sciences des religions, pose la question de savoir si sa violence est inhérente à l'islam.

Traduit par Bamiyan Shiff pour Fast for Word.

Confessions d'un général irakien : "Mes anciens compagnons d'armes ont rejoint Daesh"

Waleed Kattan, médecin général chrétien dans l'armée de Saddam Hussein, a côtoyé quelques-uns des cadres actuels de l'organisation État islamique. Entretien.

 

 

 

Grand, mince, une fine moustache blanche, le docteur Waleed Kattan affiche une prestance assez british. Cet ophtalmologiste de 66 ans, formé en Autriche et en Grande-Bretagne, dirige depuis quelques années une clinique à Erbil, capitale du Kurdistan irakien. Il a fui Bagdad après deux tentatives d'assassinat. À l'époque de Saddam Hussein, cet orthodoxe était le chrétien le plus gradé de l'armée irakienne. À la tête du grand hôpital militaire de Bagdad, Waleed Kattan a examiné les yeux et prescrit des lunettes à la plupart des officiers supérieurs. « Je côtoyais la crème du parti Baas, qui dirigeait alors le pays. Même si j'étais chrétien, j'entretenais avec eux une vraie solidarité. C'étaient des frères d'armes. Nous étions des laïques. Pourtant, beaucoup d'entre eux sont devenus les cadres de l'armée de Daesh », constate l'ancien général.

Le Point.fr : Un chrétien pouvait donc devenir général du temps de Saddam Hussein…

Waleed Kattan : Je n'ai jamais aimé Saddam Hussein. Mais il était issu du parti Baas, un parti laïque, fondé par un Syrien chrétien, Michel Aflak, en 1947 à Damas. À l'époque de Saddam Hussein, l'Irak comptait 1,5 million de chrétiens. Combien en reste-t-il aujourd'hui ? 200 000 ? 300 000 ? La plupart vivent aujourd'hui dans la région autonome du Kurdistan. Musulmans sunnites et chiites, chrétiens, et même yazidis, nous étions des Irakiens. Et les chiites irakiens se sont battus avec autant de détermination que les autres durant la guerre contre l'Iran.

L'ouvrage du journaliste américain Michael Weiss, auteur de État islamique. Au coeur de l'armée de la terreur, révèle que Abou Ali al-Anbari, qui dirige Amniyat, les services de sécurité de Daesh, est un ancien agent des renseignements du régime de Saddam. Comment des laïques ont-ils pu rejoindre les pires des islamistes ?

Le régime irakien n'a été laïque que jusqu'à la première guerre du Golfe. Saddam Hussein a ensuite pris un virage islamiste très marqué. Un virage, qui, je pense, a échappé aux Occidentaux. En mettant en avant la religiosité de l'État, il cherchait sans doute à détourner les critiques liées à l'effondrement de notre économie provoqué par les sanctions économiques. Mais c'est surtout après 2003 que beaucoup de cadres qui dirigeaient l'Irak sont devenus islamistes, par réaction vis-à-vis des Américains qui ont détruit notre pays.

Vous connaissez donc les anciens baasistes qui encadrent aujourd'hui les combattants de l'État islamique ?

Oui, je connais la plupart d'entre eux. Pour moi, l'État islamique, c'est la bête de l'Apocalypse, ce sont des monstres, et il n'est pas question d'excuser leurs atrocités. Mais il faut savoir que les Américains, à partir de 2003, ont donné le pouvoir en Irak aux Iraniens, aux chiites, qui nous ont persécutés. Mon frère a été tué, j'ai eu la chance d'échapper à deux tentatives d'assassinat. C'est pourquoi je me suis installé au Kurdistan. Ma femme, dentiste, exerce également à Erbil. Avant même la prise de pouvoir de Mossoul par l'État islamique, les chrétiens vivaient dans la crainte permanente des enlèvements, des extorsions de fonds.

Quel regard l'ancien général porte-t-il sur les peshmergas, les combattants kurdes ?

Je connais personnellement de nombreux officiers supérieurs kurdes. Contrairement à leurs homologues de l'armée irakienne, eux, en revanche, n'hésitent pas à se battre en première ligne. Quant aux soldats, ils sont très combatifs, très déterminés. Mais ils ne possèdent pas l'armement pour reprendre seuls la ville de Mossoul, qui compte deux millions d'habitants.

Avez-vous encore des contacts avec des gens de Mossoul ?

C'est de plus en plus difficile, mais nous arrivons encore à savoir ce qui se passe. Notamment quand des hommes de Daesh se rasent la barbe et vont se fondre, incognito, dans le flux des réfugiés. Vous, les Européens, vous êtes trop naïfs : vous accueillez chez vous des criminels islamistes qui ne cherchent qu'à vous détruire. Retenez ces chiffres : nous étions 1,5 million de chrétiens en Irak. Aujourd'hui, nous ne sommes plus que 200 000. Tous les jours, des familles chrétiennes partent.

 

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