Iran niouzes

Publié le par ottolilienthal

Mitra Hejazipour, exclue de l’équipe d’échecs nationale après avoir refusé de porter le voile durant une compétition

Grand maître d’échecs, Mitra Hejazipour a été virée de l’équipe iranienne car elle n’a pas porté le voile au cours d’une compétition. Elle raconte son combat dans le 23h de franceinfo mardi 3 août.

Elle est devenue le symbole du combat des femmes pour la liberté en Iran. Mitra Hejazipour, grand maître d’échecs, a réalisé un geste fort : elle a refusé de porter le voile lors d’une compétition. Si elle a été exclue de l’équipe nationale iranienne, elle explique que ce geste a permis d’envoyer un message fort. "La liberté, c’est la chose la plus importante pour les femmes en Iran", déclare-t-elle, en duplex dans le 23h de franceinfo mardi 3 août.

"Les choses ont changé"

Mitra Hejazipour explique qu’elle a beaucoup travaillé pour arriver à ce niveau. Elle affirme que si les hommes étaient davantage installés dans cette discipline auparavant en Iran, "maintenant les choses ont changé et les femmes sont plus présentes." Aujourd’hui exilée en France, elle compte concourir pour l’équipe de France. "Cela montre mon attachement pour la France", témoigne-t-elle.

 

https://www.francetvinfo.fr/monde/iran/iran-mitra-hejazipour-exclue-de-lequipe-dechecs-nationale-apres-avoir-refuse-de-porter-le-voile-durant-une-competition_4727111.html#xtor=EPR-2-[newsletterquotidienne]-20210806-[lesimages/image4]

“Parfum du prophète” et huile aux fleurs : comment la "médecine islamique" a aggravé l’épidémie de Covid-19 en Iran

 

Depuis le début de la pandémie de coronavirus Covid-19 en Iran, certains extrémistes religieux et ayatollahs sont très critiqués par les internautes iraniens. Entre blocage des mesures nécessaires, mais aussi remèdes saugrenus, certains d’entre eux sont même accusés d’être des responsables directs de la propagation du virus.

Le dernier bilan officiel présenté par les autorités iraniennes fait état de 2 757 décès dus au coronavirus Covid-19 pour un total de 41 495 personnes infectées au 30 mars 2020. Néanmoins, ces chiffres officiels ont été très critiqués par plusieurs experts internationaux,  comme dans cet article du Business Insider affirmant que le bilan est bien plus lourd que les annonces officielles.

La rédaction des Observateurs de France 24 a également pu s’entretenir avec plusieurs médecins et infirmières qui ont aussi dénoncé une différence entre les chiffres et ce qu’ils observaient sur le terrain.

>> A lire sur les Observateurs : En Iran, les autorités "dissimulent" de nombreux décès liés au Covid-19

En Iran, c’est la ville de Qom, ville sacrée pour les chiites et abritant de nombreuses écoles de théologie islamique, qui est considérée comme le premier foyer de coronavirus. Depuis le 19 février 2020, lorsque l’Iran a annoncé les premiers cas sur son territoire, plusieurs voix dans le domaine médical ont demandé la mise en quarantaine de Qom. Pourtant, il n’en a rien été. Les autorités religieuses les plus conservatrices se sont fortement opposées aux mesures de sécurité prétendant que la situation était sous contrôle.
Des "remèdes islamiques" pour guérir du coronavirus

Mais l’intervention de ces membres extrémistes du clergé ne s’est pas arrêtée là : certains n’ont pas hésité à proposer de soigner les malades du Covid-19 en utilisant la "médecine islamique ", qu’ils défendent. En Iran, il n’est en effet par rare de voir les franges les plus conservatrices rejeter la science moderne affirmant avoir leur propre réponse pour soigner les malades.
Le 21 mars, Morteza Kohansal, un des plus fervent défenseurs de ce type de médecine en Iran et disciple de l’ayatollah Tabrizian, inventeur du concept de "médecine islamique", s’est rendu dans un hôpital d’Anzali, dans la province du Guilan dans le nord de l’Iran.

Lors de cette visite, Morteza Kohansal a agité sous le nez de patients atteints du Covid-19 un liquide inconnu qu’il a baptisé le "parfum du prophète". Sur les photos et vidéos qu’il a publiées de la scène, les docteurs et infirmières autour de lui portent des masques et des tenues de protection, mais pas lui.
Deux jours plus tard, des médias locaux ont annoncé la mort de Mohsen Sharifi, un jeune homme qui avait profité de l’onction de Morteza Kohansal. Il était visible sur les photos de Morteza Kohansal.

Aucune certitude que ce "parfum du prophète" ait joué un quelconque rôle dans le décès du jeune homme. Néanmoins, le procureur général de la région a émis un mandat d’arrêt contre ce membre du clergé apprenti chimiste, qui est maintenant en fuite.

Mohsen Sharifi n’est pas la seule victime connue décédée du Covid-19 à la suite de l’administration d’un "remède islamique". L’ayatollah Hashem Batheai, un éminent membre du clergé islamique et politicien membre du conseil d'élite iranien, a annoncé avoir le coronavirus le 22 février lors d’une cérémonie. Il a expliqué qu’il s’administrait un remède islamique en guise d’auto-médication. L’homme est finalement décédé à l’hôpital de Qom le 16 mars dernier.

Le 25 février, l’ayatollah irano-irakien Abbas Tabrizian a de son côté publié, sur son compte Telegram, ses “13 conseils” pour éviter d’attraper le coronavirus. Il préconise notamment de se brosser les cheveux, de manger de l’oignon ou d’utiliser de l’huile de violette sur du coton comme suppositoire avant de s’endormir.
 
"Ils soignent, mais ils ne guérissent pas les gens"
 
Mohammad Javad Akbarain est un expert iranien des écoles de pensées chiites vivant en France.
 
Ce que nous appelons "la médecine islamique "existe depuis des centaines d’années. Avant la Révolution islamique iranienne, ceux qui y croient utilisaient déjà ce type de remèdes pour leurs problèmes psychiques. Mais c’était un phénomène mineur.

Depuis la Révolution islamique il y a 40 ans, ils ont reçu le soutien d’une structure politique, et donc de l’argent pour promouvoir ce type de "médecine". C’est pour cela que l’idée de mettre en quarantaine la ville de Qom et de fermer les sanctuaires de Qom et de Mashhad n’a pas été immédiatement suivie d’effets : ces extrémistes disaient que ces sanctuaires sont de sources divines, et qu’il est impossible qu’ils soient contaminés. Ils invitaient même les gens à venir ici pour être guéri [l’Iran a finalement fermé ces deux sanctuaires le 16 mars, NDLR]. C’est ça que promeuvent les partisans de la médecine islamique : ils soignent, mais ils ne guérissent pas les gens.
 
La source de ces remèdes est fortement liée au prophète ou à des imams chiites présents dans des livres historiques comme par exemple "Bihar al-Anwar ". Ces ouvrages rapportent que le prophète, ou certains imams chiites, ont été guéris de différentes maladies grâce à certains remèdes. L’authenticité de ces récits est fortement questionnable.

Mais les extrémistes religieux prennent ces recettes à la lettre et les présentent comme des "remèdes islamiques" capables de guérir n’importe quelle maladie.
 

Abbas Tabrizian, par exemple, a fait un autre coup d’éclat sur internet en janvier dernier en Iran. Il a brûlé, en présence de ses fidèles, des copies du livres "Les principes de la médecine interne" de Harrison, une des ressources bibliographiques principales en matière de médecine (voir la vidéo ci-dessous).

Trois médecins ont dénoncé les agissements de cet ayatollah sur les réseaux sociaux. Ils ont été condamnés avec sursis à soixante coups de fouet pour "insultes" par la justice.
Mais alors que ces ecclésiastiques sont très critiqués, d'où vient le soutien dont ils bénéficient ? Mohammad Javad Akbarain explique :
 
Pour l'exemple de l’ayatollah Tabrizian, il n’était pourtant pas très soutenu au début, et beaucoup estimaient que ses écrits et remèdes étaient infondés.

Mais il est devenu intouchable lorsque des cercles proches de l’ayatollah Khamenei, le guide suprême iranien, ont commencé à le soutenir. L’ayatollah Tabrizian s’est d’ailleurs vanté que le guide suprême l’invite à se rendre à Qom,  où il lui aurait donné une maison pour pouvoir enseigner la médecine islamique.
 
Si l'ayatollah Khamenei a effectivement exprimé son soutien à la médecine islamique, il n'a jamais publiquement exprimé son soutien à l'ayatollah Tabrizian.

Même avant l’épidémie de Covid-19, la "médecine islamique" avait déjà fait des victimes dans les rangs des ayatollahs iraniens. En décembre 2017, puis en décembre 2018, deux proches du guide suprême Khamenei, les ayatollahs Haeri-Shirazi et Hashemi Shahroudi sont tous les deux décédés.

Les familles des deux ayatollahs avaient révélé que ces derniers avaient refusé des soins médicaux et suivaient les préceptes de la médecine islamique pour soigner leurs maladies respectives, jusqu’à ce que ceux-ci soient à un stade trop avancé.
 
 
Article écrit par Ershad ALIJANI
 

 

 

 

 

https://observers.france24.com/fr/20200330-iran-medecine-islamique-epidemie-covid-19-ayatollah?xtor=CS1-51-[Desktop]-[20+Minutes.fr]&dicbo=v1-7091b5c3368c779a24374984d527db69-00518f0950dd1d41ab61ec38c907920b17-gq4ggojyge4dclldgnswmljugyytsllcmfrtsllfgu2dszrsmm3domlfmm

« La jeunesse iranienne ne veut plus des ayatollahs »

La chercheuse Mahnaz Shirali, experte de l'Iran contemporain, analyse la mort du général Soleimani et ses conséquences pour le Moyen-Orient.

 
Silence, l’Iran coule
 


L’Iran est sous l’eau depuis le 19 mars, mais le monde ne le sait quasiment pas. Pourtant, les images sur les réseaux sociaux sont absolument accablantes : on y voit des villageois emportés par les flots, d’autres courant de toutes leurs forces pour ne pas être rattrapés et engloutis, des familles réfugiées sur les toits attendant pendant des jours des secours incertains, des maisons s’effondrant comme des paquets de cartes, des caravanes de voitures razziées par des rivières en furie ou encore le magnifique pont Kashkan, construit vers le IXe ou Xe siècle dans la province du Loristan (sud-ouest du pays), sombrer sous les coups de boutoir de la crue. Certaines montrent des actes héroïques, comme celle d’un homme sauvant une femme et un enfant de la noyade.

Les autorités iraniennes ayant interdit aux médias internationaux et même aux journalistes iraniens – à l’exception de ceux de la télévision d’État et des agences officielles – de se rendre sur place, ce sont ces vidéos de villageois et de citadins qui permettent d’appréhender l’ampleur de la catastrophe. Celle-ci pourrait être comparée à Katrina, l’ouragan qui dévasta La Nouvelle-Orléans. Sauf que l’Iran coule en silence. Autre différence avec la Louisiane et la Floride, les inondations frappent la majeure partie de l’Iran, puisque 23 provinces sur 31 sont concernées, le sud (en particulier le Khouzistan et le Loristan), le nord du pays (le Golestan et le Mazandéran) et le centre (le Fars) étant les régions les plus touchées.
On compte déjà plus de 70 morts, selon des chiffres officiels. Quelque 2 000 villes et villages ont été évacués depuis la première vague de pluies torrentielles suivies d'inondations, qui a touché le nord-est du pays le 19 mars. Ensuite, il y a eu une deuxième vague qui a frappé l'ouest et le sud-ouest à partir du 25 mars. La vague actuelle, qui a commencé le 1er avril, touche particulièrement le quart sud-ouest du pays.
Près de 90 000 personnes vivent à présent dans des abris d’urgence. Dans la seule province du Khouzistan, la grande région pétrolière de l’Iran, on compte 182 villages évacués ainsi que six petites villes situées le long de la rivière Karkheh, selon l’agence semi-officielle Isna. La capitale Ahwaz, qui compte près d’un million et demi d’habitants, est aussi menacée d’inondations – l’hôpital Salamat a été évacué. Début avril, les autorités avaient dû ouvrir en urgence les vannes du barrage proche de Karkheh, l'un des plus importants de la région, dans la crainte qu'il ne puisse céder sous la pression des eaux.

Un tiers du réseau routier iranien a d’ores et déjà été endommagé, soit quelque 12 000 kilomètres. Des milliers d’hectares de terres agricoles sont inutilisables et des récoltes perdues. Ce qui frappe également, c’est le nombre de ponts détruits : 314, selon le décompte de la presse iranienne.

La situation est d’autant plus dramatique que le sud de l’Iran sort d’une sécheresse d’une dizaine d’années qui avait entraîné une pénurie d’eau et des révoltes populaires importantes en juillet 2018. D’où une aridité qui empêche les sols d’absorber la pluie. Dans le nord, c’est la déforestation sauvage qui est mise en accusation. Selon l’Organisation iranienne des ressources naturelles et des forêts, la superficie des forêts dans cette région est passée de 3,6 millions à 1,8 million d’hectares pendant ces quarante dernières années.
« La situation est vraiment mauvaise et je ne comprends pas pourquoi elle n’attire pas davantage l’attention de la communauté internationale, souligne Kaveh Madani, un grand spécialiste de l’eau, ancien directeur adjoint du Bureau iranien de l’environnement, et à présent réfugié aux États-Unis, sur la chaîne CBC. Des gens meurent, et beaucoup d’autres ont perdu leur maison et sont dans le plus grand besoin. Ils ont besoin de docteurs sur le terrain, de nourriture, d’électricité. Ces inondations sont beaucoup plus dommageables que le tremblement de terre de 2003. »
« En fait, nous avons affaire à deux crises, ajoute-t-il. L’une qui est de réguler les réservoirs et contrôler l’eau pour empêcher d’autres inondations, sinon ça va devenir encore pire. La deuxième est d’aider les populations qui manquent de tout. L’Iran n’était pas préparé à ce genre de crise et, comme dans beaucoup d’autres pays, l’environnement n’a jamais été une priorité. D’où un manque de supervision, de vision, avec le changement climatique qui a exacerbé la situation. »

Mais Téhéran paie aussi le prix de sa répression systématique des militants écologistes, qui n’ont cessé d’alerter sur la situation écologique catastrophique de l’Iran. Kaveh Madani lui-même a été arrêté et maintes fois interrogé par la police, d’où sa démission. Aujourd’hui, huit d’entre eux sont en prison pour « espionnage » et quatre risquent la peine de mort. Le plus emblématique d’entre eux, le professeur irano-canadien Kavous Seyed-Emami, arrêté le 24 janvier 2018, une fois encore pour « espionnage », a été retrouvé pendu deux semaines plus tard dans sa cellule, où il avait été placé en isolement – un « suicide » auquel aucun de ses amis ne veut croire.
Autre comparaison avec Katrina, la réaction des autorités iraniennes, totalement prises au dépourvu, apparaît assez semblable à celle d’un George W. Bush au moment de la catastrophe. Certes, le président Hassan Rohani a fini par se rendre sur place, mais tardivement. D’où une indignation dans la population perceptible dans les vidéos, certaines faisant état de colère à l’encontre du régime. Sur l’une d’elles, on peut voir un Iranien s’adressant directement au Guide suprême Ali Khamenei et aux chefs des pasdarans (gardiens de la révolution) : « Vous avez tant donné pour la Syrie, qu’est-ce que cela vous a rapporté ? Les gens sont anéantis par ces inondations. Nos enfants se noient. Vous ne vouliez pas qu’Israël existe d’ici vingt ans mais avec cette situation, notre pays ne verra pas l’année prochaine. »

« Ce n’est pas seulement de la guerre économique, c’est du terrorisme économique »
Face à la montée du mécontentement, qui s’ajoute à celui de la crise économique, encore aggravée par les sanctions américaines, le gouvernement a promis aux sinistrés, en particulier aux fermiers, qu’ils seraient indemnisés. Radio Farda, une radio proche de l’opposition démocratique basée à Prague, n’y croit guère : « Pour un gouvernement qui a échoué à payer leurs salaires aux ouvriers, les pensions aux retraités et leurs intérêts aux investisseurs à de multiples occasions pendant l’année passée, compenser les pertes et les dommages causés par les inondations semble un objectif hors d’atteinte. »
De son côté, le ministre des affaires étrangères Mohammad Javad Zarif a accusé Washington d’avoir entravé l’aide humanitaire en raison de l’embargo décrété l’an dernier par Donald Trump qui, selon lui, a privé l’Iran d’hélicoptères de secours. « Ce n’est pas seulement de la guerre économique, c’est du terrorisme économique », a-t-il tweeté le 1er avril

La réponse américaine ne s’est pas fait attendre. « Le régime blâme des entités extérieures quand, en réalité, c’est sa mauvaise gouvernance qui a conduit au désastre », a réagi le secrétaire d’État Mike Pompeo par un communiqué dans lequel il propose aussi à Téhéran une assistance financière, par le biais du Croissant islamique.
Il n’en demeure pas moins que face au désastre, l’Iran apparaît bien seule sur la scène internationale. « Les pays étrangers et les organisations internationales ont prêté peu d’attention à la situation humanitaire », déplore Radio Farda, qui établit un parallèle avec le tremblement de terre d’une magnitude de 6,6 qui avait ravagé, le 26 décembre 2003, la vieille ville historique de Bam, dans la province de Kerman (Sud-Est). À cette époque, indique-t-elle, « les États-Unis étaient le fer de lance des pays qui s’étaient précipités pour envoyer de l’aide dans les régions dévastées, dont un hôpital de campagne et des chiens de sauvetage. Des douzaines d’autres gouvernements – une soixantaine – avaient suivi ». On n’en est plus là. Et Téhéran peut mesurer à l’occasion de ces dramatiques inondations sa grande solitude.
La Turquie a fait le service le plus minimal possible – cinq camions d’aide au titre de la solidarité islamique. Les pays arabes du golfe Persique, excepté le Koweït, n’ont pas réagi. Les « bons amis » de Téhéran, la Russie et la Chine, ont envoyé des messages de sympathie mais n’ont proposé aucune assistance. Paris a fait mieux, mais son aide reste aussi dérisoire au regard de l’étendue des besoins. Le Quai d’Orsay a ainsi annoncé, le 5 avril, l’acheminement par voie aérienne de 12 tonnes de fret humanitaire, dont 114 motopompes et 5 000 couvertures.
Encore plus significative est l’attitude du Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHOA) qui, dans un communiqué publié par Reuters, le 26 mars, a indiqué qu’il était prêt à aider l’Iran mais que « les défis posés par les sanctions unilatérales affecteront la réponse des Nations unies et sa responsabilité à fournir un soutien approprié ». En clair : on voudrait bien vous aider, mais l’humanitaire et les Nations unies sont aussi sous embargo.

 
L'Iran pourrait perdre "70% de ses terres cultivées" à moyen terme

L'Iran pourrait perdre "70% de ses terres cultivées" à moyen terme en l'absence d'action rapide pour corriger la situation écologique dramatique du pays, met en garde le vice-président iranien Issa Kalantari dans un entretien avec l'AFP.

"Aujourd'hui, nous utilisons plus de 100% de nos ressources en eau renouvelables", affirme d'emblée M. Kalantari, également ministre de l'Environnement, alors que les recommandations internationales sont de ne pas en consommer plus de 40%.

L'Iran subit bon nombre de fléaux environnementaux: épisodes de sécheresse prolongée ou à répétition, pollution de l'air dans les grandes métropoles, pollution et érosion des sols, désertification, tempêtes de sables...

"La consommation excessive des eaux souterraines et des ressources du sous-sol pourrait avoir des conséquences sociales terribles pour le pays", prévient M. Kalantari, qui fut ministre de l'Agriculture pendant la décennie 1990.

Pour lui la situation environnementale actuelle, résulte de la "pression démographique", du "changement climatique", mais aussi de "mauvais choix" politiques et techniques, comme une préférence affichée pour l'agriculture intensive, extrêmement consommatrice d'eau.

"Au sud de l'Alborz et à l'est des Zagros, si nous n'agissons pas rapidement, les terres deviendront inutilisables pour l'agriculture", s'inquiète le ministre, en référence aux massifs montagneux qui bordent le plateau iranien, respectivement dans le nord et l'ouest du pays.

Dans ce cas, "nous pourrions perdre 70% de nos terres cultivées en maximum 20 ou 30 ans", ajoute-t-il.

- "Erreurs humaines" -

Toutefois, selon M. Kalantari, "dans la plupart des endroits, si nous réduisons la consommation d'eau, qu'il s'agisse des eaux de surface ou des eaux souterraines, nous pourrons peut-être réparer les dégâts dans 30 ou 40 ans".

Une bonne partie de la zone géographique au sud de l'Alborz et à l'est des monts Zagros est désertique ou aride. Mais ces régions abritent plusieurs hauts lieux de l'histoire et de la culture iranienne, comme les anciennes capitales que furent Ispahan (centre) et Chiraz (sud) ou encore la ville de Yazd (centre).

"Notre première priorité est de préserver les ressources de base que sont l'eau et les sols", explique M. Kalantari. "Les autres problèmes sont le résultats d'erreurs humaines qui peuvent être corrigées".

"Nous devons prendre des mesures radicales" afin de faire baisser la consommation d'eau, ajoute-t-il, sinon l'agriculture sera "la première victime".

Selon l'Organisation des Nations unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (OAA-FAO), l'Iran, peuplé de plus de 80 millions d'habitants, "est un pays principalement agricole".

- "Moins mais mieux" -

Pour M. Kalantari, certains des mauvais choix passés s'expliquent en partie par des "pressions extérieures".

Le vice-président fait là référence aux sanctions économiques américaines ou internationales qui se sont très vite abattus sur la jeune République islamique après la révolution de 1978-79, ainsi qu'à la "guerre imposée", comme les Iraniens appellent la guerre Iran-Irak (1980-1988) déclenchée par Bagdad.

Isolée pendant ce conflit, où le monde entier ou presque soutenait l'Irak, l'Iran n'a alors pas pu, selon M. Kalantari, se préoccuper de "développement durable": il a fallu nourrir à tout prix la population et créer de grands pans d'industrie qui n'existaient pas.

Au chapitre des autres mauvaises décisions passées, M. Kalantari cite l'installation à l'intérieur des terres d'industries fortement consommatrices d'eau qu'il eût fallu localiser près du littoral, l'expansion de l'agriculture dans des zones arides et la construction de barrages là où il n'en fallait pas.

"Nous avons ignoré l'environnement", dit-il, ajoutant: "le monde a fait des erreurs dans les décennies 1960 et 1970, nous avons fait les mêmes dans les années 1980".

Il place son espoir dans un recours à la "technologie", qui permettrait de mieux utiliser les ressources en eaux et produire plus avec moins, tout en notant que le renforcement des sanctions américaines contre son pays pourrait contrarier ces plans.

M. Kalantari ne cache pas être également préoccupé par la question démographique.

La politique de la République islamique en ce domaine a connu plusieurs phases depuis 1979. Prônant une politique très nataliste pendant la décennie 1980, les autorités ont ensuite encouragé le contrôle des naissances et la contraception dans les années 1990, avant de recommander de nouveau une forte natalité à la fin de la décennie 2000.

  

A l'heure où Téhéran prône "l'économie de résistance" face aux sanctions américaines, M. Kalantari estime que l'Iran ne peut certainement "pas [être autosuffisant sur le plan alimentaire] pour 80 millions" d'habitants "si nous voulons suivre une politique de développement durable".

L'Iran, dit-il, peut "pourvoir complètement [et durablement] aux besoins alimentaires de 50 à 55 millions d'habitants avec un technologie à jour et une hausse de sa productivité".

 

(AFP)

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